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« Personne n'en parle »

Les sportifs homosexuels ne sont-ils pas des homosexuels comme les autres ? Entretien avec le sociologue Dominique Bodin. 

Auteur : Jérôme Latta le 27 Oct 2021

 

Entretien extrait du dossier "Amour" du numéro 6 de la revue des Cahiers du football. Lire aussi "Le placard dans le vestiaire".

 

Dominique Bodin est enseignant-chercheur à l'université Paris-Est Créteil. Spécialiste des relations entre sports et violences, il a notamment enquêté auprès de sportifs homosexuels.

L'homosexualité est-elle plus significativement "censurée" dans le football masculin que dans d'autres disciplines ?

L'homosexualité n'est pas plus fustigée ou réprimée dans le football que dans les sports typiquement masculins, ou même que dans les autres. On ne connaît pas plus d'homosexuels dans le rugby, le handball, le basket, le judo, le ski ou le tennis : les difficultés à faire son coming out y sont les mêmes. Le sport a longtemps été l'antre de la masculinité exacerbée, de la virilité, c'est un héritage de l'éducation du XIXe siècle, jusque dans l'après-seconde guerre mondiale. Dans cette conception, le garçon et l'homme se construisent à travers le sport, et l'homosexuel n'est pas viril.

Un sportif peut-il conserver le secret de son homosexualité ?

Quels que soient les sports, tous me disent que leurs condisciples, leurs coéquipiers savent - ou se doutent - qu'ils sont homosexuels, mais que personne n'en parle. C'est moins une acceptation qu'une tolérance qui va de pair avec une invisibilité, un secret bien gardé par tous. Les sportifs de haut niveau sont souvent entourés de compagnes féminines, soit parce qu'ils s'inscrivent dans la stabilité d'un couple formé il y a longtemps, soit qu'ils profitent de leur célibat et de leur jeunesse - on oublie souvent qu'ils sont très jeunes - pour faire la fête. On remarque donc facilement une personne qui sort de ces normes. Il y a le dit ("Il me l'a dit", "On me l'a dit") et le non-dit. Les clubs leur demandent souvent d'être discrets, et certains m'ont affirmé que leurs sponsors leur avaient même suggéré de s'afficher avec des femmes.

Existe-t-il un hiatus entre la désapprobation de l'homosexualité en général et une tolérance plus grande envers les homosexuels qu'on connaît ?

C'est une évidence. Dans les sports collectifs, la notion d'équipe implique une solidarité : le sport gomme les différences sociales, culturelles, ethniques - auxquelles on peut ajouter les différences de sexualité. On est d'abord membre de l'équipe, y compris dans les perceptions extérieures. Par exemple, un Maghrébin dans la rue va être considéré d'abord comme Maghrébin par la majorité des personnes qui le croisent. Le même qui joue au Paris Saint-Germain sera d'abord considéré comme joueur professionnel représentant son club.

"Le coming out sera utile à toute la communauté homosexuelle si les personnes plus en vue dans la société l'effectuent, pas seulement les sportifs de haut niveau"

 

Le poids médiatique associé à l'idée de devenir une "icône" dissuade-t-il de faire un coming out ?

Le coming out est un acte d'affirmation personnelle, mais aussi un acte politique, de revendication : depuis les émeutes de Stonewall en 1969 [série de manifestations violentes après un raid de la police contre un bar gay à New York], on le réfléchit dans les termes de la communauté homosexuelle, et il vise à affirmer que les homosexuels ne sont pas des personnes déviantes, hors-norme. Plus le sport et la personne concernée sont médiatisés, plus la portée sera importante. Mais peu de gens franchissent le pas avant tout en raison des barrages personnels, familiaux, des questions d'image, notamment par rapport aux sponsors et à l'environnement général.

Ceux qui prônent le coming out de sportifs connus affirment que cet environnement a changé et que les sponsors seraient bienveillants

Si le monde avait aussi significativement changé, on assisterait à de nombreux coming out de la part de sportifs en activité Un footballeur m'avait confié qu'il pourrait faire son coming out et continuerait à être encouragé, mais que s'il ratait un penalty et faisait perdre l'équipe, on le lui reprocherait en tant qu'homosexuel et que ce serait "la faute de tous les homosexuels". En substance : "Tant que je suis performant, tout va bien, mais si je cesse de l'être, ce sera parce que je suis un pédé". L'utilisation qui pourrait être faite de son identité suscite ce genre de craintes.

On n'a pas à attendre une exemplarité particulière des sportifs professionnels ?

Le coming out sera utile à toute la communauté homosexuelle si les personnes plus en vue dans la société l'effectuent, pas seulement les sportifs de haut niveau. Je ne pense pas qu'ils portent une responsabilité particulière   - d'ailleurs je pense que l'exigence d'exemplarité envers eux est utopique. Le changement ne peut être que global. À quel moment a-t-on dit d'un résistant comme Daniel Cordier qu'il était homosexuel ? Depuis combien d'années des journalistes affichent leur homosexualité ? Combien de dirigeants du CAC 40 se disent homosexuels ? Il n'y a pas de tant de personnalités publiques dans ce cas et, parmi celles-ci, beaucoup restent discrètes, ne s'affichent pas avec leur conjoint, par exemple. Les mentalités changent progressivement, mais certainement pas assez vite aux yeux de ceux qui souffrent de cette situation, en particulier des homosexuels les plus fragiles dans la société - dont ne font pas partie les sportifs de haut niveau.

Diriez-vous que ces coming out se rapprochent dans le sport ?

Dans nos sociétés occidentales modernes, il faut probablement peu de choses  - mais ce sont des choses difficiles à accomplir - pour que les mentalités changent. Dans d'autres sociétés, dont certaines criminalisent encore l'homosexualité, cela reste impensable.

Lire aussi "Le placard dans le vestiaire".

 

LA REVUE DES CAHIERS DU FOOTBALL, NUMÉRO 6

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