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Les footballeuses de Preston

En Angleterre, le football féminin a connu un très fort développement durant la Première Guerre Mondiale, où est apparue notamment une équipe de légende, les Dick, Kerr's Ladies.

Auteur : Richard Coudrais le 12 Juin 2019

 

 

L’entreprise Dick, Kerr and Co est une société écossaise spécialisée dans le rail. Elle construit des locomotives, des wagons, des tramways. Une de ses usines a été ouverte à Preston dans le Lancashire en 1893 sans que l’on puisse imaginer un instant qu’elle deviendrait le berceau d’une des plus belles aventures de l’histoire du sport féminin.

 

 

Le foot féminin sur les rails

Lorsque débute la guerre de 1914, de nombreuses usines situées en Angleterre sont réquisitionnées pour fabriquer des armes, des munitions et du matériel. La plupart des employés sont quand à eux envoyés sur le front, et ce sont des jeunes femmes qui sont embauchées en usine pour pallier le manque de main-d’oeuvre.

 

 

L’usine Dick, Kerr and Co de Preston n’échappe pas à l’effort de guerre. De nombreuses jeunes femmes ont rejoint ses ateliers dès 1914, travaillant plus de douze heures par jour dans des conditions souvent difficiles voire dangereuses. Au bout d’un an, constatant que leur souffrance nuit à la productivité, les dirigeants proposent aux jeunes femmes de profiter des pauses pour pratiquer des exercices physiques.

 

En octobre 1917, alors que l’usine connaît une baisse d’activité, les femmes bénéficient de pauses sportives plus longues et en profitent pour s’initier au foot avec les quelques hommes encore présents ou revenus au travail. Se prenant au jeu, elle se mettent à jouer non plus avec mais contre ces mêmes hommes. Un match aurait même vu leur victoire, un événement abondamment relaté dans la presse (bien qu’on n’ait jamais connu le score) qui encourage les joueuses à monter une véritable équipe. En 1917 est donc créé le Dick, Kerr's Ladies Football Club.

 

 

Naissance d’un club

Alfred Frankland, employé administratif, est nommé manager de cette équipe. D’autres usines ont suivi le mouvement et des matches sont organisés au profit des victimes de la guerre. Les filles de chez Dick, Kerr & Co jouent plutôt bien et attirent rapidement un public nombreux et d’autant plus fidèle que les compétitions d’hommes, coupes et championnats, sont toujours suspendues.

 

Le club masculin du Preston North End prête son stade de Deepdale aux Dick, Kerr's Ladies et celles-ci attirent la foule, notamment 10.000 spectateurs le jour de Noël pour un match remporté 4-0 contre la Arundel Coulthard Factory.

 

Lorsque la guerre prend fin, les usines retrouvent leurs activités initiales. Les hommes sont de retour et de nombreuses femmes perdent leur emploi. L’aventure des Dick, Kerr’s Ladies se poursuit toutefois à travers de multiples rencontres dans tout le pays, principalement pour recueillir de l’argent destiné aux victimes de la guerre. La curiosité de voir jouer une équipe de femmes laisse place à une sincère admiration pour le jeu pratiqué.

 

 

Premières rencontres internationales

Le 30 avril 1920, les Dick, Kerr’s Ladies reçoivent à Deepdale une sélection de joueuses françaises provenant principalement de Paris. Devant 25.000 spectateurs, l’équipe anglaise l’emporte 2-0 dans ce qui est souvent considéré comme le premier match international de l'histoire du foot féminin (déconsidèrant de facto les Écosse-Angleterre disputés dans les années 1890).

 

Les deux équipes se retrouvent en trois autres occasions: les Anglaises s’imposent (5-2) à Stockport, elles concèdent le nul (1-1) à Manchester puis s’inclinent (2-1) à Stamford Bridge. En octobre, les deux formations se retrouvent en France, d’abord à Paris au stade Pershing devant 12.000 spectateurs pour un match nul 1-1. Deux autres scores de parité suivront, à Roubaix et au Havre, avant que les Dick, Kerr's Ladies ne s’imposent pour le dernier match à Rouen.

 

 

Cette tournée en France, diffusée aux actualités dans les cinémas, bénéficie d’une forte couverture. Le public anglais s’entiche des Dick, Kerr's Ladies et des joueuses comme Lily Parr ou Alice Woods acquièrent une popularité égale à celle de leurs homologues masculins. En fin d’année, le jour du Boxing Day, pas moins de 53.000 spectateurs se rendent au Goodison Park de Liverpool pour une rencontre les opposant aux St Helen's Ladies.

 

 

Le coup d’arrêt de la FA

La plupart des rencontres des Dick, Kerr's Ladies attirent une affluence plus grande que celle de bien des matches masculins, et cela commence sérieusement à agacer ces messieurs de la FA, la fédération anglaise de foot, entièrement masculine. Le 5 décembre 1921, prétextant le fait que la pratique du football serait inappropriée aux femmes et émettant des soupçons sur la nature réellement caritative de la plupart des rencontres, la FA interdit aux équipes féminines l’accès aux installations de ses clubs.

 

C’est un coup dur pour le foot féminin, obligé de jouer sur des petits terrains échappant au contrôle de la FA. Moins de spectateurs, moins de recettes, moins de passion, la plupart des équipes féminines mettent la clé sous la porte.

 

Les Dick, Kerr's Ladies semblent trop fortes pour se laisser abattre. Puisque la vieille Angleterre ne veut pas du foot féminin, les joueuses s’en vont conquérir le monde. Une tournée au Canada est entreprise en fin d’année 1922 mais à leur arrivée, les joueuses apprennent que la fédération locale a appliqué la même interdiction que celle de sa consœur anglaise.

 

Les Dick, Kerr's Ladies se rendent alors aux États-Unis où il n’existe encore aucune formation féminine, mais où des équipes masculines de l'American Soccer League acceptent de les recevoir. Neuf rencontres peuvent être disputées devant des assistances pouvant aller jusqu’à 10.000 spectateurs, et où les Dick, Kerr's Ladies arrachent trois victoires et trois nuls.

 

Cette tournée triomphale amorcent pourtant le déclin des Dick, Kerr's Ladies. En 1926, le manager Alfred Frankland se retire de l’usine et emmène les joueuses avec lui. L’équipe est rebaptisée Preston Ladies FC et continue d’attirer un public nombreux là où elle joue. En 1937, elle est même officieusement sacrée championne du monde de football féminin pour avoir battu les Edinburgh Ladies, titrées en Écosse, sur le score de 5-1.

 

L’aventure prendra fin en... 1965, quarante-huit ans après la fondation de l’équipe dans l’usine de Preston. Avec un bilan de 828 matches, dont 758 victoires (pour 46 nuls et 24 défaites). Ce n’est qu’en 1971, soit cinquante ans après son application, que la FA mettra fin à son interdiction de la pratique du foot féminin.

 

Sources et inspiration:
Le livre “Une histoire populaire du football” de Mickaël Correia (2018 - La Découverte).
L’article de Mounir Mezouar sur pkfoot.com.

 

Réactions

  • sehwag le 12/06/2019 à 12h19
    Merci pour cet article, je ne connaissais pad du tout cette belle histoire.

  • Ba Zenga le 12/06/2019 à 13h42
    Idem, merci Richard. Très belle découverte.

  • Lescure le 13/06/2019 à 08h19
    J'en profite pour faire du copinage et conseiller de dévorer le bouquin de Mickaël Correia, sité par Richard, "Une histoire populaire du football". C'est passionnant de bout en bout. Comme je l'avais déjà fait au moment de sa sortie l'an dernier je repose le pitch ici mais avant la dernière itv intelligente de Daniel Riolo:
    lien

    "De l’Angleterre à la Palestine, de l’Allemagne au Mexique, du Brésil à l’Égypte, de la France à l’Afrique du Sud, ce livre raconte une autre histoire du ballon rond, depuis ses origines jusqu’à nos jours.
    Le football ne se résume pas au foot-business : depuis plus d’un siècle, il a été un puissant instrument d’émancipation pour les ouvriers, les féministes, les militants anticolonialistes, les jeunes des quartiers populaires et les contestataires du monde entier.
    L’auteur retrace le destin de celles et ceux qui, pratiquant ce sport populaire au quotidien, en professionnels ou en amateurs, ont trop longtemps été éclipsés par les équipes stars et les légendes dorées. Prenant à contre-pied les clichés sur les supporters de foot, il raconte aussi l’étonnante histoire des contre-cultures footballistiques nées après la Seconde Guerre mondiale, des hooligans anglais jusqu’aux ultras qui ont joué un rôle central dans les printemps arabes de 2011. En proposant une histoire « par en bas », en s’attachant à donner la parole à tous les protagonistes de cette épopée, Mickaël Correia rappelle que le football peut être aussi généreux que subversif".

  • Lionel Joserien le 05/07/2019 à 07h40
    Merci Richard, c'est super intéressant.
    Gloire aux Cahiers.

La revue des Cahiers du football