Double zéro
C'est une équipe de France hybride, mélange de jeunes pousses et de fortes têtes, qui a ramené de Rotterdam un nul plus ennuyant qu'ennuyeux… Un compte-rendu plein de nalyses.
le 2 Avr 2004
En dehors de l'intérêt statistique (8e match sans but encaissé, 15e match sans défaite à défaut de 15e victoire de rang), difficile, de prime abord, de trouver un intérêt à ce match serré comme l'élastique du slip de Mido, opposant deux équipes diminuées par les absences, en manque d'imagination dans des espaces raréfiés par le pressing et les fautes. Si l'engagement n'a pas manqué, les coups d'éclats ont été rares et l'ouverture du score n'a été frôlée que sur des actions rocambolesques. Les traditionnels remplacements pléthoriques lors des matches amicaux, que la FIFA s'est décidée à limiter pour la saison prochaine, n'ont pas amélioré la lisibilité de la partie. Les absents nous font du tort On ne pourra bientôt plus organiser des rencontres internationales entre deux tours de Ligue des champions, à en juger par le nombre de certificats médicaux reçus par le staff de l'équipe de France, concernant des joueurs qui coururent comme des lapins le week-end dernier et courront comme des lièvres le week-end prochain. Le plus dramatique est la résignation, voire la complaisance, qui accompagnent ces forfaits diplomatiques, comme si les sélections s'accommodaient de n'être plus que la cinquième roue du carrosse et renonçaient à s'opposer au lobbying des clubs (voir On achève bien les joueurs et Qui veut la peau des internationaux). L'affaire est d'autant plus rageante que Jacques Santini, imitant d'autres sélectionneurs nationaux, a renoncé à la date prévue en avril. Autant dire que si l'on met de côté le France-Brésil du 20 mai, qui posera encore plus de problèmes de disponibilités, il ne restera plus que les réceptions de l'Andorre et de l'Ukraine, à veille de l'Euro (28 mai et 8 juin), pour compléter la "préparation" des Bleus. Bientôt, les équipes nationales improviseront leurs tactiques et leurs automatismes sur le tas, directement lors des phases finales. Il devient de plus en plus urgent de réviser les calendriers, mais les seules réformes qu'on nous propose sont celles du G14, sous la forme d'un chantage: c'est aux sélections d'économiser les joueurs en sacrifiant leur préparation, dans l'espoir que les internationaux arrivent au championnat d'Europe ou à la Coupe du monde dans un état de délabrement seulement relatif. Quatre majeur Seul secteur épargné par les défections, puisque Santini disposait de la quasi-totalité des joueurs qu'il a le plus utilisés depuis son entrée en fonction, la défense s'est présentée dans une disposition qui sera très certainement celle de l'Euro au Portugal. Les doutes ne sont désormais plus de mise quant au recentrage de Thuram, validé lors des quatre dernières rencontres, d'autant que son association avec Desailly a été aussi probante mercredi soir que contre la Belgique. Le capitaine Marcel n'est jamais aussi bon que quand il est énervé par les critiques exprimés à son sujet — autant dire qu'il a été impeccable, rageur aussi bien dans ses interventions que dans ses relances, n'hésitant pas à s'offrir des montées balle eu pied intéressantes. Lizarazu ayant lui aussi évolué à son niveau, la déception est venue de Sagnol, assez loin de ses prestations précédentes en bleu. Excessivement ambitieux dans ses relances, il s'est fait remarquer dans le mauvais sens et Thuram aurait presque pu lui en vouloir d'avoir peut-être semé le doute dans l'esprit du sélectionneur. Un excès de confiance du Munichois, juste au moment où la voie est libre pour lui? Espérons qu'il soit passager, parce que Gallas, titularisé à Bruxelles et remplaçant de Sagnol à Rotterdam, n'est à ce poste qu'une solution de repli. De belles paires au milieu On croit savoir que Vieira et Makelele seront des titulaires indiscutables en juin prochain. Mais comment ne pas remarquer que Dacourt a été titularisé à dix reprises depuis un an? Il a certes bénéficié des absences récurrentes des deux premiers cités, mais la qualité croissante de ses prestations crée une concurrence non négligeable, d'autant qu'on ne sait pas dans quel état les deux "Anglais" finiront la saison… Mercredi soir, le Romain a été particulièrement accrocheur, et sa technique lui autorise une conservation de balle qui fut utile face à de très bons milieux néerlandais. Dacourt-Vieira, Makelele-Vieira et Dacourt-Makelele sont les trois doublettes de relayeurs les plus souvent testées par Santini depuis le début de la saison. Avec Pedretti qui n'a pas démérité, notamment lors de la Coupe des confédérations, ce secteur est particulièrement bien doté. Les autres gars Micoud, surprise du chef, a joué sans complexes et montré avec ses tentatives de dribble et ses passes en première intention qu'il disposait d'une belle confiance en ce moment. Il a été bon dans les petits espaces, avec une volonté de construire et de jouer dans le bon tempo, sans ralentir le jeu — même s'il a été moins à son aise en seconde période, sur un côté droit qu'il fréquente rarement et où il a dû défendre face à Zenden. Quant à savoir ce que lui réserve Santini pour la suite… Giuly court derrière son niveau d'avant sa blessure, et il a un peu disparu après de bons débuts. Dommage qu’il n’y ait pas eu plus de mouvements devant, pour profiter des quelques brèches qu’il a créées. Bruno Cheyrou, qui l'a remplacé après la pause, n'a pas franchement marqué les esprits pour sa troisième sélection. Malgré les bonnes volontés, les attaquants (Trezeguet, Govou puis Henry et enfin Luyindula) ont touché un minimum de ballons. Leur frustration a rappelé qu'il y a des absences qu'on ne compense pas. Trezeguet a presque rappelé Deivid à Bordeaux, Govou a servi ses détracteurs avec quelques mauvais choix et Henry n'a rien eu le temps de tenter.
Pascal Praud parmi les siens. |