PSG, la politique de l'échec
Ce nouveau naufrage parisien sanctionne une politique sportive incohérente et désigne son premier responsable, Nasser Al-Khelaïfi.
On pourrait dire que ce n'est que justice, si le football relevait d'une quelconque justice. Disons seulement que, quand on offense le football, il vous le fait souvent payer. Alors, si vous répétez les offenses...
Cet été, le PSG a doublement offensé le football en recrutant Lionel Messi. D'une part en adressant un bras d'honneur à ce qui restait de l'équité économique dans le football européen. D'autre part en poursuivant jusqu'à l'absurde sa politique du casting. Paris n'a toujours pas d'équipe, et rien n'y fait, pas même un recrutement plus intelligent qu'à l'ordinaire : aucun joueur ne progresse, et l'équipe reste totalement déséquilibrée.

Hier soir, Neymar a été impuissant, Messi inutile. Il restait un espoir que l'Argentin rattrape le fiasco sportif de son transfert par deux ou trois gestes géniaux dans les derniers rounds de la Ligue des champions. Ils auraient suffi à sauver la face et la mise (40 millions de salaire annuel). Hier soir, Neymar a été l'ombre lente et épaissie de celui qu'il fut. Messi a été ce joueur insignifiant qu'aucun coach n'osera pourtant sortir du terrain.
Cet été, le PSG a doublement offensé le football en recrutant Gianluigi Donnarumma. D'une part en nous privant, à chaque match, d'un des tout meilleurs gardiens au monde. D'autre part en créant les conditions d'une rivalité dont l'irréprochable Keylor Navas a souffert, et dont le jeune Donnarumma a payé le prix. Il y a trois ans, c'était Gianluigi Buffon qui avait failli face à Manchester United.
Prévisible dans la défaite improbable
Mbappé peut bien faire des miracles, cela n'y suffit pas. Le PSG a probablement perdu son numéro 7 en même temps que ce match. Outre ses espoirs de l'emporter en C1 cette saison, le club a aussi perdu les acquis de ses accessions au dernier carré des deux éditions précédentes.
Nous y gagnons une certitude : même s'il cristallise le ressentiment des supporters, l'entraîneur n'est pas le problème de ce PSG, où tous les entraîneurs ont achevé leurs mandats dans l'amertume, où aucun entraîneur ne peut être un bon entraîneur. Les joueurs ne sont pas plus en cause : ils passent, les problèmes restent, et ils ne sont pas responsables de la composition de l'effectif.
Car il y a une signature parisienne, quel que soit l'homme sur le banc, des invariants. Se décomposer au match retour, après un match aller accompli. Paniquer au premier coup du sort. Perdre ses nerfs sur le terrain et sa concentration dans les contestations. Au point de réussir à banaliser la remontada, à être prévisible dans la défaite improbable.
Inutile d'invoquer, comme on n'y manquera pas, des notions ésotériques et attrape-nigaud telle que "l'expérience" qui caractériserait les "institutions" comme le Real Madrid. Il s'agirait d'abord, là aussi, de commencer par respecter le jeu.
Les récriminations de Mauricio Pochettino, Leonardo et Nasser Al-Khelaïfi contre l'arbitrage sont des aveux de faiblesse supplémentaires, les aveux d'une confondante et persistante immaturité, d'un refus de regarder leurs erreurs et la réalité en face : la saison du PSG s'est achevée le 9 mars - sauf s'il tient à reproduire un tel effondrement en Ligue 1 et à galvauder ses treize points d'avance.
Les moyens et leur utilisation
Le pire est arrivé aux dirigeants parisiens. Une énième élimination précoce, teintée de ridicule, face à leur grand rival politique. Le PSG est le club où Lionel Messi ne passe plus un dribble, le club dans lequel le meilleur gardien du monde commet une bourde fatale, le club qui ne peut même pas prétendre garder Mbappé.
Nasser Al-Khelaïfi a réussi à valoriser économiquement la marque PSG et à lui donner une médiatisation mondiale, à développer ses revenus et ses infrastructures. Mais la gouvernance du club est déficiente et l'échec de la politique sportive, s'il y en a une, est sans appel.
Les moyens financiers ne suffisent pas quand il s'agit d'affronter des clubs qui en ont à peine moins, mais qui les utilisent beaucoup mieux, d'affronter des équipes qui peuvent être médiocres, mais qui restent des équipes. Et dont les entraîneurs ont un réel pouvoir sportif.
Les responsabilités de cet échec seront-elles enfin assumées, alors que le président est au cœur du pouvoir qatari, préside l'Association européenne des clubs, occupe une position de force auprès de l'UEFA et au sein de la Ligue 1, tout cela à quelques mois de la Coupe du monde au Qatar ? La justice suisse, qui a requis contre lui vingt-huit mois de prison dans l'affaire du « FIFAgate », le sanctionnera peut-être avant l'émir.
Ceux qui aujourd'hui vont tomber sur le club sans ménagement, et à raison, devraient toutefois repenser au mois d'août dernier, quand il était de rigueur de célébrer l'arrivée de Messi et cette équipe proclamée la "meilleure du monde" avant d'avoir disputé le moindre match. Sept mois plus tard, elle laisse l'impression de ne pas avoir disputé le moindre match.