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La disparition programmée des Ultras

Réagissant aux violences en marge de Nice-Saint-Étienne, la Ligue a semblé sonner le glas d’un mouvement Ultra déjà moribond en France. Quelles chances de survie lui reste-t-il?

Auteur : Pierre Barthélemy le 26 Nov 2013

 


Alors que la répression contre les supporters les plus fidèles des clubs français ne cesse de croître et que les médias n’hésitent plus à jeter l’anathème sur tout un mouvement au moindre dérapage d’une minorité, il convient de se demander si le supportérisme "Ultra" n’est pas en train de se suicider.
 


Tendre la perche à la répression

Les incidents intervenus dimanche à Nice ne sont qu’un élément à charge supplémentaire pour nourrir l’argumentaire des acteurs institutionnels: le conflit picrocholin ayant opposé Rennais et Nantais, l’allumage de fumigènes par les Stéphanois, la présence de quelques dizaines d’Ultras parisiens au Trocadéro en pleine poudrière urbaine… Le temps passe, le mouvement s’affaiblit, mais les comportements contreproductifs se répètent inévitablement.

 

Allianz Riviera incidents Nice-Saint-Etienne

 

Pour les pouvoirs publics et les clubs qui conduisent une répression globale, la division des Ultras est du pain bénit. Or, comme le rappelle le sociologue Ludovic Lestrelin [1]: "Pour pouvoir faire évoluer le rapport de forces avec des autorités, faire valoir des revendications voire des droits, mais aussi pour avoir une visibilité, conquérir des soutiens, en somme modifier des équilibres, il faut pouvoir se mobiliser". Par son morcellement et ses rivalités, non seulement d’un club à l’autre, mais aussi au sein d’un même club, le supportérisme "Ultra" n’est pas en mesure d’enrayer collectivement l’action concertée des pouvoirs publics.
 

Enfin, le mouvement semble encore trop étranger aux exigences de la communication. Pour être crédible, il faut d’abord être audible. Par sa culture du silence et sa méfiance des médias, les Ultras se privent d’une arme que leurs opposants maîtrisent parfaitement. En 2012, à Montpellier, après la blessure de "Casti" [2], ils ont montré les prémices d’une capacité à se réunir pour porter ensemble des revendications. Cette action isolée n’a toutefois conduit ni à l’élaboration d’une communication commune, ni à la constitution d’une entité représentative. Les Ultras sont-ils capables d’une prise de conscience collective salvatrice, si toutefois il n'est pas déjà trop tard?
 


Dissolution du dialogue

Le temps joue d’autant plus contre les Ultras que les acteurs institutionnels se montrent très réactifs. Il n’a pas fallu plus de quelques heures à Frédéric Thiriez pour publier, hier, un communiqué martelant lourdement et sans nuance: "Une seule solution: la répression". Il en a aussitôt profité pour instiller dans les esprits une solution radicale qu’il prétend pourtant ne pas souhaiter: "l’interdiction systématique des déplacements". Pourtant, la LFP comme les pouvoirs publics n’ont jamais fait preuve d’initiative pour permettre une saine organisation de ces déplacements de supporters.
 

Alors que les arrêtés se multiplient pour limiter (Paris Saint-Germain) ou interdire (Lyon, Bastia, Ajaccio, Nice, Marseille) les déplacements, les pouvoirs publics n’ont jamais invité les différents protagonistes à s’assoir autour d’une table pour en préparer, en amont, la bonne tenue. Quand ils mettent en place des commissions ou rédigent des rapports, ils ne donnent la parole à aucun représentant des supporters (lire "Valérie Fourneyron imagine un football durable sans les supporters"). Pire, ils n’ont de cesse de supprimer les interlocuteurs à leur disposition. Par la dissolution administrative d’associations de supporters dont certains membres se sont rendus coupables d’actes répréhensibles, les acteurs institutionnels ont disloqué les tribunes et éliminé les leaders dont l’expérience et la maturité permettaient de contrôler des groupes structurés (lire "À qui profite la dissolution?"). Cela s’inscrit dans un mouvement général de limitation de la liberté d’expression des supporters, avec l’interdiction de chants et de banderoles revendicatifs à propos des horaires des matchs, la hausse des prix ou l’intensification de la moralisation à outrance des tribunes.
 


Politique pousse-au-crime

Pourtant, dans le même temps, les auteurs avérés d’actes de violence ou d’incitation à la haine semblent bénéficier d’une certaine impunité. Lorsque les préfectures prennent des arrêtés d’interdiction de déplacement, ceux-ci ciblent les membres d’associations de supporters, mais pas les personnes connues des forces de l’ordre pour des actes de violence. Dimanche à Nice, aucune interpellation n’a immédiatement eu lieu alors que les vidéos et les photos à disposition ont clairement permis d’identifier les individus responsables. De même, la vidéosurveillance permet à la sécurité du Parc des Princes d’identifier celui qui craque un fumigène mais, étonnamment, pas celui qui tend ostensiblement le bras vers l’avant. De surcroît, alors que cela est prohibé par les textes, on laisse accéder au stade des individus en état d’ébriété manifeste, mais on interdit de stade celui qui porte une écharpe d’association dissoute.
 

En caricaturant, on pourrait avoir l’impression que tout est fait pour inciter les supporters Ultras à commettre des faux-pas dont on s’offusquera aussitôt. Comment est-il possible de se laisser déborder, hier à Nice, par une centaine d’individus encadrés, une heure avant le match, alors que celui est classé à haut risque? Comment est-il possible que certains supporters niçois aient pu traverser tout le stade sans opposition jusqu’à la tribune des Stéphanois? Où est la logique d’interdire tout déplacement officiel encadré dans une tribune visiteur mais d’autoriser le déplacement individuel dans le reste du stade aux personnes ne se prévalant pas de la qualité de supporter ou ne se comportant pas comme tel" (Lire "ASSE-OL, victoire à la Pyrrhus pour les pouvoirs publics")? Comment est-il possible de concentrer toute son attention à Bruxelles pour Anderlecht-PSG pendant que 1.500 Napolitains sont laissés sans encadrement au centre-ville de Marseille?
 


Mourir pour mieux renaître ?

À près de deux ans du championnat d’Europe, les acteurs institutionnels sont coupables, au mieux d’incompétence par aveuglement et surdité, au pire de complicité au suicide des Ultras par police interposée. Le mouvement "Ultra" français semble en effet moribond. Peut-on envisager que celui-ci renaisse de ses cendres et fasse table rase? Voici quelques pistes de réflexion, formulées modestement et à titre personnel.
 

Sa principale faiblesse étant son morcellement, peut-on imaginer que le mouvement réussisse à mettre en place une structure de représentation et de communication? Se doter d’un représentant avec personnalité morale, c’est envoyer deux signaux fort: celui d'une capacité à parler d’une voix et celui d'une volonté de dialoguer avec les différents protagonistes. S’exprimer d’une seule voix ne signifie pas renoncer aux (saines) rivalités et aux désaccords, mais savoir aller au-delà lorsque les impératifs l’exigent. La constitution d’une superstructure comportant un organe délibérant où s’expriment les désaccords pourrait parfaitement s’entendre.
 

Sa deuxième faiblesse réside dans son incapacité à se séparer des individus dont les comportements répréhensibles sont nuisibles à l’image du mouvement. Sans abandonner les valeurs de groupe et de solidarité chères au mouvement, il convient de poser des limites dont le franchissement exposerait l’intéressé à une exclusion ferme et définitive.
 

Sa dernière faiblesse, c’est l’image de violence qui survient dans les esprits lorsque sont évoqués les Ultras. Aussi fort soit leur attachement à cette appellation, on peut s’interroger sur l’opportunité de ces supporters à l’abandonner pour un vocable vierge de tout préjugé, et sémantiquement moins connoté...


[1] Lire l'article de So Foot.
[2] "Casti" est un supporter montpelliérain qui a perdu un œil à la suite d'un tir de flashball d’un membre des forces de l’ordre, alors qu’il était en train de boire un verre dans un bar près de La Mosson.

 

Réactions

  • fabraf le 26/11/2013 à 10h33
    J'ai une question bête mais c'est quoi... un Ultra ? Je veux dire en quoi se distingue-t-il d'un supporter ? L'Ultra fait-il partie d'une association ? Si non, peut-on alors dire / écrire "les Ultras" ? Merci de vos éclaircissements.

  • Tonton Danijel le 26/11/2013 à 11h11
    Par "Ultra" on définit les membres d'une association de supporters enregistrée. Tous les clubs n'en ont pas, à grenoble il a fallu attendre le debut des années 90 pour voir apparaître les Red Kaos (qui sont au jour d'aujourd'hui les seuls à être restés).

    Il y a parfois des assoces d'ultras de clubs différents qui se connaissent et s'apprécient, So Foot avait publié un article à ce sujet (par exemple, les Red Kaos s'entendent très bien avec les ultras du Red Star dont ils partagent des valeurs très marqués à gauche. De mémoire dans les partenariats soulignés par So Foot il y avait Saint-Etienne et Bordeaux, Lille et Nice...). Mais il est vrai qu'il manque une coordination nationale, loin d'être simple à mettre en place en raison des rivalités traditionnelles entre supporteurs. En tout cas pour moi qui ne peux suivre mon club qu'en déplacement, je regretterais sincèrement l'explosion de mesures répressives (surtout qu'on est mieux dans un kop qu'entre deux pélos isolés dans une tribune).

  • fabraf le 26/11/2013 à 11h21
    Merci. Pourquoi alors on entend souvent que les Ultras "refusent les déplacements organisés par les clubs" ou "qu'ils n'ont pas de représentants" ?

    J'assimilais plutôt l'Ultra à un Indépendant qui se déplace par ses propres moyens et qui justement refuse d'intégrer toute structure.

  • Zorro et Zlatan fouillent aux fiches le 26/11/2013 à 11h24
    Le paragraphe "Politique pousse-au-crime" c'est pour le micro de plomb ?

    "En caricaturant, on pourrait avoir l’impression que tout est fait pour inciter les supporters Ultras à commettre des faux-pas dont on s’offusquera aussitôt." Euh oui, ce serait bien d'éviter de tomber dans la caricature.

  • Tonton Danijel le 26/11/2013 à 11h24
    Il y a des représentants au niveau des clubs, pas au niveau national.

  • fabraf le 26/11/2013 à 11h41
    C'est pas compliqué de réunir 1 à 2 représentant légal par club, si ? J'avoue que je ne comprends pas bien sauf si la volonté de l'Etat est de reproduire le modèle PSG sur tout le territoire.

    J'arrive pas à trouver l'info : sait-on pourquoi des supporters (ou Ultras) stéphanois ont arraché des sièges à Nice ?

  • Tetsuo Shima le 26/11/2013 à 11h46
    Questions que je trouve tout à fait pertinentes, fabraf, je me les pose à chaque fois que j'entends parler "d'Ultras"...

    De ce que j'avais compris de ma fréquentation du Parc des Princes c'est qu'outre leur appartenance à une association (et encore, je ne suis pas certain que tous ceux qui se disent "ultra" appartiennent ou aient appartenu à une association), ils avaient une certaine vision du supportérisme, tendance extrémiste assumée : logique de territoire, de compétition avec les autres groupes ultras (y compris au sein d'un même club) et également une volonté absolue de liberté sans avoir de compte à rendre à qui que ce soit et cela que ce soit au niveau de l'association qu'au niveau individuel des membres.

    Et je me trompe peut-être mais dans un kop de supporters il y a une majorité de gens qui n'appartiennent à aucune association.

    Bref, c'est hyper complexe et je suis certain que d'autres auront des réponses différentes des miennes.

  • Sens de la dérision le 26/11/2013 à 11h50
    Tonton Danijel
    aujourd'hui à 11h11

    Par "Ultra" on définit les membres d'une association de supporters enregistrée.
    ---
    Mouais ça me semble un peu succinct comme définition. Pour prendre l'exemple lyonnais, je ne pense pas que les Gastrogones ou le O'Elle Club, pourtant associations de supporters, soient de la mouvance Ultra.
    Voir ce lien pour tous les groupes de supporters de l'OL :
    lien

    Il y a quand même une idée de jusqu'au-boutisme non ? Sinon ils ne s'appelleraient pas Ultras...
    Sont-ce les plus fidèles comme dit dans l'article, ça reste à prouver... (ou faut définir ce qu'est la fidélité)

    En tout cas cet article me paraît assez objectif, notamment dans ce qui fait les faiblesses des groupes.

  • johnny gategueune le 26/11/2013 à 11h52
    @Tonton
    Je ne crois pas que l'appartenance (l'encartage) à une asso suffise à définir un Ultra. Il y en a qui participent aux animations et aux déplacements sans être forcément membres d'une organisation. Et les "Ultras" survivent souvent à la dissolution des assos, non?

    @Zorro et Zlatan fouillent aux fiches
    - "en caricaturant"
    - "pourrait" (ceci est un conditionnel)
    - "avoir l'impression"
    -> malgré ces trois modes de mise à distance, tu arrives à prendre la phrase au premier degré? Phrase qui pointe, à juste titre amha, l'irresponsabilité délibérée des instances.

    @fabraf
    C'est assez fascinant qu'un incident aussi massivement relayé (au travers notamment de cette photo de l'AFP) ne bénéficie pas d'un début d'explication ni d'information sur le déroulé des événements. On a juste vaguement entendu parler d'un caillassage de bus (et il paraît que des supps stéphanois sont cités dans L'Equipe aujourd'hui, mais je n'ai pas lu).

  • Tonton Danijel le 26/11/2013 à 11h59
    Sens de, johnny: cela montre bien la complexité du mouvement... Les associations de supporteurs semblent avoir justement pour but d'aider les supporteurs les plus fanatiques à organiser des animations et des déplacements. Je ne suis pas ultra (je ne me définis pas comme tel car n'organisant rien pour mon club) mais à Béziers j'ai profité du kop visiteur organisé par les RK, que j'associé donc plus facilement que moi aux ultras.

    Mais il y a des 'ultras' sur ce forum qui nous éclaireront sans doute davantage.


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