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Champions à la grecque

Tout est possible dans le football, surtout l'improbable. La Grèce championne d'Europe a écrit une extraordinaire page de l'histoire de ce sport, et elle l'a amplement mérité…
Auteur : Jamel Attal le 5 Juil 2004

 

Pour que les Bleus soient vraiment "indéfendables" après leur élimination, il fallait que les qualités des Grecs soient "notoirement insuffisantes" ou "parfaitement ordinaires", comme l'a écrit avant la demi-finale un journaliste dont les pathologies obsessionnelles sont, quoi qu'on en dise, infiniment plus affligeantes que les nôtres. Personne n'a eu, cependant, le monopole de la condescendance envers la sélection hellène: tout le monde prétend depuis au moins quinze ans qu'il n'y a "plus de petites équipes", mais au fond, personne n'y croit et les échecs des cadors sont toujours jugés à l'aune de leur prestige présumé — et surtout de celui de leurs adversaires. Alors, quand un trouble-fête dénué de stars et de clinquant dans son jeu vient bousculer les hiérarchies, le mépris persiste sous des formes diverses. À une époque où le foot-biz fait son beurre sur le foot-spectacle, on a vite fait de confondre valeur et esthétique… Comme en architecture, le "béton" est devenu le symbole du mal et les lamentations sont de rigueur face aux équipes qui "ferment le jeu", "jouent à dix derrière", même si ces clichés masquent des réalités tactiques et techniques beaucoup plus subtiles.

Trois fois Hellas Mais voilà, le football reste un sport d'équipe dans lequel "tout est possible", en particulier la réussite faussement inattendue d'un groupe dont la solidarité et la combativité vont compenser toutes les (présumées) lacunes individuelles. Ce n'est pas tout à fait un hasard si la Grèce a successivement douché le Portugal, l'Espagne, la France, la République tchèque et à nouveau le Portugal, quatre formations particulièrement bien dotées en individualités — celles-ci ayant été, d'une manière ou d'une autre, incapables de faire la différence face au bloc grec, à l'image de Slaves pourtant brillants jusque-là. Autre illustration: c'est paradoxalement contre la Russie, une formation plus anonyme et plus homogène, que les Grecs ont connu le plus de problèmes... On aurait pu croire que la perspective de la qualification les avait alors inhibés et qu'ils présentaient des failles psychologiques, mais les nerfs d'acier dont ils ont eu besoin pour gagner lors des matches à élimination directe ont clairement montré le contraire: c'est avec une assurance extraordinaire qu'ils ont conquis et/ou préservé leurs décisifs (et minces) avantages.

La fête dans le quartier Neas Smirnis à Athènes, après la victoire en demi-finale.
Otto persuasion Les probabilités de réussite de Rehhagel, au moment de sa nomination, étaient considérées comme quasiment nulles, dans un football constamment perturbé par les rivalités entre clubs, les affaires et l'instabilité des institutions. Comme il le souligne lui-même, rester trois ans en poste constitue déjà un miracle presque aussi grand qu'une accession en finale, un miracle que ne présageait pas les deux première défaites lors des qualifications pour cet Euro. Le choc culturel entre l'austérité allemande et la créativité grecque a finalement engendré une équipe plus sobre que rutilante, mais au projet de laquelle tous les internationaux adhérèrent. Otto Rehhagel a en effet rétabli l'autorité du sélectionneur en même temps que le respect des joueurs pour la sélection, notamment en écartant ceux qui se montrèrent un peu désinvoltes à son égard (à l'image de Zikos, qui avait refusé une convocation). De nombreux observateurs l'ont souligné, mais la clé de la victoire a bien résidé dans cette évidence que la Grèce a joué en équipe: le fait même que l'on peine à dégager une ou deux individualités le confirme, ainsi que l'abnégation dont on constamment fait preuve les joueurs, à l'image d'un Charisteas souvent amené à dégager des ballons chauds dans sa surface, ou d'un Kapsis qui est allé chercher les ballons sur la tête de Koller auquel il rend pourtant vingt centimètres. Grec moderne Évidemment, la solidarité ne fait pas tout, sinon l'OGC Nice gagnerait la Ligue des champions. Le pendant idéal de cette qualité, c'est une organisation tactique intelligente. Aucune ne l'étant dans l'absolu, sa pertinence ne peut exister que par rapport à l'adversaire et aux qualités spécifiques d'une équipe. Dans cet ordre d'idée, Otto Rehhagel a réussi des coups de maître depuis le début de l'Euro. Tombé en totale désuétude au cours de la décennie passée, le marquage individuel imposé par le technicien allemand (moins à ses joueurs qu'à leurs vis-à-vis), avec un libéro décroché derrière deux stoppeurs, s'est avéré d'une redoutable efficacité face à des équipes qui en avaient presque oublié le concept. "Le football moderne, c'est celui qui gagne", avait ironisé le sélectionneur avant la finale... Le pouvoir de neutralisation qui en résulte est terrible, mais il ne suffirait cependant pas à expliquer à lui seul la réussite de ces Bleus-là, pas plus que la "chance" apparente qui leur a permis de marquer au meilleur moment (souvent celui où l'équipe adverse connaissait ses meilleures phases), et encore moins les accusations portant sur leur soi-disant tendance à faire de l'antijeu, lues et entendues ça et là ce week-end. On ferait mieux de souligner leur remarquable capacité à gérer leurs moments forts et leurs mauvaises passes, à porter le fer sur les flancs prêtés par l'adversaire: leurs assauts déterminés lors du premier quart d'heure du match d'ouverture (au maximum de la fébrilité portugaise) et lors de celui de la prolongation en demi-finale (au pont culminant des doutes tchèques) en donnent deux exemples éclatants. Pareillement, la qualité de leur milieu de terrain est évidente lorsqu'il s'agit de remonter proprement ou de conserver un ballon qu'il est bien difficile de venir chercher dans les pieds de Karagounis, Zagorakis, Katsouranis ou Giannakopoulos, mais aussi de porter très rapidement le danger: hier soir, après une entame prudente, ils n'ont pas tardé à placer des attaques tranchantes qui ont cerné la nature du danger pour les Portugais. Il leur manque peut-être un attaquant de grande classe, mais Charisteas s'en fout, il a directement acquis le statut de héros. Leur maîtrise tactique, collective et psychologique a tout simplement été époustouflante au cours des trois derniers matches, sans le moindre recours à des artifices (pas même à une séance de tirs aux buts, serait-on tenté d'ajouter). Aussi cruelle soit la défaite des Portugais, la victoire des Grecs est amplement méritée.

Il aura certes fallu une conjonction de conditions favorables pour que les Hellènes soient sacrés. Mais ils ont eux-mêmes réunis la plupart de ces conditions. Le parcours de la Grèce, loin d'être un déplaisant concours de circonstances, constitue un joli catalogue des morales du football: l'utilisation des moyens disponibles est plus décisive que la quantité de ces moyens, sans condition physique le talent n'est rien, la continuité est une condition du succès, la valeur d'une équipe n'est pas celle de l'addition de ses individualités, etc. Au-delà, il nous serait difficile de ne pas souligner sous quels aspects cette victoire apporte de l'eau à certains de nos moulins. Après avoir prématurément fait sortir les équipes représentant les cinq grandes puissances économique du continent, cet Euro a sacré une sélection dépourvue de stars, et au contraire pourvue d'un grand nombre de joueurs laissés pour compte dans quelques grands clubs européens. Le manque de fraîcheur des écuries majeures avait déjà été flagrant au Mondial 2002, faisant la part belle aux outsiders, et le scénario semble s'être reproduit cette année. L'autre finaliste présente cependant un contre-exemple probant, avec son ossature issue du FC Porto vainqueur de la C1, et comptant donc certains des joueurs les plus utilisés de la saison (mais disputant un championnat moins relevé). Alors, plus loin que l'épuisement éventuel des vedettes du ballon rond, il faut peut-être se pencher sur un effet plus pervers du nouveau rapport de force entre les clubs et les équipes nationales: sous l'effet du lobbying direct et indirect de leurs employeurs, les stars ne finissent-elles pas par manquer singulièrement de motivation au moment de s'investir sous le maillot de leur fédération? Le Portugal ne pouvait pas en manquer, en tant que pays organisateur. La Grèce elle, est restée inégalée dans ce domaine. Pour gagner une compétition, il faut encore le vouloir…

Réactions

  • frar le 05/07/2004 à 11h46
    sinon je suis d'accord avec l'ours Bob pour sa différence entre le jeu défensif et subir !

  • ouais.super le 05/07/2004 à 12h01
    Y a pas de "mérite de gagner" ou de "ne mérite pas de gagner" ! Je ne parle pas de la beauté de la victoire des Grecs, juste de sa pleine et entière validité, quoiqu'en disent les ronchons qui voudraient voir des matchs avec 9 attaquants de part et d'autre, un championnat du monde de roulettes et de reprises de volée dans la lucarne avec un score final de 37 à 25. Encore une fois, la note artistique n'existe pas en football, la notion de mérite encore moins. Si vous aimez pas ce sport tel qu'il est, regardez le basket, le hockey sur glace ou que sais-je...

  • delfarilie le 05/07/2004 à 12h02
    Tiens, une remarque qui n'a rien à voir… C'est la photo de l'article qui m'y fait penser, avec le maillot de Charisteas… Qui décide des maillots qu'ils portent, et surtout de l'écriture. Sont-ils faits pour les équipes ou pour les commentateurs étrangers ? Parce que sinon, c'est vrai que ce serait chaud avec le cyrillique pour les russes ou le grec pour les… Mais bon, les joueurs, dans tout ça, ça leur fait quoi d'avoir des maillots qu'ils ne savent peut-être pas lire (enfin, je suis de mauvaise foi, je suppose que pour vivre en Allemagne, en Angleterre ou en Italie comme certains joueurs grecs, ils doivent bien connaître l'alphabet).
    Voilà, c'était juste mon côté "on vend son âme pour la mondialisation médiatique".
    Je retourne donc dans ma grotte.
    Bonjour chez vous !

  • Capitain Rai le 05/07/2004 à 12h11
    nono 93

    ma reflexion sur le brésil 2002 (plus défensif qu'a l'habitude) est issue des commentaires de brésiliens (scolari ayant améné un peu de rigueur , le jeu étant moins flamboyant qu'en 94 amis avec un dounga plus influent).

    sinon vu le nombre de joueurs offensifs qu'ils ont, c'est certainement plus facile de jouer l'attaque.

  • NoNo93 le 05/07/2004 à 12h16
    Beh on est d'accord Captain (enfin sauf sur l'orthographe de Dunga), pour les brésiliens, la seleçao a pris un tournant bien plus défensif, pour le reste du monde et le commun des mortels, ils sont parmis encore très offensifs ;-)))

  • NoNo93 le 05/07/2004 à 12h20
    Frar, là où je te suis pas c'est qu'ils savent aussi jouer en attaque et je note en passant que l'aspect tactique d'un match n'a jamais été ce qui m'a le plus fait bander en foot (la finale Milan AC/Juve par exemple a été un calvaire pour moi), beh les Grecs m'ont fait quand même plaisir et quand il jouait et comme le remarque fort justement El Mallorquin ils savent aussi attaquer et faire du mouvement, y'en a toujours un ou deux qui courrent et proposent une solution au porteur de la balle (ce que les français n'ont PAS du tout fait, même pas peu fait, pas fait tout court), non désolé les Grecs ne sont pas juste bon en défense, c'est leur plus grande force j'aurais du mal à dire le contraire, les cantonner dans ce rôle comme tu le fais, et beh c'est moche, vraiment moche çà ;-))

  • thibs le 05/07/2004 à 12h30
    delfarilie, les grecs lisent parfaitement l'alphabet latin :)

  • Capitain Rai le 05/07/2004 à 12h31
    nono93
    j'espère que dunga ne viendra me tacler par derrière ouy à la carotide pour mon erreur d'orthographe.

    sinon pour quoi ne pas élire le plus beau match du tournoi: le nec plus ultra restera hollande-tchequie, plein de beau jeu ça allait dans tout les sens.

  • frar le 05/07/2004 à 12h32
    lien, je ne conteste pas la validité de leur titre : les Grecs n'ont pas triché, ne sont pas dopés (enfin pas plus que leurs adversaires...) mais je trouve juste qu'un champion qui passe son temps à subir, ça la fout mal... j'aime aussi le jeu défensif quand il est maitrisé : la défense de Porto en est un modèle. Le problème avec les Grecs c'est que ça ne passe pas certes mais après c'est trop timide : ils attaquent en moyenne 3 fois par mi temps (chiffres tirés de frar dont un peu sujet à caution). Enfin, je ne vois pas pourquoi je regarderai des sports que j'aime pas sous prétexte que j'aime pas le jeu pratiqué par les Grecs.

    Nono93, c'est vrai que les Grecs pour courir ils courent... ça on peut pas leur reprocher de pas avoir envie. Ils savent aussi planter des buts mais ils sont quand même radins sur le spectacle...

  • loual le 05/07/2004 à 12h37
    "Le parcours de la Grèce, loin d'être un déplaisant concours de circonstances, constitue un joli catalogue des morales du football: l'utilisation des moyens disponibles est plus décisive que la quantité de ces moyens, sans condition physique le talent n'est rien, la continuité est une condition du succès, la valeur d'une équipe n'est pas celle de l'addition de ses individualités, etc."

    Qui est chargé de l'utilisation des moyens dans une équipe sinon l'entraîneur? On aurait aimer comprendre la différence de talent entre Santini et Rehhagel par exemple. Non pas que l'entraîneur allemand soit un génie loin de là, mais en appliquant à minima et de manière très défensifs certains principes de base du foot il a fait la différence. On aurait aussi aimé une analyse plus pointue que la simple excuse de la lassitude physique pour expliquer l'impuissance tactique et collective à percer un béton qui n'avait rien de génial comme la très mauvaise utilisation des ailes de toutes les équipes qui ont rencontré les Grecs Tchéquie comprise.

    "Au-delà, il nous serait difficile de ne pas souligner sous quels aspects cette victoire apporte de l'eau à certains de nos moulins. Après avoir prématurément fait sortir les équipes représentant les cinq grandes puissances économique du continent, cet Euro a sacré une sélection dépourvue de stars, et au contraire pourvue d'un grand nombre de joueurs laissés pour compte dans quelques grands clubs européens. Le manque de fraîcheur des écuries majeures avait déjà été flagrant au Mondial 2002, faisant la part belle aux outsiders, et le scénario semble s'être reproduit cette année."

    Ben voyons. Pour gagner un Euro il faut prendre des joueurs qui n'ont pas, ou peu jouer dans l'année et qui sont remplaçants dans leurs clubs. On ne nous l'avait pas encore faite celle là. Gérard Davet du "Monde" fait des Piges pour les CdF maintenant?

    "L'autre finaliste présente cependant un contre-exemple probant, avec son ossature issue du FC Porto vainqueur de la C1, et comptant donc certains des joueurs les plus utilisés de la saison (mais disputant un championnat moins relevé)."

    Ca aussi c'est beau comme de l'antique ce genre de réflexion. Autrement dit Porto est champion d'Europe car il joue dans un championnat dévalorisé. On se demande pourquoi les Lettons ne sont pas arrivé en final eux aussi.

    "Alors, plus loin que l'épuisement éventuel des vedettes du ballon rond, il faut peut-être se pencher sur un effet plus pervers du nouveau rapport de force entre les clubs et les équipes nationales: sous l'effet du lobbying direct et indirect de leurs employeurs, les stars ne finissent-elles pas par manquer singulièrement de motivation au moment de s'investir sous le maillot de leur fédération?"

    Il m'a semblé que le retour de la France contre l'Angleterre était un des plus beau moment de volonté et de motivation de cet Euro. Contre les Croates s'était pas mal non plus. Le problème c'est que jouer à l'énergie et sur la motivation ne permet pas d'être régulier dans la performance et lamine rapidement les conditions physiques les plus performantes. Combien de longs ballons devant à l'aveugle pour passer vite (trop vite) de la phase défensive à la phase offensive?
    Il aurait fallut présenter un cadre collectif autrement plus élaboré que le brouillon "santinien pour passer ce béton qui, il faut le répéter n'a rien d'ébouriffant. Juste rigoureux. Cela a suffit. Et pas pour des considérations fumeuses comme le manque de fraîcheur.
    Ca fait deux fois qu'on nous sert ça en guise d'explication. La troisième fois serait carrément odieuse.





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