Tour de chauffe
Trois victoires diversement acquises assurent le destin de l'équipe de France dans la première partie de cette Coupe des confédérations que l'on va finir par désirer… Retour sur les face-à-face avec le Japon et la Nouvelle-Zélande.
le 23 Juin 2003
FRANCE-JAPON : encore à l'arraché Malgré son élimination prématurée (dimanche soir, après sa défaite contre la Colombie), on a pu mesurer les progrès de la sélection nippone au fil de ses nombreuses confrontations avec les Bleus ces dernières années. Elle était certainement l'une des plus "complètes" et des plus motivées par l'enjeu de la CdC, et elle se présentait avec des joueurs qui ont atteint le plus haut niveau individuel (Nakata, Nakamura, Takahara), sans se départir de ses qualités collectives. Mobile, engagée, douée pour le jeu court et le replacement, elle joue véritablement et joliment au football, ainsi que le montre la qualité de certains de ses mouvements. Comme la Colombie, elle aurait mérité un meilleur sort contre des Tricolores sauvés par la transversale et un superbe but de Govou. La faute aussi à un peu de naïveté à ce niveau, à l'image de ce ceinturage un peu grossier sur Boumsong en pleine surface… Les joueurs Les Français ont pour leur part réussi à surmonter un légitime manque de cohésion ainsi qu'une condition physique encore insuffisante. Le défaut d'initiative a été flagrant, notamment de la part de milieux de terrain qui jouaient gros à titre personnel. Même si Dacourt s'est affirmé à l'occasion de sa troisième titularisation consécutive (depuis l'Égypte), Dabo a pris peu de responsabilités et Rothen n'a pas réussi sa partie. Comme lors du match précédent, l'animation des flancs est d'ailleurs restée le point faible de l'équipe dans ce 4-4-2 qui l'exige, les attaquants étant très peu servis. La faible spécificité de Marlet et Govou comme attaquants axiaux a vraisemblablement compliqué les choses, même si le Lyonnais a montré sa capacité à faire de vraies différences individuelles et inscrit un but avec une grande autorité. L'ex-Lyonnais, lui, n'a jamais réussi à trouver ses marques. Il est permis de penser qu'un système plaçant Govou sur le flanc droit et Pires dans l'axe derrière un seul attaquant aurait présenté une plus grande cohérence. Mais aurait fallu reparler de 4-2-3-1 à la Lemerre… Sagnol, en (petit) patron, affirme à la fois une belle régularité à haut niveau et une réelle maturité. Il fut un des rares piliers de cette fragile formation. Silvestre a assuré la très bonne qualité générale des centres français (presque une première historique), montrant sur le but de Govou qu'il pouvait aussi trouver des ouvertures dans l'axe. Mais les couloirs ont été encore peu exploités, notamment parce que Pires s'est fréquemment recentré et que Rothen n'a pas eu le rendement attendu. Gallas et Boumsong ne peuvent absolument pas être tenus pour responsables des nombreux tsunamis qui ont déferlé sur la défense centrale, et le résultat final oblige à les créditer d'un bon match Les deux petites observations Mikaël Silvestre (AFP): "On a respecté les consignes". Jouer laborieusement en attendant un penalty sympa? Le foot japonais accède à la reconnaissance internationale : Thierry Roland ne se trompe presque plus dans les noms des joueurs. oh yes it's good to be the pays organisateur Comme quoi, il y a des arbitres qui respectent les consignes de la FIFA. FRANCE-NOUVELLE-ZÉLANDE : écrit blanc sur noir Rien de tel qu'une vraie petite équipe pour se remettre sur de bons rails. Face à une opposition nettement moins relevée que celle offerte par la Colombie et le Japon, les Bleus ont semblé retrouver leurs pleine mesure, tant physique que technique et collective, et ils ont renoué avec leur tarif maison (troisième 5-0 de la saison après la Slovénie et l'Égypte). Fluidité, engagement, prises de risque, inspiration et efficacité étaient au rendez-vous du Stade de France, témoignant de la nécessaire progression de l'équipe au cours de cette compétition. Malgré une prévisible baisse de régime en seconde période qui offrit plus d'opportunités aux Blacks, les Blancs ne sont pas déconcentrés, obtenant l'essentiel avec le troisième but inscrit par Cissé, maladroit jusque-là, puis finissant très fort dans les arrêts de jeu. Les joueurs L'avenir dira si le positionnement de Wiltord en milieu défensif est une trouvaille ou le fruit d'un concours de circonstances, mais le Gunner a parfaitement assumé ce rôle aux côtés d'un Pedretti dont la vision du jeu fait déjà des merveilles. Si lui et Mexès ne tardent pas à atteindre leur plénitude, ils rétabliront bientôt une qualité technique "défensive" digne des champions du monde 98. L'Auxerrois a assuré une très bonne relance et s'est offert une passe décisive au terme d'une jolie chevauchée et d'une talonnade inspirée. Il s'est cependant deux fois laissé surprendre par les attaquants néo-zélandais, notamment lorsque Coveny s'est enfui dans son dos et présenté en duel face à Landreau (50e). Le gardien nantais a assuré sur les deux autres occasions noires comme sur celle-ci, repoussant un tir flottant et une tête piquée dans un dernier quart d'heure plus chaud pour lui. Principale satisfaction, Giuly a montré une activité inlassable et rétabli la capacité de pénétration des tricolores. Avec un but et deux passes décisives, son bilan personnel est éclatant. De l'autre côté du terrain, Kapo a renoué avec la qualité déjà montrée contre la Yougoslavie en novembre, avant sa blessure. Il a effacé sa terne prestation de mercredi dernier, en ouvrant notamment le score au terme d'un mouvement qu'il avait lui-même amorcé, d'une impeccable frappe du gauche. Dans ces conditions, Cissé et Henry ont pu s'illustrer et bénéficier d'un nombre significatif de ballons exploitables, inscrivant un but chacun. Santini tient son duo d'attaque majeur pour la fin de la compétition. Enfin, les "vieux", Thuram, Desailly et Lizarazu ont parfaitement tenu leur rôle et la baraque, base incontestée pour la rénovation santinienne, renforcée dans le dernier quart d'heure par l'entrée de Pires, qui paracheva le score. Les deux petites observations Landreau a été inquiété par une frappe de Hickey. Quelqu'un peut-il coudre la doublure des maillots pour que Cissé évite de mourir étouffé? UN TOUR DE CHAUFFE ET UN ROUND D'OBSERVATION On peut légitimement se demander comment Jacques Santini a réussi le pari de se sortir parfaitement — sur le plan comptable — de ce premier tour de la Coupe des confédération, avec un effectif visiblement à court de forme auquel il a fait subir une importante rotation. Sans automatismes, mais avec le maximum de réussite et le concours de penalties sympas lors de ses deux premiers matches, ces formations de circonstances sont parvenues à forcer leur destin dans une compétition piégeuse. La rencontre contre la Nouvelle-Zélande a plus idéalement conclu ce tour de chauffe et consolidé les ambitions bleues pour la suite de la compétition. Le sélectionneur s'est rapproché d'un onze type pour les deux derniers rendez-vous, bien que les bonnes prestations de Dacourt, Wiltord, Pedretti, Kapo et Giuly créent une sorte de surnombre au milieu. Devant et derrière, les choses sont plus claires, le doute principal résidant dans la personne du flanqueur de Desailly, puisque Mexès a profité de deux titularisations à Lyon et Saint-Denis pour raviver la concurrence avec Gallas. Au-delà d'un bilan sportif qu'il est de toute façon trop tôt pour tirer, Santini aura au moins très bien employé les circonstances en parvenant à faire jouer les 23 joueurs de son groupe. Et en annonçant certaines titularisations pour des matches déterminés, comme celles de Landreau, Rothen, Coupet ou Giuly, il a clairement offert aux joueurs concernés une opportunité d'expression, et des conditions favorables pour cette expression (le challenge étant clair par ailleurs). Avec la bénédiction de résultats très favorables, le sélectionneur semble donc en mesure de réussir le premier pari de ce mois de juin — rendre utile cette problématique CdC dans la perspective de l'Euro portugais — en effectuant un réel passage en revue des internationaux "possibles" à un an de l'Euro. Nul doute que passée cette étape, les essais risquent d'être moins nombreux.