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Pogba, un bras raccourci

Grâce à la réduction du débat à la question "montrer les images ou pas?", L'Équipe va encore bien s'en sortir, en dépit d'un choix éditorial désastreux. Le quotidien sportif est-il un maître en stratégie rhétorique? 

Auteur : Gilles Juan le 17 Juin 2016

 

 

Il se met en place, avec la médiatisation de la vidéo de Pogba que beIN Sports a choisi de ne pas diffuser, un mécanisme médiatique aussi habituel qu'insupportable. Le débat se simplifie autour d'un dilemme, d'un sujet "clivant", qui n'est au fond pas le vrai problème.

 

 

 

 

Quelle est la question ?

Yanick Cochennec sur slate.fr et Pierre Prugneau dans sa chronique de L'Équipe ont raison de rappeler que le journaliste n'est pas un supporter (il faudra cependant lister, un jour, les contenus du journal L'Équipe qui relèvent du supportérisme: ils se voient surtout en cas de victoire ou de défaite éclatantes), ils ont raison d'expliquer qu'un fait est un fait et que la mission du journaliste est d'informer le public de l'existence de ce fait, qu'il soit joli ou non, polémique ou non, agréable ou non.

 

Mais ce faisant, ils apportent une réponse à quelle question? À celle que Florent Houzot, le directeur de la rédaction de beIN Sports, propriétaire des images, a posée: fallait-il montrer ce geste d'humeur de Pogba, qui autorise en effet à interpréter un bras d'honneur? Cette question est évidemment celle qui arrange bien L'Équipe. Que se passe-t-il, lorsqu'on oppose "montrer" et "ne pas montrer"? Il se passe que "montrer" est du côté du bien (et c'est bien normal) – mais il se passe aussi, par un tour de passe-passe rhétorique, que "montrer n'importe comment" se retrouvera aussi du côté du bien. Car c'est toujours mieux que de cacher aux gens!

 

Dit autrement, il se met spontanément en place un mécanisme que les publicitaires et les politiques connaissent bien, qui est très bien identifié par Schopenhauer dans L'art d'avoir toujours raison. Ce mécanisme consiste à exploiter un point de comparaison, à créer de toute pièce une alternative qui nous arrange, parce qu'elle valorise notre option.

 

 

Comment montrer ?

Pour prendre un exemple concret, une pub que chacun a malheureusement en tête: lorsque la MAAF conserve les mêmes tarifs d'une année sur l'autre, comment le dit-elle aux téléspectateurs? "Appelez-moi le directeur! On me dit que les prix vont augmenter en 2016?!" dit un gros débile qui rentre dans l'agence. Le directeur répond "Non, les prix restent les mêmes", et le gros débile s'en va. Mais que se passerait-il si la question était: "Quoi?! On me dit que les prix ne baisseront pas en 2016?" La même réponse, le même fait ("Non, les prix restent les mêmes") n'auront pas le même impact sur le téléspectateur... Schopenhauer le résume ainsi: le gris a l'air clair à côté du noir, et foncé à côté du blanc.

 

Par analogie, si l'alternative est "montrer, ou ne pas montrer?", alors n'importe quel choix éditorial pour "montrer" le fait sortir vainqueur du débat. Par comparaison à "taire", "cacher", ou "éviter une polémique", les choix d'"informer", de "révéler", d'"oser" seront toujours vainqueurs. Mais il n'en va ainsi que relativement à cette alternative.

 

Et ce n'est pas la bonne alternative. En démocratie, la presse montre. Point. Et le débat unique devrait être (formulé schématiquement): "montrer comment?" Le dilemme, puisqu'il est apparemment incontournable des mettre les débat sous forme de référendum simpliste, devrait être: "montrer bien, ou montrer mal?" Si tel était le débat, L'Équipe s'en sortirait moins bien.
 

Réactions

  • Jamel Attal le 18/06/2016 à 15h00
    Merci pour tous ces éléments de réflexion et d'appréciation…

    Effectivement, le traitement n'est pas malhonnête, même si on peut interpréter différemment les connotations de cette une. On semble ainsi oublier qu'il n'y a pas d'inquiétudes très prononcées autour des Bleus, ni même de Pogba dans ce début d'Euro – du moins il n'y a rien d'alarmant – alors que les unes récentes de L'Équipe (sur Pogba déjà et Griezmann) entretenaient le sentiment d'une crise.

    Les pages 2 et 3 n'ont rien de scandaleux non plus, c'est plutôt ce qui est occulté ou nié (les précédents, les relations systématiquement tendues entre joueurs et journalistes spés, le sens des choix éditoriaux d'un journal en de telles circonstances, ce qu'il est susceptible de déclencher) qui pose question – et pose un vrai problème de journalisme.

    Mais je dirais que c'est moins la teneur des propos qui importe que la place donnée à l'incident dans la hiérarchie de l'information (et ses justifications, que Gilles analyse bien, je crois). Le choix de la une est significatif, pour le moins, alors que l'incident méritait tout au plus un article en page 4. Ça ne concerne pas que L'Équipe, même si le quotidien conserve un rôle assez moteur dans la promotion de ce genre de polémiques.

    J'ai le sentiment qu'il s'agissait un peu d'un ballon d'essai, pour voir si cela allait prendre – et cela constitue en soi une responsabilité importante, quand on sait quel genre de shitstorms on peut déclencher dans le contexte national autour de l'édF. Mais je pense comme toi que "l'opinion" n'est pas, cette fois, preneuse d'un nouveau psychodrame. Tant mieux, ça fait une bonne nouvelle. Aujourd'hui dans L'Équipe, il n'y a rien, nada, sur cette affaire qui faisait la une la veille… Ça dit assez bien le caractère artificiel et disproportionné du traitement qui lui a initialement été réservé.


  • le petit prince le 18/06/2016 à 15h56
    D'accord.

  • Moravcik dans les prés le 19/06/2016 à 11h26
    Oui, c'est assez frappant cet espèce de fatalisme dont semble faire preuve kiplé ici, une sorte de résignation cynique très contemporaine du genre 'c'est comme ça, on DOIT faire la une là-dessus, c'est notre boulot, point.'
    Leur manque de conviction est flagrant mais ça ne les empêche pas de le faire quand même. On peut aussi le voir tous les jours sur leur chaine de TV, où ils 'débattent' souvent, d'un air un peu fatigué, de polémiques factices comme on joue à un jeu de rôles ('alors, qui va jouer le rôle du con aujourd'hui ? C'est ton tour ou mon tour ?' 'bah je veux bien le faire allez'), comme s'ils n'avaient pas le choix, et que leur métier ne pouvait pas (ou plus) se concevoir autrement.

    Quant à leur justification pour faire cette une, elle est évidemment très faible, l'article l'explique très bien.

  • newuser le 19/06/2016 à 18h32
    Ca me rappelle le fameux effet Barbara Streisand.
    BeIn choisit de ne pas parler de l'info, de ne pas la montrer mais indique son existence.

    Et derrière on ne parle plus que de ça sans avoir rien vu sans pouvoir analyser ou même sans se poser la question de savoir si ça vaut le coup d'être analysé.

    Quand je regarde le geste je vois un geste d'un mec qui se libère et qui est aucunement contre quelqu'un.
    En plus s'imaginer qu'à ce moment d'un match aussi important un joueur est juste dans l'esprit de se venger des journalistes c'est faire présence d'un melon de la part de ces derniers assez impressionnants. A croire qu'ils doivent exister au travers des gestes et paroles du sélectionneur ou des joueurs.

    On a envie de leur dire "les gars vous êtes que journalistes, ils s'en caguent".

    Bref comment avoir une polémique pour rien sur un truc non diffusé et qui est monté en épingle pour faire du beurre.
    C'est petit.

    Un peu comme Löw qui doit s'excuser de se gratter les rouleaux...

La revue des Cahiers du football