Top 10 : le péril jeune
Investir dans la jeunesse étrangère n'est pas sans risque: nombreux sont les clubs français qui ont payé pour le savoir.
Auteur : Miklos Lendvai
le 11 Mars 2011
1. Ivan Franceschini, le rouge
En 1996, Marseille, de retour en Première division est pressé de retrouver les sommets. RLD offre un recrutement assez cohérent avec des stars (Letchkov, Kopke, Pedros), des joueurs confirmés (Roy et Gravelaine) et des jeunes prometteurs (Makin, Ben Slimane, Malusci). Ivan Franceschini, après des années passées dans la réserve parmesane, commence la saison titulaire dans l’axe de la défense, au côté de son compatriote Alberto Malusci. Franceschini va surtout se faire remarquer pour son engagement (deux expulsions et huit avertissements), mais il faut bien avouer qu’à l’époque, ce n’est pas le pire joueur côté olympien.
En milieu de saison, l’OM, qui n’a plus de temps à offrir au jeune Italien, remet Galtier dans l’axe et confie le couloir gauche à Jean Christophe Marquet. Franceschini n’est plus aligné et retourne en fin de saison à Parme. Transféré à Salernitana, il remporte la serie B en 1998 mais n’est pas conservé. Il signe à Lucchese pour finir dernier de Serie B. Il navigue ainsi dans plusieurs clubs avant de s’installer durablement au sein de la défense de la Reggina (2000-2006).
Défenseur de Serie A, Franceschini rejoint le Torino en 2006, où des blessures vont perturber la fin de sa carrière.
2. Thomas Pfannkuch, l‘opportuniste
Eté 1991, l'ex-promu lyonnais veut poursuivre sa progression dans l’élite (huitième en 1990, cinquième en 1991) en ciblant son recrutement. Seules trois recrues débarquent: Ben Mabrouk et Fernandez Leal pour renforcer le milieu de terrain, Thomas Pfannkuch pour la défense. Pfannkuch est un espoir de vingt-et-un ans, originaire du pays champion du monde en titre et est présenté comme le futur Beckenbauer. Sous la houlette de Domenech, il va jouer onze matches, ce qui lui suffira pour être sacré "pire joueur de l’Olympique lyonnais". En 1992, il retourne en Allemagne et disputera l’essentiel de sa carrière en troisième division allemande.
3. Pablo Contreras, le faussaire
En 1999, Monaco craque sur Pablo Contreras, jeune international de vingt-et-un ans (quatre sélections), double champion en titre au Chili. Contreras est un défenseur polyvalent pouvant jouer à gauche et dans l’axe de la défense. L’ASM pratique le plus beau football de Ligue 1 et remporte assez logiquement le championnat en 2000.
Malgré une forte concurrence (Riise, Léonard, Di Tommasso, Pignol puis Abidal), Contreras est souvent aligné. En janvier 2001, l'ASM lui demande de partir et lui trouve un club en Argentine. Des affaires de faux passeport éclatent un peu partout dans le championnat de France, et Monaco essaie de passer entre les gouttes. Mais la justice finit par tomber sur le Chilien et le condamne à une lourde amende et une interdiction temporaire du territoire.
Sur le plan sportif, le joueur va rebondir. Appelé régulièrement en sélection, sa carrière en club va être moins linéaire: il va jouer pour Osasuna, Sporting, Celta Vigo et Braga. Il évolue aujourd’hui à Salonique.
4. Christophe Kinet, le faux air
En 1997, Christophe Kinet arrive à Strasbourg, précédé d’une bonne réputation. International espoir belge, il est comparé dans son pays à Enzo Scifo pour son jeu et ses coups francs. Les recruteurs alsaciens ont été séduits lors de la finale de Coupe de Belgique, où il a offert le seul trophée de son histoire à Ekeren. Le Racing a envie de miser sur des jeunes: Kinet est accompagné de Denni Conteh et de Raphael Miceli. Le début de saison n’est pas bon sur le plan des résultats, mais Kinet est aligné régulièrement. Ses prestations sont à l’image du reste de l’équipe: pas très convaincantes.
En janvier, Proisy découvre les joies du mercato et recrute dans tous les sens (Martins pour le meilleur, Seo, Nielsen, Andersen et Zavagno pour le pire). Kinet est sacrifié et ne va pratiquement plus jouer de la saison. La saison suivante, après six mois sur le banc, il est cantonné à l’équipe réserve. En février 2000, Kinet tente de relancer sa carrière en signant à Milwall, en troisième division anglaise. Il contribue à la remontée du club jusqu’aux portes de la Premier League (défaites en barrages contre Birmingham en 2002). Il se fait alors spécialiste des promotions: FC Brussels en 2004, Sparta Rotterdam en 2005.
En 2005, il signe au RFC Liège, en quatrième division belge. Christophe Kinet prend sa retraite à trente-cinq ans après une ultime montée en troisième division.
5. Torben Frank, l’éclopé
En 1992, Torben Frank aurait pu être la sensation du mercato. Champion d’Europe des Nations avec le Danemark, multiple champion du Danemark (quatre titres remportés avec Brondby et Lyngby), ancien international espoirs, l’attaquant va finalement être un cauchemar pour Jean-Michel Aulas. Le joueur signe au club sans visite médicale pour six millions de francs. Dès son premier match, il sort sur blessure et ne portera plus jamais le maillot de l’OL. Des examens complémentaires révèlent une malformation congénitale de son genou.
Le joueur reste à l’infirmerie pendant toute la durée de son contrat. Aulas essaie par tous les moyens de ne pas payer ce joueur, mais la Ligue fait valoir ses droits et menace le club de relégation. En 1994, Torben quitte enfin l’OL et retourne à Lyngby. Il prendra sa retraite deux ans plus tard.
Il travaille actuellement dans un magasin de décoration à Copenhague.
6. Giuseppe Colucci, le capitaine
En 1999, Bordeaux, champion de France en titre, annonce le recrutement de Giuseppe Colucci, en provenance de la Roma. L’étiquette "capitaine de l’équipe d’Italie Espoirs" permet tous les fantasmes, quand on sait que son prédécesseur s’appelait Andrea Pirlo. À Bordeaux, il tombe dans un club en pleine mutation avec l’arrivée de M6. Le recrutement est ambitieux et l’arrivée de l’Italien entre dans une politique d’investissements sur la jeunesse.
Les occasions de voir Colucci sont rares, la concurrence au milieu étant assez féroce (Micoud, Battles, Martins, Ziani, Feindouno pour deux places). Baup ne le sort que pour les matches de prestige (Valence et Fiorentina en Ligue des champions): le reste du temps, il joue avec la réserve. La saison suivante, il retourne en Italie. Plus ou moins titulaire, il fait une carrière honnête de joueur de Serie A (Hellas Verone, Modene, Brescia, Reggina, Livourne, Catania et Chievo Verone).
À trente-et-un ans, il porte actuellement de maillot de Cesene, formation qu’il avait rejointe en Serie B.
7. Emra Tahirovic, le faux-jumeau
Emra Tahirovic est un joueur suédois né à Sarajevo, culminant à 1m90. Cela lui suffira pour être comparé à Zlatan Ibrahimovic et attirer de nombreux observateurs. En 2007, Claude Puel cherche désespérément un attaquant et tente le coup avec le Suédois. Il le présente comme "un joueur athlétique, capable de prendre la profondeur, très à l'aise techniquement des deux pieds. C'est un potentiel en devenir qui va s'inscrire dans notre collectif."
Au bout de deux matches, son sort est réglé et le joueur est envoyé en réserve. En janvier, il part en prêt au FC Zurich, avec option d’achat. L’option est levée mais le joueur ne jouera quasiment plus. Le FC Zurich le prête à son tour à Obredo et à Maastricht.
À vingt-trois ans, il joue actuellement à Castellon, en troisième division espagnole.
8. Aziz Makukula, le presque bon coup
Attaquant congolais, naturalisé portugais, Ariza Makukula cartonne à Salamanque en Segunda (21 buts en 39 matches). Nantes, champion de France un an plus tôt, le fait signer et lui offre même le numéro 10: malgré un physique très proche de celui de Desailly, Aziz est réputé être très doué techniquement.
À Nantes, le joueur n’arrive pas à s’imposer : en 21 matches, il ne plante qu’un seul but et est vendu à Valladolid, où il se débrouille assez bien pour intéresser le FC Séville. Dans le club andalou, le joueur ne plaît pas à Juande Ramos et est prêté à Taragona puis au Maritimo. Au Portugal, il retrouve son efficacité et attire à nouveau l’œil d’un gros club: le Benfica le fait signer en janvier 2008. Comme d’habitude avec Makukula, il n’arrive pas à franchir le palier. Un an et cinq matches plus tard, il est prêté à Bolton, où il ne fait pas mieux. Après un ultime prêt en Turquie, il signe en début de saison à Manisaspor.
9. Daniel Kenedy, le positif
En 1996, le Paris-SG, champion d’Europe en titre, cherche un latéral gauche pour remplacer Colleter, parti à Bordeaux. Daniel Kenedy, international espoir portugais et titulaire au Benfica depuis deux ans, semble très prometteur. Lancé à son retour des JO, Kenedy ne montre aucun talent et fait même plutôt peur à son poste, que Didier Domi finit par récupérer. Kenedy est finalement utilisé en milieu de terrain (quand il est aligné).
En fin de saison, il est transféré au FC Porto, qui comprend vite pourquoi ça n’a pas marché à Paris. En janvier 1998, Kenedy est prêté à Albacete, où il ne s’impose pas non plus. La saison suivante, il part refaire ses classes dans une équipe de bas de tableau portugaise (Estrella de Amadora). Ses performances lui permettent de signer à Maritimo et d’être convoqué en sélection portugaise. Appelé pour le mondial 2002, le joueur sera privé du voyage en Asie par un contrôle antidopage positif. Kenedy ne jouera même jamais pour la sélection.
Sa carrière va progressivement se rapprocher du néant (Braga, Coimbra, APOEL Nicosie, Ergotelis Heraklion, Kallithea). Il joue actuellement à l’Aias Salamina, club amateur grec.
10. Gunther Van Handenhoven, le pari de trop
En 1998, le FC Metz est convaincu d’avoir signé le nouveau prodige du football belge en la personne de Gunther Van Handenhoven. Un an plus tôt, il brillait au championnat du monde des moins de 20 ans en marquant trois buts, soit autant que Thierry Henry. À Metz, le milieu de terrain belge va montrer son talent par intermittence (une moyenne de 14 matches par saison).
En 2002, quand le club est relégué en deuxième division, il retourne en Belgique, à La Gantoise. Il enchaine les clubs sans jamais s’imposer. En 2005, il fait l’actualité en raison de son implication dans une affaire de matches truqués. Gunther n’est plus aligné par son club et va se "relancer" à Al Ahli Doha, club de deuxième division du Qatar, entrainé par un ami à lui.
Après une ultime saison à Roulers, il met un terme à sa carrière en 2009, à l’âge de trente ans.