Vata 1990, la main du Diable
Un jour un but – Le 18 avril 1990 à Lisbonne, l'Olympique de Marseille résiste face au Benfica jusqu'à ce qu'un remplaçant surgi de nulle part marque le but qui le prive de la finale. De la main…
C'est dans un stade de la Luz garni par plus de cent mille spectateurs que l'Olympique de Marseille vient chercher, ce 18 avril 1990, une qualification pour sa première finale de Coupe d'Europe des clubs champions.
Au match aller, l'OM avait largement dominé le Benfica Lisbonne mais n'avait récolté qu'un maigre 2-1. Un nul au Portugal lui suffirait toutefois pour décrocher son ticket.

Un vieux chat dans la cage
Gérard Gili, le coach marseillais, a demandé à ses hommes de jouer prudemment. Il sait qu'ils sont fatigués. Quatre jours plus tôt, ils ont remporté le sommet du championnat face aux Girondins de Bordeaux (2-0, doublé de Chris Waddle). Un match tendu, un peu pourri par les amabilités que s'échangeaient les dirigeants par voie de presse, qui a donc coûté autant d'énergie physique que d'influx nerveux.
En outre, une certaine fébrilité a gagné les rangs marseillais. Leur gardien Gaëtan Huard n'est plus disponible: il s'est fracturé la jambe à la fin du quart de finale retour contre le Sredets Sofia. C'est le vétéran Jean Castaneda, embauché en début de saison comme préparateur et accessoirement dernier rempart de l'équipe réserve, qui poursuit l'aventure dans la cage marseillaise.
Les dirigeants du club ne cachent pas leur scepticisme, l'ancien portier des Verts semblant un peu déconnecté des exigences du haut-niveau. L'OM est parvenue à recruter par dérogation un autre gardien, Pascal Rousseau, mais celui-ci peut uniquement jouer en championnat, les règlements lui interdisant de s'aligner en Coupe d'Europe.
Mais tous ces tracas pourraient finalement être oubliés si l'OM se qualifiait pour la finale. À Lisbonne, les Phocéens contiennent longtemps leur adversaire et ne sont pas loin de décrocher le 0-0 qu'ils sont venus chercher. Il ne reste que quelques minutes à tenir. Benfica obtient un nouveau corner, tiré par le brésilien Valdo. Dans la surface marseillaise, copieusement occupée, l'attaquant suédois Magnusson dévie le ballon de la tête. Au second poteau surgit le remplaçant Vata. L'Angolais s'impose devant Di Meco et parvient à tromper Jean Castaneda.
“Maintenant, je sais !”
Les défenseurs marseillais contestent et s'en prennent à M. Van Langenhove. L'arbitre belge accorde le but sans se poser de questions. À la télévision, les ralentis permettent de découvrir l'objet des contestations: l'attaquant angolais a poussé le ballon de l'avant-bras. Plus rien ne sera marqué. Le but de Vata élimine l'OM.
Bernard Tapie, le président du club, entre dans une colère folle. Il ameute les micros et hurle au complot: “Maintenant, je sais comment on gagne une Coupe d'Europe!” Dans les jours qui suivent, en France, la presse indignée s'en prend à l'arbitre, à l'attaquant angolais, au club portugais, à l'UEFA, au monde entier. On milite pour le recours à la vidéo. Au plus haut sommet de l'État, le premier ministre Michel Rocard s'interroge à haute voix sur les conditions dans lesquelles a été arbitrée la rencontre.
Au Portugal, on fête la qualification de Benfica pour la septième finale européenne de son histoire, mais l'on se pose aussi des questions aussi sur ce but étrange. Si Vata assure avoir marqué de l'épaule, il ne convainc pas grand-monde.
Les Portugais insistent beaucoup sur le fait que la surface de réparation était bondée, que l'arbitre belge était trop mal placé pour voir l'action. D'autres ajoutent qu’il aurait de toute façon dû siffler un penalty, Vata étant accroché par Di Meco au moment où il tente de reprendre le ballon de la tête.
Un héros angolais
Si, en France, son nom n'évoquait rien avant cette fameuse main, Vata Matanu Garcia n'était pas un inconnu au Portugal. Arrivé au Benfica un an plus tôt, il fut aussitôt sacré meilleur buteur du championnat, contribuant ainsi au vingt-huitième titre du grand club lisboète.
Mais la saison suivante, le nouvel entraîneur Sven-Goran Eriksson a préféré en faire un remplaçant. Lors de la finale à Vienne, contre l'intouchable Milan AC, Vata entrera bien dans le dernier quart d'heure. Mais il ne rééditera pas son exploit.
L'arbitre, Marcel Van Langenhove, finira la saison en Italie où il dirigera une rencontre de la Coupe du monde. Jean Castaneda en terminera avec le foot pro, ce match de Lisbonne étant le dernier de sa carrière.
Quant à Vata, il quittera la capitale lusitanienne en 1991 pour une discrète fin de carrière. Son nom sera évoqué par les recruteurs de quelques clubs français. Sans suite.