Ballon de Plomb 2011, les candidats: Maïga et El-Arabi
Un otage qui cherche à s\'évader de Sochaux, une révélation qui part s\'ensabler dans le Golfe: des passeports pour le BdP?
Modibo Maïga, le marathonien du BdP
Cette nomination aurait déjà été légitime en 2010, quand le joueur est allé au bras de fer avec Le Mans, descendu en Ligue 2, car Modibo Maïga incarne avec une remarquable persévérance tout ce qui désole les supporters dans les constants désirs de départ des divas du Ventre mou.
En véritable marathonien du Ballon de Plomb, Maïga a surclassé les Piquionne et autres "esclaves" de leurs contrats avec une remarquable série d'actions et de déclarations. Tout commence au printemps, lorsque le président Lacombe annonce qu'un joueur sous contrat sera libéré en fin de saison afin d'équilibrer les comptes. Kiev se place sur Ideye, qui quitte le club. Tout semble fini pour Maïga, qui loupe quelques entrainements de début de saison pour une obscure histoire de passeport au Maroc. Le 12 août, le joueur refuse de jouer contre Caen, à quelques heures du coup d'envoi, et quitte le stade. Il ne jouera pas le suivant non plus, et commence avec l'aide de son agent à médiatiser ses envies d'Angleterre.
Première déclaration de plomb, ou le joueur explique qu'il a une famille à nourrir. Fin du mois, nouvelle montée en puissance avec le boycott de sa sélection nationale, difficile à expliquer. Les choses semblent se calmer, mais c'est alors qu'après son doublé face à Toulouse, le joueur s'adresse au public de Bonal: "Cela va leur faire fermer leur grande gueule (...) je m'en bats les couilles des supporters." S'ensuivront de nouvelles absences et une sanction du club. Depuis, le joueur assiste aux entraînements en fonction de ses humeurs et de ses voyages à Newcastle, s'invente une blessure au genou non décelée par le staff médical, et se plaint lorsque certains supporters lui jettent des pièces.
Un niveau footballistique difficile à évaluer alors qu'il refuse de jouer, une mentalité déplorable et un choix de carrière qui le fait miser sur Newcastle... avant d'être disqualifié par la visite médicale. Une année de plomb, à récompenser comme il se doit.
Point fort
Côté déclarations, seul Maazou le surpasse.
Point faible
Avec son envie de revanche, il continue à marquer.
Le slogan de campagne
"Aidez-le à ne jamais quitter Sochaux."
Youssef El-Arabi
Peut-on remporter le Ballon de Plomb sur un seul de ses trois critères? Pour y parvenir, il conviendrait d'être à bloc sur celui-ci: l'exploit n'est donc pas inaccessible pour Youssef El-Arabi, parti cet été pour Al Hilal Ryad en Arabie Saoudite. Quoi d'extraordinaire, ou d'indigne, à opter ainsi pour les pétrodollars et l'exotisme climatisé des championnats du Golfe, quand tant de footballeurs font le même choix? Simplement parce que s'il est compréhensible pour des retraités (ou des pré-retraités dans le cas de Feindouno ou Bakari Koné, prématurément fatigués d'être des footballeurs de haut niveau), il est franchement désolant pour un joueur de vingt-quatre ans en pleine ascension.
Ses dix-sept buts en Ligue 1, la saison passée avec Caen, ne disent pas tout de cet attaquant enthousiasmant, de sa présence et de sa précision devant le but, d'un épanouissement manifeste alors qu'il découvrait la Ligue 1... Les explications apportées à ce transfert dans un championnat de troisième zone, qui constitue un véritable gâchis sportif, relèvent à la fois de l'absurde et du comique. Bien sûr, s'il n'a pas invoqué l'argument de la religion, il ne nous a pas épargné celui de "la famille [à mettre] à l'abri." Garçon, excuse-nous, mais avec ce que tu gagnes, c'est une vingtaine de familles que l'on peut mettre à l'abri, et ne viens pas nous dire, au motif que tu as reçu "une proposition deux fois plus élevée du Qatar", que cela n'était pas qu'une question d'argent, voire que c'était par philanthropie [1].
Le comble, en effet : il nous est aussi demandé de croire que si un footballeur part au Qatar, c'est pour... rendre service à son club, du moins selon cette fable: le SM Caen demandait 7 millions d'euros, aucun club ne s'est manifesté ou n'a conclu, mais El-Arabi s'est sacrifié: "Malherbe attendait mon transfert pour officialiser des arrivées. Je ne voulais pas les mettre dans la merde." Un phénomène unique à notre époque de mercenaires, qui mériterait plutôt une nomination au Ballon d'Eau fraîche. À ceci près que le club pouvait baisser le prix, comme tant d'autres l'ont fait en cet été de crise, et que tous les protagonistes pouvaient attendre le mercato d'hiver.
Pour reprendre sa carrière, sans pour autant amoindrir l'inanité de ce transfert, Al-Arabi pourrait d'ailleurs revenir en Europe assez vite. "J’espère qu’on va garder un œil sur moi", a-t-il dit. Son vœu serait exaucé s'il était élu Ballon de Plomb – au nom d'un choix de carrière consternant assorti de justifications fallacieuses.
Le point fort
Son affiche de campagne est très réussie.
Le point faible
C'est son agent qui devrait être nominé à sa place.
Le slogan de campagne
"Youssef c'est sur YouTube maintenant."
[1] Citations L'Equipe, 25/10.