Sans fric, c'est chic
La championnat de France va-t-il retrouver ses couleurs de l'avant-Bosman?
Auteur : Thibault Lécuyer
le 18 Août 2010
Souvenez-vous, c'était il y a dix ans, peut-être quinze. La D1, cette butineuse, aimait s'offrir à un prétendant différent chaque année. Avec une régularité surprenante, une équipe arrivait à maturité, remportait le championnat, se faisait piller et laissait la place au suivant sur la liste. La compétition était ouverte, les équipes fragiles, les effectifs limités et une blessure longue durée pouvait suffire à éliminer un candidat au titre. Paradoxalement, les clubs français avaient d'excellents résultats en Coupe d'Europe.
Puis Bosman et la Ligue des champions ont changé la donne. Est arrivée l'époque des effectifs aux postes doublés. En cas de coup dur concernant un international, le favori avait un autre international à aligner. En cas de long parcours européen aussi. En cas de suspension, de tsunami dans son pays d'origine, d'amputation des quatre membres, il y avait toujours un autre international à titulariser pour s'assurer une des places qualificatives pour la Ligue des champions. La L1 a eu son Big One avant la Californie, puis son Big Two et… patatras.
Ventes privées
La Crise. "La fin des années fric?" avions nous titré (quelques semaines avant le transfert de Cristiano Ronaldo, démontrant un incomparable sens de l'à-propos) en une du magazine. Nous y sommes. Les clubs ont réduit leur train de vie plus vite que le chef de l'état, et se sont échinés à se séparer des doublonneurs de poste – si possible les remplaçants – en enchaînant les aller-retour en Turquie. Quelques titulaires et beaucoup de seconds sont partis, redonnant un visage humain aux groupes sur le point de s'affronter.
Et voilà nos cadors à la merci du moindre pépin. Lyon avait réussi à se maintenir au sommet malgré une consommation d'adducteurs largement au-dessus de la moyenne, il va falloir désormais piocher chez les moins de 19 plutôt que chez les plus de 300K€. Marseille ne sait pas qui dans son groupe vieillira comme Jean-Louis Aubert, et qui vieillira comme Louis Bertignac.
Et si Lille?.. Et si Rennes? Et si Paris? Monaco? Il faudrait de la chance. Mais ces dernières années, la chance ne suffisait qu'à accrocher au mieux un strapontin éjectable pour la C1. Au bout du déficit se trouve peut-être un peu de nouveauté et de réconfort pour les supporters longtemps privés d'honneurs.
Si la saison 2010/11 devait accoucher d'un championnat à l'ancienne, on entendrait probablement revenir l'antienne des clubs français trop inconstants pour briller aux côtés de Manchester et de Barcelone. Souvenons-nous toutefois qu'à mesure que nos fers de lance emmagasinaient argent et expérience, les meilleurs clubs d'Europe s'envolaient beaucoup trop haut pour être rattrapés. Et qu'on ne prenait pas moins de plaisir en 1995.