Le guide de survie du supporter rennais
La vie n'étant pas simple pour l'amoureux du SRFC, nous mettons à sa disposition sept techniques de résistance à un destin toujours aussi contrariant, saison après saison.
Chers collègues supporters rennais. Cette année, comme tous les ans, vous allez en baver. Vous y croirez, vous stresserez chaque samedi, vous apercevrez bien un ou deux rayons de soleil, mais, à la fin de la saison, vous ne serez que tristesse, amertume et désillusion. Puisque vous le savez déjà, faites de ce non-suspens une opportunité avec les meilleures techniques du guide de survie du supporter rennais ci-dessous, fruit d’une observation minutieuse du comportement de ces étranges passionnés sur les vingt dernières années. Vous pouvez vous y plonger chaque lendemain difficile, ou à tout moment dès que nécessaire, pour trouver la parade la plus adaptée à vos déceptions quotidiennes.
1. Relativiser : "On a connu bien pire"
La technique
Toujours regarder dans le rétroviseur pour positiver. En effet il fût un temps, il n’y a pas si longtemps, où la situation était pire. Le club évoluait à la frontière de la L1 et de la L2 (ou plutôt de la D1 et de la D2) sans réussir à s’installer durablement dans l’un ni dans l’autre. Voilà vingt ans qu’a eu lieu la dernière remontée, et voilà un bon paquet d’années qu’on ne s’est pas fait une vraie frayeur de redescente. Alors oui, c’est sûr, on a connu bien pire.
Les spécialistes
Traditionnellement les anciens, les historiens, les vrais connaisseurs et ceux qui savent combien le football, c’était mieux avant.
L’avantage
Dans le rétroviseur on voit aussi les supporters en carton.
L’inconvénient
Dans le rétroviseur, on voit aussi des trophées.
La variante
"On connaîtra pire", pour les pessimistes invétérés et autres prophètes de l’apocalypse.
2. Retourner le stigmate : "La légende de la lose"
La technique
Comme toutes les communautés qui souffrent au point de dévaloriser le regard porté sur elles-mêmes, les supporters rennais peuvent être tentés de se détourner de leur identité pour des identités de substitution. Au contraire, une technique classique consiste à faire de cet honneur blessé une force en retournant le stigmate, en faisant du déshonneur un marqueur de fierté. Rennes, capitale mondiale de la lose, ça claque, non? Comme son slogan "Rennes, pres que un club", d'ailleurs.
Les spécialistes
Les footix, les faux indifférents et les supporters en désintox.
L’avantage
Rennes pourrait devenir le porte-drapeau d’un pays déprimé.
L’inconvénient
Une Coupe de la Ligue nous pend au nez.
La variante
Une marche des fiertés de losers pourrait être organisée avec les supporters de l’AS Montferrand en rugby, ceux des Pays-Bas et les derniers fans de Poulidor.
3. Se recentrer sur l’essentiel : "On a bien rigolé, on a bien picolé"
La technique
Pourquoi est-on supporter de foot si ce n’est d’abord pour avoir un prétexte à un divertissement qui associe sa famille, ses amis, ses voisins autour d’une même passion? Au final que retient on des défaites en finale ou des non-qualifications en Ligue des champions: de bonnes rigolades, une dizaine de verres de trop, des grillades et du doliprane. Et si c’était ça la vraie vie de supporter (ou le simple plaisir de retourner au stade)?
Les spécialistes
Tous ceux que l’introduction de la Buckler Route de Lorient a révoltés.
L’avantage
Facilite la mémoire sélective.
L’inconvénient
Ne marche plus si vous aviez prévu de jouer vous-même un petit match le lendemain.
La variante
Consiste à se recentrer sur l’essentiel même quand il n’y a pas match, ou à participer à la Ligue des Cahiers du football.
4. Et que fait le FC Nantes pendant ce temps-là ? Pire
La technique
Le club de foot de votre cœur s’exprime-t-il en valeur absolue ou en valeur relative? La question se pose vraiment du fait de l’obsession, probablement très intéressante sur le plan psychiatrique, que les supporters rennais entretiennent pour les performances de leurs voisins nantais. Et cela tombe bien, depuis l’arrivée de Lord Waldemar, les sept plaies d’Egypte semblent s’abattre sur les Canaris. La dernière en date? Ils sont interdits de recruter après le transfert irrégulier de Bangoura. On n’aurait pas rêvé blague plus cruelle.
Les spécialistes
Les revanchards, les Rennais de Nantes et les Nantais de Rennes.
L’avantage
Une victoire à la Beaujoire et on oublie tout le reste.
L’inconvénient
Une défaite à domicile et tout empire.
La variante
Et que fait Guing… Non. Et que fait Lor… Non plus. Et que fait Laval pendant ce temps-là?
5. Le rennais est voyageur : "On est partout chez nous"
La technique
Consiste à considérer le Stade rennais comme une sorte société secrète à visée prosélyte s’infiltrant dans la plupart des clubs professionnels ou amateurs via le transfert de ses joueurs. Ainsi, quand Guingamp nous bat en 2014, c’est normal: Gourvennec, d’où vient-il? Comme par hasard. Le PSG champion de France? Un jour, on révèlera le poids décisif de Nicolas Douchez dans le groupe.
Les spécialistes
Les football-addicts, les bouffeurs multi-rateliers, les nostalgiques.
L’avantage
Il y a forcément un Rennais qui a gagné ce week-end.
L’inconvénient
L’équipe avec le plus de Rennais reste toujours Rennes.
La variante
Il y a d’autres winners rennais sur lesquels s’appuyer, Pascal Obispo par exemple.
6. Jeter le bébé avec l’eau du bain : "Une bonne purge et on repart de zéro"
La technique
Il s’agit là d’un truc mental qui permet de faire le vide en soi afin de repartir sur de meilleures bases. Un 0-0 contre une bonne équipe? On siffle copieusement. Une défaite? On demande six titulaires sur le banc. Quatre défaites? On demande la tête l’entraîneur. Huit défaites? On demande la tête du président. Pratique, car finalement cathartique et déresponsabilisant, mais à utiliser avec modération: mutatis mutandis, à la fin on prend (presque) toujours les mêmes, et on recommence.
Les spécialistes
Les jeunes grincheux, les vieux grincheux, les grincheux de tous les pays.
Avantage
Se prête très bien à la critique systématique et virulente en particulier anonymement sur les réseaux sociaux ou les forums de supporters.
Inconvénient
À la longue, on se demande bien pourquoi on va toujours au stade.
La variante
Multiples possibilités parmi lesquelles la critique nihiliste ("De toute façon je préfère le rugby, ça c’est un vrai sport"), régionaliste ("Combien y a-t-il de joueurs bretons? Et l’amour du maillot alors?") ou gauchisante ("Les salaires des joueurs, on en parle?"), les trois pouvant être cumulées aisément.
7. Positiver : "On est au début d’une nouvelle ère, l’année prochaine ce sera la bonne"
La technique
Consiste à croire en des lendemains qui chantent, peuplés de titres, de stars et de stade en folie. Voir dans la vie du club, l’entraîneur de talent, l’actionnaire milliardaire, le centre de formation performant et les installations remarquables le socle d’un futur forcément joyeux.
Les spécialistes
Nous tous, forcément, un peu.
Avantage
Statistiquement, c’est certain, ça viendra.
Inconvénient
Répétée dans le temps, cette technique peut devenir psychologiquement usante.
La variante
Soyons stoïques, et aspirons à ce que l’on a déjà, c’est la voie la plus courte vers le bonheur, "Maintenant on va jusqu’en en finale, c’est déjà pas mal, non?"