Divine comédie
Consternation dans les cieux: le FC Hell a battu l'AC Paradis. Les forces du mal étaient très bien organisées.
Il neige. Il est 20 heures, l’enfer s’éveille. Enfer, Paradis. Quelle différence. Au fond, nous sommes tous identiques. La pelouse a revêtu son manteau blanc. Mauvais présage. Faim, froid, besoin d’espoir. Ces mots résonnent dans ma mémoire. Mais c’est trop tard : condamné à vivre dans un isoloir, une vie tronquée, partielle. Ezéchiel. "J'abattrai le bras d'une terrible colère, d'une vengeance furieuse et effrayante sur les hordes impies qui pourchassent et réduisent à néant les brebis de Dieu."
Guignol. S’il ne veut pas passer pour un charlot, Dieu va devoir agir. Rapidement. Depuis hier, l’Humanité a les yeux braqués sur lui. Impatiente, inquiète, elle attend qu’il exécute enfin sa promesse. Car oui: les brebis de l’AC Paradis ont été défaites 4 buts à 2 par les hordes impies du FC Hell.
Fußball macht frei
Pour une première, c’est une première. Oussama Ben Laden, nommé à la tête de l’équipe du FC Hell depuis que Philippe Pétain a mis un terme à sa collaboration, avait fait quelques choix forts. Comme la titularisation d’Attila, en numéro 6-6-6, pour muscler son milieu de terrain. Une initiative salvatrice tant le Hongrois a été impressionnant, venant gratter les ballons huns à huns et distribuant quelques caviars à un Staline trop maladroit. C’est pourtant bien le petit père des peuples qui ouvrait le score à la 33e minute, sur un service magistral d’Hitler. Le kop explose, les NTP (Nazis Trop Puissants, ndlr) exultent. C'est un stade en fusion qui entonne son célèbre You’ll never hate alone.
Le Führer, qui récupérait le brassard à l’occasion de son retour, a donné une véritable leçon de concentration. Présent sur toutes les situations dangereuses du FCH, il a largement mérité son nom en une du journal d’Anne Frank ce matin: "Le FC Hell Hitler".
En face, l’AC Paradis s’apprête à s’effondrer. Les hommes de l’inamovible Schindler auront rivalisé une mi-temps avant de décliner peu à peu. Une défaite qui fragilise un peu plus le technicien autrichien, déjà mal en point après les récentes déclarations de Martin Luther King: "I have a dream, that one day, I will coach ACP" dans le quotidien La Bible. Le tableau n’est pourtant pas si noir. Les couleurs du Tintoret devraient permettre au manager de bénéficier d’encore un peu de temps. Mais jusqu’à quand?
Le Bal des Naze
Au rang des satisfactions, il faut retenir l’excellente prestation de Jésus Christ. Mauvais lors de ses dernières sorties, le capitaine est en train de vivre une véritable résurrection. Placé au centre d’un système en croix, il a marché sur l’eau pendant soixante-dix minutes avant de se sacrifier pour son équipe. Soixante-douze minutes, plus exactement. Sur une infiltration d’Amin Dada, Saint-Pierre, gardien du Paradis, lit mal la trajectoire et fauche le héros ougandais. L’homme en noir n’a rien vu mais Judas, l’arbitre assistant, désigne le coupable. Penalty.
Saint-Pierre exclu, De Nazareth enfile les gants. Dada se charge lui-même de l’exécution et crucifie un Jésus qui tendait la mauvaise joue. Mené 3-0, le Paradis n’a plus le choix s’il ne veut pas faire mentir Polnareff. Salir sa mémoire, le traîner dans la boue. Finalement, nous n’irons pas tous au paradis.
L’entraîneur heaven tente le tout pour le tout et effectue un double changement. Présent pour la première fois dans la liste de Schindler, Léon Blum s’est montré prometteur. Le jeune ailier gauche a réveillé ses partenaires en étant présent sur tous les fronts. Populaire, il y a fort à parier qu’on le verra à nouveau dans le groupe. C’est également le cas de Jean Moulin, entré en cours de partie avec son terrible cortège. Pour sa première sélection, l’avant-centre s’est fendu d’un doublé et est même passé tout proche d’un incroyable coup du chapeau. Au four et au Moulin. Hat Trick. Très déçu en conférence d'après-match, il déclare même à la presse allemande: "Je ne dirai rien".
Jardin d’Eden
Ce matin, le monde a la gueule de bois. Polnareff est un salaud. Benoit XVI est un tricheur. Deux mille ans d’une histoire bâtie sur un horrible mensonge: l’Enfer est meilleur. En conférence de presse, Gandhi tente, tant bien que mal, de sauver les meubles: "Non mais, les derniers seront les premiers…. Et puis la non-violence". Ferme-la. Illusions gâchées, utopie perdue. Existences saccagées. Ce weekend, ces hommes n’ont pas honoré leurs maillots blancs du Paradis. Michel Berger s’égosille, mais la caravane passe; le Paradis est perdu.
S’il veut sauver l’Humanité, Schindler va devoir se remettre au travail. Le match retour approche, et ses hommes ne sont pas prêts. Voilà 2.000 ans qu’ils jouent selon les mêmes principes tactiques. Mais aujourd’hui, leurs 10 commandements ne suffisent plus. Et Moïse ne sera plus là pour écarter leur mare de sang.
Personne n’est dupe. L’Humanité tremble, elle a peur. Elle a peur car elle voit se rapprocher dangereusement l’éventualité d’une victoire finale de l’Enfer. Et les joueurs le savent. Abraham Lincoln, en pleurs au micro de David Astorga, conclut même: "Nous n'avons pas été dignes. Le monde nous regarde, et nous le décevons. Ça ne peut plus durer. L'Enfer mérite sa victoire, il a été bien meilleur. L'Enfer l'emporte. Malheureusement, l'Enfer, c'est les autres."
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