Sagnol dans le piège des stéréotypes
Une Balle dans le pied – Avec des propos navrants qui font écho à ceux de Laurent Blanc il y a trois ans, Willy Sagnol a déclenché une polémique prévisible, qui mérite pourtant d'autres réactions que l'indignation automatique des uns et le déni des autres.
Le propre d'une polémique, quand elle est brutalement médiatisée, est que très vite , plus grand monde ne parle de ce qui l'a amorcée, mais s'écharpe sur cet artefact qu'est devenue la polémique elle-même. Les réactions suscitées par les déclarations de Willy Sagnol au cours d'un entretien avec les lecteurs du quotidien Sud Ouest, n'échappent pas à la règle. L'entraîneur des Girondins de Bordeaux, juste après avoir évoqué son souhait de recruter moins de joueurs africains afin que son équipe ne souffre pas de leur absence durant la Coupe d'Afrique des nations, affecte au "joueur typique africain" des qualités de combativité et de puissance, pour dire ensuite que "le foot ce n’est pas que ça (…), c’est aussi de la technique, de l’intelligence, de la discipline."
Ces mots résonnent inévitablement avec ceux de son confrère Laurent Blanc, dans le cadre de la réunion organisée au siège de la FFF en novembre 2011 pour évoquer un système de quota de joueurs binationaux (lire "Pas de Blacks, «pas de problème»?"). Embarqué dans une conversation scabreuse dont il n'était pas le principal protagoniste, le sélectionneur de l'équipe de France avait évoqué ces Blacks forcément "grands, costauds, puissants" avant, surtout, de poursuivre avec des considérations sur leur style de jeu, leurs comportements supposés ou encore leur absence d'une sélection espagnole alors triomphante [1].
LA PARADOXALE EFFICACITÉ DES STÉRÉOTYPES
Il n'y a pas de procès de Willy Sagnol à mener, mais on peut – à moins de les considérer comme anecdotiques, ce qu'ils ne sont cependant déjà plus – examiner ses propos, s'interroger sur leur origine et leur portée, les remettre en perspective avec d'autres qui les ont précédés et qui leur ressemblent. Cet examen n'a nul besoin de porter sur leur racisme supposé (ou pas), mais sur les stéréotypes qu'ils expriment si spontanément : plaider sa "maladresse" et fustiger la "malveillance" de ses détracteurs ne suffit pas à régler la question.(…)
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