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La dictature du ralenti

La surenchère technologique dans les retransmissions télévisées finit par distordre complètement notre perception du jeu. En multipliant les images, et notamment les ralentis, la télévision s\'éloigne de plus en plus du football.

Auteur : Pierre Martini le 18 Nov 2002

 

 

Éloge du Replay

Il fut un temps, que les moins jeunes d'entre nous se rappellent, où le seul effet audiovisuel qui agrémentait les retransmissions était le ralenti. Mais ce n'était pas le ralenti que nous connaissons aujourd'hui. Déjà, il fallait attendre patiemment le recalage des magnétoscopes et l'arrêt de jeu propice. On l'identifiait immédiatement au "R" clignotant qui venait s'afficher dans le coin supérieur de l'écran. Une image arrêtée s'affichait alors, et après un temps de démarrage variable (un patinage pouvait survenir, et l'on se souvient des difficultés extrêmes que la télévision bulgare rencontrait dans cet exercice) l'action se déroulait à nouveau sous nos yeux.

À l'origine, le Replay portait bien son nom — avant d'être abusivement traduit en français par "ralenti" — puisqu'il "rejouait" l'action à vitesse réelle. Rapidement, les réalisateurs choisirent justement de ralentir l'image afin de mieux détailler la phase de jeu, puis d'en multiplier les applications au cours d'un match. Mais en raison des limites techniques, on y recourait encore avec parcimonie, essentiellement pour remontrer les buts (c'est-à-dire les beaux gestes — sauf s'il s'agissait d'un but de Bernard Lacombe).

 

Toujours plus de différé dans le direct

La technique progressant, l'usage devint de plus en systématique et s'intégra totalement à la mise en scène télévisuelle des matches. La diffusion des ralentis meublait les temps morts et densifiait le spectacle, offrant du grain à moudre pour le commentaire. Tant de grain d'ailleurs que le revisionnage est aujourd'hui devenu totalement obsessionnel chez des commentateurs qui tiennent maladivement, et en pure perte, à rejuger les décisions arbitrales. Tout récemment encore, cette exploitation du ralenti connaissait une nouvelle application avec le "révélateur de Canal+ (voir Vidéo maton).

Du côté de la réalisation elle-même, les ralentis ne sont qu'une des innombrables ressources techniques auxquelles les réalisateurs font appel, depuis la révolution copernicienne menée sur Canal+ par Charles Biétry et Jean-Paul Jaud dans les années 80. Une certaine surenchère s'est effectivement développée avec la multiplication des caméras (et donc des ralentis, parce qu'il faut bien s'en servir), l'insertion permanente de plans de coupe (plans sur le banc ou les tribunes, gros plans sur les joueurs qui se mouchent, cadres resserrés sur une portion du terrain…), l'introduction des infographies statistiques, les gadgets comme le calcul de la distance ou de la vitesse des frappes. Cette inflation est telle qu'on est parfois contraint d'inventer de nouveaux gadgets pour s'en sortir, comme ces "grands écrans" virtuels pour incruster les plans de coupe (voir la Gazette 2).

On peut croire en l'intérêt de ces dispositifs, mais ils finissent par faire passer le jeu au second plan. C'est ainsi que la volonté de multiplier les gros plans sur les visages (pour un surcroît d'humanité) ou de passer hâtivement le ralenti de l'occasion ou de la faute précédente nous fait souvent manquer le début d'actions importantes, ou ignorer comment un ballon a été récupéré ou relancé. Le reste du temps, la continuité du match est hachée menue. À eux seuls, les ralentis approchent la centaine par match et dépassent les 10% du temps de jeu. (1)…

 

L'excès de ralenti nuit gravement à la réalité (2)

Deux avancées techniques majeures ont radicalisé la dictature du ralenti. D'une part, la possibilité grâce au numérique de les lancer presque instantanément. Ce procédé a fait l'admiration du monde entier lors de la Coupe du monde 98, avant d'être généralisé. D'autre part, l'introduction de la "loupe", avec des images d'une qualité irréprochable (au prix d'un ralentissement encore supérieur), justifiant encore plus de séquences à vocation "esthétique". Pourtant, la supériorité du ralenti sur la "vitesse réelle" pour comprendre une action est complètement infondée. La loupe en donne un exemple flagrant avec son effet de déréalisation des contacts, qui fait passer des tacles uruguayens pour d'aimables figures de danse contemporaine (ou inversement). D'autre part, le but du réalisateur est de déclencher sa rafale de ralentis (au moins trois, et forcément courts) sans se demander lequel apporterait la meilleure information, quel angle est le pertinent. Il n'en a pas le temps de toute façon, et la répétition des séquences, jusqu'à l'hypnose, est devenue une figure obligée du genre. On en arrive à la thèse soutenue ici. Au lieu de passer trois ralentis brefs, on ferait infiniment mieux de nous remontrer l'action dans son intégralité et à vitesse réelle. Car les ralentis spolient toujours le lancement des actions, rendent invisibles les gestes préparatoires tout aussi décisifs que celui du buteur. L'action retrouve tout son sens si elle est montrée en intégralité et dans son timing réel, permettant de comprendre comment se fait le décalage, de mesurer le retard du défenseur, de saisir le placement et le mouvement des joueurs. Malheureusement, cette séquence est justement la seule qu'on ne revoit presque jamais, même dans les résumés de rencontres.

 

Plus de télévision, moins de football

Cette "technologisation" du football à la télévision ne fait quasiment pas débat dans les médias ou chez les spectateurs, tant cette évolution semble naturelle. On peut même estimer que cet enrichissement du spectacle est plutôt apprécié, sachant de toute façon que le football, est devenu un objet purement télévisuel pour l'écrasante majorité de son public (les téléspectateurs sont infiniment plus nombreux que les spectateurs)… Jusqu'à faire retour dans les stades par le biais de vrais écrans géants (susceptibles, comme à la Coupe du monde, de diffuser les ralentis et de réintroduire la télévision dans l'enceinte sportive). Justement, dans sa tribune, un spectateur occasionnel va être comme par réflexe frustré de ne pouvoir revoir l'action qui vient de dérouler sous ses yeux. Mais en revanche, il va vivre le match dans sa continuité, il va saisir le caractère unique et définitif de chaque action, ressentir que le match se déroule bien dans le même espace-temps que lui. Et comme le dit Jacques Blociszewski, sa vision est libre et mobile (voir note ci-dessous). Ainsi, on saisit bien mieux les éléments tactiques d'une rencontre depuis les gradins que devant son, poste (malgré les éclairages de nos consultants préférés). La recherche d'un spectacle toujours plus télégénique (dans sa forme visuelle et dans son mode de narration) finit par dénaturer le jeu. À force de saucissonner les matches et d'interposer des "prothèses de vision" entre le spectateur et le spectacle, d'imposer un seul mode de lecture, l'œil est certes excité, mais la compréhension du jeu devient de plus en plus hypothétique. Et surtout, c'est un produit de télévision qui se substitue progressivement au football.

 

Jacques Blociszewski, spécialiste des nouvelles technologies audiovisuelles, est aussi un passionné de football qui analyse et combat, non sans une part de Don Quichottisme qu'il reconnaît lui-même, les dommages que la télévision inflige au football. Il est l'auteur de nombreux articles parus sur le sujet, parus dans Le Monde, le Monde Diplomatique ou les revues spécialisées. Ayant une totale identité de vue avec lui sur la question de l'arbitrage vidéo, nous profitons de l'occasion pour lui rendre hommage. Les réflexions menées ici lui doivent beaucoup, de même qu'à la précieuse documentation qu'il nous a fournie. Voici l'introduction d'un article qui montre comment le ralenti est utilisé comme un instrument de dopage du spectacle, de transformation du réel et de persécution des arbitres: "Alors que le regard que la télévision porte sur le football façonne notre propre regard, le culte de la technologie et une certaine idéologie du contrôle et de la vidéosurveillance transforme le sport-spectacle en sport-procès, et mettent le football en danger. Le ralenti est le symptôme le plus flagrant de cette utilisation mal comprise et malsaine de la technique. Sous couvert de vérification et d'esthétisme, les images au ralenti déforment profondément notre perception du réel". "Le football télévisé victime du ralenti", in Communication et langages, septembre 2001.

(1) Lors de la finale de la coupe du monde 98, Bernard Leconte a recensé 89 ralentis pour une durée de 9 minutes 30. Bernard Leconte, Pierre Gabaston, "Sports et télévision", L'Harmattan 2000, cité par J. Blociszewski.
(2) Ce titre est celui d'un article des Cahiers 98 : L'excès de ralentis nuit gravement à la vérité
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Réactions

  • CELTIC BHOY le 18/11/2002 à 11h58
    en même temps, CLV, c'est normal. Le jeu y est plus riche, donc pas besoin d'en rajouter dans la réalisation, hé hé ;-)

  • kalle le 18/11/2002 à 12h01
    Ben moi plutôt que de voir et revoir le même but marqué à tous les arrêts de jeu, je préfère savoir si le hors-jeux (ou autre) est justifié ou pas sur la base d'un ralenti.
    Mais chacun a le droit d'avoir sa préférence.

  • MajorFatal le 18/11/2002 à 12h32
    A propos des écrans dans les stades: je dois être un affeux footix, mais j'avoue que je suis souvent frustré, quand je suis au stade, de ne pas revoir les actions sur écran géant. Si, sur le plan de l'atmosphère et de la vision tactique, rien ne remplacera jamais une bonne place en tribunes, je ne vois pas pourquoi on s'interdirait d'améliorer le spectacle dans le stade lui-même. D'ailleurs, plus généralement, je trouve que la plupart des enceintes de foot sont totalement archaïques: pas de replay, un confort minimaliste, des sanitaires dans un état déplorable, etc...

  • cours-la-ville le 18/11/2002 à 12h34
    Mais ça sert à quoi de revoir indéfiniment des actions (des fautes et des hors-jeux, quel spectacle!) qui ont été jugées et sur lesquelles on ne peut pas revenir?

    Ma préférence à moi (rien à voir avec Julien Clerc), elle va plutôt vers les belles actions et les beaux gestes (quoique les 2532 ralentis sur les gris-gris de Zidane avec l'EdF sont un peu saoulants à la longue).
    Mon idéal, c'est des rediffusions sans commentateurs (mais avec le son d'ambiance) et avec le minimum de gimmicks et de ralentis, pour retrouver la pureté et l'instantanéité du "vrai match".

  • cours-la-ville le 18/11/2002 à 12h36
    MajorFatal, tu devrais essayer les loges VIP :))

  • MajorFatal le 18/11/2002 à 12h51
    Je l'attendais celle-là clv ! Franchement, au prix des places, j'estime que le service est vraiment nul dans la plupart des stades que je connais. Ce que j'aime, c'est voir un match de foot, de rugby, ce n'est pas d'avoir mal au c.. après une heure et demie. Si pour toi le côté spartiate fait partie du truc, ce n'est pas mon cas !

  • cours-la-ville le 18/11/2002 à 13h38
    OK, mais là je crois qu'il y a des choses qu'on ne peut pas changer, et que ton rejet tient à un phénomène dont n'est pas responsable le football : tu vieillis et tu t'embourgeoises :))
    Ce que tu reproches aux stades, c'est de ne pas avoir les mêmes conditions de confort que chez toi (chauffage, canapé, télévision, épouse aimante etc.).

  • CELTIC BHOY le 18/11/2002 à 13h38
    ben, faut dire, Major, que tes préférences vont à des clubs de L2 ! (Nancy, ASSE, Toulouse) ;-)) tu devrais essayer des clubs de top niveau, des fois ;-))))

    sinon, kalle, je n'avais peut-être pas l'air d'être ironique, mais je l'étais un peu en fait quand je parlais du but Larsson repassé à tous les temps morts ;-) pour les ralentis sur des hors-jeu, ça ne me donne pas toujours satisfaction, mais dans ce cas ça peut être effectivement utile. En fait, j'ai surtout du mal avec les ralentis quand il y a une faute, parce que tantôt un plongeur a l'air balancé au ralenti, tantôt c'est l'inverse.

    Et puis, au stade, même quand on est mal placé et qu'on ne voit pas grand chose, l'essentiel n'est pas de voir le match dans les meilleures conditions, mais de supporter son équipe pour qu'elle gagne (je conçois que cet opinion n'est pas partagée par tout le monde)

  • suppdebastille le 18/11/2002 à 13h39
    Major , les écrans géants sont là en effet pour remplacer la télé , cad diffuser des pubs à n'en plus finir, depuis qu'il y a des écrans géants au Parc, ça n'apporte vraiment pas grand chose au match , par contre on doit subir une rafale de pubs jusqu'à plus soif.

  • gxnc le 18/11/2002 à 13h56
    Les écrans géants du parc servent aussi à montrer les joueurs en train de faire les pitres lors de la présentation de l'équipe.

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