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Domenech à mi-chemin de la vérité

Dans une interview qui sonne son "retour médiatique", l'ancien sélectionneur donne sa version des faits mais ne les explique pas.
Auteur : Jérôme Latta le 17 Fev 2011

 

Au moins, la communication de Raymond Domenech semble-t-elle enfin contrôlée: une longue période de silence sans pour autant donner l'impression qu'il se terre, les prémisses d'un retour avec quelques apparitions sans prise de parole (il entraîne les jeunes de l'ACBB à Boulogne-Billancourt), et enfin une interview dans un magazine généraliste, c'est-à-dire sur terrain neutre.


Les sales gosses

Cette communication est-elle plus sincère pour autant? Pas sûr, à la lecture de L'Express, que l'homme ait fait autre chose que dire, selon l'expression consacrée, "ses" vérités. Il le pose lui-même d'emblée: "Tout le monde parle à ma place. J'ai envie de rétablir ma vérité." S'ensuivent des protestations convenues: "Je ne suis pas l'abruti que l'on décrit", "J'aime le foot. Et qu'on ne mette pas en doute mon intégrité!". Et une thèse connue: "Je cherchais à protéger le groupe".

C'est bien là que manque une analyse. Domenech reconnaît des erreurs, comme la lecture du communiqué des joueurs – selon lui pour mettre fin à la "mascarade" du bus, admettant: "Si j'avais réfléchi deux secondes, je serais parti..." Il charge aussi, comme tout le monde, les joueurs dont il nie l'isolement [1] et qu'il affirme avoir tenté de convaincre. "Une bande de sales gosses inconscients": l'expression est cinglante, elle fait écho à celle de Roselyne Bachelot, dont par ailleurs l'ancien sélectionneur se gausse ouvertement. Le propos verse pourtant dans l'indulgence à propos de Thierry Henry ou des footballeurs en général [2]. "La colère ne sert à rien et j'ai un gros défaut: je comprends toujours trop bien les faiblesses humaines".

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Le discrédit du Lyonnais

Même s'il admet sa perte d'autorité à propos de la mutinerie ("Je suis surtout triste de ne pas avoir su trouver les bons mots face aux joueurs" [3]), il ne pousse pas plus loin l'examen du même phénomène dans le domaine sportif: "Je me suis peut-être trompé sur le choix des joueurs. L'équipe n'a pas bien joué: peut-être ai-je mal expliqué mon projet..." C'est rester très en deçà de la réalité. La fin de règne de Domenech est celle d'un discrédit auprès des joueurs devenu total au moment de l'explosion de l'équipe de France.

L'erreur la plus tragique du Lyonnais, sa principale faute, a été de vouloir continuer après l'Euro 2008, alors que toutes les conditions étaient réunies pour rendre son travail absolument impossible: la défiance de la Fédération et de son président, l'assurance de déchainements médiatiques aux moindres difficultés sportives, la présence d'ennemis farouches depuis les meilleurs postes de tir... et la consolidation de son statut de refouloir national. Par la suite, la volonté de Domenech de jouer une fois de trop la partition du groupe uni contre l'adversité relève d'une grave erreur stratégique: comment a-t-il pu croire que des joueurs dépourvus de vrai leadership depuis les retraites de Thuram ou Zidane allaient le suivre? Les footballeurs qui pensent que leur coach est un imbécile se comptent par centaines, et ils parviennent parfois à obtenir son éviction. Mais il est plus rare qu'ils finissent par faire comme s'il n'existait pas, à plus forte raison en pleine Coupe du monde.


La grève était annoncée

Le fiasco du Mondial aura au moins eu le mérite de montrer que Raymond Domenech – qui n'a jamais été un aussi mauvais entraîneur que l'opinion le pensait et dont les choix sportifs, discutables, n'ont jamais été aberrants –, ne pouvait décemment pas en être tenu pour le seul responsable. Un lieu commun consiste à dire aujourd'hui, à la façon du toujours subtil Christophe Dugarry, que "l’équipe de France n’arrivait pas à faire trois passes d’affilée". C'est travestir grossièrement la réalité: entre 2008 et 2010, la sélection avait certes été en grande difficulté après une défaite cruelle en Autriche, mais elle a aussi réussi d'excellents matches (par exemple contre la Serbie), survécu à une déveine incroyable et dégagé une identité de jeu dans un 4-2-3-1 organisé autour d'un Gourcuff alors en plein épanouissement.

L'épreuve des barrages contre l'Irlande aurait dû être un aboutissement et un tremplin, au lieu de quoi le calamiteux match retour montra une équipe sans mental qui se qualifia dans une atmosphère délétère. Le match amical contre l'Espagne, en mars, vit évoluer des internationaux démissionnaires. La grève avait déjà commencé. En annonçant vouloir couper les têtes, avant de finalement retenir les pontifes, Domenech achevait de perdre son crédit et parachevait son fourvoiement: ce sont ceux auxquels il accordait une confiance démesurée qui allaient le lâcher avec le moins de vergogne – pendant et après la compétition.


Le résultat le plus criant fut donc le spectacle d'Anelka atrocement mauvais sur le terrain, traînant des pieds pour montrer son désaccord avec sa position avant d'insulter le sélectionneur qui lui rappelait les consignes. Domenech avait fini d'exister en tant qu'entraîneur bien avant la mi-temps de France-Mexique. C'est peut-être demander beaucoup à une personne accablée de tous les torts, mais on aurait aimé qu'il nous explique comment l'équipe de France en était arrivée là. Ses demi-aveux n'y suffisent pas.


[1] "Il faut arrêter avec ces histoires de 'bulle'. Ils disposaient non pas d'un, mais de deux, voire trois téléphones portables, de deux ordinateurs. Les infos, ils les avaient plus vite que moi! C'était très facile de communiquer avec l'extérieur."
[2] "L'entraîneur de Manchester City disait récemment que les joueurs actuels se foutent de tout. Ce n'est pas tout à fait vrai. Je dirais plutôt qu'ils n'ont pas forcément conscience des enjeux dans lesquels ils évoluent".
[3] "Je leur dis même que leurs familles les regardent et que l'image qu'ils s'apprêtent à envoyer est terrible. Personne ne répond. C'est le silence. A trois reprises, je descends pour les laisser réfléchir. Quand je remonte, je les entends palabrer, je réessaie. Mais rien".

Réactions

  • HumLloriste le 18/02/2011 à 17h40
    Très bon article, comme toujours.
    Modéré, réfléchi, analytique...

    Parfaitement d'accord sur sa plus grosse erreur : ne pas être parti après l'Euro 2008 - et, au passage, annoncer qu'il préparait la CM, ça c'est le truc que tu peux dire *avant* la compétition, mais pas après une élimination retentissante au 1er tour.
    S'en aller aurait, pour le coup, été un geste logique, intègre et intelligent, plus en conformité avec l'homme tel que je le croyais (et Jacquet le croyait, aussi !)

    Baka in the sky with ballons
    jeudi 17 février 2011 - 10h49
    "au final je le trouve super consensuel. Que ce soir dans sa communication ou dans sa gestion de l'équipe. Son style de jeu est tout mou, ses choix de joueurs sont pas surprenants, il balance rarement des scuds en interview... (...) Domenech il est toujours tiède."
    --
    Mais il ne l'a pas toujours été ! Sa 1ère année de sélectionneur avant le fameux retour des anciens (saison 2004-2005) a été particulièrement audacieuse, aussi bien dans le choix des joueurs que dans sa com. C'est là qu'il a vu que les blagues et le 2ème degré avec les journalistes, ça ne marchait pas. Quant à 'son' équipe de cette saison-là, elle a bien failli réussir à se qualifier (sans Zidane) : le tournant aura été l'exclusion de Trézéguet en Israël.

    Pour en revenir à l'interview, moi ce que j'ai aimé c'est cette phrase :
    "Enfant déjà, mes professeurs se plaignaient de mon attitude. Lorsque je répondais simplement à une question, ils pensaient à tort que c'était de l'insolence."

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