Une fessée au téfécé
le 3 Oct 2005
Acariesse y veut plus venir nulle part avec nous. Il a dit que c’était préférable, sinon c’est obligé, il allait finir par en tuer un. Moi je m’en fiche pas mal, il a qu’à en tuer un si y veut. Tiens, je sais pas, Nakata au hasard. Ou alors... Non, Nakata c’est très bien.
Du coup, pas le choix, on est allé au téfécé sans lui, mais avant le départ, il a quand même tenu à nous lire un mot écrit par Diouf. Les joueurs étaient pas chauds, ils ont prétexté qu’ils voulaient pas louper le bus et tout. Tu parles, Acariesse a répondu qu’ils pouvaient pas le louper vu qu’ils étaient assis dedans. Quesse tu veux trouver à redire à ça ?
Déjà à la base, Acariesse quand il parle, on dirait qu’il lit. Mais alors quand il lit, on dirait, je sais pas, qu’il a des glaçons dans la bouche. Franchement on a tous souffert. Lui inclus, mais quand même nous surtout. Sans mentir, il a passé facile vingt minutes sur le mot « circonvolution ». Et faut voir comme y s’entêtait à vouloir le lire, heureusement qu’il a pas eu à l’épeler, sinon on y passait la nuit.
Comme personne avait rien compris au message de Diouf, Acariesse y est allé de son speech perso. Il a insisté sur l’importance de continuer la bonne série des victoires. C’est vrai qu’à l’OM, les bonnes séries dépassent rarement le premier épisode. Acariesse a ajouté « Il faut gagner pour s’injecter de la confiance ». « Ah non ! », a protesté Meïté « Moi je suis clean, je touche pas à ça ». Acariesse a fait comme si de rien était. « Après chochaux », il a crié, « Troie ! » « Et après Troie... » Ribéry a répondu « Quatre ! » Je l’ai vu Acariesse, il a serré sa canne très fort entre ses mains. Tout ce que je peux dire, c’est que Ribéry a eu de la chance d’être assis au fond du bus.
La ville du téfécé, on appelle ça la ville rose. Alors que tu verrais, elle est exactement de la même couleur que les autres villes. À mon avis, c’est juste pour se faire remarquer et puis c’est tout. N’empêche, le téfécé c’est surtout une ville de ruguebi. Tu sais, le sport qui se pratique rien qu’avec des défenseurs et où le but du jeu c’est de traverser tout le terrain avant que les autres t’aplatissent et te marchent dessus. C’est spécial, faut aimer. Moi j’aime bien, ça me rappelle les matchs d’Endoûme à l’époque où je jouais. On était pas bons mais quesse qu’on rigolait !
Crois-le ou pas, mais le téfécé ils ont des maillots lavande. D’ailleurs, je leur ai demandé « Ça marche comment chez vous lavande des maillots ? » Ils ont fait « Ça dépend lesquels, ceux du foot ou ceux du ruguebi ? » J’ai dit « Ben ceux du foot, pardi ! » Ils ont répondu « Ceux du ruguebi se vendent très bien ». J’ai pas insisté.
À peine arrivés, Carasso a demandé si des fois, on aurait le temps de se taper un cassoulet avant le match. J’ai répondu « Non mais t’es fissuré du bocal, où t’as vu qu’on mangeait du cassoulet avant de jouer ? » Comme il commençait à bouder, je lui ai dit « Déjà, termine ton pot de nutella, on verra si t’as encore faim après ».
Ce coup-ci, pour éviter les tensions dans le vestiaire, Fernandèze a décidé d’innover pour composer sa défense. Il a mis tous les noms des défenseurs dans sa casquette pour en tirer cinq au sort. Déhu a demandé à avoir deux papiers de son nom, en tant que capitaine de l’Olympique de Marseille, il a dit, c’est quand même un peu normal qu’il compte double. Personne a trouvé à redire.
Le premier à avoir été tiré, ça été Ferreira, notre arrière droit soi-disant brésilien. Pour faire le cake, il a rien trouvé de mieux à faire que d’aller chercher son maillot en faisant la démarche d’Aldo Maccione. Mais comme y avait trop de suspense, personne a rigolé. Ribery a quand même voulu savoir si ça marchait avec les filles, cette démarche. Ferreira l’a regardé et a répondu que oui, mais sauf des fois.
Déhu a été tiré, il s’est levé sans rien dire. Genre, c’est normal. Puis ç’a été le tour de Meïté qui, sous l’effet de la joie, a promis de faire un bon match, mais il a pas précisé quand. En entendant son nom, Andre Louisse a crié si fort qu’il a vrillé le tympan de Emont. C’est là que Déhu a été tiré une deuxième fois. En bon seigneur, il a été d’accord pour laisser sa seconde place qui lui revenait en tant que capitaine de l’Olympique de Marseille à un autre joueur et c’est tombé sur Nakata. Sauf que, à la place, Fernandèze a lu Naka...Taiwo.
On a eu chaud. Dans son coin, Beye disait rien mais il en pensait pas plus. Je le voyais qui rongeait son front. Une expression bizarre quand t’y penses, parce que, pour ronger son front, faut être sacrément souple des dents. J’ai essayé, impossible.
Soudain, on a frappé à la porte. J’ai demandé « C’est qui ? » On a répondu « C’est moi ! » J’ai reconnu la voix. C’était Batlles ou alors peut-être Casimir mais je penchais quand même plus pour Batlles. Il a ouvert la porte et a fait « Eh salut les copains ! Alors ça va ? » Meité a répondu « Copain toi-même ! T’es plus avec nous ! » Batlles a perdu son sourire content. Carasso a ajouté « Ouais, t’es un traître, on te cause plus ». « Ouais ! » a rajouté Nakata qui entravait pourtant nib à ce qu’on parlait. Batlles a dit que puisqu’on le prenait comme ça, il allait pas se gêner pour nous marquer un but terrible de 47 mètres et qu’on serait tous bien embêtés. C’était la goutte. J’ai crié à Andre Louisse : « Vas-y choppe le ! Choppe le ! » Il lui a couru après dans les couloirs en hurlant « TODO MACH !! » On a bien rigolé. Batlles moins.
Au téfécé, ils avaient pas dû faire le ménage depuis un bail puisqu’au coup d’envoi, y avait un ballon de ruguebi qui traînait sur le terrain. Pour bien faire, Meité a voulu le dégager. Tu parles, déjà qu’avec un ballon normaux, il a du mal. Alors là, laisse tomber. Ça a fait une drôle de trajectoire tordue, comme le cheval au jeu d’échec, et ç’a foncé pile sur Mendoza. Meïté s’est pris la tête à deux mains, en criant « Oh non ! » Heureusement que Nakata est passé devant à ce moment. Mon vieux, il est tombé déquerre. Faut dire, les japonais et le ruguebi, ça fait deux.
Puis le match a enfin commencé et il a plutôt bien commencé pour nous puisque Arribagé s’est pris un rouge pour avoir fait un ippon à Ribéry. Là, on s’est dit, 70 minutes avec un joueur en plus, c’est obligé que même nous, on gagne. C’était oublier un peu vite que nous aussi, on avait un joueur en moins sur le terrain, en la personne de Mamadou Niang.
J’ai compté, on a eu 52 000 occases. Mais à chaque fois, c’était que des tirs à côté ou au dessus. C’est bien simple, Revault a même fini par retirer ses gants pour jouer au bantumi sur son portable. Et puis à force de pas marquer, il est arrivé ce qui devait arriver ; on s’en est mangé un. Un corner mal renvoyé. Bergnougnou récupère aux six mètres pour marquer. Il a fait un haka pour célébrer sa joie. En voyant ça, Niang a dit que lui aussi, il ferait un truc spécial le jour où il marquera. Je lui ai dit « Ecoute, commence déjà par marquer, ça sera vraiment un truc spécial venant de toi ».
On est repartis comme on est venus. J’irais pas jusqu’à dire qu’on a perdu trois points, vu qu’on les avait pas en venant. Bien sûr Beye a pas pu s’empêcher en répétant que c’était pas pour dire mais s’il avait été titulaire, au moins on aurait pas perdu. Même qu’il en mettait sa main au feu de bois. Moi ça m’a cassé les bonbons, j’ai dit « Elle est belle la solidarité ! » Nasri a demandé c’est quoi la solidarité. Alors j’ai expliqué. La solidarité, c’est quand tu vois un copain qui est nul, et ben au lieu de le critiquer, tu deviens aussi nul que lui pour pas qu’il se sente seul. Autant dire que c’est tout sauf une toupie à l’OM.