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Feuilles de match et feuilles de maîtres

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Un conseil de lecture ? Une bonne librairie ? =>> "You'll never read alone", le Gogol Doc: http://bit.ly/11R7xEJ.

  • John Six-Voeux-Berk le 28/01/2023 à 08h36
    Cyrano est un Don Quichotte qu'on prend au sérieux. Cela change tout, non ?

    Rostand ne nous fait pas rire de la folie de Cyrano. Mais tu as raison de le rappeler, les Romantiques lisaient Don Quichotte sérieusement : je ne crois pas que ce soit possible aujourd'hui. Alors à la place, on se jette sur le Cyrano de Rostand.

    D'ailleurs on peut aussi déplacer l'appréciation de "Cyrano" sur le plan historique : post-boulangisme, morosité nationale dans les décennies qui suivent la défaite et les illusions de grandeur du second empire. Mais je ne crois pas que ce soient les raisons de la séduction exercée par l'oeuvre sur ses lecteurs/spectateurs aujourd'hui.

  • O Gordinho le 28/01/2023 à 08h58
    Oui absolument.
    D'ailleurs il est intéressant de constater qu'en termes de lente décadence, de sevrage des illusions de grandeur, et même de "pourrissement", je pense que l'on ne surpassera jamais l'Espagne de Cervantes.

  • Balthazar le 28/01/2023 à 11h43
    Et mes concurrents qui attendent le dernier moment pour voter, histoire de ne pas donner de points aux rivaux les plus dangereux... Que c'est bas.

  • Balthazar le 28/01/2023 à 11h44
    Merci, John. Bon, je vais essayer de te répondre, et de défendre ma conception de la littérature sans trop me répéter.

    Il faudra me pardonner si le propos n'est pas aussi structuré qu'on pourrait le souhaiter, je manque de temps (ou de capacités intellectuelles, ça revient au même) et en plus je traîne un virus.

    (1) La métaphore comme « susucre littéraire » :

    Impossible de ne pas réagir à ça. D'autant que, tu ne dois pas t'en souvenir, j'ai moi-même employé cette image dans un livre que tu as lu, mais dans l'autre sens, comparant les gisements de sucre dans une gaufre liégeoise aux images dans un sonnet. Frappante illustration du principe de Breton selon lequel les images ont un sens, une direction : la même analogie qui visait dans mon cas à exalter la sucrerie sert dans le tien à rabaisser l'image. (Bon, c'est plus encore une question de tonalité que de direction, bien sûr ; le mot « susucre » y étant pour beaucoup.)

    Mais enfin, même si j'imagine que tu as employé cette expression en tâchant plus ou moins de te glisser dans la peau d'Ernaux, il me paraît impossible de réduire la métaphore, le véhicule par excellence de la beauté (désolé pour l'emphase, c'est le virus), à une petite gâterie qu'on offrirait au lecteur par complaisance.

    En plus ce type de gâterie se trouve précisément chez Ernaux, qui remplace le « susucre littéraire » par le « susucre mémoriel » : « le stylo Bic, le shampoing en berlingot, le Bulgomme et le Gerflex, le Tampax et les crèmes pour duvets superflus, le plastique Gilac, le Tergal, les tubes au néon, le chocolat au lait noisettes, le Vélosolex et le dentifrice à la chlorophylle. »

    Pas de connivence avec le lecteur cultivé, donc (comme si c'était par connivence que Proust ou Breton cultivaient les images les plus originales… franchement…), mais une connivence avec le lecteur gavé depuis son plus jeune âge de noms de marque et de publicités débiles. Je ne sais pas trop ce qu'on y gagne, mais je vois bien ce qu'on a perdu en route.

    Il faudrait relire les pages où Proust explique que le monde est recréé par chaque artiste, que chaque artiste original nous offre un monde nouveau à explorer.

    « Des femmes passent dans la rue, différentes de celles d'autrefois, puisque ce sont des Renoir, ces Renoir où nous nous refusions jadis à voir des femmes. Les voitures aussi sont des Renoir, et l'eau, et le ciel : nous avons envie de nous promener dans la forêt pareille à celle qui le premier jour nous semblait tout excepté une forêt, et par exemple une tapisserie aux nuances nombreuses mais où manquaient justement les nuances propres aux forêts. Tel est l'univers nouveau et périssable qui vient d'être créé. »

    Cet effet, en littérature, c'est avant tout la métaphore qui le permet. Qui a envie de se promener dans le monde d'Ernaux ? Et le problème ne vient pas du choix des sujets, mais du manque de génie (désolé, encore le virus...) ! Tu vois, je viens de lire une bande dessinée qu'on m'a offerte à Noël, « Rusty Brown », de Chris Ware, dont j'avais déjà adoré « Jimmy Corrigan ». Eh bien, voilà quelqu'un qui, j'en suis sûr, parviendrait à extraire du supermarché lui-même un peu de poésie. Mais ça demande de faire exactement l'inverse de ce que fait Ernaux, de ce qu'ont toujours fait les médiocres qui croient dur comme fer au « réel ». (Je ne dis pas que c'est ton cas, hein, mais tu fais un peu trop tien, à mon goût, le point de vue d'Ernaux. Sois moins généreux.)

    (2) Effets historiques

    « Tu proposes au randonneur littéraire d'aller toujours se promener dans un cimetière, sous prétexte qu'on n'en aurait pas encore sillonné toutes les allées? »

    Bon, d'abord, M. John, que tu voies la littérature du passé comme un cimetière, ça en dit long ! Ensuite, non, ce n'est pas du tout ce que je propose. Je dis simplement qu'il me paraît sensé, compte tenu du peu de temps qui nous est imparti, et du nombre d'œuvres géniales de toutes époques qui sont à notre disposition, de ne pas nous appesantir sur ce qui est seulement « intéressant ». Qu'on donne une sorte de prime à ce que nous avons les yeux (le présent, la France) me semble naturel, mais s'il se trouve que ce que nous avons les yeux est momentanément médiocre, et c'est selon moi le cas, à quoi bon s'acharner ? Personnellement je préfère aller voir ailleurs, dans d'autres époques, d'autres cultures, d'autres arts. Je ne dis pas que tout est à jeter chez nous en ce moment, loin de là, mais à l'exception de Michon, les auteurs que tu cites, auxquels on pourrait ajouter les prix Nobel Le Clézio et Modiano, me font l'effet, pour ce que j'en connais, de n'avoir pas une étincelle de génie, ce petit truc qui saute aux yeux dans la moindre ligne de Michon, dans la moindre case de Chris Ware.

    Je ne me lance pas dans les pronostics sur ce qui va durer ou pas : j'aurais un avis (le même que toi sur Michon, d'ailleurs) si les conditions de réception et de conservation, actuelles et futures, étaient les mêmes que celles qui nous ont précédé, mais je crains qu'il n'en soit rien.

    (3) Ernaux contre Proust

    (a) « Elle sait faire du Proust, mais ce n'est pas cela qu'elle veut faire »

    Ça me paraît terriblement audacieux, comme affirmation… Et je suis en désaccord total avec ce que tu dis sur la volonté d'éviter la fiction, comme si on pouvait éviter la fiction ! et surtout comme si c'était quelque chose d'important. (Au passage, l'extrait que j'ai cité est issu des « Souvenirs » de Tolstoï ; je ne connais pas le statut exact de ce texte, mais a priori ce n'est pas du pur roman non plus.)

    Quand tu dis ceci :

    « (…) ce que tu cites de « grand » me fait penser à la critique que Nathalie Sarraute formulait à l'encontre de Proust : cette compréhension du temps vécu est magnifique si l'on veut, mais elle est irrémédiablement faussée par son exposition rétrospective »

    je me dis que tu confonds art et science ; si c'est « magnifique », il n'y a rien à ajouter, que le résultat soit « faussé » ou non n'y change rien ! Et à l'inverse, si ce que nous lisons est sans beauté ni grandeur, qu'est-ce que ça peut nous faire que ce soit « vrai » !

    (b) La mèche

    La notation à propos de la mèche collée par le sperme m'a rappelé le début de « L'Âge d'homme », où Michel Leiris nous dit en passant qu'il se gratte l'anus quand il est seul. Voilà à quoi aboutit le désir excessif d'être original dans une œuvre à caractère autobiographique. Ça demande un certain courage d'écrire ce genre de choses, mais littérairement ça n'a aucune valeur. Je dirai même que le courage que cela nécessite trahit la faiblesse de l'ambition littéraire : vu le prix à payer, on ne dit pas ces choses par hasard, on les dit parce qu'elles correspondent à l'idée banale qu'on se fait de l'originalité. Dire ce que les autres n'ont pas encore dit, sans se rendre compte qu'il ne suffit pas qu'une chose n'ait pas encore été dite pour qu'elle mérite de l'être.

    (4) Proust lecteur d'Annie Ernaux

    « Peut-être est-ce plutôt à la qualité du langage qu'au genre d'esthétique qu'on peut juger du degré auquel a été porté le travail intellectuel et moral. Mais, inversement, cette qualité du langage (…) dont croient pouvoir se passer les théoriciens, ceux qui admirent les théoriciens croient facilement qu'elle ne prouve pas une grande valeur intellectuelle, valeur qu'ils ont besoin, pour la discerner, de voir exprimer directement et qu'ils n'induisent pas de la beauté d'une image. »

    « On préférait à Bergotte [à Michon!], dont les plus jolies phrases avaient exigé en réalité un bien plus profond repli sur soi-même, des écrivains qui semblaient plus profonds simplement parce qu'ils écrivaient moins bien. La complication de son écriture n'était faite que pour des gens du monde, disaient des démocrates, qui faisaient ainsi aux gens du monde un honneur immérité. Mais dès que l'intelligence raisonneuse veut se mettre à juger des œuvres d'art, il n'y a plus rien de fixe, de certain : on peut démontrer tout ce qu'on veut. »

    « Comment la littérature de notations aurait-elle une valeur quelconque, puisque c'est sous de petites choses comme celles qu'elle note que la réalité est contenue (...) et qu'elles sont sans signification par elles-mêmes si on ne l'en dégage pas ?
    Peu à peu conservée par la mémoire, c'est la chaîne de toutes les impressions inexactes, où ne reste rien de ce que nous avons réellement éprouvé, qui constitue pour nous notre pensée, notre vie, la réalité, et c'est ce mensonge-là que ne ferait que reproduire un art soi-disant « vécu », simple comme la vie, sans beauté, double emploi si ennuyeux et si vain de ce que nos yeux voient et de ce que notre intelligence constate, qu'on se demande où celui qui s'y livre trouve l'étincelle joyeuse et motrice, capable de le mettre en train et de le faire avancer dans sa besogne. »

    (5) Merci de m'avoir répondu sur Cyrano. C'est passionnant. Je ne partage pas du tout ton point de vue (Cyrano doit faire partie de mes dix œuvres préférées, tous genres confondus), mais ta critique témoigne d'un goût bien plus raffiné que le mien. Je ne veux, ne peux simplement pas lire ce texte comme tu le fais, et là où tu sembles retrouver des connaissances antipathiques, je ne reconnais pour ma part que l'esprit d'enfance. Quand je lis Cyrano, j'ai dix ans et je meurs à la fin.

  • Edji le 28/01/2023 à 12h29
    Ce message jusqu'à ses dernières lignes => *love*

  • Balthazar le 28/01/2023 à 12h43
    Ne te sers donc pas de moi pour énerver John !
    (Merci.)

  • Pascal Amateur le 28/01/2023 à 13h44
    Je vais me permettre deux remarques, pas davantage, et elles ont une incidence limitée.

    1/ Je sens dans votre débat, sur les noms (Bic & Bulgomme) vs. la métaphore, un questionnement sur ce qui fige vs. ce qui autorise un déplacement, un circuit, une danse de l'écriture. Convoquer de tels noms propres, c'est figer globalement l'imaginaire : l'univers du narrateur est pris dans des dénominations, auxquelles certes se rattachent des sensations (chacun ne tient pas un Bic de la même façon, il peut y avoir plaisir ou hantise du bleu Bic ou des quatre-couleurs, etc.), mais des blocs sont posés. Un Bic est un Bic. Un champ sémantique et de sensations est imposé. Monde publicitaire, quelque peu réactionnaire ? Assurément. Ces descriptions renvoient en effet, aussi, à un monde consumériste des années 1920-30, où les néons ont fasciné nombre d'auteurs, pris dans un modernisme enfantin, cf. Cendrars — « La publicité est la fleur de la vie contemporaine ; elle est une affirmation d'optimisme et de gaîté ; elle distrait l'œil et l'esprit. (...) Avez-vous déjà pensé à la tristesse que représenteraient les rues, les places, les gares, le métro, les palaces, les dancings, les cinémas, le wagon-restaurant, les voyages, les routes pour automobiles, la nature, sans les innombrables affiches, sans les vitrines (ces beaux joujoux tout neufs pour familles soucieuses), sans les enseignes lumineuses, sans les boniments des haut-parleurs, et concevez-vous la tristesse et la monotonie des repas et des vins sans les menus polychromés et sans les belles étiquettes ? Oui, vraiment, la publicité est la plus belle expression de notre époque, la plus grande nouveauté du jour, un Art. »
    De l'autre côté, la métaphore renvoie : à autre chose, à d'autres ouvertures. Il y a un souffle qui déstabilise, et d'ailleurs c'est ainsi, « métaphore », que Lacan avait rebaptisé la « condensation » de Freud ; pas étonnant en effet que la psychanalyse ait repris ces rondes signifiantes. Lacan encore disait au tournant des années 70 : « C'est bien à ça que ça sert, la métaphore, c'est à faire surgir un sens qui en dépasse de beaucoup les moyens ; la torpille, et puis celui qui la touche et qui en tombe raide, c'est évidemment, on ne le sait pas encore au moment où on fait la métaphore, c'est évidemment la rencontre de deux champs non accordés entre eux, champ étant pris au sens propre ici de champ magnétique. »
    Donc univers figé vs. univers relancé, c'est ainsi que je peux relire, un peu, ces questions.

    2/ Néanmoins, mallarméens que nous sommes, nous ne pouvons oublier qu'au-delà des mots est leur sonorité. Et il paraît dommageable de refuser à ces Bic, berlingot, Bulgomme, Gerflex, Tampax, Gilac, Tergal, tubes au néon, Vélosolex et Cocotte-Minute à la chlorophylle leur jouissance purement orale, qui ont le claquement des comptines et des blagues de Pef. C'est un autre plaisir qui gît ici, qui se détache du sens pour aborder le son — sinon Guyotat ça serait que des soldats qui niquent. C'est un au-delà de la description, au-delà de l'identification, au-delà d'une nostalgie qui fait glu dans l'imaginaire et convie le lecteur à une party organisée au millimètre. Ça fait crac, boum, hue, shebam, plow, bop, wizz. Et ça, ça nous appartient drôlement plus, car on ne pétille pas de la même façon. Je maintiens d'ailleurs que ce qui gêne chez Ernaux, c'est que ces sons sont l'expression très étriquée de sa jouissance à elle, et qu'on y est peu convié malgré tout.

  • Pascal Amateur le 28/01/2023 à 14h07
    (Dernière phrase, dite autrement : elle ressuscite son monde pour elle, ses sonorités enfantines pour elle comme un enfant blessé se raconte son histoire à voix haute et serre son doudou, et pas pour la partager. Il n'y a pas de partage chez Ernaux. Elle colle son présent à son passé via ces mots, pour qu'il n'y ait pas d'interstice, de gouffre, et n'y pas tomber. Créer une nostalgie à partager me paraît globalement hors de propos ici. C'est de sa survie dont il est question, à mon sens).

  • John Six-Voeux-Berk le 28/01/2023 à 17h37
    Bon, tu es écrivain, je suis "professeur" ; ça explique notamment qu'il faut que j'empathise avec ce que j'ai à partager, programmes obligent. (Cette année, découverte de Sévigné, c'est tellement immense ! et en passant bien supérieur à ce que Proust en fait)

    (1) La métaphore comme « susucre littéraire » :

    Ce que j'aime chez Ernaux, c'est justement de suivre l'intuition fondamentale : ""la littérature au sens habituel transfigure" et je refuse cette évasion" (première page du premier roman, "Les armoires vides" : le personnage subit un avortement clandestin, et ironise : il faudrait écrire un poème : "la transfiguration de la canule").

    Qui veut se promener dans le monde d'Ernaux...?, demandes-tu. On n'a pas à avoir ou non envie, on y est : surtout quand on a un foetus dans le ventre que la société veut vous imposer. Croire au "réel" ? Mais faire sécession, c'est un privilège que tout le monde n'a pas. Et au lieu de simplement accepter que la littérature ne soit pas pour elle, Ernaux l'investit, et ses lecteurs lui en sont redevables.

    Comment nier que la littérature de Proust dépende d'une possibilité : celle de s'abstraire du concret le plus pressant. Pour ce qui est des théories de la métaphore, tu imagines bien que j'en ai quelques-unes en mémoire.

    (2) Le cimetière. C'est l'image que Sartre donne d'une bibliothèque, et le professeur de lettres est un gardien de cimetière qui va sortir ses petits auteurs inoffensifs de leur petites boîtes cercueils bien rangées.

    C'est le genre d'images qui obligent à rester éveillé.

    (3) (a) Oui, elle sait faire ; et elle produit des choses très belles, dans Les Années notamment.
    (3)(b) La mèche : justement, Ernaux n'est pas Leiris. Leiris, le joue à l'épate, au "vous vous rendez compte de ce que j'ose dire". Ernaux : c'est comme cela. La question de la honte d'écrire est sans cesse écartée, de manière plus ou moins convaincante.

    (4) Mais justement, on n'a pas forcément à être d'accord avec Proust. Proust, dans "La Place", dans "les Années", est le grand modèle admiré, pensé, et repensé ; Ernaux connaît évidemment par coeur le "style comme vision", et au lieu de le prendre tel quel, en propose une autre version : moins enfermante dans l'individualité. La forme (à inventer) plutôt que le style (à dégager de sa propre nature).

    PS (hors sujet)
    Franchement, même les droitards à la Finkie n'ont pas réussi à soulever une polémique valable contre le Nobel d'Ernaux : son "Réplique" sur Ernaux, que j'ai écouté en espérant pouvoir m'en servir en guise d'introduction, est tout mou et n'y croit pas une seconde : le premier et dernier argument, trouvé avec Assouline est le suivant : "elle a signé contre l'eurovision à Tel-Aviv". Le point Godwin atteint en premier, la classe.

    Il faut lire ; ça tombe bien ; c'est "guère épais". Il faut lire "Mémoire de fille", "Passion simple", "La Place" ("L'occupation" est vraiment concon), "Les Années".

  • Jeremie Janette le 28/01/2023 à 17h52
    On se bat avec ses armes...