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Le ballon de l'ingénieur

L'histoire technique du ballon de football épouse celle du jeu et de ses enjeux... 
Auteur : Ange Ebissou le 3 Fev 2011

 

L'histoire du football est intimement liée à celle de son accessoire principal, celui qui lui donne son nom: le ballon de football. Au cours des siècles, il est aisé de retrouver des traces de jeux qui consistaient à transporter un objet vers un but, avec l'aide de coéquipiers, vers un endroit défini, un but. Dans ce qui suit, nous allons précisément s'intéresser à cet objet et à son évolution sous un angle particulier: celui de l'ingénieur pour qui, derrière chaque innovation, se cache la résolution d'une contradiction.


Les origines : le ballon avant le football

Un ballon qui roule et qui rebondit

Les premiers témoignages d'une forme de football remontent à la Chine ancienne, il y a plus de trois mille ans: il s'agissait alors d'un exercice militaire au cours duquel un ballon en peau d'animal rempli de cheveux ou de plumes devait être envoyé, par un tir au pied, entre deux poteaux. Au Mexique, les Aztèques jouaient au "tlatchi" avec une pierre recouverte d'une épaisse couche de gomme. Le ballon, dans ces cas de figure, devait répondre à un impératif: pouvoir rouler et être frappé au pied avec une trajectoire prévisible. Pour cela, il fallait qu'il soit rond et le moins déformable possible.

Cependant, un nouveau critère fait son apparition au fil du temps, ajoutant ainsi au caractère ludique du jeu: il faut que le ballon rebondisse. Pour cela, il faut qu'il se déforme élastiquement comme, justement, une balle de caoutchouc... On observe ici une première contradiction: le ballon ne doit pas se déformer quand il roule, mais doit se déformer quand il rebondit. Elle est résolue durant le Moyen-âge, avec l'usage de vessies de porc gonflées: on remplace le cœur solide de l'objet par de l'air. Avec une pression de gonflage appropriée, le ballon se déformera sous l'effet d'efforts importants tels qu'à la suite d'une frappe ou d'un choc contre le sol mais ne s'affaissera pas sous son propre poids en roulant. Une fois gonflées, ces vessies ont été l'objet de convoitises acharnées lors de parties de soule ou de calcio florentin en Europe.

ballons_vessie.jpg


Résister à la violence de la soule et du calcio
La soule et le calcio florentin, probables ancêtres du football, étaient des jeux violents, pratiqué par des équipes de nombre indéterminé, dont les parties s'arrêtaient régulièrement faute de joueurs valides: selon la légende, quarante hommes se seraient noyés dans une mare lors d'une partie à Pont-l'Abbé. Du fait de l'âpreté des combats, il arrivait souvent que le ballon éclate. Ainsi, la possibilité de rebond apportée par l'utilisation d'un ballon creux devient moins cruciale devant la
nécessité de jouer avec un ballon plus résistant aux chocs: pour cela, un ballon plein aurait été optimal...

Se profile alors la résolution d'une deuxième contradiction: le ballon doit être creux pour rebondir, mais plein pour résister aux chocs. Alors, au lieu de n'avoir qu'une membrane, on en aura désormais deux! La vessie de porc est placée dans une enveloppe de cuir qu'elle tendra une fois gonflée. C'est sur ce principe que les ballons de la plupart des sports collectifs concernés (football, rugby, handball, volleyball, basket-ball...) sont encore aujourd'hui conçus. Au fil de l'évolution des ballons, des couches de textiles viendront s'intercaler entre l'enveloppe et la vessie pour assurer une conservation de la forme plus longue. Le plus ancien spécimen d'un tel ballon encore conservé à l'heure actuelle a près de 450 ans! Il a été retrouvé dans les poutres de la chambre de la reine d'Écosse, Marie Stuart (1542-1587). Il se dit qu'il était courant qu'elle lance un ballon de sa fenêtre pour donner le coup d'envoi de matches entre soldats. Imaginons le sacré coup de botte de celui qui l'aura logé là.



Vers le ballon moderne

ballons_18.jpgUn ballon vraiment rond
À la suite de l'invention de la vulcanisation par Charles Goodyear en 1842, les vessies naturelles sont progressivement remplacées par des vessies en caoutchouc. Ceci permet de s'approcher d'un objectif que les vessies naturelles ne permettaient pas d'atteindre: le ballon parfaitement sphérique. En effet, un ballon rond a une trajectoire et un rebond prévisibles, ce qui permet un plus grand contrôle avec les pieds (c'est bien pour ça que les rugbymen, eux, peuvent se contenter d'un ballon aux formes étranges). Aussi le ballon doit-il être rond, afin de permettre un meilleur
contrôle de sa trajectoire avec le pied. Pour cela, la vessie doit tendre autant que faire se peut l'enveloppe de cuir qui l'entoure ; sinon, cet assemblage de six pièces de tissu garderait une forme cubique. Or, ceci implique une tension importante sur les coutures du ballon, ce qui n'est pas acceptable si ce dernier doit également subir les frappes répétées des joueurs.

C'est une nouvelle contradiction: le ballon doit être rond si l'on veut jouer, mais ne peut pas l'être si l'on veut jouer longtemps! Pour la résoudre, on segmente l'enveloppe: en utilisant un plus grand nombre de pièces plus petites, on s'approche plus facilement de la sphéricité avant même le gonflage: la pression nécessaire est donc moins grande et les coutures préservées. Ainsi, chacun des six panneaux se verra divisé en deux (Coupe du monde 1930, Uruguay, ballon à douze panneaux), puis en trois (Coupe du monde 1958, Suède, ballon à 18 panneaux, similaire à un ballon de volleyball), leurs extrémités s'arrondissent.



L'icosaèdre tronqué, un ballon de football
Jusqu'ici, les ballons sont pourvus de lacets: afin de les gonfler, il faut une ouverture pour accéder à la valve de leur vessie. Le lacet permet de fermer cette ouverture, emprisonnant la valve. Or, la présence de ce lacet n'allait pas dans le sens de la sphéricité recherchée, sans compter le manque de confort lorsqu'on venait à frapper le ballon de la tête... juste sur le lacet.

Il faut donc une ouverture lorsque l'on gonfle le ballon, mais pas d'ouverture lorsqu'on joue avec. Cette contradiction est résolue en combinant les pièces. En effet, au lieu d'avoir une vessie  indépendante de son enveloppe, ces deux dernières seront maintenant liées: la valve de la vessie est intégrée à l'enveloppe et la dernière couture est réalisée à l'aide d'une aiguille courbe  spécialement conçue.
C'est le danois Eigil Nielsen, créateur de la marque Select, qui utilise le premier ce système en 1951. Ceci lui permet d'utiliser des panneaux encore plus petits et de fournir au monde du football en 1962 le concept qui perdure encore majoritairement aujourd'hui: le ballon à 32 panneaux, en forme icosaèdre tronqué, c'est-à-dire comportant 20 hexagones et 12 pentagones réguliers respectivement blancs et noirs, nous allons y venir...). Si Select n'a pas pu profiter de son inventivité dans le monde du football, il s'agit encore aujourd'hui d'un fabricant d'importance majeure dans le monde du handball, sport très populaire au Danemark.

ballons_select.jpg


Le ballon du football moderne

Télévision et marketing

Pour des impératifs télévisuels, il devient nécessaire de s'affranchir de la couleur marron du cuir. Dès 1951, il est possible de teindre le ballon en blanc afin d'assurer un meilleur contraste avec la pelouse pour un affichage en noir et blanc. En 1970 se prépare, au Mexique, la première Coupe du monde retransmise en couleur. Pour cela, la couleur du ballon doit encore être modifiée. À cette époque, il est de plus en plus courant de voir les fabricants de ballons marquer leurs produits de leur logo. Cette opération n'était pas aisée à réaliser sur un ballon rond.

Il fallait donc un ballon plat pour le marquer et rond pour l'utiliser. Cette contradiction a été résolue en agissant à l'avance: au lieu de marquer les ballons après qu'ils aient été fabriqués, on marque les panneaux avant qu'ils ne soient cousus entre eux. Ainsi, le fabricant d'équipements sportifs Adidas a décidé de peindre les pentagones de ses ballons en noir afin d'assurer un bon contraste avec le blanc des panneaux hexagonaux. C'est leur design, nommé "Telstar" qui sera retenu pour la Coupe du monde 1970, et les multiples reprises dont il fera l'objet de la part de graphistes et dessinateurs contribueront à populariser le ballon à 32 panneaux. Adidas y gagne gros: il devient par la suite le fournisseur officiel de ballons de toutes les éditions de la Coupe du monde suivantes.


ballons_telstar.jpgLe synthétique pour ne pas prendre l'eau
Les ballons en cuir avaient le défaut d'absorber l'eau présente sur le terrain en cas de pluie, ce qui se traduisait par une augmentation de poids notable, jusqu'à 25% supérieure à son poids initial, engendrant ainsi des efforts supplémentaires pour frapper le ballon et par suite de nombreuses lésions cervicales lorsque les joueurs venaient à frapper le ballon de la tête. Le monde du football a ainsi dû subir des matches sans jeu sur certains terrains détrempés du premier tour de la Coupe du monde 1978 en Argentine. Or, les ballons entièrement en synthétique, présents dès 1974 sous la marque Select (encore une fois à la pointe de l'innovation), n'avaient pas la faveur des joueurs qui leur trouvaient un toucher trop agressif et un comportement trop nerveux.

Le ballon devait donc être en cuir pour le confort d'utilisation des joueurs, mais ne pouvait plus l'être pour conserver des conditions de jeu acceptable en temps de pluie. Cette contradiction a été résolue grâce au principe du film de faible épaisseur : une fine couverture de polyuréthane a été utilisée pour isoler le ballon de son environnement et améliorer son étanchéité tout en conservant les qualités de toucher de balle propres au cuir. Adidas profite de sa position favorable et impose le "Tango España" utilisé lors de la Coupe du monde 1982. L'amélioration des cuirs synthétiques et la réduction progressive de la résistance au changement (le grand ennemi de l'ingénieur) conduiront à la généralisation du ballon tout synthétique: en 1986, la seconde Coupe du monde de l'histoire à se dérouler au Mexique utilise le ballon "Azteca", composé de différentes couches synthétiques.


Le ballon spectacle
Le fait que le ballon ne soit pas parfaitement rond a ses avantages: les turbulences créées au passage de l'air au dessus des coutures peuvent donner à une balle frappée puissamment et sans effet de rotation une trajectoire surprenante pour les gardiens de buts, dite flottante. On retrouve ce principe dans le service flottant au volleyball ou encore dans le lancer d'un knuckleball au baseball. Ceci favorise les joueurs qui n'hésitent pas à tirer de loin, permettant ainsi au public de voir des buts spectaculaires. En 1994, la Coupe du monde part conquérir les États-Unis et un public amateur de sports où les actions décisives sont nombreuses.
La FIFA, organisme à la tête du football mondial, est inquiète: la précédente compétition, qui s'était tenue en 1990 en Italie, a été reconnue comme l'une des plus ennuyeuses de l'histoire avec un jeu fermé (plus faible moyenne de buts par match, 2,2) et violent (première expulsion d'un joueur en finale du tournoi: deux Argentins recevront un carton rouge). Il est pourtant crucial de ne pas perdre l'occasion de séduire l'imposant marché que représentent les États-Unis. La façon la plus radicale de modifier le jeu semble être de modifier le ballon. Or, la deuxième Loi du jeu n'autorise pas de modification de grande ampleur sur le ballon.

Cette contradiction est résolue à l'aide des principes de qualité locale et de changement de paramètres physiques et chimiques d'un objet. Puisque la forme du ballon ne peut être changée, ce sont les matériaux qui le composent qui seront modifiés afin de mieux transmettre au ballon l'énergie du joueur. Les frappes sont plus sèches, les tirs plus rapides, les trajectoires plus flottantes: le football offensif reprend ses droits et de nombreux buts sont marqués... jusqu'à la finale, première de l'histoire à n'en voir aucun. Néanmoins, l'objectif est atteint pour la FIFA.


ballons_moderne.jpgLe ballon de plume
Au fil du temps, la quête de la sphère parfaite a cédé sa place à la recherche du ballon toujours plus vif: outre les travaux sur les matériaux composant l'enveloppe, la surface même du ballon a été modifiée afin de favoriser l'apparition de turbulences, au grand dam des gardiens de but. Ainsi, la surface du ballon officiel de marque Adidas de la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud, "Jabulani", est-elle recouverte de fines nervures.

On vient de voir comment le ballon de football est devenu ce qu'il est aujourd'hui. Finalement, il faut admettre que cet exercice de style ne consiste qu'à appliquer une réflexion complexe à des solutions qui se sont trouvées naturellement. Si l'on veut parler de créativité, il serait plus intéressant encore, par exemple, de se plonger dans les trésors d'inventivité déployés par des millions d'enfants à travers le monde pour se confectionner des ballons avec les matériaux de récupération à leur disposition. Il n'y a rien de plus simple, en effet, qu'un ballon rond: c'est ainsi que le ballon de football a contribué à faire de ce sport un des plus pratiqués au monde.

[NDLR : ce texte a été soumis par köpke aux grandes oreilles à l'occasion de son inscription]

Sources: www.fifa.com, site internet de la Fédération International de Football
Association ; http://footballs.fifa.com, centre d'information de la FIFA sur les ballons
de football ; www.select-sport.com , site internet du fabricant d'équipements sportifs
danois Select ; www.adidas.com, site internet du fabricant d'équipements sportifs
allemand Adidas ; http://fr.wikipedia.com

Réactions

  • Bananja Vidic le 03/02/2011 à 02h24
    Passionnant, et remarquablement rédigé.
    Merci beaucoup!

  • Ô Mexico le 03/02/2011 à 04h37
    Je me devais de réagir :


    Le jeu de pelote mexicain (le tachtli est aztèque mais les Mayas et d'autres peuples le jouaient auparavant, sûrement avant J-C) s'apparentait plus à du basket... sans les mains.
    La balle de cuir était en effet renvoyée par les hanches, la tête, les cuisses..., tout sauf pieds et mains, et ne devait pas toucher terre. Le but était de l'envoyer dans un anneau en pierre placé à la verticale sur un mur.

    Le jeu avait une valeur religieuse et mystique, les courbes de la balle représentant la course des astres dans le ciel. Et le vainqueur était vraisemblablement sacrifié, mais pas toujours.
    L'importance du rite se mesure aux nombres de terrains existants, environ 1200 sur toute la Mésoamérique.



    Ces précisions n'enlèvent rien à la qualité de l'article et au fait que la balle de cuir a ensuite inspiré le ballon de foot (mais je ne savais pas que les Chinois possédaient un jeu aussi ancien, si ce n'est plus).

  • Miklos Lendvai le 03/02/2011 à 07h35
    Pour le sacrifié, les récits divergent. Dans certains, c'est le capitaine de l'équipe gagnante (la partie était gagnée quand une équipe parvenait à passer le ballon dans l'anneau) et dans d'autres c'était celui de l'équipe perdante.

  • Sens de la dérision le 03/02/2011 à 07h59
    WOW un tel texte comme critère d'embauche ! Impressionnant et magnifique.

  • OLpeth le 03/02/2011 à 08h39
    Vachement instructif ce texte, respect à son auteur.

  • Papin Jour Pape toujours le 03/02/2011 à 09h17
    Oui, c'est bieng.

  • Henry golera-t-on encore? le 03/02/2011 à 09h48
    Excellent papier.
    L'idée de base très intéressante y a été remarquablement développée. Félicitations aux initiateurs et auteurs de cet article.

  • Tonton Danijel le 03/02/2011 à 10h05
    Sens de la dérision
    jeudi 3 février 2011 - 07h59
    WOW un tel texte comme critère d'embauche ! Impressionnant et magnifique.
    - - - - - - - - - - - - -

    Oui, c'est la même réaction. Voilà qui va conforter l'hypothèse "élitiste" du forum ;-).

    Superbe texte, sinon, très instructif.

  • gironflon le 03/02/2011 à 10h17
    Si vous lisiez le truc pourri que j'avais écris à l'époque...
    Heureusement que tout le monde n'est pas aussi mauvais que moi.

    Bravo à toi Kopke.

  • taniwha le 03/02/2011 à 10h24
    Très bon texte.
    On remarquera que les "indiens" étaient suffisamment c... pour faire un jeu d'un truc qui roule mais ne pas utiliser la roue.

    L'histoire en aurait été toute autre.

La revue des Cahiers du football