La Gazette, numéro 17
Paris-Marseille, axe chiant
Il ne nous revient pas de porter des jugements de valeur sur les réactions à nos articles, mais ces derniers temps elles ont eu une fâcheuse tendance à dégénérer en pénibles et sempiternelles controverses entre "pro-PSG" et "pro-OM", y compris quand les sujets abordés n'avaient rien à voir avec la rivalité entre ces deux clubs. Les échanges sont restés courtois, ce qui est déjà une victoire, mais les protagonistes de cette guérilla devraient se rendre compte qu'ils fatiguent tous ceux qui la subissent depuis trop longtemps.
Les "débats" relancent toujours les mêmes discussions stériles sur un passé qu'il ne faut pas oublier (mais pas non plus mélanger au présent) ne suscitent que des comparatifs du type "qui pisse le plus loin?", des accusations gratuites et des protestations foireuses.
Notre inquiétude vient de ce que de nombreux forums abondent déjà de pénibles et dispensables polémiques que nous leur abandonnerions volontiers... D'excellentes contributions se trouvent un peu noyées, d'autres vraisemblablement découragées et c'est un peu dommage.
Il doit être possible de parler de l'OM ou du PSG sans rapporter toujours l'un à l'autre, les deux sujets devraient d'ailleurs être toujours soigneusement séparés. Ce sont effectivement deux clubs passionnants, et ils concentrent l'attention ici comme ailleurs. Lorsque l'un d'eux connaît des difficultés, il semble à ses supporters qu'il est plus violemment descendu que tout autre. Mais comme l'OM et le PSG nous ont chacun gratifiés de déboires allant du ridicule au pathétique, de périodes désastreuses et de comédies diverses, on a pu constater qu'en fait les médias s'acharnent avec aussi peu de scrupules sur l'un et l'autre. Pour notre part, nous regrettons que les Cahiers n'aient pas été en ligne lors de la saison 98/99: le PSG de Biétry nous aurait ainsi fourni plus de matière pour ricaner que celui de cette saison...
Cette invitation à entreprendre une thérapie anti-obsessionnelle est valable dès cette Gazette un peu provocante, qui parle forcément de Marseille!
Tapie toujours prêt (à rien)
Marseille ne fait pas peur à tout le monde. Daniel Leclerq s'est presque porté candidat, il est en effet assez fou pour tenter l'aventure dès demain. Mais surtout, et l'on se serait étonné d'un plus long silence, c'est le fantôme Bernard Tapie qui fait son offre de service. Pas n'importe où, puisque c'est dans un entretien accordé à La Provence qu'il répond aux appels pressants de certains supporters du Vélodrome.
Il précise les deux hypothèses de son éventuel retour à l'OM. La première est celle où "j'ai les moyens financiers, seul ou avec des partenaires, et je reviens à l'OM à 100% comme patron". Elle est évidemment nulle et non avenue: Tapie se retrouve aujourd'hui sur le sable, celui sur lequel son empire était construit. Économiquement il est redevenu un nain, et n'a pas grand espoir de rassembler un tour de table sur son nom. Il le sait bien, et enrage certainement du mépris dans lequel le tient Louis-Dreyfus, qui ricane à l'évocation de son prédécesseur. Tapie refuse donc l'hypothèse de devenir manager sportif, ce qui l'obligerait à être "l'employé de RLD". Reste le rôle de consultant auquel il pourrait encore prétendre: la seconde solution est que "Robert Louis-Dreyfus m'appelle pour me demander quelques tuyaux afin qu'on arrête de se moquer de sa gueule". En clair, l'actionnaire majoritaire est une buse, et moi je détiens toujours la science.
Difficile de ne pas prêter à Tapie le désir de renouer avec le club dont il s'est servi pour arriver au sommet de sa gloire médiatique. De son come-back dans le football, il avait déjà été question en juin dernier, avec de semblables propositions en direction de l'OM (voir Tapie: bluff et démagogie sur toute la ligne). Mais tant que Louis-Dreyfus est en place, il sait qu'il n'a aucune chance. Et si Louis-Dreyfus s'en va, il sait qu'il n'a presque aucune chance.
Y a-t-il un président dans la Ligue?
Quatre après son élection surprise à la tête de la Ligue nationale, il est impossible de faire le moindre bilan de la présidence de Gérard Bourgoin. Si nous n'en attendions rien de bon (voir Bourgoin face au vent, toutes voiles dehors), nous ne nous attendions pas non plus à un tel statu quo. Car la seule véritable mesure a consisté à créer un "bureau" élargi, sorte de gouvernement créé par les instigateurs de l'éviction de Le Graët, un nouvel exécutif (Martel, Campora, Aulas, Bompard, Triaud, Talar et Proisy) qui donne les clés du pouvoir aux présidents de club du "clan Aulas" La Ligue aux mains des gros et des ambitieux).
Il faut rappeler que la faction qui a renversé l'ancien président n'a paradoxalement pas réussi à imposer son candidat, l'avocat André Soulier. Bourgoin n'était même pas un second choix, il est arrivé par la grâce de coups fourrés électoraux qui ont pris les Aulassiens à contre-pied. Personnage moins contrôlable et un peu mégalo qui a affiché son indépendance après le scrutin, il se retrouve dans une position inconfortable car il doit quand même son élection aux "putschistes" qui attendent désormais de lui qu'il applique leur programme.
Après des déclarations d'intention sur la nécessaire solidarité entre les clubs et celle de moderniser le football français (c'est-à-dire de mener une politique impliquant notamment de rendre aux clubs la propriété des droits télé), l'annonce de la rédaction d'un "livre blanc" à remettre au gouvernement... en septembre (!), on ne vit plus rien venir... Entre-temps, le séisme déclenché par la Commission européenne autour des transferts a fait surgir de nouvelles urgences, mais on ne peut pas dire que la Ligue se soit vraiment mise en avant dans la recherche de solutions dans ce dossier. Les dirigeants ont mené leurs démarches sans solliciter beaucoup l'instance nationale.
De son côté, le nouveau président connaît de graves déboires avec son empire industriel. Le groupe Bourgoin, présidé depuis six an par sa fille, a en effet déposé le bilan et est placé sous administration judiciaire. Ruiné, comme il le reconnaît lui-même, Bourgoin pourrait tomber sous le coup de procédures pénales relatives à sa gestion aventureuse. Dès lors, il sera question de sa démission prématurée, surtout si certains profitent des circonstances pour imposer un remaniement conforme à leurs intérêts. Mais après la crise politique de juin et juillet dernier, le foot français pourra-t-il assumer de nouvelles grandes manœuvres de couloir?
Et tant qu'à parler de retours dans cette Gazette, pourquoi ne pas évoquer celui de Noël Le Graët? Après avoir mûrement réfléchi et avoir réalisé qu'il fallait un vrai et solide politique à la tête de la Ligue, les clubs professionnels pourrait bien faire basculer la fragile majorité actuelle du côté du Guingampais, si celui-ci s'avisait de prendre une revanche précoce...
PS: il y a quelques jours, lors d'un séjour à Cuba (où il entretient de bonnes relations avec Fidel Castro et a encore quelques intérêts), la dernière lubie de Gérard Bourgoin a consisté à remettre aux médaillés olympiques cubains... une médaille, au nom de la Ligue nationale de football !