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Un chaos bleu

Optant pour le sabordage, l'équipe de France parachève une extraordinaire débâcle collective.
Auteur : Jérôme Latta le 21 Juin 2010

 

Au moment de l'annonce de la liste des 30 et donc du lancement de la préparation de l'équipe de France, on pouvait se dire qu'un nouveau chapitre s'ouvrait, susceptible d'infléchir le cours de ce qui ressemblait à un destin nécessairement tragique. La barque était déjà lourdement chargée: une qualification à scandale au cours d'un France-Irlande déplorable dans le jeu, un sélectionneur encore enfoncé, un capitaine déconfit, une défaite déprimante contre l'Espagne et pour terminer, une affaire de mœurs. Mais la compétition permet d'effacer les ardoises et offre souvent des rédemptions inattendues, alors il était tentant de conjurer le pessimisme ambiant en imaginant des lendemains plus chantants.


Le bunker de verre
L'illusion a pu être entretenue par la litanie du "groupe [qui] vit bien" et un premier match amical enthousiasmant. La suite n'a été qu'une dégringolade plus consternante que tout ce qui avait précédé, avec le terrain pour lieu d'expression à peine crypté de la discorde générale. L'écho déformé qui nous parvient de l'intérieur de la délégation française ne permet certes pas d'en évaluer précisément l'ampleur, et il convient de prendre les fuites avec toutes les réserves requises: dans quelle mesure témoignent-elles de la réalité, et dans quelle autre tiennent-elles d'une volonté de représailles médiatiques contre l'isolement de la sélection? Mais à ce stade, le Pezula Hotel est un bunker de verre, et l'équipe de France le théâtre de guéguerres infantiles mettant en cause nombre de ses "cadres".
Et c'est bien le plus consternant: l'idée que la sélection est le lieu où l'attachement au maillot est le plus prononcé, où les intérêts individuels ont le moins leur place, s'est évanouie dans la nature. La décennie 1996-2006 appartient à un passé complètement révolu: les internationaux encore actifs qui en ont vécu les dernières années, ainsi que le sélectionneur, se sont avérés totalement incapables de transmettre l'héritage.

chaos_bleu2.jpg


Un monde de distance
Au soir de la qualification contre l'Irlande, la satisfaction apparemment cynique des Bleus, de leur staff et de leurs dirigeants, incapables de prendre en compte le sentiment de désolation laissé par leur prestation et le rapt manuel de Thierry Henry, avait creusé, plus que jamais auparavant, ce désormais fameux "fossé" avec l'opinion. Cette fois, ils se retricotent une solidarité contre les médias et leurs dirigeants en lançant une chasse au traître, paraissant cautionner l'attitude de leur partenaire exclu, puis ils exhibent leur irresponsabilité avec leur boycott d'un entraînement – au lieu de recouvrer un peu de dignité et d'humilité et de préparer le match à venir. On mesure une nouvelle fois le décalage dramatique entre leur perception et celle des spectateurs de leurs avanies, leur incapacité à comprendre le sens que prendront leurs actes à l'extérieur.
Cette éthique clanique est cependant compréhensible, de leur point de vue... D'aucuns désignent la "mentalité des cités", alors que c'est celle de n'importe quel microcosme qui vit selon ses propres règles et considère que l'extérieur ne peut pas comprendre celles-ci (1). Confrontés à une pression médiatique considérable, cernés par d'innombrables malveillances, menacés par les rivalités internes, les internationaux veulent à tout prix maintenir ce secret du groupe – aussi illusoire soit-il, et même s'il ne sert qu'à dissimuler les turpitudes des uns et des autres.


Domenech s'auto-dissout
Le procès de Raymond Domenech va s'alourdir d'un nouveau volet, pas le moins légitime. Car sur la gestion du groupe, son échec est patent. Alors qu'il avait envoyé des signes avec son discours des "coups de fusil" et la non-sélection de plusieurs joueurs au motif de leur mentalité – s'assurant notamment, au passage, la possibilité de remiser Henry sur le banc ou de faire reculer Malouda –, il n'en a pas moins maintenu un pacte accordant des privilèges à certains cadres... Ceux-là même qui, selon toute vraisemblance, l'ont bien peu payé de leur gratitude. Le sélectionneur a joué une partie plus politique que sportive, y perdant les derniers vestiges de son autorité. Avalant désormais les insultes, il termine en porte-parole des joueurs devant leur bus.
La principale erreur de son parcours aura été de vouloir conserver son poste en 2008. Ses dirigeants, en le maintenant sans même lui assurer leur soutien ultérieur et alors qu'on était certain que toutes les conditions seraient réunies pour miner son travail, en ont commis une plus monumentale – qu'ils ont lestée ensuite de quelques autres errements.

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Un travail de sape
Enfin, il y a la part de responsabilité que les médias endossent avec tant de répugnance, et avec eux le milieu du foot, les politiques et les philosophes à la petite semaine, qui ont fait de Raymond Domenech une sorte de plus petit dénominateur commun pour soixante millions de Français, une poupée vaudou à usage universel, le point focal d'une haine collective ayant basculé dans l'irrationnel pour le plus grand profit des éditocrates, des professionnels de la débine et des déblatérateurs appointés. Sans exonérer les protagonistes de leurs responsabilités, la démolition rituelle du sélectionneur puis de la sélection, jusqu'au recours à certaine "une" ordurière, a préparé puis accéléré l'implosion et le chaos qui a suivi. "Le traitement réservé à Domenech depuis des années est en train de s'étendre à tout ce qui touche à l'équipe de France... C'était prévisible, mais ça n'en est pas moins d'une tristesse insondable", avons-nous lu sur le forum (2).

Pour parvenir à ce désastre, il aura en effet fallu la collaboration de toutes les parties prenantes. Aujourd'hui, les unes tâchent de sauver leur peau, les autres de prendre leur part de la curée. Il faudrait tout de même qu'à un moment, on se rappelle qu'il ne s'agit que de football, et que l'extrême dramatisation de ce qui se passe au sein d'une bande sportifs ne fait qu'ajouter au ridicule (3).
Mais le psychodrame est en marche, et outre les dégâts infligés au football français – que l'on peut relativiser, aussi attristants soient-ils pour les amoureux des Bleus –, l'affaire va charrier des monceaux de réactions imbéciles ou démagogiques, faire l'objet des récupérations les plus nauséabondes. Les footballeurs et le football, qui servent de diversion quand les résultats sont là, n'ont pas fini de servir d'exutoire quand tout va mal.


(1) C'est selon ce mécanisme que l'omerta et les codes en vigueur au sein du peloton cycliste ont permis d'y développer au secret un dopage systématique sans que les consciences en souffrent, et avec le sentiment que toute révélation est une trahison, que toute accusation ne peut émaner que de félons ou de personnes qui n'entendent rien au problème.
(2) sansai – dimanche 20 juin 2010 - 18:54
(3) La rhétorique de la "honte" infligée à la nation va être particulièrement difficile à subir.

Réactions

  • Diablesse Rouge le 21/06/2010 à 09h14
    Vas-y Mako!
    lundi 21 juin 2010 - 09h03

    Merci, je viens d'avoir mon premier éclat de rire de la journée grâce à toi (ou grâce à Riolo mais je préfère te remercier toi).

  • Tonton Danijel le 21/06/2010 à 09h24
    Vas-y Mako!
    lundi 21 juin 2010 - 09h03
    le ridicule ne tue plus...Sur RMC hier soir, au milieu des insultes à l'égard de Raymond et des joueurs, Riolo qui lance ( très sérieusement) que le seul qui peut sauver la Fédération Française en en prenant la tête, c'est Jean-Michel Larqué!
    ----------------

    Le problème avec ce grand n'importe quoi, c'est que maintenant n'importe qui (Leboeuf, Larqué, Finkelkraut, Francis Lalanne, un dindon) va pouvoir s'imaginer compétent pour reprendre la fédé en se disant, sauf à être très imaginatif, qu'il est impossible de faire pire.

    Demain, nouveau slogan de la FFF: "C'est en faisant n'importe quoi, qu'on attire n'importe qui."

  • emink le 21/06/2010 à 09h35
    Ouais, Tonton, Rémi Gaillard président !
    Sinon, très bon article, du fond, du recul, merci les CdF. Je crois que sans ce forum, j'aurais sombré et arrêté de m'intéresser au foot (d'ailleurs, je crois que je m'intéresse plus au forum qu'au foot, finalement).
    Une remarque : l'article souligne la relativité du foot (ce n'est que du foot). Malheureusement, ce n'est pas que du foot. Ce qui se passe célèbre une tendance déjà ancienne mais désormais lourde dans nos soicétés : la victoire de l'individualisme, du fric, de la réussite affichée, de la vulgarité, de la bêtise, du cynisme, la domination menaçante, sur toute autre forme de souci des autres, de l'intérêt général, de vivre ensemble, de solidarité.
    Heureusement que le plus niveau de l'Etat n'est pas atteint, sinon, on serait mal.

  • Chaban del Match le 21/06/2010 à 09h35
    Tonton Danijel
    lundi 21 juin 2010 - 09h24


    Le problème avec ce grand n'importe quoi, c'est que maintenant n'importe qui (Leboeuf, Larqué, Finkelkraut, Francis Lalanne, un dindon) va pouvoir s'imaginer compétent pour reprendre la fédé en se disant, sauf à être très imaginatif, qu'il est impossible de faire pire.

    ---------------
    et le pire c'est que c'est sans doute vrai...


  • Yann 56 le 21/06/2010 à 09h38
    Très bon article...
    Devant l'emballement médiatique on ne peut qu'être inquiet...
    Reste que l'attitude des joueurs, celle d'une bande d'ados boudeurs, gâtés, et inconscients de l'image qu'ils donnent d'eux et du foot, est sans doute celle qui restera de cette "épopée".
    Si le terme de "honte" est quelque peu pertinent c'est en ce sens.

    J'y pense, en 2006 on avait eu droit au navrant "coup de boule"...
    Quelle chanson souvenir cette année va apparaître dans les 3 prochains jours et "bercera" notre été ?

  • Vas-y Mako! le 21/06/2010 à 09h39
    Diablesse Rouge
    lundi 21 juin 2010 - 09h14
    Vas-y Mako!
    lundi 21 juin 2010 - 09h03

    Merci, je viens d'avoir mon premier éclat de rire de la journée grâce à toi (ou grâce à Riolo mais je préfère te remercier toi).

    ...ne rigole pas trop fort , j'ai encore mal à la tête!!!

    Et Heureusement que Pauwels n'était pas sur RMC hier soir.......sinon je vomissais en plus....

  • José-Mickaël le 21/06/2010 à 09h41
    emink : clap clap clap ! Surtout la dernière phrase ! (En plus elle est super bien amenée...)

  • DarkZem13 le 21/06/2010 à 09h43
    Ah je l’attendais cet article, et merci. Encore une fois très juste, posé et intelligent. Je suis souvent d’accord avec Mr Latta, et ça continue.

    Un petit bémol tout de même sur la « relativisation » des faits parce que ça ne reste que du football. Ca me parait quand même compliqué, vu tout ce que ça implique, comme passion, argent et image du pays, quoiqu’on en dise. Que ceux qui n’y comprennent rien et n’en profitent que pour faire de la récupération s’en tiennent loin, ou que la presse racoleuse ne surfe pas sur la vague pour vendre ou prendre du pouvoir, je suis complètement d’accord. Mais de la même manière que ça nous apporte de la joie extrême quand l’Equipe de France fait de belles choses, on doit s’attendre à ce que l’on soit très déçu devant ce qui s’est passé ces derniers jours, et qu’en valeur absolue, les réactions soient comparables au final. Les passionnés que nous sommes sont extrêmement déçus par l’attitude des joueurs, et c’est compliqué de se dire que ce n’est que du football. En plus, c’est une Coupe du Monde là, le summum qu n’a lieu que tous les 4 ans.

    Ou alors, j’ai mal compris le message de Jérôme Latta, et je m’en excuse.

  • kaizouman le 21/06/2010 à 09h46
    Bon article, même si j'aurais aimé un peu plus de dérision pour faire passer la pilule. Mais je ne vais pas trop chipoter, car sur le forum ont a quand même bien rigolé (jaune).

  • LLBB1975 le 21/06/2010 à 09h56
    Merci d'avoir mis en mots ce que je pense.

    Nous, amoureux du foot et des bleus, nous faisons encore une fois volé notre "bien". Mais, peut-être qu'après tout cela, la parenthèse ouverte en 1998 va se refermer.


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