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Appel contre la guerre à l'intelligence

Adhérant à ses objectifs et partageant son alarme, nous relayons ici l'Appel lancé par l'hebdomadaire Les Inrockuptibles, et vous invitons à le signer…
le 24 Fev 2004

 

Les Cahiers du football ont souvent manifesté leur désir de ne pas séparer l'univers du football du reste de la société, de réintroduire du politique sur ce terrain afin, notamment, de ne pas laisser des idéologies que nous combattons y régner sans opposition. En des circonstances aussi dramatiques que le premier tour des élections présidentielles 2002, nous nous étions joints au mouvement "Pages noires" et avions exprimé notre sentiment (voir Les présidentielles sur la tête). Plus constamment, nous tâchons, sur le site et dans le magazine, de rester fidèles à nos partis pris, de défendre et d'argumenter nos opinions en nous adressant toujours au sens critique de nos lecteurs, dussent-ils ne pas partager nos points de vue. C'est dans cet esprit que nous vous invitons à prendre connaissance de l'appel reproduit ci-dessous, dont nous partageons le diagnostic, les termes et l'objectif. L'équipe des Cahiers. Pour fédérer les mobilisations de plus en fortes, mais encore très éparses et éclatées, émanant des secteurs de la culture et du savoir, face aux attaques régulières, aux coupes budgétaires et aux menaces dont ils font l'objet de la part de l'actuel gouvernement, l'hebdomadaire culturel Les Inrockuptibles lance un "Appel contre la guerre à l'intelligence". Appel contre la guerre à l'intelligence ------------------------------------------------------------------------ Rien de plus proche aujourd'hui d'une université sans crédit qu'un laboratoire scientifique en panne, rien de plus proche d'un intermittent du spectacle qu'un doctorant précaire, d'un urgentiste en alarme qu'un juge débordé par les dossiers et les affaires, d'un psychanalyste interdit d'exercice qu'un archéologue privé de fouilles, rien de plus proche d'un architecte qu'un avocat ou qu'un médecin dont la liberté d'exercer est de plus en plus encadrée, rien de plus proche d'un chômeur en fin de droit qu'un artiste au Rmi, rien de plus proche, dans des salles vétustes et bondées, qu'un prof et ses étudiants. Tous ces secteurs du savoir, de la recherche, de la pensée, du lien social, producteurs de connaissance et de débat public font aujourd'hui l'objet d'attaques massives, révélatrices d'un nouvel anti-intellectualisme d'Etat. C'est à la mise en place d'une politique extrêmement cohérente que nous assistons. Une politique d'appauvrissement et de précarisation de tous les espaces considérés comme improductifs à court terme, inutiles ou dissidents, de tout le travail invisible de l'intelligence, de tous ces lieux où la société se pense, se rêve, s'invente, se soigne, se juge, se répare. Une politique de simplification des débats publics, de réduction de la complexité: pour ou contre le voile? Psychiatres ou charlatans? Un policier dans chaque école ou des professeurs laxistes? Juges de gauche ou flics sévères? France d'en bas contre élites savantes? Les artistes: fainéants ou profiteurs? Depuis deux ans, la liste est longue des compétences et savoirs pratiques méprisés, des débats raccourcis, amputés de leur épaisseur et de leurs contradictions fécondes. Le gouvernement Raffarin fait un usage simpliste et terrifiant des fameuses leçons du 21 avril: en pleine crise de l'Etat-Providence, dans ces secteurs les plus sensibles que sont l'hôpital et la santé, l'école et l'université, la justice et le travail social, la culture et l'audiovisuel public, au moment d'une fracture urbaine sans précédent entre des centre-ville riches et paisibles et des périphéries abandonnées, à l'heure d'une décentralisation culturelle accélérée et sans filet et d'une industrie de la culture qui modifie en profondeur le paysage intellectuel, que fait le gouvernement? Il livre l'architecture, l'urbanisme et la construction d'un nouvel espace public aux grands groupes de BTP. Il dégraisse les corps intermédiaires de la communauté éducative en supprimant emplois-jeunes, aide-éducateurs, infirmières, surveillants. Il fragilise le monde du spectacle au nom d'une réforme nécessaire du régime de l'intermittence. Il démoralise les professions de santé et accélère la "fuite des cerveaux" dans les universités étrangères. Il profite du départ à la retraite des générations du baby-boom pour faire disparaître des secteurs de recherche, des spécialités médicales, des disciplines éducatives. Il procède à des coupes sombres dans les budgets du savoir et de la recherche. Et il résout la prise en charge des "vieux" par la culpabilisation des familles, le rappel à l'ordre paternaliste des plus jeunes et la suppression d'un jour férié. Cette guerre à l'intelligence est un fait sans précédent dans l'histoire récente de la nation. C'est la fin d'une exception française: un simple regard chez quelques-uns de nos voisins européens, dans l'Angleterre post-thatchérienne ou l'Italie berlusconienne permet pourtant de voir ce qu'il advient des écoles, des hôpitaux, des universités, des théâtres, des maisons d'édition au terme de ces politiques qui, menées au nom du bon sens économique et de la rigueur budgétaire, ont un coût humain, social et culturel exorbitant et des conséquences irréversibles. Loin de constituer un mouvement d'humeur corporatiste, ce sursaut des professions intellectuelles concerne l'ensemble de la société. D'abord parce que la production et la diffusion des connaissances nous est aussi indispensable que l'air que nous respirons. Ensuite, parce qu'au-delà de nos métiers, de nos savoirs, de nos pratiques, c'est au lien social qu'on s'en prend, reléguant davantage encore dans les marges les chômeurs, les précaires, et les pauvres. Et maintenant? Fort de cette prise de conscience, il s'agit de partager les luttes et les mobilisations, de fédérer nos inquiétudes, d'échanger ces expériences alarmantes, et d'adresser au gouvernement une protestation solidaire, unifiée, émanant de tous les secteurs attaqués par cet anti-intellectualisme d'Etat qu'aucun parti politique, de droite comme de gauche, n'a encore entrepris de dénoncer. Chacun d'entre nous doit continuer à porter ses propres revendications, à élever ses propres défenses, mais nous devons aussi interpeller collectivement nos concitoyens sur ce démantèlement des forces vives de l'intelligence. Pour signer (avec vos noms, prénoms et qualité): appel@inrocks.com N'hésitez pas à faire circuler >> Le site des Inrockuptibles.

Réactions

  • electron libre le 24/02/2004 à 10h56
    Goom:

    1/ "la négligence des chercheurs à valoriser les recherches est importante." ?

    Permets moi d'etre surpris. Je bosse dans ce qu'il est convenu d'appeler de la recherche fondamentale. Pourtant, une partie de l'equipe travaille en etroite collaboration avec des entreprises. Des applications sont envisagees en medecine (radiotherapie). Donc c'est aussi de la recherche appliquee.

    Bref ce n'est pas avec une experience personnelle que l'ont tire une verite generale.

    Si le lien entre recherche publique et entreprises privees est insuffisant en France, il faut peut-etre aller voir du cote des dirigeants de la recherche et developpement des grands groupes industriels. Ceux-ci investissent moins qu'USA, c'est un fait.
    Il existe une mefiance historique envers l'universite.

    La classique separation Universite/grandes ecoles est peut-etre une des causes ? Je ne sais pas...

    Autre point, il ne faut pas non plus mettre la charrue avant les boeufs. Demander aux chercheurs, comme le fait le gouvernement, de privilegier une soit-disante recherche "utile" apportant des applications a court termes en negligeant le long terme n'est rien d'autre qu'un suicide national (cf ton exemple classique du laser).

    2/ individualisme des chercheurs ?
    comprends pas bien. Les chercheurs sont des etres humains pas des anges. Donc les travers du monde professionnel se retrouvent dans la recherche comme partout ailleurs.

    3/ le cloisonnement des connaissances ?
    La recherche avancee, c'est par definition une specialisation. Je me mefie beaucoup des ces effets de modes d'approches pluridisciplinaires. Si dans certains cas, cela peut etre tres benefique, dans d'autres c'est seulement un alibi pour obtenir des subventions parce que cela plait aux instances dirigeantes.

    4/ Recrutement archaïque et truqué ?
    a ameliorer certainement, mais ne tombons pas non plus dans le "tous pourris".

    ---

    Enfin, le gouvernement semble avoir decide de debloquer les credits geles de 2002 (oui vous avez bien lu, 2002).



  • electron libre le 24/02/2004 à 11h02
    Smally73: "Mais là-bas [aux USA], la recherche n'est que peu subventionnée par l'Etat. "

    Contre-sens total. C'est exactement le contraire.

    "le financement public de la recherche américaine, biologique et médicale notamment, progresse au rythme soutenu de 20 à 25 % par an". (cf le lien que j'ai donne plus haut).

  • Ricardo Baggio le 24/02/2004 à 11h03
    la tournure de la pétition est maladroite, quand bien même certaines revendications interpellent.

    Résultat, une réaction comme celle de Denis en profite de manière énorme, politisant encoe plus le débat, et c'est mauvais.

    Peut-être que les Inrocks devraient se rattraper, voire répondre à l'article du Figaro, sinon leur pétition sera un coup d'épée dans l'eau.

  • deaftone le 24/02/2004 à 11h04
    Pour info, la réaction du rédacteur en chef de l'excellent "alternatives économiques" dans libération de ce jour. Je ne sais pas si ça a déjà été mis en ligne ici.


    Pourquoi je n'ai pas signé, Par Philippe FREMEAUX

    Le succès de l'«Appel contre la guerre à l'intelligence» est réjouissant mais ne cache pas le problème de la gauche qui doit reconquérir la confiance des couches populaires.

    Le succès de l'«Appel contre la guerre à l'intelligence» lancé par le magazine les Inrockuptibles ne peut que réjouir : il témoigne du rejet, par une part croissante des «travailleurs intellectuels», de la politique menée par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Et pourtant, je n'ai pas signé cet appel.

    Une «guerre contre l'intelligence» ? Voilà un bien grand mot, qui sent bon la volonté de faire choc, voire de faire chic. Proclamer dans un hebdomadaire culturel qu'il faut donner plus de moyens aux artistes, enseignants, chercheurs, professions libérales, témoigne d'un courage commercial similaire à celui du magazine Elle quand il s'engage contre le port de la burqa en Afghanistan. Dans un pays où les «intellectuels» demeurent une catégorie sociale reconnue ­ en tout cas, par ceux qui croient en faire partie ­, on ne prend pas un grand risque à proposer à tous ceux qui se pensent plus intelligents que les autres d'envoyer un e-mail qui certifie leur différence et les dispense de toute réflexion sur leur statut.

    Il est trop facile de voir une manifestation de «guerre à l'intelligence» dans toutes les tentatives de réforme de la sphère publique : la culture vit des deniers publics, il est normal que la collectivité débatte de l'argent qui y est dépensé. La santé est ­ insuffisamment ­ prise en charge par la collectivité, c'est pourquoi on ne peut laisser aux médecins une totale liberté dans l'exercice de leur art. Quant à considérer qu'il serait contraire à la sérénité de la justice de faire entrer l'idée de productivité au sein des tribunaux, c'est prendre appui sur quelques situations particulières pour protéger la tranquillité d'une majorité.

    Mais passons, l'essentiel n'est pas là. Il tient à la gêne éprouvée face à une coalition de mécontents fédérée par l'idée qu'ils détiendraient le monopole de l'intelligence et que ce serait là la raison des attaques subies aujourd'hui. Les profs, chercheurs et autres intermittents du spectacle sont généralement diplômés. Certains ont parfois accédé, grâce à leur talent, à un statut prestigieux. Mais cela ne les prémunit pas contre la connerie, chose du monde la mieux partagée. Et quand bien même seraient-ils tous «intelligents», que sont alors les autres ? Tous ces habitants du monde trivial qui produisent les biens et services que nous consommons chaque jour ? Des cons ? Pour ma part, je vois autant d'intelligence chez les ingénieurs qui fabriquent des voitures qui tiennent la route ou des ordinateurs qui permettent de signer des pétitions, et chez les boulangers qui font du bon pain et des croissants chaque matin.

    En disant cela, mon propos n'est pas d'opposer de manière démagogique la France du réel à la France de l'intellect, la France qui produit à celle qui se contenterait de penser, mais au contraire de dénoncer ceux qui les opposent. C'est précisément ce que cherche Jean-Pierre Raffarin, qui flirte effectivement sans vergogne avec un populisme anti-intellectuel malsain. Les auteurs de «l'Appel contre la guerre à l'intelligence» sont tombés dans le piège par lui tendu, en adoptant une posture au fond identique, puisque opposée.

    Car Raffarin n'est pas un fasciste qui préfère la mort à l'intelligence. Il ne fait qu'appliquer une politique de revanche sociale décidée plus haut et qui consiste à privilégier une France d'en bas faite de petits patrons, de professions libérales, de gros agriculteurs. Il préfère les médecins du secteur II aux urgentistes, les buralistes et les cafetiers aux enseignants, la flexibilité imposée aux 35 heures. Il veut bien préparer l'avenir, mais après avoir servi ses clientèles, et comme il faut bien limiter les déficits tout en baissant les impôts, il taille dans l'éducation, la recherche et, plus encore, dans les dépenses sociales.

    Dans ce contexte, tenir un discours anti-intellectuel est une tentative minable pour séduire des ouvriers et employés malheureusement nombreux à considérer ceux-ci comme des privilégiés.

    Jean-Pierre Raffarin s'efforce ainsi d'unifier autour des clientèles traditionnelles de droite la frange des salariés qui votent pour l'extrême droite parce qu'ils pensent que la gauche les a abandonnés au profit des couches moyennes aisées. En réponse, la gauche doit savoir se montrer sensible au sort des enseignants ou des artistes, parce qu'elle croit dans l'éducation et la culture. Mais il lui faut d'abord reconquérir la confiance des couches populaires et montrer qu'elles sont en tête de son agenda. Et, quitte à dénoncer ce gouvernement, ne lui reprochons pas de faire la guerre à l'intelligence mais, plus simplement, la guerre à l'avenir. Car la politique menée s'attaque à la compétitivité même du pays, à sa cohésion sociale. A ce qui permettrait de dégager demain les ressources nécessaires pour améliorer la qualité de la vie de tous.


  • papa cammayo le 24/02/2004 à 11h07
    La technique consistant à stigmatiser et uniformiser une pensée (libérale en l’occurrence) et un panel d’actions gouvernementales afin de mieux les combattre et de rassembler large dans cette lutte, nuit sensiblement au message et fait qu’il tombe rapidement dans l’extrême.

    Au final, la position des auteurs me semble être l’exact contraire de la position du gouvernement, et pour les mêmes raisons qui me poussent à n’adhérer que par intermittence (non rémunérée : ) à la seconde (on décline les coupes budgétaires à tous les pans de la société sans plus de précautions), je n’adhère que partiellement à la première. Dommage, certaines idées valent la peine d’être défendues.

    Il suffit d’observer les réactions hétéroclites des lecteurs de ce site (pourtant en général assez réceptifs sur les questions d’ordre social) pour se dire que le message est au minimum, maladroitement rédigé.

    On peut toujours dire que l’urgence de la situation nécessitait de requérir à des solutions chocs afin de réveiller les consciences, c’est prendre à mon sens le parti de dire que les consciences sont endormies et oublier complètment que l’urgence de la situation, elle est malheureusement aussi un peu dans l’autre sens ; à savoir des finances publiques dans un état assez déplorable.

  • zoher le 24/02/2004 à 11h09
    Déja je trouve ce texte mal écrit, et je vois pas ou l'auteur veut en venir en mélangeant des sujets aussi différents que l'allocation chomage et les crédits de la recherche. Si j'ai tous compris le gouvernement se livrerait à une guerre larvée contre l'intelligence, par contre je n'arrive pas à savoir si cette guerre est planifiée, organisée ou si c'est un un état de chose, mal maitrisé par le gouvernement, résultant des soucis budgétaires.
    Pourquoi le gouvernement ferait la guerre à l'intelligence: parce qu'il est de droite et que la droite c'est des cons donc ils aiment pas les intellos de gauche, un peut simpliste comme explication.
    Donc il me parait un peut grotesque de parler de guerre mais plus de choix politique dans le cadre d'une sitaution économique difficile. On peut discuter ces choix et déffendre les intérêts de sa croporation(j'en fais autant), mais faut être réaliste et pas raconter n'importe quoi: non le gouvernement ne veut pas éradiquer l'intelligence.

  • robin_wood le 24/02/2004 à 11h10
    Cher smally73,

    Voici un -long- extrait de la petition "Sauvons la recherche", qui presente les revendications des chercheurs. Les revendications ne sont pas salariales, mais portent sur l'abandon de la recherche publique. Ca repondra je pense a beaucoup de tes questions.

    -------

    A l'aube du XXI siècle, la France a besoin d'une recherche vigoureuse. Cette activité est indispensable aux innovations de demain, au développement économique de notre pays, ainsi qu'à son rayonnement culturel. Dans la conjoncture actuelle, les pays qui ne maintiendront pas un outil de recherche d'excellence seront incapables de suivre l'accélération de l'évolution économique associée à la production des connaissances. Plus grave encore, ils deviendront rapidement incapables de former les jeunes générations de manière compétitive. Ils entreront donc dans une dépendance économique difficilement réversible.

    Croire que l'on peut limiter la recherche à quelques axes prioritaires pour la société, c'est entrer dans une logique de sous-développement. Les retombées utiles et rentables viennent et viendront de la recherche appliquée. Mais celle-ci ne peut exister qu'en utilisant les nouveaux outils et les concepts inventés par la recherche fondamentale. Comme l'objectif de cette dernière est le développement des connaissances, indépendamment de toute rentabilité escomptée, elle ne peut être soutenue, pour l'essentiel, que par des financements publics. Cette responsabilité centrale de l'Etat ne peut être transférée aux organismes caritatifs, privés, ou aux structures internationales même si les chercheurs savent trouver auprès de ces bailleurs d'importants compléments de financement.

    En France, nous assistons à un abandon de la recherche fondamentale par l'Etat. Cette politique entraînera irrémédiablement à sa suite un effondrement de toute recherche appliquée. Nous en avons déjà des exemples avec la fermeture de centres de recherche privée (Aventis, Pfizer), qui préfèrent exercer cette activité là où le lien entre recherche fondamentale et appliquée est soutenu : aux USA. Car il faut le redire : l'industrie privée américaine est massivement dépendante du secteur public. En gros, dans le domaine de la santé, les grandes compagnies pharmaceutiques se transforment en sociétés financières, spécialisées dans le rachat des start ups issues du monde académique, quand elles réussissent. Mais il n'y a plus réellement de recherche pharmaceutique privée, et c'est tout aussi vrai en Europe [...]

    En dépit du discours officiel affirmant que la recherche est une priorité nationale, le gouvernement français est bel et bien en train de fermer le secteur de la recherche publique, sans même se rendre compte qu'il n'y a rien pour la remplacer. Il asphyxie financièrement les organismes de recherche publique. Les baisses de crédits ajoutées aux annulations de crédits et au non paiement des crédits votés par le Parlement (début décembre 2003, 50% des crédits de fonctionnements 2002 du CNRS ne lui avaient toujours pas été versés !) mettent plusieurs EPST (Etablissements Publics à caractère Scientifique et Technique, comme le CNRS, l'INSERM ou l'INRA) et les EPIC (Etablissement Public Industriel et Commercial, dont le CEA) au bord de la faillite. Alors que la recherche, qui est une activité sur le long terme, a besoin de perspectives claires, le gouvernement décide une réduction brutale du nombre de recrutements de jeunes chercheurs (un exemple, pour les recrutements de chargés de recherche à l'INSERM : 95 recrutements en 2002, 30 prévus en 2004). Coïncidant avec un départ massif des cadres de la recherche française à la retraite, cet abandon fera que l'écart avec les autres pays équivalents atteindra rapidement un point de non retour, d'autant plus rapidement que les jeunes scientifiques s'expatrieront, un mouvement déjà largement amorcé.

    Les grandes orientations de la politique scientifique doivent être contrôlées par la représentation nationale. Mais le gouvernement ne peut à la fois désengager l'Etat et piloter la recherche avec des méthodes qui risquent de la paralyser. Ainsi, les moyens d'intervention sont de plus en plus concentrés au niveau du ministère. [...]

    Les scientifiques signataires considèrent de leur responsabilité d'agir collectivement contre une destruction programmée de l'appareil de recherche français. En conséquence :

    1) Nous demandons que les sommes dues aux organismes (dotations 2002 toujours non versées) leur soient immédiatement versées.

    2) Nous demandons que le nombre de possibilités d'embauche proposées aux jeunes chercheurs pour les concours 2004 soit significativement augmenté.

    3) Nous souhaitons qu'une mobilisation profonde du monde de la recherche prenne corps pour que la situation puisse être comprise du monde politique et économique, et de l'opinion. Nous demandons au Ministère de la Recherche que soit mise en chantier dans les plus brefs délais la préparation d'ASSISES NATIONALES DE LA RECHERCHE, dont l'exemple pourrait être le colloque de Caen qui fut à l'origine du renouveau spectaculaire de la recherche française dans les années 60. Un tel colloque, en réunissant les acteurs économiques et politiques concernés, en n'éludant aucune des questions qui conditionnent la dynamique et la réactivité de notre système de recherche, visera à une refondation d'un secteur d'activité vital pour l'avenir des citoyens de ce pays, secteur dont tant de jeunes aujourd'hui se détournent. Il devra déboucher sur la mise en place d'une politique pluri-annuelle offrant des perspectives d'embauche et de carrière attractives pour les jeunes chercheurs.

    Si les pouvoirs publics ne mesurent pas la gravité de la situation, et en particulier la désespérance des plus jeunes qui devient le problème central de nos laboratoires, SI DONC CES DEMANDES NE SONT PAS SATISFAITES DANS LE DELAI D'URGENCE QU'EXIGE LE TRAITEMENT DE LA CRISE QUE NOUS SUBISSONS, LES DIRECTEURS D'UNITES ET D'EQUIPES SIGNATAIRES PRESENTERONT LA DEMISSION COLLECTIVE DE LEURS FONCTIONS DE DIRECTION.

  • goom le 24/02/2004 à 11h15
    electron libre, je parlais de mon expérience et de ce que j'ai pu en tirer.

    J'étais dans un domaine très proche du monde industriel et pourtant je n'ai pas eu l'impression que les contacts étaient forts.

    Sur l'individualisme peut être que l'expression "tirage dans les pattes" serait plus appropriée.

    Je ne tiens pas à dire que tout est à jeter simplement sur ce que j'ai pu voir, je n'ai aucun envie d'intégrer la recherche publique, même pour la sécurité de l'emploi...

  • smally73 le 24/02/2004 à 11h20
    OK, Robin, electron libre.
    Merci pour les infos.

    Question (toujours dans un souci d'exhaustivité) : la repartition public/privé dans le financement de la recherche aux Etats/Unis et en France ?

  • Fredevils le 24/02/2004 à 11h21
    Pour information, la pétition a été signée à ce jour par plus de 40000 personnes.
    Autant dire qu'elle ne fait pas fuir malgrè quelques tournures bancales.
    Il y a peu d'exemple de pétition ayant suscité un tel retour sous la Vème république.

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