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Le footballeur, le petit beurre et la politique

Les récentes suppressions d'emplois chez quelques-uns de leurs sponsors ont montré l'embarras des joueurs de foot, dont à la conscience politique est en général inversement proportionnelle à leurs revenus...
Auteur : Jamel Attal le 24 Avr 2001

 

Eloignons-nous un peu des terrains en revenant sur les positions de quelques-uns de nos footballeurs préférés à propos des licenciements massifs dans les entreprises et les marques dont ils sont les supports publicitaires (Lu et Danone principalement, grands consommateurs de champions du monde). Le sujet a suscité l'ouverture d'un débat sur le forum, autour de la responsabilité des joueurs. A l'exception notable de Thuram, force est de constater en effet que la plupart d'entre eux dégagent en touche et évitent les contradictions. Anelka pense que faire de la publicité fait partie intégrante de son métier, comme si elle était obligatoire ou allait totalement de soi. Lizarazu estime que c'est un problème "philosophique", ce qui montre à quel point les sportifs peuvent éloigner d'eux-mêmes toute considération politique. Il est vrai que rien dans leur parcours ne les a incités une conscience particulière dans ce domaine. Souvent privés de la prolongation de leur parcours scolaire et d'un contact avec des milieux professionnels "normaux", rapidement passés dans une tranche de revenu très au-dessus de la moyenne, ils ont les préoccupations de leur position sociale, la plupart du temps réduites à un discours assez désespérant sur le "trop d'impôt" ou à l'acquisition d'une certaine compétence en matière de placements financiers.


Mutisme politique
Au-delà, les stars du football ne se laissent guère solliciter, notamment pour figurer auprès des ténors de la politique (ce qui est plutôt une bonne chose), et les plus modestes se font parfois de discrets colistiers lors des élections municipales (Di Meco, Kastendeuch…). Mais on les attend moins sur le terrain de la politique traditionnelle que sur celui des grandes questions sociales, qui les laissent à peu près muets. Toutes les formes d'engagement humanitaires ou antiracistes sont encouragées, quelques préoccupations écologiques très générales sont parfois formulées et Manu Petit élucubre gentiment, mais la limite avec les sujets polémiques est sévèrement tracée.
En 1999, au moment où Robbie Fowler avait été lourdement sanctionné pour avoir exhibé un t-shirt de soutien aux dockers de Liverpool*, la Ligue nationale de football interdisait en France ce type d'expression, à l'exception des messages personnels pour saluer une naissance par exemple (d'ailleurs c'est fou ce que les footballeurs procréent — si tout le monde avait le même taux de natalité, nos retraites seraient largement payées).

Les exceptions restent donc très isolées. Ainsi, pour rester parmi les internationaux français, Christian Karembeu s'était exprimé en 1996 sur la situation des Kanaks et sa double identité, mais il avait été pris dans une polémique malveillante qui a semblé ensuite le dissuader. Youri Djorkaeff a clairement dit son sentiment quant à la reconnaissance du génocide arménien, Thuram et Lama avaient évoqué l'anniversaire de l'abolition de l'esclavage…

Top-models et hommes-sandwiches
Pour ce qui concerne de plus près les entreprises avec lesquelles il collabore par le biais de ses nombreux contrats de sponsoring et de publicité, le footballeur n'a finalement pas vocation à avoir plus d'autonomie critique qu'un homme-sandwich ou un top-model. Son salaire et sa notoriété assurent efficacement son adhésion au système, quand sa candeur ne s'en charge pas: on a vu récemment Thierry Henry formuler avec enthousiasme le lien d'amour qui l'unit à son équipementier. D'ailleurs, les journalistes sportifs ne s'étaient pas précipités pour interroger les sportifs lorsque les conditions de travail dans les usines de ces équipementiers dans le tiers-monde avaient été révélées… C'est une démarche délicate d'abord pour des médias qui doivent beaucoup à ces annonceurs, et encore plus pour des athlètes professionnels qui sont pour partie les salariés de ces mêmes sociétés.

Cette relation de dépendance envers un ordre du monde qui justifie leurs énormes revenus engage les joueurs à une adhésion plus ou moins consciente à cet ordre, même s'ils peinent à en assumer le côté très déplaisant lorsque leurs sponsors opèrent des licenciements impopulaires. Cela se traduit par un silence écrasant et une déresponsabilisation très nette: la probabilité n'est pas grande pour qu'un footballeur s'interroge sur sa collaboration avec des entreprises dont la gestion pose des problèmes moraux… ou politiques. Dommage, parce qu'en tant que personnalités incontournables de notre culture, ils auraient tout à fait le droit d'être un peu plus responsables de leurs choix et de devenir des acteurs un peu plus engagés. Et pas forcément aux côtés d'Alain Madelin.


Précision : la lecture de cet article a dû être pénible pour tous ceux qui se bercent de l'illusion que le sport et la politique (au sens large) n'ont rien à voir et qu'il faudrait donc les séparer totalement pour ne pas attenter à la virginité de notre sport préféré. Nos excuses.


* En grève depuis 1995. Suite au licenciement de cinq jeunes dockers qui avaient refusé d'effectuer des heures supplémentaires, près de 500 dockers se sont fait licencier pour s'être solidarisés avec eux. Ce mouvement a reçu un large soutien international et fait l'objet d'un film de Ken Loach (Les dockers de Liverpool, 1997).

Réactions

  • lyonnais le 25/04/2001 à 08h25
    L'article de Djamel est intéressant, mais pourquoi voudriez-vous que les footballeurs soient rebelles vis à vis du système qui en a fait ses rois (ou ses bouffons...) ? Dans le monde ou l'on vit, le bonheur est d'aller faire ses courses au supermarché avant d'aller voir "Les Visiteurs chez le gendarme de St-Tropez".
    Pourquoi voudriez-vous salir des rêves de Ferrari avec de la conscience sociale ?
    De même, lorsque je lis que untel regrette que les clubs français ne fassent pas d'effort pour faire revenir ses champions du monde, je me souviens d'un Kevin Keegan finissant sa carrière comme joueur
    de D2 à Newcastle...pour filer un coup de main...Alors, Blanc entraineur-joueur à Montpellier ou Dessailly capitaine du FC Nantes en Champions League ? Faut que j'arrête de rêver, moi...


  • myki le 25/04/2001 à 10h49
    El mallorquin,

    La star de foot est deja salarie de 10 multinationales, celles qui l'ont fait devenir star, avant de faire de la pub a la tele. faire une pub ou ne pas en faire ne change absoulument rien. c'est pour ca qu'il a terriblement raison anelka quand il parle de ne faire que son metier.

  • Boris Yips le 25/04/2001 à 14h19
    Je me berce dans l'illusion que le football n'a rien à voir avec la politique. Pour tous les gens très intelligents et avec une magnifique conscience sociale qui croient le contraire, je leur conseille de parler à des survivants de l'équipe Italienne des années 30 (qui devait faire le salut fasciste en rentrant sur la pelouse) ou à l'opposé de l'exploitation par la propagande des victoires des équioes de l'est dans les années 50-60. Au moins, avec un article comme celui-là, vous allez devenir copain avec Videla, ou feu Sani Abacha (le truculent feu président Nigérian). Quant à Di Meco, je rappelle qu'il a été inscrit sur une liste FN aux municipales à Antibes.

  • dorfmeister le 25/04/2001 à 14h41
    Ta réaction est un peu contradictoire Boris, puisque les exemples que tu cites montrent justement que l'on ne peut pas séparer le sport de la politique : preuve en est de ces régimes totalitaires qui l'ont utilisé à des fins de propagande.
    Aujourd'hui, ce n'est pas parce que ces régimes tendent à disparaître que le sport devient vierge de toute idéologie. Avoir une "conscience sociale", ce n'est pas regretter ces détournements de l'idéal sportif, c'est être conscient de l'imbrication du sport avec l'idéologie dominante d'aujourd'hui (nier cela, c'est être un peu "aliéné", non?). C'est aussi regretter que les sportifs sont si peu conscients et responsables vis-à-vis de leurs activités et de la société actuelle, même si il y a tout un tas de raisons pour l'expliquer. Je ne vois donc pas pourquoi nous n'aurions le choix qu'entre l'Argentine de Videla ou notre merveilleux système ultralibéral. Ce qui me frappe dans les arguments ce ceux qui préconisent une séparation totale entre sport et politique, c'est leur fatalisme ("c'est comme ça et c'est pas autrement"). Avoir une "conscience politique", cela implique l'idée que les choses peuvent changer, même dans un domaine aussi désespéré que le football. Et puis c'est un peu une question de lucidité et de dignité. Je suis peut-être encore plus que toi "bercé d'illusions", mais je préfère ces illusions-là.

  • osvaldopiazzolla le 25/04/2001 à 18h40
    Un peu d'histoire.
    c'est le 11 septembre 1973 que Salvador Allende s'est tiré une rafale de mitraillette dans la bouche, à l'intérieur de la Moneda, le palais présidentiel assiégé par l'armée putschiste de Augusto Pinochet. Quelques jours plus tard, l'URSS a refusé de jouer le match retour de barrage de coupe du monde 74 à santiago. La FIFA a donc disqualifié l'URSS et automatiquement qualifié le chili.

  • El mallorquin le 26/04/2001 à 00h11
    Merci pour ces précisions osvaldo... Particulièrement instructif.

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