La Gazette, numéro 73
Le coq Hardy monte sur ses ergots
On a juste eu le temps de se raconter des histoires sur le fléchissement du Racing que le voilà déjà qui remet les choses aux points. Muller, toujours aussi boudeur, y a même trouvé l'occasion de remonter ses troupes. Ce n'est pas non plus un exploit de battre un MHSC qui ne gagne plus, surtout s'il rate un penalty à un moment crucial. par contre, on a du mal à comprendre l'acharnement grotesque sur Barbosa, de la part de son président (qui l'a traité de "clown") et de Vincent Hardy à Téléfoot, tellement excité que ses collègues ont du le calmer. On dirait, chez le second, que la frustration accumulée de ne pas pouvoir dire le fond de sa pensée sur des joueurs plus intouchables se libère tout d'un coup. C'est vrai que le Montpelliérain a foiré son tir comme un vieux pet, mais enfin, faut-il tirer sur une ambulance? Venant de celui qui emporterait haut la main une élection par les lecteurs des Cahiers du journaliste sportif le plus crétin de l'histoire, la charge est franchement ridicule.
Tirages de maillots : le fléau
L'accrochage entre Jurietti et Bassir, qui a provoqué un penalty controversé en faveur de Lille face à Marseille a semblé une conséquence logique — sinon juste — d'un début de rencontre marqué par un nombre incalculable de tirages de maillot, ce fléau du footbal contemporain.
Le problème, c'est qu'ils deviennent de plus en plus sophistiqués, avec des joueurs qui savent très bien où est l'angle mort de l'arbitre. Il faut parfois voir trois ralentis de suite pour apercevoir un bras passé dans le dos, au bout duquel un poing agrippe la tunique de l'adversaire. On a tous en mémoire l'épisode du Brésil-Norvège de Coupe du monde, et depuis, il semble que ces gestes se sont banalisés, réfugiés dans une des dernières zones de non-droit d'un jeu de plus en plus sévèrement surveillé. Du coup, des mesures qui sembleraient loufoques apparaîtraient presque comme des solutions crédibles. En attendant de peindre les maillots sur la peau des joueurs ou de mettre au point un textile insaisissable, il faut peut-être, au lieu de l'interdire, rendre obligatoire le maillot sans manche des Camerounais, ou obliger les joueurs à porter des moufles.
Tirages de maillots : la solution ?
Une bonne part des polémiques consécutives aux penalties tient au fait qu'en cas d'incident dans la surface, l'arbitre n'a le choix qu'entre "laisser jouer" comme si rien ne s'était passé, ou prendre la sanction suprême. Les tirages de maillot et les poussées (sur les coups de pied arrêtés notamment) doivent leur impunité au fait qu'il est difficile pour les juges du jeu de les punir d'un tir au but. Quand ils le font, on dit d'ailleurs que ce tir au but est justifié, mais qu'il est injuste dans la mesure où tous les gestes de cette catégorie devraient être ainsi puni systématiquement, et non exceptionnellement.
Il est donc grand temps de réhabiliter une autre sanction, qui fait bien partie de l'arsenal prévu pas les règlements, mais qui n'est quasiment pas employée: le coup franc indirect dans la surface. Il permettrait d'établir un niveau intermédiaire de sanction et d'échapper à une alternative un peu absurde et s'appliquerait parfaitement aux incivilités constatées dans la zone de vérité.
Tout va bien au pays de Gérard Bourgoin
Gérard Bourgoin dérange un peu les vrais maîtres de la Ligue en raison de son style inconvenant, mais ceux-ci ne peuvent se plaindre de l'enthousiasme de camelot qu'il déploie pour justifier les mesures les plus absurdes. Invité sur le plateau de L'Equipe du dimanche, Bourgoin a tranquillement déblatéré sur le thème de l'arbitrage, des comptes du foot professionnel et de l'appel d'offres lancé auprès des radios pour les droits des compétitions françaises.
Sur le premier thème, il s'est permis de prétendre avoir "développé l'arbitrage", ce qui ne veut rien dire, surtout dans un contexte où le "code de bonne conduite" à l'usage des entraîneurs et des dirigeants est bafoué chaque semaine. Il a eu le culot de s'attribuer le mérite de la publicité sur les maillots des arbitres, dont les fonds servent au recrutement et à la formation, alors que la Ligue avait honteusement tenté d'en détourner les sommes à son profit. Retrouvant son ton de patron paternaliste, il a fustigé et rappelé à l'ordre les leaders syndicaux du corps arbitral, qui se sont permis de se plaindre et de revendiquer. Quand on vous dit que les patrons du foot français ont une mentalité qui les place à droite du Medef…
Sur les droits radio, il s'est fait le vendeur d'un futur "vrai magazine" de radio consacré totalement à la compétition concernée (les championnats de D1, de D2 et la Coupe de la Ligue seront vendus en lots séparés), qui sera réalisé par l'heureux détenteur de l'exclusivité acquise, prenant exemple sur Canal+ et son exclusivité sur le championnat. Le problème est bien la généralisation à n'importe quel médium du principe de la vente d'un droit d'accès, aujourd'hui la radio, demain la presse écrite (La privatisation du football). Comme Kirch avec ceux de la Coupe du monde cédés à RMC, la LNF ne compte même pas sur d'énormes revenus, il semble plutôt question de marquer les esprits et d'affirmer à la face du monde qu'ils possèdent le pouvoir et qu'ils en feront ce qu'ils veulent.
Enfin, à propos des comptes en pleine dégradation des clubs professionnels, il s'en est tenu à quelques remontrances vagues et quelques assurances tout aussi floues quant à l'avenir, refusant de désigner des clubs. Tout récemment un débat s'est engagé (voir L'ultralibéralisme expliqué aux enfants) sur les vertus de transparence que les tenants d'une libéralisation attribuent au marché. On peut consulter le rapport de la Ligue (document pdf) pour s'en faire une idée. Habilement regroupées en catégories soit disant homogènes, les données sont totalement anonymes. Impossible d'avoir la moindre idée de la situation d'un club précis. C'est tellement transparent qu'on n'y voit rien…