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Au Vélodrome, les ultras montent le son

Supps Par Terre – Galvanisés par le parcours européen de l'OM, les ultras marseillais ont retrouvé de la voix. Malgré leurs différences, ils font du Vélodrome une caisse de résonance unique. 

Auteur : Christophe-Cécil Garnier et Frédéric Scarbonchi le 26 Avr 2018

 

 

Inspirés par les "collectionneurs de stades" anglais, les deux auteurs de Supps Par Terre ont lancé un tour de France des vingt stades de Ligue 1 pour aller à la rencontre des supporters et vivre le supportérisme de l'intérieur. Après NiceParisGuingamp, Nantes, Caen, LyonTroyes, MonacoSaint-Étienne, ToulouseMontpellier, Bordeaux, Angers, Strasbourg, et Metz, ils sont allés à la rencontre des supporters marseillais.

 

 

* * *

 

À Marseille, porter les couleurs du club est une fierté qui se partage. Hommes, femmes, enfants: dans leur grande majorité, ils sont en tenue avant la réception de Lille, ce samedi. Que ce soit sur l'avenue du Prado ou sur les marches du centre commercial du boulevard Michelet, les allées sont garnies de maillots voire de tatouages dédiés à l'OM. Et encore plus dans le stade.

 

Il pouvait exister, à la grande époque du Parc des Princes, une forme de jalousie du peuple marseillais – les plus anciens s'en souviennent. Pas un sentiment d'infériorité, ce n'est pas le genre de la maison, mais les Marseillais étaient persuadés que s'ils avaient une enceinte capable de garder le son à l'intérieur, ils seraient sans conteste les meilleurs. Il suffit aujourd'hui de pénétrer dans le nouveau Vel', désormais doté d'un toit, pour le constater. Si le partage de l'animation entre les six groupes donne parfois un résultat anarchique, ce stade est assourdissant.

 

 

 

 

« On ne connaît plus nos membres »

Les Fanatics, privés de leur bloc, se font entendre depuis la tribune Jean-Bouin. Dans le virage Nord, la sono pétée des Yankee empêche de coordonner les chants en début de première mi-temps. Le troisième groupe le plus important de Marseille ne peut de toute façon pas compter sur un noyau aussi efficace que celui des Marseille Trop Puissant (MTP), qui partagent le virage avec les Dodgers, où la famille Cataldo est présente.

 

Trois groupes, une tribune, pour quelle relation? "C'est cordial, avec une forme d'émulation, où chacun essaye d'être meilleur que l'autre", affirme Michel Tonini, le président des Yankee, qui confie aussi ne plus "connaître ses membres": "On peut s'abonner sur internet, plus besoin de passer par nous. Avec une seule carte bancaire, on peut prendre quatre abonnements. Donc avec 1.000 noms seulement, avoir 4.000 abonnés… Et nous, on reçoit juste la liste via Digitick".

 

Deux groupes historiques se partagent le virage Sud: South Winners et Commando Ultra. Les premiers échangeront avec nous une demi-douzaine d'appels et de mails, avant de devenir muets le jour de la rencontre. Les seconds ne pourront jamais être contactés, mais la Vieille Garde du Commando Ultra nous reçoit au Snack l'Oasis, en face du stade, une heure et demie avant le match.

 

 

« Aulas, on va la gagner chez toi »

Un membre important de la Vieille Garde, présent dès 1984 au sein du Commando Ultra, revient sur la genèse de ces rapports entre groupe: "Quand on voit arriver les Winners et les Fanas, on est contents. Tout ça va culminer avec la création d'un groupe commun: Fanatics Ultras Winners".

 

Mais les choses se gâtent ensuite: "Dans toute société humaine, les différences de vues entraînent des divergences d'actions et l'envie d'unité n'est pas toujours plus forte que les divergences. À Marseille, les divergences sur ce qu'il fallait faire en tant que groupe ultra ont pris le dessus sur la volonté d'être ensemble", commente-t-il, avant de finir sur une note positive: "Il y a eu beaucoup d'inimitiés, de séparations, des chemins ont divergé… Mais au moment où c'est le plus important, cette ferveur emporte tout, comme on l'a vu contre Leipzig. Je trouve ça bien".

 

Au stade, les deux groupes mettent une bien jolie ambiance, même si les "Aux armes", importés justement par le Commando Ultra dans les années 80, se font rares. Une autre chanson est en vogue, aujourd'hui, adressée à Jean-Michel Aulas. Au Nord, on prévient le président lyonnais: "On va la gagner chez toi", référence à la finale d'Europa League prévue à Lyon. Au Sud, sur le même air et à destination du même homme, on préfère dire: "On va tout casser chez toi". Deux vannes à ne pas prendre au pied de la lettre.

 

 

 

 

« Quand la mayonnaise prend, on emporte tout sur notre passage »

Le Vélodrome est porté par l'euphorie. Celle d'un match de coupe d'Europe épique qui fait oublier où il en était, il y a quelques mois, devant moins de 9.000 personnes face à Konyaspor, pire affluence du siècle. C'est le sens de la démesure de la cité phocéenne, capable d'être des milliers à se moquer de la "Coupe Thiriez" des autres et de célébrer en masse sa Coupe de la Ligue sur le Vieux-port.

 

"Marseille, c'est une ville de football dans le contexte français, mais ce n'est pas non plus l'Italie ou l'Argentine, clairement. On est quand même dans une société de consommation…", pondère notre intéressant confident anonyme. Avant d'ajouter: "Je pense que Marseille reste au-dessus en potentiel de ferveur et en hystérie collective quand tout se passe comme on l'espère. Ce qui se produit de très particulier à Marseille, c'est un grain de folie qui, quand il arrive, rend le Vélodrome incomparable. Ce n'est pas le cas tout le temps, Marseille ça reste en France, c'est pas Boca Junior. Mais quand la mayonnaise prend, on emporte tout sur notre passage".

 

En première mi-temps, quand Junior Alonso doit tirer un corner, espérons qu'il ait les tympans solides. Les sifflets empêchent quiconque de tenir la moindre conversation. Les MTP passent le quart d'heure de la pause à chanter. Ils le paieront peut-être en fin de match, rattrapés par des Yankee dont le capo courageux aura eu du mal à mobiliser – surtout ceux qui se rendent dans le stade avec d'autres maillots que ceux de l'équipe phocéenne.

 

 

 

 

« Notre première bâche ? Des draps volés à la SNCF cousus par ma grand-mère »

Mais à 10 heures du matin, nous n'avions encore rien vu de tout ça. Pas de vagues bleues et blanches, pas d'homme au maillot du Barca floqué Remontada. 10 heures, c'est l'heure du rendez-vous avec Michel Tonini, dans le local des Yankee. Midi, l'homme de cinquante-deux ans débarque enfin. "Désolé, on a un problème avec la sono, il fallait réparer…", glisse-t-il en ouvrant la porte de son bureau. La famille Tonini, comme celle des Cataldo, représente Marseille et ses supporters médiatiquement. Sans être représentatif?

 

L'homme est sympathique, le discours rodé. Sur chaque sujet, il semble répondre avec une sincérité profonde, tant pis si la plupart des réponses ont déjà été formulées à mille autres journalistes. L'occasion est faite, cette fois, de ne pas parler de l'homme, mais de la création d'un groupe, assimilé ultra mais qui semble bien loin d'en avoir les codes.

 

"On était dans le virage Nord quand les ultras s'étaient créés dans le quart de virage côté Ganay (en 1984). Quand Tapie est arrivé, ils sont partis dans le virage Sud, qui était traditionnellement fermé. À l'époque, l'OM végétait et le stade était aux trois quarts vide. Au fur et à mesure, l'ambiance a disparu dans le virage Nord. Mais il y avait une énergie qu'on a eu envie de canaliser. Notre première bâche – avec des draps volés à la SNCF et cousus par ma grand-mère –, c'était 'Yankees North Army'."

 

Aujourd'hui, le groupe compte 3.000 membres, loin d'un âge d'or qui l'a vu atteindre 5.000. Avec un amour pour la Nord qui guide le petit monde au départ: "Il était hors de question de suivre les ultras dans la Sud, mais on n'a pas fait ça pour les concurrencer. Nous, on était du virage Nord, et on voulait qu'il vive. C'était uniquement du plaisir. On se rendait au stade à 10 heures avec les tréteaux, les tables, le barbecue, la pétanque, le Ricard… Une ambiance complètement différente. En déplacement, on arrivait dans les centres-villes, il n'y avait pas de parcage, pas d'escorte, on s'amusait", se souvient-il, en précisant qu'il ne veut pas être taxé de "passéiste".

 

 

 

 

« Le monde ultra a brisé les codes sociaux du Vélodrome »

Cet attachement à une tribune vient pourtant du passé, selon le membre de la vieille garde du commando ultra, qui invoque le sociologue Christian Bromberger: "Le monde ultra a brisé les codes sociaux qui existaient au Vélodrome, marqués par l'appartenance sociale et économique du public des différentes tribunes. Tu avais un phénomène d'appartenance sociale différente selon la tribune".

 

Il explique le déménagement du Commando Ultra, à l'époque: "On s'est dit qu'il valait mieux commencer une page vierge, pour pouvoir animer toute une tribune que d'avoir du mal à dompter les plus virulents. On va dans le virage Sud et l'avantage c'est qu'il n'y a personne. C'est vraiment mort là-bas". L'histoire démarre réellement en 1986, avec le succès que l'on connaît.

 

Une réussite que n'a pas connue Michel Tonini depuis longtemps. Ses propos sont ceux d'un homme touché – ou qui se pose en "victime", selon ses détracteurs. Il mange son pain noir, avec la plainte déposée par l'OM contre le groupe pour "escroquerie", soupçonnant les Yankee d'avoir vendu de fausses places lors du match face à Lyon. Une pratique a priori inutile si l'homme veut inviter des amis au stade: il lui suffit de s'y présenter, de dire le nombre de personnes qui vont rentrer avec lui, sans valider le moindre billet, et les portes s'ouvrent.

 

 

 

 

« Le tifo Netflix ? Il n'y avait rien de vicieux »

Auparavant, une autre histoire avait mis à mal le groupe: un tifo géant, demandé par Netflix, et validé par Tonini, avant que le projet ne tombe à l'eau quand les autres groupes apprennent cette "commande". "Il n'y avait rien de vicieux, se défend le vieux briscard. Netflix nous demande combien coûterait de financer un tifo qui prendrait tout le stade. Je leur ai dit que ça dépendait ce qu'on voulait faire. Ce n'était pas une publicité pour Netflix. Ils ne demandaient même pas à voir ce qu'il y aurait dessus avant. C'est l'OM qui a voulu savoir, et c'est la communication du club qui a saboté le truc. Ça les faisait chier que Netflix soit passé par nous et pas par le club".

 

Les autres groupes étaient-ils au courant? "Je n'avais pas dit quel était le partenaire, mais bien précisé qu'il y en avait un. Si j'ai quinze partenaires comme ça qui ne me demandent rien et financent des tifos, je signe tous les jours." Après le naming des stades, le naming des tifos? "On ne peut pas sponsoriser la passion. Mais ce n'était pas le but. L'OM nous aide bien financièrement… Avoir des partenaires qui nous aident financièrement, pourquoi pas", conclut Michel Tonini, qui se dit usé par "les emmerdements" que génèrent la gestion d'un groupe.

 

"À la Vieille Garde, on adore faire des banderoles, bien rigoler entre nous, faire des repas, se retrouver avant les matches, être au stade avant avec nos couleurs, dit l'anonyme, comme en écho. Mais on ne gère plus une asso, on ne s'occupe pas de tout ce qui fait que le mouvement ultra. Quand tu es responsable d'un groupe ultra, ça peut devenir une prise de tête. Tous les responsables te le disent. On essaye d'avoir le plaisir sans les emmerdements".

 

 

 

 

« Viens avec nous, ne psychote pas et tu te feras ton idée »

Pendant que Tonini se défend en enchaînant les cigarettes, quelques supporters descendent les Ricard au comptoir du local. Certains viennent du Jura, d'autres d'ailleurs. Ils sont déjà chauds alors que la température grimpe à peine, vers 13h30. Deux heures plus tard, quelques membres de la Vieille Garde des Commando Ultra se retrouvent non loin de la boutique du groupe CU et du snack de l'Oasis. Juste à côté, des enfants jouent au foot avec une canette de Coca-Cola écrasée.

 

Adossé à un muret, Cédric. Cet homme, au tambour chez les CU par le passé, a aujourd'hui pris du recul pour s'occuper de sa famille, rejoignant la Vieille Garde il y a trois ans. Lui aussi parle de l'émulation entre les groupes, dit que le Commando doit se battre pour rester à jamais le premier. Il évoque régulièrement l'image négative des ultras, autant dans la société civile que chez les dirigeants. "On a une mauvaise image parce que les gens ne sont pas imprégnés. Viens avec nous, ne psychote pas et tu te feras ton idée", finit-il par lâcher.

 

Une mauvaise image née avec le groupe, note notre membre anonyme de la Vieille Garde: "On n'était absolument pas désirés. Soit les plus turbulents – dans le virage Nord – trouvaient qu'on était trop organisés et qu'on demandait un effort d'organisation et de suivi de certaines consignes qui ne leur convenaient pas. Le côté 'On tape tous des mains derrière un leader', ils regardaient ça de travers parce qu'ils ne voulaient pas avoir de chefs. Soit on était considérés nous-mêmes comme beaucoup trop turbulents par la masse des abonnés de l'époque".

 

 

« On nous vole notre stade »

"Faut voir ce que c'est un abonné à l'OM en 1984, précise-t-il. Un petit notable, un commerçant, un artisan qui vient au stade pour regarder son équipe. Des pétitions ont été envoyées au président de l'OM de l'époque, Jean Carrieu, qui a passé la main à Tapie, pour demander notre interdiction de stade. Les mecs voulaient qu'on soit IDS avant l'heure!"

 

Au stade, le Commando Ultra dévoilera une bâche "Sanctionner une nouvelle fois ses supporters d'un huis clos, dirigeants vous êtes des mastres", en soutien aux Fanatics, obligés de payer cinq euros pour se regrouper en Jean-Bouin. "C'est un scandale, appuie Cédric. On supprime ta tribune, mais on veut quand même te faire venir pour mettre l'ambiance en te forçant à payer en plus. Je le prends très très mal. On nous vole notre stade alors que certains sont là depuis quarante ans." En fin de match, les Fanatics sortiront une banderole: "Jamais nous n'abdiquerons".

 

En attendant, tous au stade, la ferveur peut reprendre. Pendant quatre-vingt-dix minutes, les soucis seront oubliés. Cet état de fait se ressent ici plus qu'ailleurs. Dans la victoire, dans les joies et la ferveur, comme dans une démesure parfois imprégnée de mauvaise foi, les supporters comptent bien rester "à jamais les premiers".

 


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Réactions

  • Redalert le 06/05/2018 à 22h35
    Aucun commentaire pour ce numéro marseillais, bizarre...

    Une fois de plus, dommage que certains n'aient pas voulu parler notamment les plus jeunes.

    Le prisme marseillais, il me semble, d'un des 2 journalistes marqué une vrai connaissance des arcanes du Vélodrome, bravo.

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