Vignettes Panini : le dessous des cartes
When Saturday Comes – Le vieux rituel des vignettes de joueurs à collectionner et échanger résiste au changement. Les éditeurs achètent au prix fort les droits des compétitions, et ont déjà basculé vers l'adaptation numérique de leur vieille formule.
Extrait du numéro 347 de When Saturday Comes. Titre original : "Stick or Twist", traduction Toto le zéro.
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Depuis des années, le plaisir d'ouvrir un paquet de vignettes ou de cartes à collectionner sert de rite initiatique pour les jeunes fans de football. Et même à l'ère technologique des consoles de jeu ou des tablettes, la demande pour les cartes Panini ou Merlin reste forte.
Ventes et droits en hausse
Tellement forte que les ventes continuent d'augmenter pour ces deux sociétés, et que le montant que ces dernières sont disposées à verser pour les droits des principaux championnats ne semble pas diminuer. Après une année exceptionnelle favorisée par son statut de fournisseur officiel des vignettes lors de la Coupe du monde 2014, Panini a enregistré en 2015 une hausse de 41% de ses ventes à l'international, passant de 490 à 690 millions d'euros. Pour Topps Europe, qui possède les produits Merlin et Match Attax, les ventes au Royaume-Uni sont passé de 17 à 27 millions d'euros, bien qu'elles soient moins importantes dans le reste de l'Europe [1]
Des chiffres qui peuvent expliquer pourquoi Panini n'a, récemment, pas lésiné sur les moyens auprès de la Fédération anglaise (FA) pour acquérir les droits des vignettes de l'équipe d'Angleterre – vignettes dont une série vient de sortir –, ainsi que les produits associés. La maison italienne peut ainsi représenter les joueurs en tenue complète, par opposition aux montages Photoshop qui ne montrent pas les logos officiels. Même les rivaux de Topps le concèdent dans leur rapport annuel: "L'entreprise estime que ses contrats de licence sont d'une importance significative pour ses activités".
Panini prophète en son pays
Alors qui possède quoi? Lors de la signature du nouveau contrat de quatre ans avec la FA, Peter Worsop, le directeur des licences de Panini, a déclaré que sa maison d'édition se concentrait sur les équipes nationales et les compétitions internationales. Après avoir conçu l'album officiel de vignettes de la Coupe du monde, Panini entend signer des partenariats avec les participants à l'Euro 2016 et avec le tournoi lui-même, tout en proposant des albums pour la Copa America.
Topps, pour sa part, semble se concentrer davantage sur les ligues nationales. Après avoir renforcé son partenariat avec la Premier League, inauguré en 2004, la firme de Brooklyn a produit la collection officielle du championnat écossais ainsi que les cartes à collectionner de la Ligue des champions et de la Bundesliga. Néanmoins, Panini est encore dominateur dans ce domaine. L'éditeur italien est naturellement prophète en son pays, son premier album pour la Serie A remontant à 1961, et s'est même associé avec la Liga afin de produire sa collection de vignettes flatteusement intitulée "Megacracks", qui représente les joueurs de tous les clubs de l'élite en Espagne.
L'équipe d'Angleterre à la carte
Panini a également publié des albums pour divers autres pays depuis les années 1970, et s'est aventuré en Russie dernièrement, mais du fait de la hausse du prix des matières premières, dont le marché des vignettes autocollantes est fortement tributaire, seuls les championnats majeurs sont suffisamment attractifs pour que les maisons d'édition se disputent le droit d'en concevoir les vignettes. Ainsi, dans son communiqué de presse relatif au partenariat avec la FA, la firme italienne fut prompte à souligner que "826 millions de personnes" suivaient l'équipe des Three Lions et que, selon elle, les enfants de Chine de d'Afrique pourraient désormais s'échanger les cartes de Wayne Rooney et James Vardy sur les terrains de jeu.
Topps ne proposera une offre concurrente pour l'Euro 2016 que si la firme américaine estime pouvoir surpasser les ventes de Panini, ce qui semble peu probable. Mais elle pourrait néanmoins avancer la sortie des albums dédiés à la Premier League et à la Bundesliga afin d'encourager le public à acheter les packs basés sur ceux qui joueront les premiers rôles en France. S'il venait à briller à l'Euro, Harry Kane deviendrait la tête de gondole des pubs pour les cartes Match Attax de la prochaine saison Anglaise.
Vers les vignettes virtuelles ?
Si la cote des cartes réelles demeure forte, les maisons rivales investissent dans les produits numériques. Panini a lancé Adrenalyn XL, une série d'applications d'échange de cartes destinée aux championnats français, polonais et italien, puis a développé un outil de collecte statistique qui permet aux données interactives de modifier le score de chaque carte de joueur en ligne. Kick 2016, de Topps, permet de jouer et de gagner des points en temps réel selon les performances des vrais joueurs sur les pelouses de plusieurs championnats européens.
L'idée est d'inciter les collectionneurs de vignettes et de cartes à découvrir les nouvelles fonctionnalités sur une application, là où la hausse du prix du papier n'a plus aucun impact, qui offre de multiples "opportunités d'achats intégrés" ou des "points de collecte de données". Les cartes à collectionner ont donc encore une certaine valeur, ce qui explique l'intérêt d'en obtenir le droit de fabrication. Et pourtant, il faut se demander si une application virtuelle peut réellement se substituer au plaisir de déchirer un paquet de cartes scintillantes.
[1] D'abord spécialisée dans les sports US, Topps, qui réalise des cartes à collectionner depuis 1938, avait acquis la société anglaise Merlin en 1995.
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