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Miss Monde

Notre bilieux chroniqueur sort de son obscure retraite pour fustiger l'attribution du Ballon d'or à Ronaldo, parfait symbole, selon lui, de la déchéance du football contemporain. Tout cela proféré sur un ton extrêmement désagréable.

Auteur : Jean-Patrick Sacdefiel * le 17 Dec 2002

 

 

Les critères d'attribution du Ballon d'or, infantile cérémonie de remise des prix, se délitent d'année en année. En 2002, pour le remporter, il fallait donc être blessé les trois-quarts de la saison, alimenter la piètre chronique d'un transfert à rebondissements et à sensation, permettre aux journalistes de raconter une édifiante fable morale et, accessoirement, finir meilleur buteur de la Coupe du monde — avec une moitié de buts qui ne ressemblent à rien, dans une Seleçao dont le niveau situe bien celui d'un Mondial calamiteux…

 

Sans porter aux nues un lévrier (c'est-à-dire un sprinter prétentieux), qui osera soutenir que Ronaldo a été un meilleur attaquant que Thierry Henry cette année, à part ce jury dévoyant un titre qui couronna Masopust ou Belanov? Sans parler de l'admirable Hristo Stoichkov, avec lequel je partage le sentiment que les vrais esthètes seront chaque jour davantage méprisés dans cette ère de pacotille. Le Bulgare, auquel nous devons en partie le dernier match mythique de l'équipe de France (à l'époque où elle savait perdre plus glorieusement qu'elle n'a gagné depuis), avait arraché la boule à facettes à cet aréopage de bien-pensants avec toute la morgue nécessaire. Mais je m'exalte.


Un cornet à deux boules.

On va donc ressortir un Champagne éventé et repasser des reportages déjà vus mille fois, garnis de commentaires éculés. Le professeur Saillant-gnan-gnan, la leçon de courage gna-gna… Le Téléthon n'est pas encore fini? Même Gérard Ernault a dû percuter un pilier de Notre-Dame, il parle de "résurrection" là où il ne faut voir qu'un rafistolage de genou (s'il ne vaut pas trois milliards, Ronaldo est presque aussi bionique que Steve Austin). Le dieu du foot contemporain est un joueur boiteux. Même Bruno Rodriguez (auparavant surnommé "Ronaldo au ralenti") va plus vite que lui. Et j'aurai la charité de ne pas m'attarder sur Roberto Carlos, autre phénomène de foire qui n'a de Garrincha que l'arc des jambes, mais qui ne cadre ses mythiques frappes pas plus souvent qu'un attaquant montpelliérain.

 

Quant à la troisième place d'Oliver Kahn, le gardien qui a des spatules inertes à la place des mains, elle parachève l'indigence générale. On appréciera également la conception très sélective de l'exemplarité du joueur, parfaite icône pour enfants de moins de dix ans, mais par ailleurs mercenaire lâchant sans scrupule le club qui lui avait maintenu confiance et salaires au moment où l'on ne savait même pas s'il rejouerait. Tout ça pour avoir aujourd'hui l'honneur et l'avantage être blessé dans cet absurde attelage de divas qui caricature le Real de Di Stefano. Mais c'est vrai, ainsi que toute star qui se respecte, Ronaldo donne dans le caritatif. Pour la désignation du Ballon d'or comme pour l'élection d'une Miss, ça paye.

 

Pour ne pas être en reste, la FIFA attribue également au Brésilien son titre de joueur de l'année. Peut-être le football cherche-t-il à se faire pardonner d'avoir fait du Ballon d'or 97 une mécanique brisée et une parodie de l'espoir qu'il était alors. Mais Ronaldo est la juste icône ce monde de fausses idoles, où le Veau d'or peut même prendre la forme d'un ballon. * Jean-Patrick Sacdefiel est un journaliste de fiction, chroniqueur occasionnel des Cahiers du football, depuis un article à scandale au lendemain de la finale de l'Euro 2000 (Honte aux Bleus). Il a également contribué à sa façon aux Portraits des Bleus 2002. La rédaction décline toute responsabilité envers les réactions nerveuses que ses propos peuvent provoquer.

Réactions

  • harvest le 17/12/2002 à 11h15
    Merci JP SdF , voilà enfin un article qui dit tout en finesse ce qu'on hurle* tous ( ou presque) ici depuis 6 mois.
    Gageons que si Jean Pascal** se mettait au foot , il décrocherait sans peine la vessie plaquée or , aujourd'hui brandie par le VRP d'une entreprise exclavagiste d'enfants.
    * de rire évidemment
    ** de star académie ou loft story , je ne sais pas vraiment

  • harvest le 17/12/2002 à 11h18
    Au fait , à tous les défenseurs du nou-veau d'or , je rappelle qu'il marque même les buts des autres ( cf. match contre le Costa Rica ).

  • NoNo93 le 17/12/2002 à 11h20
    Et c'est qui l'équipe Adidas harvest?
    Pas facile de trouver des arguments contre l'équipe même autant aller en chercher sur son sponsor...
    C'est quoi le slogan : la victoire est bien plus souvent en eux? :-)))
    Quant aux exploits individuel du Brésil, prenons le but de Rivaldo contre l'Angleterre : Bon pressing du milieu de terrain brésilien, Ronnie en profite pour récupérer la balle, chevauchée dribble et passe à Rivaldo (donc jeu collectif en passant) et but de Rivaldo.
    Donc il y a eu phase défensive collective, exploit individuel soit puis passe et but.
    Alors une petite question : dans le foot moderne on n'a plus le droit qu'aux tactiques au cordeau avec positionnement strict (quelle plaie ce RC qui n'en fait qu'à sa téte), avec redoublement de passe comme au hand, il ne faut surtout pas savoir effacer un joueur sur un dribble pour ne pas nuire au spectacle, on n'a pas le droit non plus de savoir viser le petit filet quand on tire (dommage Ronaldo) quand à l'amorti poitrine frappe en se retournant on devrait le bannir et demander à la fifa de légiférer au plus vite pour empécher Rivaldo de recommencer et n'autoriser que les buts sur coup de pied arrété. Ebfin tout défenseur central venant mettre une bicyclette dans la surface adverse et marquant en plus devrait prendre automatiquement un carton jaune pour non respect de l'adversaire.
    Vous leur reprocher quoi en fait aux joueurs brésilien d'assurer un peu de spectacle et en plus de gagner et pas de gagner une coupe du monde comme toute équipe qui se respecte (avec le bloc à mémé et 7 joueurs biens défensifs + le gardien...)

  • kalle le 17/12/2002 à 11h21
    Tout à fait d'accord, c'est dire à quel point c'est un phénomène...............

  • snake le 17/12/2002 à 11h28
    Ronaldo n'a pas mis 8 mais 7 buts à la Coupe du Monde. On lui a accordé un Csc injustement. Enfin bref...

    Moi, ça me fait plaisir de le voir ballon d'or. Je le croyais perdu à jamais pour le football. C'est le meilleur joueur au monde potentiellement, devant Zidane, et le voir gagner son deuxième ballon d'or n'est qu'une juste récompense.

  • René Leys le 17/12/2002 à 11h32
    Je prendrai pas parti dans la discussion, mais sur le fond t'as raison NoNo. Y'a globalement 3 façons de créer une situation de rupture dans le jeu: soit on se positionne bien défensivement et on intercepte le ballon ou on pousse l'adversaire à la faute, puis on le contre alors qu'il ne s'est pas encore replacé, soit on fait circuler la balle et on espère que la vitesse de circulation ou celle d'un joueur qui se démarque destabilisera l'adversaire, soit on accélère balle au pied ou on dribble pour créer tout seul la rupture.

    C'est ce genre d'actions (la 3ème) qu'on voit de moins en moins souvent car elles supposent de grosses (et rares) qualités individuelles pour les réussir , et que le jeu des équipes devient peut-être trop stéréotypé

  • harvest le 17/12/2002 à 11h38
    Moi non plus , je ne prendrai pas parti dans la discussion , mais reconnaissez que Wimbée méritait bien plus cette distinction que Ronaldo.

  • harvest le 17/12/2002 à 11h49
    Nono , si je met en avant la malfaisance du sponsor des brésiliens , c'est parce que la Coupe du Monde a été organisée pour (et attribuée à) lien a été arrangé dans cette optique et, par exemple , le but refusé aux belges n'en est qu'un des flagrants exemples. Ce qui ne signifie pas qu'Adidas n'a pas bénéficié du même système 4 ans avant.
    Ce csc costaricain attribué à Ronaldo ne t'empêche pas de dormir depuis 6 mois ? ( moi si :-) ).
    Mais , on peut aussi imaginer que tout est bien rose dans l'univers du ballon , comme on peut toujours croire que le monde est dirigé par des gens désinterréssés qui appliquent la volonté des peuples qui les ont choisi.

  • René Leys le 17/12/2002 à 11h53
    C'est toi qui avait raison harvest, soyons fan du monde et de ses dirigeants, et tout parait d'un coup plus simple et plus joli ;-)

  • thibs le 17/12/2002 à 12h31
    Si on avait eu a élire un ballon d'or pour "Juin 2002", pas de problème....je le donne a Ronaldo.

    Mais là c'est une blague, récompenser Ronaldo alors qu'il n'a joué que 7 vrais matches cette année, c'est vraiment n'importe quoi. Briller dans une coupe du monde au niveau pire que médiocre, puis intégrer une equipe du real qui déjoue depuis son arrivée.... ca mérite pas grand chose.

    Si on décide que la Cdm est l'évènement prépondérant dans le classement, on met Rivaldo au meme niveau que Ronaldo, car ils ont tous les 2 été exceptionnels, avec l'avantage pour Rivaldo d'avoir fait une vraie saison complète.

    Si on continue sur cette lancée, que veut dire la 6° place d'Henry? Il est considéré publiquement comme un des principaux responsables de l'echec des bleus!

    Roberto Carlos a effectviement tout gagné, mais c'est quand meme un défenseur plutot anodin (à son poste, on trouvera Sylvestre, Manuel Pablo, ou meme Ashley Cole bien plus efficaces). Il a en fait surtout beaucoup de chance de se trouver dans des équipes formidables.

    On dirait que les années de Coupe du monde...le ballon d'or ne veut plus dire grand chose! On remarquera que platoche et van basten l'ont gagné 3 fois hors années de cdm... c'est dans ces années la qu'on va trouver les meilleurs joueurs du monde!

La revue des Cahiers du football