Nos internationaux lèvent-ils le pied en sélection? Que doit faire Santini de la Coupe des confédérations? Faut-il un quota de penalties par équipe? Le spectateur idéal est-il en carton? Doit-on balancer les tricheurs?
Des stars qui marchent à l'économie
Les internationaux français étaient en pleine forme ce week-end, particulièrement en Angleterre, où le Manchester-Arsenal de Cup nous a montré des Gunners étincelants et un Fabien Barthez rétabli. Il devient difficile de nier que les sélectionnés boycottent mentalement (voire physiquement) les matches amicaux, conséquence logique d'une pression en club que leurs dirigeants ne se privent pas de renforcer, même si l'on doit se rappeler que le même syndrome atteignait déjà les Bleus d'avant 98…
Jacques Santini avait admis avoir conclu des accords avec certains entraîneurs pour n'aligner leurs joueurs qu'une mi-temps. Mercredi dernier, cette réduction du temps de travail ne s'est pas traduite par une hausse de la productivité, mais le stage de relaxation à Clairefontaine a visiblement fait du bien.
L'attitude du sélectionneur national sera capitale dans le bras de fer engagé par les grands clubs contre les sélections, accusées avec une mauvaise foi hallucinante de surcharger un calendrier qu'eux-mêmes bourrent jusqu'à la gueule. En montrant une certaine bonne volonté devant les demandes des employeurs, Santini s'engage-t-il dans la voie d'un compromis fatal, ou s'est-il laissé la possibilité de montrer qu'un engagement total était indispensable pour la sélection, voire de saisir l'occasion pour durcir ses exigences envers les joueurs?
Le choix de Jacquot
La Coupe des confédérations va justement être dans les prochains mois le terrain d'une guérilla sans merci entre les clubs et les sélections (voir
Qu'est-ce qu'on fait des rations?). Un terrain idéal pour le G14-18 qui aura tout le loisir de dénoncer l'absurdité effective de cette compétition, placée en plein milieu de la trêve de la plupart des championnats.
Pour Santini, le dilemme sera particulièrement ardu. Il peut prendre le parti de faire de ce rendez-vous une priorité de second ordre, et appeler une "équipe B" dont les membres devraient être motivés par l'espoir d'intégrer le groupe final. Ce faisant, il laisserait ses "titulaires" faire un break salutaire à un an de l'Euro. Cette option semble plus raisonnable, mais elle implique le risque que le sélectionneur y perde beaucoup de son autorité… Voire de sa crédibilité, car même si cette Coupe n'a pas de grande valeur sportive, la France est détentrice d'un titre qu'elle défendra sur ses terres et un échec trop marqué coûterait cher à tous points de vue…
Jacques Santini sera-t-il contraint de jouer au subbuteo au mois de juin? (image FFF) |
Inversement, il peut refuser de se priver de l'occasion de préparer son groupe aux échéances qui l'attendent, en le faisant réellement travailler dans le cadre idéal d'un rassemblement de plus de deux semaines. Il peut aussi en faire un test de la motivation de ses joueurs (le doute étant permis au lendemain de France-République tchèque), et pourquoi pas, en profiter pour établir des hiérarchies marquées entre eux…
Quota de penalties
Depuis quelques saisons, une nouvelle figure s'est imposée dans le discours de certains entraîneurs, entrant dans la catégorie "lobbying ordinaire sur le corps arbitral". Ces responsables stigmatisent en effet le fait que leur équipe ait obtenu un nombre insuffisant de penalties au cours de la saison…
Il s'agit en fait de l'exploitation d'une statistique sans grande signification, exercice peut-être inspiré d'un usage similaire très répandu dans les médias (voir
Stats de France). En effet, le nombre de coups de pied de réparation, variant de 0 à 5, ne peut pas être d'une si grande influence sur le classement, surtout si l'on constate qu'au sommet de ce top figurent Montpellier, Paris, Le Havre, Lens et Strasbourg. D'autre part, les penalties sont de tels aléas du jeu qu'ils peuvent effectivement se répartir très inégalement entre les équipes. On ne va quand même pas instaurer des minima obligatoires.
Il faut donc être d'une mauvaise foi certifiée pour y voir la preuve d'un complot contre son équipe. Ce n'est évidemment pas cela qui pourrait gêner Guy Roux, lequel revendique "sept situations de jeu douteuses" à l'Abbé-Deschamps, stade décrit comme trop accueillant pour les arbitres (L'Equipe 11/02). Tout est dans la suggestion, mais cette finesse-là n'est pas du meilleur goût.
Malgré les bonnes intentions, l'arbitrage reste donc une merveilleuse machine à excuses, même les plus saugrenues.
Spectateurs virtuels
Les yeux les plus perçants auront repéré un étrange peuplement dans la tribune en réfection du Stade de la route de Lorient. La masse des spectateurs pouvait en effet choquer par son uniformité et son immobilité, étant donné qu'il s'agissait de silhouettes imprimées. L'artifice a visiblement été adopté pour lutter contre l'effet de désolation donnée par une tribune vide juste en face des caméras, et s'il n'a rien de répréhensible, on ne peut s'empêcher de lui trouver un caractère un peu malhonnête, même si l'on peut se réjouir que le club de M. Pinault n'en ait pas profité pour déployer des bannières publicitaires au profit de Conforama, La Redoute ou Finaref.
L'avantage, c'est que des spectateurs comme ça ne créeront jamais de problèmes. On peut même leur balancer des fumigènes dessus sans dommage. L'inconvénient c'est qu'en tant que supporters et consommateurs, ils sont nuls.
Lorsque la multiplication des matches et des retransmissions télévisées aura fini de dégoûter les spectateurs de se rendre au stade, il y aura toujours moyen de les remplir artificiellement de cette manière, ou encore à l'aide d'images virtuelles. Il ne devrait pas être très difficile de vendre le système à l'AS Monaco.
L'éthique, c'est chic, l'équité c'est compliqué
On attendait que le Conseil national de l'éthique donne une suite à la bruyante affaire Fiorèse, histoire de prouver qu'il était bien là pour imposer un recours régulier à la vidéo pour sanctionner rétrospectivement les tricheries et les brutalités. Il vient de se saisir des cas de Pamarot et Everson, et déjà les difficultés de sa nouvelle mission apparaissent. Car inévitablement, puisque tout le monde voit les images, le CNE va se voir reprocher d'ignorer des cas potentiels, et l'arbitraire de ses choix sera dénoncé. D'autant que pour le moment, aucun dispositif de visionnage systématique des rencontres n'est prévu, ce qui implique des remontées d'information indirectes. On peut alors craindre qu'un geste répréhensible aura un risque variable d'être sanctionné selon son degré de médiatisation. Ensuite, ce sera un encouragement pour que les clubs "victimes" plus ou moins imaginaires de tels actes mènent des campagnes contre leurs adversaires, ce qui ne serait pour alléger l'ambiance.
L'instance présidée par Dominique Rocheteau doit encore défricher beaucoup de terrain pour imposer sa légitimité…