soupalognon,
J'attendais presque avec appréhension ta réplique, mais j'y vois malheureusement, une nouvelle fois, plus de dénigrement que d'arguments. Il aurait peut-être fallu que tu donne des définitions à "raté" ou "inefficace", puisque c'était justement l'objet de notre débat.
"L'histoire regorge de gestes stupides, identifies comme tels a posteriori, je ne vois pas en quoi il est choquant de dire qu'ils sont completement cons s'ils ne servent a rien".
Tu pourras toujours dire que je suis pédant, mais franchement, de quoi tu parles, et qu'est-ce que tu démontres? En disant qu'un truc est stupide parce qu'il est con puisqu'il ne sert à rien, tu n'explique rien, même avec tes preuves historiques anonymes (???).
Tant pis, j'essaie d'expliquer mon point de vue :
D'abord, mets-toi pourtant à la place d'un géant de l'agroalimentaire comme Danone qui communique énormément sur sa vertueuse politique sociale. Tu sembles croire que seule une baisse des ventes peut l'affecter, en ignorant totalement le coût exorbitant, en termes de communication et d'image, qu'a représenté la couverture médiatique du boycott... Quand il arrive des choses pareilles, je peux t'assurer que c'est une situation de crise, que tout le monde est décomposé au siège et que l'on déploie des moyens très importants pour reprendre le contrôle (parfois avec d'autres effets pervers, comme en atteste le recours très critiqué contre les animateurs du site "
lien).
Sur ce point encore, je te renvoie à ce qui a été dit plus haut à propos des vertus que doivent impérativement afficher les multinationales ("développement durable", "gouvernement d'entreprise", "responsabilité sociale" etc.). Après, tu peux être pour ou contre, mais dans le cas Danone, le boycott n'est certainement pas inefficace.
Mais ce qui précède ne concerne que Danone, alors que la dimension symbolique (cad politique) de ce genre d'action, comme de tout mouvement social, excède toujours le cas d'espèce.
Tu ne peux ignorer que l'idéologie dominante actuellement est celle du libéralisme ou ultra-libéralisme, doctrine économique qui a étendu son emprise intellectuelle dans les médias et dans la vie politique, et se présente à l'esprit de tous les gens normaux comme "naturelle", fatale, obligée, comme relevant du "bon sens".
Ceci dit, tant qu'on n'a pas basculé dans une dictature, l'espace public reste un lieu de lutte (au moins intellectuelle), dans lequel des formes d'opposition, de pensée critique tâchent de se faire entendre. Les mouvements sociaux, citoyens, syndicaux entrent tous dans cette logique. C'est en cela que l'action contre Danone n'a pas pour unique but de faire baisser les ventes de produits, ou d'altérer l'image de la société, mais aussi de peser dans le débat politique général, de développer la conscience du prix exorbitant du libéralisme, de mobiliser contre les licenciements boursiers et enfin, in fine, de montrer que la lutte est possible. Après, c'est plus ou moins réussi, mais c'est rarement sans effet.
Quand 400.000 personnes manifestent à Florence contre la mondialisation libérale et la guerre en Irak, est-ce ridicule, car dans l'optique "utilitariste" que tu revendiques, marcher dans la rue est certainement "gratuit" et inutile? Je suppose que tu vas ramener ça à la "logique binaire de la lutte des classes", mais c'est visiblement un peu moins binaire que ça ou que les "mentalités d'assistés" (?).
Ce n'est peut-être pas assez "concret", mais c'est pourtant bien réel. Après, je ne nie pas les contradictions de la méthode du boycott, ses défauts, ses effets pervers. Par contre nier totalement ses effets politiques (au sens large) me semble une erreur.
Pour conclure, j'espère qu'à tes yeux, je n'ai pas une nouvelle fois "théorisé et péroré dans le vide dans un style ampoulé", vu que moi j'appelle ça se donner la peine d'argumenter son point de vue.