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Habitus baballe

Pour causer socio, éco, sciences-po, anthropo, histoire-géo, philo, épistémo, Adorno, filporno, Bernard Pardo...

  • cachaco le 28/03/2022 à 20h06
    Sans parler de l'influence française sur le terrorisme d'Etat des dictatures sud-américaines, friandes des vétérans d'Indochine et d'Algérie. Un exemple parmi d'autres, après son passage à Fort Bragg pour enseigner ses techniques aux forces contre-insurrectionnelles américaines nouvellement créées, Aussaresses fut attaché militaire "instructeur" au Brésil pendant la mise en place du Plan Condor dans les années 70.

  • Raspou le 28/03/2022 à 20h08
    Je tombe sur votre discussion, et comme elle fait écho à un roman que je viens juste de lire, et dont le titre commence aussi par "L'art...", je mentionne le remarquable "L'art de perdre" d'Alice Zeniter. Il a peut-être été déjà évoqué en ces pages quand il est sorti il y a 3-4 ans, mais c'est vraiment un livre très fin sur l'Algérie avant la guerre, pendant la guerre, sur l'émigration-immigration, la mémoire, la transmission, la construction identitaire... C'est centré sur une famille qu'on va appeler pour simplifier "de harkis" (mais la force du roman est de montrer que c'est beaucoup, beaucoup plus compliqué que ça), mais ça parlera à tous ceux qui s'intéressent à l'Algérie et à la mémoire de la guerre.

  • O Gordinho le 29/03/2022 à 04h02
    Merci pour les témoignages.
    Oui effectivement L'art de perdre est un beau livre, abordable, qui aborde toutes les problématiques de la décolonisation avec un remarquable équilibre entre pudeur et sensibilité.

    ... En revanche l'art français de la guerre m'avait terriblement ennuyé.

  • Pascal Amateur le 29/03/2022 à 10h43
    Salut les penseurs et possibles penseuses. Bon, j'arrive avec une question qui me titille depuis quelque temps, et j'y vais, je vous la soumets, avec la certitude que ça vous en remuera une en exaltant l'autre. Voilà : des lectures de textes des années 70 (Foucault, Deleuze, sans oublier Lacan qui a proposé sa propre approche) indiquent qu'il y eut là à cette époque, brutal, monstrueux, le développement d'un capitalisme bouleversant. Cinquante ans plus tard évidemment, nous y sommes, le monstre a des têtes supplémentaires, il est difforme autrement – et ça m'empêche d'avoir un recul sur le choc que cela fut ; je sens une difficulté à cerner en quoi ce fut si brusque, si dément. Certains auraient-ils des éléments d'explication, qui indiqueraient donc en quoi ç'a été si nouveau ? Merci de vos lumières.

  • inamoto le 29/03/2022 à 12h34
    Ah tiens, je l'ai lu récemment aussi. Je l'ai pas mal offert aussi, c'est un bon signe. Il y a un emboitement de trois générations : les grands parents, les parents et la narratrice. Je trouve que les passages les plus forts concernent les premiers : à la fois parce qu'ils mettent des mots sur ce que "harki" veut dire - sujet assez mal connu en tout cas de moi -, dans la réalité concrète d'un village algérien pendant la colonisation, et aussi car cela raconte avec beaucoup de force ce que ces gens atterris à Flers (!), via les camps dans le Languedoc, puis la Provence, ont enduré. Le personnage énigmatique du père est beau aussi. Par contre les passages de la narratrice sur sa propre vie et sa quête d'identité m'ont semblé affaiblir le propos général, en tout cas je n'y ai pas été sensible. Mais c'est certainement un livre que je recommande.

  • albeur battu le 29/03/2022 à 13h24
    Concernant "L'art Français de la Guerre", les parties concernant le vécu militaire sont plutôt pas mal et bien écrites. Par contre, lorsque le narrateur parle de lui, j'ai vraiment eu l'impression d'avoir affaire à un auteur qui se regarde écrire et j'ai fini par zapper ces parties là.

  • Red Tsar le 29/03/2022 à 16h29
    Lâche comme ça en plein jour, ça ressemble presque à un attentat terroriste.

  • Red Tsar le 29/03/2022 à 16h36
    "Lâché"...

  • Red Tsar le 30/03/2022 à 13h02
    Pour te répondre sur la question des mues du capitalisme dans les années 1970 (qu'est-ce qui est nouveau ? Pourquoi à ce moment là ? Pourquoi cette « brutalité » ?), il faut, je pense, commencer par poser ce qu'est le capitalisme. C'est mon côté besogneux. Désolé si certaines choses te paraissent évidentes et donc inutiles ici. Désolé aussi si ça te paraît top peu développé. Ce n'est pas évident de caler la mire à blanc comme ça sur un forum. Autre avertissement préalable : je te livre ici des lectures personnelles non contrôlées. Ça ne sort pas d'un séminaire où j'aurais bûché sous la houlette scrupuleuse d'un professeur et qui aurait rectifié des interprétations hérétiques. Il se peut que certains éléments soient mal présentés et j'invite d'ailleurs chacun à corriger et/ou compléter. Enfin, je mets de côté la question de l'exploitation au sein du système capitalisme, loin d'être anodine, mais qui n'entre pas directement dans le champ de tes questions.

    Pourquoi prendre le temps de poser ces bases ?
    Comme tu le soulignes, dans les années 1970, beaucoup de personnes comprennent qu'il se passe quelque chose. On voit émerger de nouvelles grilles de lectures, que tu as évoquées. Mais il y a aussi des choses très intéressantes chez des « tradi », comme Paul Boccara (économiste au PCF) ou Ernest Mandel (trotskyste, Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale), dont les « manuels » ont été massivement diffusés chez 10-18.
    Les questions qui se posent alors sont : est-ce vraiment « nouveau » ? Est-ce qu'on assiste réellement à une transformation du capitalisme ? Est-ce que ce n'est pas une illusion qui cache une permanence de fond ? S'il y a transformation, ce dont tout le monde finit par convenir, est-ce une simple mue ou une rupture radicale ? Voire une inversion de certaines logiques initiales du capitalisme ? Est-ce qu'il faut appréhender ce nouvel âge du capitalisme selon une perspective linéaire ou cyclique ? Car assiste-t-on à du nouveau ou, plutôt, à un retour aux fondements du capitalisme des origines, contenu un temps par un rapport de force plus favorable aux salariés (État-providence et planificateur après 1945…) ?

    Et pour comprendre les réponses apportées à ces interrogations dans les années 1970, il faut déjà voir quel l'état de l'art pour les intellectuels de cette époque.

  • Red Tsar le 30/03/2022 à 13h52
    I. DÉFINIR LE CAPITALISME

    I.1- Les « idéalistes »

    ** Weber
    Pour Weber, le capitalisme est né d'un nouvel état d'esprit qu'il lie à l'éthique protestante. Sa démonstration est complètement invalidée aujourd'hui sur le lien capitalisme/protestantisme. Mais sa présentation de ce qu'est l'esprit du capitalisme reste aujourd'hui très féconde. Weber s'oppose totalement à Marx sur la question de l'origine du capitalisme. Pour Weber, un nouvel état d'esprit crée de nouvelles conditions matérielles. Pour Marx, c'est l'inverse : les nouvelles conditions matérielles créent un nouvel état d'esprit. Mais Weber n'en a pas moins des propos cinglants contre le capitalisme.
    [Au passage, l'édition de la partie « Esprit du capitalisme » dans la Petite Biblio chez Payot (140 p. tout compris) est excellente, avec une très bonne présentation et une postface d'Appadurai très stimulante (j'y reviens dans le II).]

    Pour Weber on entre dans le capitalisme quand on passe d'époques où existaient des capitalistes « aventureux » [propos de Weber pour tout ce qui est entre guillemets] à la généralisation d'une « philosophie de l'avarice » et du gain à l'ensemble de la société, avec des expressions comme « le temps est de l'argent », avec l'idée qu'il faut travailler dur pour gagner sa vie, épargner, investir, avec l'idée que « l'acte consistant à gagner de l'argent [est] la manifestation de la compétence »... Pour Weber, si le capitalisme n'est pas né en Chine, en Inde ou à Babylone, c'est justement qu'il aurait manqué cet ethos spécifique qui permet la généralisation et la formation de pratiques en système.

    Qu'est-ce que le capitalisme pour Weber ? « L'idée d'un devoir [en italiques] de s'intéresser à l'augmentation de son capital – dont il est présupposé qu'il est une fin en soi » ou, plus loin : « le fait de gagner de l'argent et toujours plus d'argent […] si entièrement dépouillé de tout point de vue eudémoniste ou même hédoniste, est à tel point pensé comme une fin en soi […]. C'est l'homme qui est rapporté au fait de gagner de l'argent en tant qu'objectif de son existence, et non plus le fait de gagner de l'argent qui est rapporté à l'homme en tant que moyen de satisfaire ses besoins ».

    Comme Marx (ou Polanyi), une des particularités du capitalisme pour Weber est son emprise sur la société : « l'ordre économique capitaliste d'aujourd'hui est un cosmos immense où l'homme se retrouve plongé à sa naissance et qui, pour lui, au moins en tant qu'individu, est donné comme un habitacle [terme allemand ?] dans lequel il lui faut vivre – un habitacle dont l'immuabilité ne se discute pas ». L'homme selon Weber est « intriqué à l'ensemble des rapports constituant le marché », il est « éduqu[é] » par le capitalisme. Cette éducation est indispensable, car, écrit Weber : « l'homme ne veut pas ''par nature'' gagner de l'argent et plus d'argent encore, mais simplement vivre ».

    Le plus cocasse dans tout ça, c'est que, malgré ces propos, Weber n'est pas anti-capitaliste. Il n'est pas pro non plus, disons qu'il est résigné, qu'il n'envisage pas qu'il soit possible de sortir de l'« habitacle ».

    ** Sombaert
    Sombaert est également dans cette veine idéaliste. Il est peu étudié aujourd'hui en France, sauf par l'extrême-droite anti-capitaliste. Il fait partie de ces intellectuels sulfureux, comme Heidegger ou Carl Schmitt. Pas besoin de développer, je suppose que tu as compris. D'ailleurs, méfiance sur certains textes qui présentent la pensée de Sombaert. Comme pour Gramsci, on trouve aujourd'hui des choses très... orientées...
    Comme Weber, Sombaert lie l'émergence du capitalisme à un nouvel état d'esprit. Sombaert entend démontrer que l'homo oeconomicus n'a pas toujours existé. Qu'il n'existe pas de penchant naturel et universel des individus pour s'enrichir. Que, de même, l'existence d'un marché n'est ni universelle, dans le temps et l'espace, ni naturelle.
    Pour Sombaert, le capitalisme serait né de la convergence de l'esprit d'aventure et de l'esprit bourgeois. Idéaliste, il estime que la bourgeoisie ne forme pas une classe à proprement parler, mais un groupe qui incarne un esprit (Geist).

    Ce qui est nouveau dans l'homme économique moderne, pour Sombaert, c'est son attrait pour l'illimité. Le capitaliste cherche à gagner le plus possible d'argent, à faire prospérer ses affaires le plus possible, sans autre logique que le gain lui-même. C'est une logique sans fin, un processus d'accumulation continue. Dorénavant, le matériel s'impose au spirituel et l'homme n'est plus maître des choses, mais esclave des choses.

    Sur la question des nouveaux modes de production, Sombaert met en avant « l'émancipation de la firme de la personne de son propriétaire », qui est « l'essence même de l'entreprise capitaliste ». L'esprit capitaliste est vu comme la mise en valeur du capital investi dans l'entreprise. Pour Sombaert, l'esprit capitaliste, c'est donc la recherche du profit et de son accumulation. À cet esprit du capitalisme correspond une technique de travail rationnelle : la comptabilité en partie double : « concevoir le capitalisme sans comptabilité en partie double, c'est totalement impossible : l'un est à l'autre comme la forme au contenu » (Le Capitalisme moderne, 1902).