Épilogue
Dans sa "réponse à notre réponse", D. Rousseau met l'accent sur la dégradation des conditions de travail des journalistes sportifs, confrontés eux aussi à de nouvelles formes de pression de la part des joueurs, des entraîneurs et des dirigeants du football. C'est un sujet extrêmement intéressant, que pour notre part nous ne pouvons instruire, puisque nous n'y sommes pas directement confrontés: notre "distance" rédactionnelle est aussi une distance physique aux acteurs du football. Malgré ses inconvénients, cette position nous assure une certaine indépendance, et c'est vrai qu'elle nous immunise contre de tels problèmes (mais nous avons d'autres contraintes!..).
C'est cependant un dossier très intéressant, qu'il reviendrait à la presse traditionnelle de mettre à jour, ce qu'elle n'a pas encore fait véritablement —peut-être justement par crainte de représailles ou d'une dégradation accrue. Mais nous ne pouvons qu'encourager nos confrères, de L'Equipe ou de France Football en particulier, à aborder publiquement la question, car il est certain que "l'industrialisation" du football et l'hypertrophie de ses enjeux ont transformé les rapports entre clubs et journalistes.
Notre interlocuteur a donc raison de dire que nous opérons dans le confort d'une position très différente de celle de la presse officielle, qui nous évite de nous "coltiner quotidiennement le monde du foot d'aujourd'hui". Nous nous coltinons cependant le produit de la machine médiatique qui l'entoure, car c'est effectivement notre matière première, et nous avons également nos propres contraintes. L'anonymat de nos signatures n'y est pas pour grand chose, ce sont simplement celles des Cahiers du football, petit satellite mal localisé mais bien identifié… Peut-être qu'un jour Pierre Martini, embauché par un grand service des sports, passera à la télé et deviendra célèbre, mais ce n'est pas acquis.
Notre "légèreté" de ton est une réalité (bien que nos vannes soient parfois un peu lourdes), et nous nous autorisons à franchir fréquemment une ligne jaune que les médias traditionnels sont tenus de respecter. La complicité avec nos lecteurs nous autorise à des clins d'œils et des provocations généralement bien comprises. Ce site revendique de toute façon la possibilité de dépasser ces bornes et d'apporter un peu d'esprit de subversion à un milieu dont la carence en la matière est assez grave (voir Les Cahiers et les journalistes).
Mais au-delà de la forme, il nous semble que nous essayons aussi de briser d'autres conventions, de passer quelques frontières ailleurs trop bien respectées, mais aussi de mettre des arguments et des points de vue constants derrière nos ironies. C'était bien le cas de l'article sur la gifle d'Anelka . On peut les trouver excessives, mais nos critiques ne sont jamais gratuites. Cette désinvolture, que D. Rousseau nous a reprochée sur un sujet dont nous n'avons peut-être pas pris toute la mesure, n'est donc pas le fruit d'une irresponsabilité ni d'une tendance au populisme (il faudrait pour cela que les Cahiers aillent plus souvent dans le sens du vent), mais plutôt l'effet de partis pris plus radicaux que la moyenne.
Sur les autres thèmes surgis du débat, comme le monopole de L'Equipe, son attitude envers les sélectionneurs français ou sa ligne éditoriale, il y a matière à d'autres polémiques, que nous aurons certainement l'occasion de réactiver un jour.
Merci encore à notre contradicteur.