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La princesse de Lyons

Pour nos lecteurs préparant un concours administratif et n'ayant pas eu la chance de naître dans un milieu favorisé, présentons de manière intelligible, grâce au football, un classique de la littérature française.
Auteur : Madame de La Raspouette le 5 Juin 2009

 

En ce temps qui, déjà, nous semble reculé, Madame de Thiriez, favorite du Roi, dictait le goût à la Cour de France: qu'elle mît un ruban d'une couleur, toutes les femmes s'empressaient de l'imiter; qu'elle louât le port de la moustache, tous les hommes se la laissaient pousser; qu'elle trouvât du génie à un poète, ses vers aussitôt résonnaient en chaque lieu.


madame_lyons.jpgL'héroïne

Un jour dont on devait se ressouvenir longtemps, une jeune fille fit son entrée dans le monde. Elle était de vieille famille, quoique de peu de biens; elle avait passé plusieurs années comme pensionnaire; elle se nommait Mademoiselle de Ligain.
Sitôt qu'elle parut à la Cour, elle retint le regard des hommes et nourrit l'inquiétude des femmes. On vit d'abord qu'elle avait un doux visage, de la taille et du maintien; on s'aperçut ensuite qu'elle n'était point dénuée d'esprit. Malgré ce, au désespoir des galants, au soulagement des coquettes, Mademoiselle de Ligain se révéla aussi prude qu'aimable, aussi peu portée sur l'intrigue que capable de susciter les plus vifs sentiments.

Madame de Thiriez s'enticha de la jeune personne: elle en fit sa favorite. Elle vanta ses charmes et loua sa vertu; elle se promit de lui trouver le meilleur des partis. Elle pensa à Monsieur de Lyons, dont l'immense fortune pourrait assurer à Mademoiselle de Ligain une rente considérable. Sans doute cet homme était-il de caractère austère, peu à même d'engendrer une passion violente, mais au moins ne désespérerait-il point son épouse par d'incessantes aventures dont l'Europe entière parlerait. L'affaire fut convenue, le mariage arrangé: Mademoiselle de Ligain devint la Princesse de Lyons.



La rencontre

Peu de temps après que fut célébrée cette union, Monsieur de Marseilles revint à la Cour de France. Il avait parcouru l'Europe, multipliant les hauts-faits, rehaussant de son mérite la gloire d'un nom déjà illustre. Les femmes baissaient la voix en parlant de cet homme bien fait, à la jolie figure et au verbe alerte – un peu trop alerte, raillaient les jaloux.

Monsieur de Marseilles arriva à la Cour le soir où un bal y était donné. Pas même annoncé, il entra dans la salle et, par hasard, se trouva face à la Princesse de Lyons. Il l'invita à danser, ils se mirent à tourner au bras l'un de l'autre, et un murmure passa dans l'assistance: qu'ils étaient beaux, tous les deux! et qu'ils s'accordaient bien! Il n'y avait guère moyen d'alterquer là-dessus.

Monsieur de Marseilles se demandait qui était cette jeune femme qu'il n'avait jamais vue et qui possédait tant de charmes. La Princesse de Lyons, qui, elle, connaissait de réputation son cavalier, se sentait saisie d'un trouble qu'elle n'avait de sa vie éprouvé. Trois fois, ce soir-là, ils dansèrent ensemble; ils l'eussent fait plus souvent n'eût été la crainte de fournir au caquet. Ils se quittèrent avec au cœur un transport prêt à s'invétérer.



L'amour

Monsieur de Marseilles perdit le goût pour ses activités usuelles. Il ne chassait plus, ne se montrait plus au jeu de paume, négligeait ses amis. Pis: il se détournait du commerce des femmes. Lui! Si galant, si courtisé! Pas une conquête qui ne vînt s'ajouter à sa liste! Ses rivaux ne manquaient point de se gausser de ce palmarès figé.
C'est qu'il ne pensait plus, ne respirait plus, ne vivait plus que pour ravir à Monsieur de Lyons l'épouse qui lui avait été donnée. Il la cherchait dans les salons, il l'entretenait à l'Opéra ou aux Français, il saisissait toutes les occasions d'être en sa présence. Il lui faisait passer des lettres qui ne laissaient point de doute sur le sentiment qu'il éprouvait. En un mot: il entreprit, avec respect mais assiduité, de faire sa conquête.

Madame de Lyons s'était d'abord menti sur ce qu'elle ressentait; elle avait tâché de n'y plus penser: en pure perte. L'image de Monsieur de Marseilles occupait son esprit: qu'il parût à ses yeux, elle se sentait heureuse; qu'il se retirât, la tristesse la gagnait; elle ne put plus se cacher la nature de son penchant.
Néanmoins, bien que se sachant sensible, elle refusa de devenir tendre. Certes, Monsieur de Marseilles avait tout pour ravir le cœur d'une femme, tout pour enflammer ses sens – tout ce dont Monsieur de Lyons était si dépourvu. Mais la Princesse était vertueuse: elle ne voulait en aucun cas rompre ses vœux et trahir son époux. Elle entreprit de résister au tourbillon qui l'emportait.



L'aveu ; ses conséquences

Le temps passa; l'amour alla grandissant; le devoir ne lui céda point. Monsieur de Marseilles désespérait d'arriver à ses fins. Madame de Lyons trouvait chaque jour plus lourd le fardeau qu'elle portait. Elle se résolut à faire ce que nulle femme, jamais, n'avait pensé de faire: elle se confia à son mari.
C'était par une nuit d'été, dans le pavillon de leur domaine de Tola Vologe. Monsieur de Lyons s'enquit d'une tristesse qu'il croyait déceler, d'une langueur qu'il n'expliquait point. Elle hésita; elle se lança. Elle lui dit son amour; elle lui en dépeignit la force; elle lui en tut l'objet. Il insista pour le savoir; elle s'en tint à son silence. Elle l'assura de sa vertu; mais il savait qu'il avait perdu son cœur.

Monsieur de Lyons était plus ardent que son abord ne le laissait présager. Il aimait son épouse, cette Mademoiselle de Ligain qu'il avait faite Princesse... Eh quoi! Pendant sept ans, il s'était évertué à la rendre heureuse! Pendant sept ans, il n'avait eu de cesse de la combler! Et pour quel résultat? Elle ne l'aimait point! Elle lui préférait un galant dont elle taisait le nom!
Monsieur de Lyons ne supporta pas cette situation. Sa colère le rendit amer, son amertume malade, sa maladie sans force. Il n'était plus que l'ombre du vigoureux gentilhomme qu'il avait été. Il s'alita; son mal empira; l'heure vint où il fut évident qu'on ne le pourrait point sauver. Malgré un dernier sursaut, il rendit son âme à Dieu.



Le dénouement

La Princesse de Lyons pleura sans fausseté cet époux qui l'avait si bien traitée. Elle s'accusa de lui avoir porté le coup fatal en lui révélant les tourments où son âme était plongée. Elle porta le deuil de son mérite et de sa bonté. Elle refusa de reparaître à la Cour.
Monsieur de Marseilles respecta cette affliction légitime. Il laissa passer le temps que la bienséance exige. Puis, sa passion ne faiblissant point, et l'obstacle du devoir semblant levé, il se fit annoncer chez Madame de Lyons.

« Madame, je respecte la douleur dont vous fûtes pénétrée à la perte de votre époux. Elle témoigne à mes yeux de la pureté de votre cœur et de la droiture de votre jugement. Mais le temps a passé et la raison des hommes, comme la loi de Dieu, réprouvent un isolement trop long... Revenez à la vie, Madame! Quittez votre retraite, reprenez place dans le monde... Et vous me permettrez, alors, avec tout le respect qui vous est dû, sans heurter la mémoire de celui dont vous portez le nom, de vous entretenir à nouveau des sentiments que j'ai pour vous.
– Non, Monsieur, je ne puis... Je pleure un mari dont j'ai hâté la mort par mon inconséquence... Je ne puis me donner à un autre que lui.
– Madame, prenez garde à ce que la constance ne devienne pas obstination! Vous êtes jeune; vous n'avez commis nul péché; personne ne redira à votre remariage... Quoi! Nierez-vous l'amour que nous nous portons? Ferez-vous votre malheur et le mien? Moi qui, depuis tant d'années, vous ai sacrifié les honneurs et les bonnes fortunes, moi qui n'ai entrepris de conquérir nulle autre femme, vous me rejetez encore! Quand ni la religion ni les mœurs n'exigent plus ce sacrifice!
– Monsieur de Marseilles, Dieu m'est témoin de l'amour que j'ai pour vous! Votre ferveur me ravit, votre franchise, droite au but, me conquiert... Vous êtes, de tous les hommes que j'ai croisés, le plus digne d'être adoré... Mais je ne répondrai pas à votre demande... Je connais un Monsieur de Marseilles amoureux de n'être pas comblé; j'ai cette tendre image du soupirant éternel: je ne la veux point perdre en gagnant un mari. J'emporte notre amour pur de toute contingence... Je ne le laisserai point se flétrir par habitude, s'affadir par routine... Qui sait si, au fil du temps, ce Monsieur de Marseilles que j'aime passionnément gardera pour sa femme la même flamme brûlante? Je ne supporterais pas de vous voir tiédir, Monsieur: je préfère vous garder en moi aussi ému qu'au premier jour.»


Et sur ces paroles, Madame de Lyons se retira. Elle prit bientôt ses dispositions pour être admise dans un couvent, au cœur de la Gironde tranquille. Elle y vécut une vie calme et pieuse, sans jamais oublier Monsieur de Marseilles, mais sans jamais regretter non plus de s'être refusée à lui.

Réactions

  • Judas Heart le 06/06/2009 à 11h22
    Quel baptême du feu... Après des mois de lecture assidue des deux versions des CDF (cyber et papier), et ayant enfin osé solliciter de leur haute bienveillance mon inscription sur LE Forum, je me pointe en plein débat littéraire ! Lire les réactions des lecteurs des CDF plonge vraiment dans la quatrième dimension footballistique (celle où on doit récupérer son cerveau à l'entrée sous peine de se la voir refuser).
    Alors pour commencer, je tiens à remercier l'hermaphrodite Madame de la Raspouette pour sa réécriture tellement admirable qu'elle m'a inspiré une profonde compassion pour Monsieur de Marseilles (alors qu'à l'époque où j'ai lu "La Princesse de Clèves", par obligation, bien sûr, je n'avais éprouvé que profond mépris pour ce pitoyable Nemours), ainsi que l'envie surprenante et incongrue de relire ce "monument de la littérature française". Je vais le mettre de côté pour les longues soirées de juin, tiens, histoire de vérifier si les années peuvent donner une plus douce saveur à une oeuvre qui m'avait parue si fade au lycée. Et sinon, comme j'avoue en éprouver une fierté aussi déplacée que solitaire (c'est un exploit qui n'intéresse personne !), je déclare solennellement sur ce forum avoir lu "La Nouvelle Héloïse" pas plus tard que l'année dernière. Eh bien, à condition de négliger les notes horripilantes de Rousseau qui commente les faits et pensées de ses personnages (intéressante schizophrénie littéraire...), je crois qu'on peut vraiment accrocher à l'intrigue. Mais il ne me viendrait pas à l'idée de le faire étudier à des élèves, sauf à vouloir provoquer une vague de suicides adolescents...
    Je me demandais, quand même... Cette vision finalement sympathique et estimable donnée de Monsieur de Lyons, est-elle due au dernier replay des CDF, montrant un OL à visage (presque) humain, ou à la considération nécessairement accordée au défunt qui ne peut plus défendre son cas ? (Peut-être que cette dernière remarque est un peu mesquine, j'avoue... J'aurais peut-être dû m'en tenir au débat littéraire...)
    Sur ce, je m'incline devant vous, rédacteurs et lecteurs des CDF, dont l'humour, l'esprit, la culture et l'ironie me consolent quotidiennement d'avoir sombré inexplicablement et irrémédiablement dans cette passion du vulgaire.

  • funkoverload le 06/06/2009 à 16h50
    En fait, jepense que le problème n'est pas tant d'enseigner la littérature que de la faire aimer.
    C'est un aspect des choses qui n'est pas particulier à la littérature d'ailleurs. Mais vous en avez eu combien des profs qui ont abordé leur matière sous l'angle du simple paisir ?
    Une grande partie du problème de l'éduc nat il est quand même là à mon avis.

  • Troglodyt le 06/06/2009 à 17h08
    Le problème aussi est de savoir "situer" le plaisir.

    - Le gars est supporter de l'OM. Il regarde un OM-Nancy. Mais ceux des années où l'OM était encore plus moche que cette année. Ouais mais voilà, il regarde l'OM, et ça, ce n'est peut-être qu'un simple détail pour vous, mais pour lui ça veut dire beaucoup. En plus, si l'OM gagne avec 8 buts d'écart et que 3 clubs perdent avec ce même écart, l'OM sera peut-être 4ème, et quand même, c'est la coupe d'Europe quoi.
    Bref, il est comme un dingue avant le match, tremble tout le match, et pleure de joie ou de tristesse à la fin.

    - Le même jour, à la même heure, et il n'a pas de magnétoscope, il y a un obscur match entre deux clubs dont le gars lit tous les jours dans l'Equipe que ce sera le match de l'année en raison du jeu magnifique proposé par les 2 équipes depuis des mois, et de l'opposition tactique géniale qui va être mise en place par les entraîneurs.
    Ben le gars, il le sait tout ça, mais bon, quand ce n'est pas l'OM, il n'arrive pas à s'y intéresser.

    Le gars, il n'a pas tort. Je veux dire, on peut préférer un match pour autre chose que pour la pureté de l'art.
    L'OM ce sont les joueurs qu'il connait. Les matchs, il en a déjà vus plein d'eux, c'est son dada. Et puis l'autre match, même si tout le monde dit que ça jouera mieux, qu'importe pour le gars, puisque même si ça joue mieux, il ne saura pas s'y intéresser.

    Alors le gars va regarder l'OM, toujours, sans rien attendre d'autre que l'OM joue (et, éventuellement, gagne, mais peu importe: même si l'OM est nul, ce sera de nouveau l'OM dans 8 jours).
    Ah moins que quelqu'un, un jour, lui explique ce qu'il y a de beau dans le deuxième match, pourquoi, même si cela lui semble totalement étranger (il ne connaît pas les personnages des deux équipes, ne comprend pas trop pourquoi ils ne balancent pas tout devant et perdent du temps à tourner autour du pot derrière, il ne comprend pas pourquoi les attaquants parfois défendent, parce que pendant qu'ils défendent, il ne se passe rien devant,...), il y a intérêt à chercher à la comprendre.
    Et quand il y verra ce qu'il y a à y voir d'autre qu'un match étranger pour lui, alors il sera ouvert à la possibilité d'un autre chose, à la critique, à l'attente.

    Il regardera toujours l'OM. Seulement, quand il regardera l'OM, il se mettra à espérer autre chose, à être plus indulgent sur certaines phases, plus critique sur d'autres.
    Et puis, parfois, pourquoi pas, il s'essayera au deuxième match, comme ça, parce que même s'il ne connaît personne, ben il arrive à y trouver un autre plaisir.

    Ensuite, il s'inscrit sur les CdF.

  • clerks le 06/06/2009 à 17h32
    Le mec de ton histoire, c'est Dinopatou?

  • Troglodyt le 06/06/2009 à 17h43
    (...)

    Le match de l'OM, c'est du Pennac, du Nothomb et du Lévy.
    L'autre match, c'est Proust, la Chartreuse de Parme, la dame de Clèves,...

  • clerks le 06/06/2009 à 17h49
    (....) aussi.


    Merci Troglo, j'avais compris.


  • Troglodyt le 06/06/2009 à 17h51
    (oui, j'avais compris que tu avais compris, mais je me suis rendu compte que tellement d'accord avec moi-même, j'avais oublié de conclure)

  • Dinopatou le 06/06/2009 à 18h22
    Non, moi je suis pas intelligent, je suis resté le mec numéro 1

  • José-Mickaël le 06/06/2009 à 19h35
    J'aime bien l'analogie de Troglodyt. Eh bien dans son analogie, je suis quelqu'un qui ne s'intéresse pas au foot, qui n'a jamais regardé le moindre match de foot sinon contraint et forcé (que ce soit de Marseille ou d'une autre équipe). Et je ne suis pas convaincu de la nécessité d'imposer le foot à tout le monde.

  • Troglodyt le 06/06/2009 à 19h39
    Rien n'impose de trouver du plaisir par le football.

    Néanmoins, si tu te dispenses du football, crois-tu que ce soit:
    - car sa nature et son objet font qu'il est dispensable (et que tu le substitues aisément par n'importe quelle activité à laquelle tu ne renoncerais pas),
    - ou parce que personne n'a su te le rendre indispensable?

La revue des Cahiers du football