L'indiscipline olympique
Le football peut-il prendre part aux JO sans faire tache? En tout cas, aucun sport ne semble mieux armé pour discréditer l'idéal olympique…
Auteur : Etienne Melvec
le 18 Août 2004
Bon d'accord, l'idéal olympique est une marque déposée de Coca-Cola et de quelques autres multinationales, et l'on se mettrait le doigt (ou l'accréditation) dans l'œil en faisant preuve d'un excès d'angélisme à l'égard du grand raout athénien. Mais enfin, les JO réunissent pour un bref laps de temps des disciplines tout aussi méritantes que méconnues, offrent un peu de lumière à des athlètes et des pays qui restent généralement dans l'ombre, et nous donnent toujours de purs et inoubliables moments d'émotion. Et s'il n'est pas toujours respecté, l'esprit olympique mérite qu'on entretienne sa flamme, toute vacillante qu'elle soit. Dans ce contexte, une discipline se fait remarquer par ses avanies usuelles... Le football, bien sûr, seul sport dont les représentants vont étaler une gamme inégalable de comportements antisportifs. Avant même la cérémonie d'ouverture — le tournoi débordant les dates des Jeux —, Cristiano Ronaldo, star de Manchester United et vice-champion d'Europe, a par exemple ouvert le visage d'un joueur irakien d'un vilain coup de coude devant les caméras. Ses confrères de toutes équipes (pour la plupart, ironiquement, les "Espoirs" de notre sport préféré), ne vont pas manquer, bien sûr, de déployer à leur tour tout l'arsenal des comportements en vigueur dans le football: simulations, gesticulations, simagrées, invectives adressées à l'arbitre, provocations, coups en douce, tirages de maillots, crachats, blessures imaginaires, contestations éhontées, etc. Bien sûr, d'autres sports recèlent leurs propres travers, mais aucun ne peut se prévaloir d'une collection aussi complète d'indignités. En outre, la plupart des disciplines représentées ne brassent pas les centaines de millions d'euros du foot-biz et le salaire annuel d'un seul galactique du Real suffirait à financer des dizaines de fédérations représentées en Grèce. D'ailleurs, le tournoi olympique est une plaie pour nos clubs, furieux de devoir libérer des salariés pour une cause beaucoup moins digne, à leurs yeux, qu'une tournée-exhibition aux Etats-Unis. Ajoutons à ce tableau de médailles peu glorieuses les difficultés qu'a faites jusqu'au bout la FIFA pour accepter le Code mondial antidopage, condition sine qua non pour ne pas perdre le statut olympique… Conclusion : le football n'apporte rien aux JO, mais ceux-ci ont le mérite de révéler où en est rendu le sport le plus populaire au monde…