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Eusébio 1962, naissance d'une légende

L'homme Eusébio da Silva Ferreira s'est éteint le 5 janvier dernier, à l'âge de 71 ans. Le footballeur mythique, lui, est né au début des années 60, au sein du grand Benfica Lisbonne double champion d'Europe.

Auteur : Christophe Zemmour le 6 Jan 2014

 


"Qui est ce garçon?" La question est posée par Pelé à Mário Coluna à la fin du match du Tournoi International de Paris entre le Santos Futebol Clube et le Benfica Lisbonne, le 15 juin 1961. Et elle concerne un jeune attaquant portugais de dix-neuf ans qui vient d’inscrire un hat-trick en seconde période, remplaçant à la pause Santana et évitant aux siens une déroute plus lourde que le 3-6 final (0-4 à la mi-temps). Quinze jours plus tôt, alors que les Aigles devenaient les premiers successeurs du Real Madrid au palmarès de la C1 contre le FC Barcelone (victoire 3-2), ce joueur dénommé Eusébio da Silva Ferreira faisait ses débuts avec le club lisboète en huitièmes de finale retour de la Coupe du Portugal, la fédération ayant refusé de reporter le match. Face au Vitória Setúbal, il inscrit un but et manque un penalty. Le tir est détourné par Félix Mourinho, le père d’un certain José.
 

 

Eusebio
 


Dans son club de cœur

Les débuts d’Eusébio, qui a tout du phénomène, sont fracassants. Explosivité, adresse, technique de dribble et de tir, sang-froid, il n’est pas sans rappeler un autre attaquant plus contemporain, lui aussi lusophone: Ronaldo. Après le tournoi de Paris, il devient évident qu’une place de titulaire doit lui revenir, et c’est justement Santana qui en fait les frais. La saison 1961/62 est donc sa première en pro et va se terminer en apothéose, avec le sacre du 2 mai à Amsterdam face au Real Madrid (5-3) et le doublé victorieux des 65e et 68e minutes. Un couronnement collectif et individuel précoce avec son club de famille, le Benfica Lisbonne, qu’il lui fut pourtant difficile d’intégrer.
 

Né au Mozambique, à Lourenço Marques, Eusébio, alors membre des Os Brasileiros, tente tout d’abord d’emprunter la voie du Grupo Desportivo, affilié au Benfica. Il espère pouvoir ainsi rejoindre les rangs de la formation lisboète, mais ses deux essais sont des échecs. Ses dirigeants se tournent alors vers le Sporting Clube de Lourenço de Marques, jumelé lui avec les rivaux du Sporting Portugal. Le club est immédiatement conquis, mais Eusébio est hésitant à le rejoindre. Selon lui, le Sporting “appartenait à l’élite et à la police; ils n’aimaient pas les Noirs.” Finalement, il dépasse ces considérations et fait éclater ses qualités, jouant surclassé en U-19 et chez les seniors.
 

Il est repéré lors d’une tournée de Ferroviária de Araraquara à Lourenço Marques par José Carlos Bauer, ancien joueur de Béla Guttmann [1], alors entraîneur du Benfica. Les deux hommes se rencontrent ensuite chez un barbier de Lisbonne, et le premier recommande Eusébio au second. Les dirigeants benfiquistes parviennent à un accord avec la mère du joueur, Dona Elisa, laquelle signe un contrat stipulant que son fils ne peut jouer que pour le Benfica, club de cœur de son défunt mari [2]. Le Sporting tentera bien par des voies administratives d’empêcher Eusébio de rejoindre les rangs rivaux, mais le jeune attaquant s’engage en faveur des Aigles pour 400.000 escudos.
 


La consécration d'Amsterdam

Il arrive au Portugal en décembre 1960, ne pouvant prendre part à la finale de la C1 face au Barça, l’UEFA interdisant de faire évoluer les joueurs n’ayant pas été inscrits au moins trois mois plus tôt. Qu’importe, Guttmann l’emmène dans ses bagages lors des matches à l’extérieur à Aarhus et à Vienne. La jeune pousse s’acclimate à l’atmosphère de la compétition européenne, en attendant de prouver un talent qui excita son coach lors de sa première séance d’entraînement. Ce jour-là, Guttmann crie “De l’or! De l’or!” à son assistant Fernando Caiado, tandis que Germano dit à ses coéquipiers attaquants: “Pour moi, ça va, je suis défenseur. Mais vous les gars, soyez prêts parce qu’il y en a un qui va devoir laisser sa place.”
 

La route vers la finale de la C1 du Benfica, tenant du titre, est plutôt tranquille jusqu’à la demi-finale retour à White Hart Lane, où les Rouges parviennent malgré la pression à préserver le but d’avance, après le penalty de la 54e minute converti par Danny Blanchflower pour les Spurs (3-1; 1-2). Lors du premier tour, l’Austria Vienne est balayé (1-1; 5-1) et en quarts retour, le FC Nuremberg, vainqueur 3-1 à l’aller, explose (6-0) dans l’Inferno da Luz déchaîné par 70.000 fans – qui firent dire au capitaine de l’équipe allemande, Max Morlock, qu’on ne pouvait y jouer “qu’avec des cotons dans les oreilles”. Eusébio est l’auteur de quatre buts lors de ces matches préalables à la finale d’Amsterdam.
 

Le Real Madrid mène 3-2 à la pause grâce à un triplé de Ferenc Puskás, sous les yeux d’un ramasseur de ballons de quinze ans nommé Johan Cruyff. Coluna, d’une magnifique frappe croisée aux vingt mètres, égalise à la 51e. Quatorze minutes plus tard, Eusébio reçoit le ballon côté droit, dans sa moitié de terrain. Il fait face à son idole, Alfredo di Stéfano, et le provoque. L’attaquant benfiquiste prend de vitesse son adversaire, gagne du terrain par l’aile et pénètre dans la surface madrilène. Il heurte alors Pachín et l’arbitre Leo Horn siffle penalty. Furieux parce qu’il juge qu'Eusébio a plongé, José Santamaría va voir l’attaquant et le traite de “maricón”. Coluna dit alors à son coéquipier incrédule: “Prends le péno et appelle-le ‘cabrón’.”

 


 

 

Après une longue course d’élan, Eusébio croise son tir du plat du pied et bat José Araquistáin. Di Stéfano le sent, les Madrilènes sont “foutus”. Il faut trois minutes à la “perle noire” pour sceller le score, sur un coup franc indirect à l’entrée de la surface de réparation. Décalé par Coluna, Eusébio frappe fort du droit et trouve encore le petit filet du gardien merengue. L’avant-centre vient d’offrir un second sacre consécutif à son club et, surtout, d’entrer dans la cour des grands. Les images de son échange de maillots avec Di Stéfano à la fin du match, et de son poing levé alors que la relique sacrée est bien calée dans son short, sont immortelles. Tout comme l’héritage footballistique de ce joueur devenu une légende ce soir-là, et tout simplement l’un des meilleurs attaquants de tous les temps.
 


[1] Luis Catarino consacre à l’ascension du Benfica Lisbonne de Guttmann un article intitulé “The Flight of the Eagles” dans le numéro 6 de The Blizzard, et dont la plupart des anecdotes du présent article sont issues.
[2] Le père d’Eusébio est décédé des suites du tétanos, alors que ce dernier n’avait que huit ans.

 

 

Réactions

  • Raspou le 06/01/2014 à 13h23
    Je rejoins absolument sansai sur la comparaison avec Weah, avec une frappe de balle encore meilleure. Et sur cette impression, en regardant les vidéos de l'époque, qu'un attaquant "moderne" des années 90-2000 a été ramené dans les années 60.

    Il est mort à l'hôpital da Luz, à quelques centaines de mètres du stade du Benfica portant le même nom. Les deux loutres mascottes de l'aquarium de Lisbonne s'appelaient Amalia et Eusebio, c'est dire à quel niveau il était dans la conscience collective portugaise: l'un des symboles du pays avec Vasco de Gama (et Pessoa pour les intellos). Je comprends donc ta remarque, supp', mais ça n'a rien à voir avec Salif Keita, qui doit être connu par 0,5% de la population française.

  • suppdebastille le 06/01/2014 à 13h26

    "Raspou

    aujourd'hui à 13h23
    Je comprends donc ta remarque, supp', mais ça n'a rien à voir avec Salif Keita, qui doit être connu par 0,5% de la population française."

    Cà serait pas un peu lié à la différence de culture foot entre les 2 pays?
    Je doute qu'il y ait une telle émotion en France quand Kopa ou Fontaine vont s'éteindre.

  • visant le 06/01/2014 à 15h34
    Raspou
    aujourd'hui à 13h23

    "c'est dire à quel niveau il était dans la conscience collective portugaise: l'un des symboles du pays avec Vasco de Gama (et Pessoa pour les intellos)."

    Aussi grand joueur qu'il fut c'est assez regrettable (à mes yeux) qu'un footballeur occupe une place aussi importante.
    Trois jours de deuil national (!!) pour Eusebio. Les trois F de Salazar sont tenaces...

  • Tonton Danijel le 06/01/2014 à 17h01
    suppdebastille
    aujourd'hui à 13h26

    Peut-être pas pour Kopa ou Fontaine, qui ont évolué à une période où le foot était confidentiel. Par contre, le jour où Platini et surtout Zidane décèderont, l'émotion sera plus importante.

  • Charterhouse11 le 06/01/2014 à 17h51
    Très chouette papier, merci.

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