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Et l'affaire Carnus-Bosquier éclata

Il fut un temps où les transferts, quasiment impensables, faisaient scandale. En mai 1971, l’ASSE est proche d’empocher son cinquième titre d’affilée, mais la presse annonce le départ de deux éléments majeurs...
Auteur : Grégory Charbonnier le 10 Nov 2009

 

Ce match contre Bordeaux n’aurait dû être qu’une étape vers un cinquième titre. Au pire, une occasion manquée. Il marqua, plus que la défaite, la perte du titre et la fin du premier âge d’or stéphanois. Il n’y avait pourtant pas le feu au lac. L’ASSE mène le championnat de France, comme d’habitude depuis 1967. Carnus, Bosquier, Herbin, Keita, Bereta, Revelli sont les maîtres de la France. Certes, ils sont revenus bredouilles de Strasbourg (0-1) mais les champions ont de l’orgueil et le 4 mai, Metz paye l’addition: 6-0 à Geoffroy-Guichard. L’attaque est prolifique et la défense solide. Mais trois membres de la ligne arrière sont en fin de contrat: Wladimir Durkovic, Bernard Bosquier et le gardien de but Georges Carnus. Les bruits circulent et Bosquier s’explique dans la presse: "On dit que j’ai 90 chances sur 100 d’aller à Marseille, 90 de devenir Parisien et 90 d’aller à Rennes. Cela fait beaucoup de chances. J’ai des propositions, c’est vrai. Mais pour l’instant, je suis Stéphanois et j’ai quelques devoirs envers le public". De son côté, Roger Rocher, en bon entrepreneur, préfère prévenir: "Nous allons jouer tous nos matches de la saison comme celui-ci [NDLR: celui de Metz]. C’est un contrat que nous avons passé avec les joueurs: pas de traînard". C’est vrai, contre Metz, les Verts ont répondu présent, appliquant à merveille le jeu tout en mouvement préconisé par Albert Batteux.


Une fuite dans les journaux…
Bordeaux vient de se sauver de la relégation et a donc l’esprit libre. L’esprit libre mais les cuisses dures: les Girondins viennent de jouer en Coupe de France. Les Bordelais, tout le monde les connaît, jouent depuis des années le béton. Le robuste et rugueux arrière-verrouilleur Desremeaux illustre cet état d’esprit et cette conception du jeu venu d’Italie. La défense est expérimentée avec les Papin, Dubouil et compagnie. Keita trouvera Grabowski sur son passage, à lui de jouer sur sa vitesse. Devant, Ruiter a déjà causé des soucis aux Verts. Méfiance, donc.

Pendant ce temps, Marseille se déplace à Lyon... Non le principal souci stéphanois ne se nomme pas Bordeaux. Dans la semaine, les bruits enflent. Gérard Simonian s’en fait l’écho, avec raison, dans La Tribune-Le Progrès du 6 mai: "Razzia spectaculaire sur l’AS Saint-Étienne. Carnus (certain), Bosquier (probable) à Marseille la saison prochaine" La bombe est lâchée. En plein championnat, on apprend que certains joueurs rejoindront l’ennemi la saison suivante. Carnus se défend mais ne dément pas: "J’ai choisi dès que Marseille s’est mis sur les rangs. Les propositions de M. Rocher étaient très acceptables mais j’avais l’occasion de me rapprocher de ma famille avec les mêmes avantages". Vis-à-vis du public, "je peux prendre un but idiot mais je fais confiance à l’intelligence d’un public composé en majorité d’anciens footballeurs. Il doit savoir que ça arrive".

carnus_bosquier_1b.jpg

Le contrat à temps et son apprentissage
L’origine de l’événement? Le contrat à temps. Le championnat de football professionnel est refondu au sortir de la Seconde guerre mondiale. En signant son contrat, le joueur s’engage dans un club jusqu’à l’âge de trente-cinq ans, c’est-à-dire jusqu’à la fin de sa carrière. On a donc appelé ce type d’engagement "contrat à vie". En effet, le joueur ne peut pas quitter son club sans l’accord du président. Kopa prend la tête d’une fronde contre le contrat à vie en 1963, se comparant à un esclave. Ce contrat reste en vigueur jusqu’en 1969, date à laquelle il est remplacé par le contrat à temps, pour une durée probatoire: c’est un CDD. Au début de la saison 1972-1973, les présidents de club décideront unilatéralement de revenir à ce "contrat à vie", provoquant une grève des footballeurs en décembre 1972.

Saint-Étienne essuie les plâtres du nouveau dispositif: en 1971, les premiers contrats à temps arrivent à expiration et Rocher n’a pas son mot à dire: les présidents proposent, les joueurs choisissent. Carnus en bénéficie et se justifie: "C’est une bonne chose et c’est normal. Dans les autres secteurs, un cadre peut choisir son entreprise selon le salaire proposé et ses propres affinités". Le public n’est peut-être pas du même avis, tout comme le président Rocher qui semble apprendre la nouvelle par la presse: "Je souhaite garder ces deux joueurs. J’enregistre simplement la manière qui n’est pas très élégante sur le plan sportif. Que va-t-on dire si Bosquier fait une faute et si Carnus encaisse un but stupide? Décidément, ce contrat à temps comporte beaucoup de défauts". Saint-Étienne bruisse de rumeurs, la polémique attend une déconvenue pour s’installer.


La colonne vertébrale défensive
Bernard Bosquier est le premier arrivé dans le Forez, en 1966 de Sochaux. C’est un gars du sud, un peu grande gueule, qui débute à Alès en 1959. Parti dans le Doubs en 1961, cette valeur sûre nationale tape dans l’œil de Rocher et Snella. Pour le plus grand bien des deux partis: il est sacré "footballeur de l’année" en 1967 et titulaire en équipe de France. Défenseur central solide, il ne répugne pas à passer la ligne médiane pour prêter main-forte aux avants.

Carnus, de son côté, méridional comme son collègue, est un discret, un taiseux. Recruté en 1967 en provenance du Stade français, il succède à Pierre Bernard. Dur challenge que le portier international réussit sans trop de mal. Son boulot change mais ne devient pas plus facile: il ne négocie que deux ou trois ballons chauds par match, bien protégé par une défense de haut niveau. En revanche, Carnus ne doit pas se louper. Le bilan des deux hommes est parfait: champions à chaque exercice. L’annonce de leur départ tombe mal, les deux hommes doivent assurer.


carnus_bosquier_2.jpgJusque-là tout va bien
Le public va regarder attentivement les deux hommes. Batteux leur demande de ne pas en faire trop. Bordeaux n’est pas une montagne quand même. Le match débute sur un faux rythme, bien aidé par des visiteurs sur la défensive. À défaut de buts, le jeu prend le pas sur "l’affaire". Le public s’assoupit jusqu’à la demi-heure de jeu. Là, Herbin envoie le ballon vers Keita qui reprend puissamment. Rigoni ne peut que détourner sur sa ligne, Herbin semble retenir Jensen et Keita, reprend violemment dans sa course et marque le premier but de la rencontre. 1-0 pour l’ASSE. Les Verts se sont réveillés et gardent l’emprise sur la rencontre.

Au milieu, José Broissart accélère le jeu, change le rythme à bon escient. Devant, Revelli redevient dangereux et le jeu agréable. Saint-Étienne va faire le break quelques minutes plus tard par Bereta – 1m66 – qui devance RIgoni: ASSE 2-Bordeaux 0. Bordeaux réduit le score à trois minutes de la mi-temps. À la conclusion d’une action Giresse-Papin, Ruiter profite d’une sortie manquée… de Carnus, visiblement gêné et chahuté sur l’action. L’arbitre siffle la pause, Gérard, l’entraîneur bordelais est furieux contre l’homme en noir notamment sur le premier but stéphanois. La reprise est calme, seul Revelli se signale par deux reprises acrobatiques et imprécises. Bordeaux domine quand Broissard baisse de pied et se met au niveau de ses coéquipiers: les Verts jouent mal. Et ce qui devait arriver arriva.


Cauchemar à Geoffroy-Guichard
Camérini vient de mettre Ruiter à terre. Coup franc. Desremeaux tire en force dans le mur. La balle, déviée, passe quand même. Carnus pris à contre-pied s’interpose du pied mais Jensen suit et se jette. 2-2, stupeur à Geoffroy Guichard. Pourtant Bordeaux ne pousse pas plus, se contente du nul. Le public s’ennuie entre des visiteurs satisfaits et des locaux qui déjouent complètement. Nous jouons la 81e. Jensen centre. La défense est statique, Carnus ne bouge pas, tout le monde croit au hors-jeu. Pas Ruiter qui marque, ni l’arbitre. 2-3, score final. Le ciel tombe sur les têtes stéphanoises. Dans le contexte du transfert annoncé de Carnus et Bosquier, la défaite débouche sur la polémique. La pire que le club ait connue. Rocher ne fait rien pour l’apaiser: "Je n’accuse pas Carnus ni Bosquier, j’accuse le contrat à temps qui démobilise les joueurs avant terme".

Les jours suivants, la presse se focalise surtout sur le gardien de but, fébrile et médiocre ce soir-là. D’ailleurs, le public, qui l’adulait une semaine auparavant, l’a bombardé de projectiles. "Après ce match, j’ai dû me battre pour monter dans ma voiture. Certes, je n’avais pas été très bon mais toute la semaine, on m’avait répété 'Surtout ne prends pas un but bête… Attention au but idiot'. Et bien sûr, j’ai pris trois buts". Le championnat n’est pas terminé mais pourra-t-il rejouer à Geoffroy-Guichard? Rocher tranche dans le vif: Bosquier et Carnus sont écartés de l’équipe contre l’avis de Batteux et de leurs coéquipiers, solidaires des deux accusés. L’ASSE perd deux joueurs, le titre (Marseille l’emportera) et une équipe: Camérini, Durkovic, Broissard, Szamardzic, Keita, Revelli, Batteux s’en iront bientôt. Cela aurait pu être la fin du grand Saint-Étienne. Heureusement, des jeunes du centre de formation vont bientôt se rendre célèbres…



ASSE-Bordeaux 2-3
8 mai 1971, stade Geoffroy-Guichard
Buts
ASSE: Keita (29e), Bereta (37e).
Bordeaux: Ruiter (42e et 81e), Jensen (75e)

ASSE
Carnus
Camérini, Bosquier, Durkovic, Farison
Broissart, Herbin
Szamardjic, Bereta, Keita, Revelli.

Girondins de Bordeaux
Rigoni
Desremeaux, Dubouil, Papin, Rostagni
Giresse, Grabowski, Jensen
Burdino, Petyt, Ruiter.

>> Article initialement paru dans La Gazette des Verts.

Réactions

  • Dinopatou le 10/11/2009 à 17h07
    Il me semble qu'il y a la place pour des nuances entre "aucun groupe de supporters n'est un sain capable de toujours soutenir dans les pires conditions sans jamais avoir le moindre écart, l'évolution des mentalits et ce qui leur est proposé influe forcément" et "les supporters sont tous les mêmes", m'enfin bon

    (et affirmer qu'on passe sous silence les agissements marseillais me fait vaguement sourire aussi, mais bref)

  • charbo le 10/11/2009 à 20h37
    Le public de Geoffroy Guichard n'était pas si remarquable dans les années 60-70. Il n'hésitait pas à siffler en cas de coup dur. Il était habitué à beaucoup, il ne se contentait pas de peu. Le stade n'était quasiment jamais rempli et les Associés supporters faisaient pendant les après-midi de match le tour de la famille avec klaxon et trompette afin d'attirer le public.
    Non pas si bien le public, suffit de voir le retour de Bereta sous le maillot de Marseille (on l'a forcé à partir quand même, personne ne pouvait l'ignorer).

    La légende de GG est venue avec l'Europe, notamment à partir de Split (le surnom du chaudron vient de là) et puis s'est concrétisé régulièrement depuis 99 date à laquelle le stade est vraiment bien rempli. Il suffit de consulter les affluences des matchs.

  • charbo le 10/11/2009 à 20h37
    tour de ville pas tour de famille hein.

  • José-Mickaël le 10/11/2009 à 23h17
    Merci Charbo pour ces explications ! Je trouve que c'est une discussion très intéressante. Je ne savais pas que la bonne réputation du "chaudron" ne datait que de 75.

    Pour ce concerne le stade pas rempli, il faut quand même rappeler qu'à l'époque, les stades l'étaient rarement. La moyenne de spectateurs, de nos jours, tourne autour de 20000, alors qu'au début des années 1980 elle était de 10000. Je me souviens avoir vu un classement, à la fin de la saison 80-81 je crois, qui montrait que c'était le Parc des Princes qui avait l'affluence maximum avec environ 20000 spectateurs de moyenne, tandis que pas mal de stades étaient sous les 10000 (Monaco, Bastia, Laval, Auxerre...) L'équipe visiteuse qui attirait alors le plus de spectateurs était bien sûr St-Étienne. Aujourd'hui les chiffres ont doublé.

  • José-Mickaël le 10/11/2009 à 23h32
    Tiens, j'ai retrouvé un tableau plus ancien. C'est dans le Téléfoot Magazine n°1, mai 78. Tableau des affluences moyennes de la saison 1977-78 :

    --> À domicile :

    1. PSG = 21.894
    2. Marseille = 20.940
    3. Strasbourg = 20.053
    4. St-Étienne = 18.140
    5. Nantes = 15.410
    6. Lens = 13.363
    7. Nancy = 12.394
    8. Metz = 10.616
    9. Nice = 10.371
    10. Lyon = 10.361
    11. Rouen = 10.295
    12. Laval = 9.900
    13. Reims = 9.071
    14. Bordeaux = 8.690
    15. Nîmes = 6.660
    16. Troyes = 6.156
    17. Valenciennes = 6.060
    18. Sochaux = 5.336
    19. Monaco = 4.192
    20. Bastia = 4.098

    Commentaires :
    - Le bon chiffre de Strasbourg est probablement dû à ses résultats inattendus (nouveau promu qui finit troisième).
    - Nancy et Metz ont de bons chiffres, j'imagine grâce au spectacle : Nancy avait Platini et Metz était une équipe qui ne savait qu'attaquer (avec Braun et Curioni).
    - Bordeaux avait une équipe très quelconque.
    - Les deux derniers du classement sont pourtant rien moins que le champion de France et le finaliste de la coupe de l'UEFA ! Le chiffre de Monaco correspond à seulement 79.268 spectateurs sur l'ensemble de la saison.

    --> À l'extérieur :

    1. St-Étienne = 20.300
    2. Nantes = 15.150
    3. Nice = 15.070
    4. Marseille = 14.780
    5. Monaco = 14.150
    6. Bastia = 13.520

    Remarque : la bonne affluence de Nice est sans doute lié au fait que Nice est resté longtemps en course pour le titre (avant de s'effondrer en fin de championnat, ce qui était d'ailleurs sa marque de fabrique dans les années 1970), dont 12 fois en tête du championnat (mais termine seulement 8è !)

    Je n'ai pas de chiffres plus anciens, mais je pense que ça n'a pas tellement évolué durant toutes ces années 1970. Il faudra attendre les progrès du football français (qui commencent fin des 70s) pour voir les affluences augmenter peu à peu.

  • Qui me crame ce troll? le 11/11/2009 à 08h04
    Pour les affluences, il y a ce site :
    lien

  • François-Youssouf Hadji-Lazaro le 12/11/2009 à 15h21

    C'est vrai que cette notion de meilleur public me paraît assez subjective finalement puisque tout le monde n'attend pas forcément la même chose d'un "bon" public.

    Est-ce qu'un bon public est un public exigeant, un public connaisseur, un public bouillant, un public fidèle ou encore autre chose ?

    Ce que je trouve beau, c'est quand un public continue de soutenir son équipe alors qu'elle est en difficulté, voire même en déroute. J'ai quelques souvenirs de ce comportement chez des publics anglais notamment, mais très rarement de publics français.

    A ce propos, je n'ai jamais compris pourquoi certaines personnes estiment qu'à partir du moment où elles payent leur place, elles sont en droit de manifester leur mécontentement quant au spectacle ou aux résultats en sifflant, huant voire insultant les joueurs.

    C'est pas un jugement. Je ne comprends pas bien le raisonnement en fait.
    Il me semble que dans ce cas-là, on ne se place plus dans la position d'un supporter, mais plutôt dans la position d'un client de la Ligue (en tant que "fournisseur de spectacle") ou d'un club (qui serait redevable en terme de victoires)...


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