L'équipe de Francis
Dans les années 80, Francis Lalanne incarnait "le jeune" sur tous les plateaux de télévision. Il était capable de piquer sur-le-champ des crises de rébellion adolescentes, voire de se laisser emporter par l'émotion dans un flot de vraies larmes en direct. Une sorte de pré-Patrick Bruel. Que diable fait-il dans les Cahiers du football? Il nous les brise menu, en fait, en tant que représentant de cette faune de "personnalités" qui traînent autour de l'équipe de France. Lors de France-Australie, on a pu ainsi le voir démarrer au quart de tour dans les tribunes, s'agitant comme un vrai supporter maquillé en apercevant la caméra de TF1 braquée sur lui. A l'instar d'un autre Francis (Huster), il fait partie de ces demi-célébrités qui profitent de celle de l'équipe de France pour grapiller quelques passages télé et venir jouer les authentiques fans de foot dans les émissions, où ils nous font subir en mots humides leur niaise passion. Ils avaient ainsi fait un come-back remarqué à l'occasion du Mondial 98, et voilà maintenant le chanteur à cuissardes qui copine avec nos internationaux. C'est pas énervant ça?

Mais pourquoi personne peut le blairer ?
La nouvelle est passée un peu inaperçue, mais les journalistes de France 2 ont voté une motion de défiance contre Charles Biétry, directeur des sports de France Télévision, en raison de ses choix "dispendieux" (Le Monde 25/05). En cause notamment, les 40 millions de francs consacrés aux droits d'une émission du lundi sur le championnat de France, alors que TF1 refuse d'en mettre plus de 55 pour celle du dimanche. Les rumeurs d'un départ courent sur les bords de Seine, où la popularité de l'omniscient patron n'a jamais été très grande. Biétry était au sommet lorsqu'il a quitté Canal+ pour le PSG, il y a trois ans pile. Le choc avec son seuil d'incompétence a été brutal.
L'avantage, c'est qu'on pourrait peut-être le retrouver sur les terrains, là où nous sommes persuadés qu'il n'a pas encore donné sa pleine mesure.

Livre d'or
Parenthèse. Il y a un monsieur qui a également voté une motion de défiance, contre les Cahiers du football cette fois, sous la forme d'un message reproduit ici en texte intégral et qui résume assez clairement tous les griefs que l'on peut légitimement nous faire:
"espece de site de pd allez vous faire enculé au lieu de critiquer tous les clubs tous les joueurs et tous les dirigeants. ça doit surement etre parce que vous n'avez reusi a travailler que pour un site de merde que vous etes aussi frustré et aussi con."
Dont acte.

Téléfoot (1977/2001)
Revenons dans la lucarne, la petite, pas celle dans laquelle s'engouffrent les tirs brossés. Le dossier "Téléfoot" n'avance pas et la France pourrait être privée de son institution dès la saison prochaine. TF1, après une offre à 75 millions de francs en 99, et une autre à 55 an début d'année, refuse de surenchérir. Le Graët ayant repris le dossier récemment, les réunions au sommet se sont multipliées, mais la chaîne de Patrick Le Lay n'a pas fait d'effort significatif (55 millions pour la saison prochaine puis 65 et 75 pour les deux suivantes) et la Ligue menace aujourd'hui de ne pas attribuer son magazine dominical. Il est vrai qu'accepter les conditions actuelles serait une véritable humiliation pour les dirigeants de la Ligue, qui avaient fait des droits télé leur principal cheval de bataille et comptaient glaner 150 millions de francs pour ce seul paquet. On imagine cependant assez mal que les amateurs ne disposant pas de Canal+ doivent attendre le lundi soir sur France 3 pour voir les résumés de la journée de championnat. Un tel calcul serait préjudiciable au championnat lui-même (à défaut de l'être à la qualité moyenne du journalisme sportif télévisuel).
Les déboires de la Ligue et la dévalorisation constante de notre championnat mettent en effet les télévisions en position de force. Celles-ci commencent à craindre les effets d'une l'inflation des droits exponentielle depuis quelques années qui fait peser de sérieux doutes quant à la rentabilité réelle du sport sur les ondes. Il est vrai que la folie qui s'est emparée des droits de la Coupe du monde —et qui voit Kirch racketter les chaînes publiques pour les éditions 2002 et 2006— donne un très mauvais exemple (voir La Coupe du monde en morceaux). A force de dénigrer un football national "affaibli par le poids de la fiscalité et par un système pas assez élitiste", nos dirigeants ont réussi à dévaluer leur produit bien plus efficacement que ces causes supposées.
Notre offre de reprendre Téléfoot pour le franc symbolique tient donc toujours, elle acquiert même une crédibilité nouvelle. Ou presque.

Téléfoot, c'était mieux avant
Créée en 1977 par Pierre Cangioni, l'émission avait marqué un premier pas, timide mais décisif, dans la diffusion des images de football à la télévision. Auparavant, c'était la cécité presque totale pour les amateurs, en dehors de rares épopées européennes et des finales de Coupe de France. Voir les buts du championnat, c'était déjà le nirvana. Bien avant d'accueillir les fabuleuses trajectoires de Didier Roustan ou Pascal Praud, Téléfoot, qui était diffusé le samedi soir (comme Jour de Foot aujourd'hui), était vite devenu une institution dans les foyers français. Il fallait prier pour s'attirer la bonne grâce des faisceaux satellite et des magnétoscopes, mais l'excitation était à son comble. Un document archéologique en témoignera auprès des moins de 25 ans, il s'agit d'une chanson de Renaud (un chanteur à foulard très populaire dans ces années-là) qui recrée à la fois l'atmosphère de l'époque et celle de ses programmes télévisés.

DOCUMENT
Renaud : "J'ai raté Téléfoot", album Le retour de Gérard Lambert, 1981.

Ca f'sait douze bières que j'menfilais
Faut dire qu'on était samedi soir
J'étais tranquillement écroulé
D'vant la télé sur mon plumard
Y'avait Jean Pierre El Kavada
Qui m'racontait l'Afghanistan
Et la Pologne et le Liban
Le Salvador y connaît pas
L'information pour ces mecs-là
C'est d'effrayer l'prolo, l'bourgeois
A coups d'chars russes d'Ayatollahs
Demain faites gaffe y va faire froid
Et à part ça, eh bien ça va
S'y s'passe quelque chose on vous l'dira

V'là ma gonzesse qu'entre dans ma piaule
Qui m'dit qu'est-c'tu fais planté là
T'en as pas marre de ces marioles
T'en a pas marre d'leurs tronches de rats
J'lui réponds j'en ai rien à foutre
Mais j'veux pas rater Téléfoot

Cette soirée s'annonçait super
J'me suis enfilé une bibine
Pour l'Numéro Un Mick Jagger
Avec Dylan et Bruce Springsteen
J'avais pas bien lu manque de bol
C'est l'Numéro Un Bécassine
Avec une turluttte à Guignol
Une main au cul à Colombine
Si ça fait marrer vos lardons
Moi ça m'a carrément gonflé
S'en est fallu d'peu nom de nom
Qu'j'balance ma bière dans la télé
Mais vaut mieux rire de ces crevures
Que d'gaspiller d'la nourriture

V'là ma gonzesse qu'entre dans ma piaule
Qui m'dit qu'est-c'tu fais planté là
T'en as pas marre de ces mariole
T'en as pas marre d'leurs tronches de rats
J'lui réponds j'en ai rien à foutre
Mais j'veux pas rater Téléfoot

Après j'me suis r'gardé Dallas
Ce feuilleton pourri dégueulasse
Ça fait frémir le populo
De voir tous ces enfants d'salauds
Faire l'apologie du pognon De l'ordurerie et de la crasse
Y nous prennent vraiment pour des cons

Eh maint'nant qu'on est socialistes
Fini les feuilletons américains
On veut des feuilletons soviétiques
Et même des belges y'en a des biens
Y'en a un c'est l'histoire d'une frite
Qu'est amoureuse d'un communiste

V'là ma gonzesse qu'entre dans ma piaule
Qui m'dit qu'est-c'tu fais planté là
T'en as pas marre de ces mariole
T'en a pas marre d'leurs tronches de rats
L'lui réponds j'en ai rien à foutre
Mais j'veux pas rater Téléfoot

Alors elle m'dit au lieu d't'aliéner
Avec cette télé à la con
T'entends pas qu'ta gosse s'est réveillée
Va lui faire chauffer son biberon
Pi si c'est pas trop te d'mander
Faudra qu'tu changes la caisse du chat
Grouille-toi sinon tu vas rater
Pierre Cangioni et Stopyra
En arrivant dans la cuisine
J'me suis dit tiens un p'tit Ricard
Mais après mes quatorzes bibines
J'étais un p'tit peu dans l'coltard
J'ai bu un grand verre de Blédine
J'me suis vautré dans la caisse du chat
Et dans le biberon de ma gamine
J'ai mis d'la sciure et du Pastaga

La moralité d'cette chanson
Elle est super ah ouais je veux
C'est qu'la télé c'est très dangereux
Et le football aussi un peu