Envahissement de terrain
Une Balle dans le pied – L'invasion publicitaire déferle dans les stades et, à l'image des ignobles panneaux lumineux, finit par parasiter le spectacle lui-même.
Les signes de la mercantilisation du football sont si nombreux qu'on en vient parfois à ne même plus les remarquer, aussi envahissant soient-ils. Leur banalisation va de pair avec une forme de fatalisme chez l'amateur de ce sport, gavé jusqu'à en devenir insensible et qui s'imagine peut-être que les injonctions publicitaires sont sans effet sur lui. Et il en mange, de la publicité, au point qu'on ne sait même plus à quel moment il n'y est pas exposé.
LA CONQUÊTE DE L'ESPACE
Il n'est déjà plus possible de trouver une seule image de match dans laquelle n'apparaîtrait aucun logo: les sponsors maillots et les panneaux autour de la pelouse, les marques peintes sur celle-ci occupent littéralement le terrain depuis longtemps. Afin de ne perdre aucune surface de l'écran (sur lequel s'incruste occasionnellement un ou deux parrains), on a aussi vu apparaître des panneaux mobiles précipitamment apportés derrière les joueurs interviewés à la fin des mi-temps. Le ridicule de cette scène n'étonne même plus. En salle de presse, le mur derrière l'entraîneur est constellé d'autocollants figurant les innombrables sponsors locaux, composant un ignoble papier peint. Même les vestiaires ont leurs panneaux.
Déferlant via la télévision, la publicité se déverse dans l'arène elle-même, voire sur elle: le Stade de France, habillé de publicités géantes, semble racoler le client au bord de l'autoroute A1. À l'intérieur, les écrans géants remettent le spectateur devant sa télé. À ceux qui parviennent à se départir du réflexe de le fixer constamment, on assène un deuxième coup de gourdin avec des sonos braillardes, qui débitent des jingles abrutissants et des messages ineptes de spots radio. L'environnement sonore n'échappe pas à cette pollution endémique.
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