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Vidéo : le rugby dans l’engrenage

“L’arbitrage vidéo, ça marche dans le rugby!” croient savoir ses partisans pour le football. Ça marche si bien que l’IRB en a étendu l’application… et que les polémiques explosent.

Auteur : Jacques Blociszewski le 29 Août 2013

 


Nombreux sont ceux qui voient un exemple dans l’adoption par le rugby de la vidéo pour l’arbitrage. Voilà un sport moderne dont le foot ferait bien de s’inspirer, disent-ils. En oubliant d’emblée que le rugby, dont le jeu est découpé en phases successives, se distingue fondamentalement du football – dont l’intérêt et l’intensité résident dans la continuité du jeu [1]. Aujourd’hui, espérons qu’ils se posent au moins quelques questions après la déroute de l’application accrue de la vidéo dans le Top 14.


Rappel des faits : l’International Rugby Board (IRB) a décidé d’étendre l’utilisation de la vidéo dans l’arbitrage. Jusqu’alors principalement employée pour valider certains essais, elle concerne désormais aussi le jeu déloyal et les brutalités, les hors-jeu, les passes en-avant, les obstructions et les joueurs passés en touche. Et l’on peut remonter jusqu’à deux regroupements précédant un essai. Important: l’arbitre vidéo a maintenant lui aussi le droit de demander un visionnage, et non plus seulement l’arbitre de champ.
 

 



 

“C’est catastrophique”

Le constat après les premières journées de Top 14 est plus que négatif:
“Le jeu s’arrête en permanence” (Marc Delpoux, entraîneur de Perpignan), “C’est épouvantable” (Christian Lanta, Bayonne). “C’est catastrophique”, déplore Marc Lièvremont, ancien entraîneur du XV de France, qui ajoute: “Je ne comprends pas comment le législateur a pu aller aussi vite, aussi loin” (lire "Top 14: nouvelle polémique autour de l'arbitrage vidéo"). Didier Mené, patron des arbitres français, est très inquiet, lui qui regrettait déjà trop d’erreurs des arbitres vidéo la saison passée. Cela ne va pas s’arranger avec le nouveau protocole, trop vaste.


Ainsi, l’outil qui est censé abolir les polémiques est lui-même au coeur d’une vive polémique. Le paradoxe n’est qu’apparent. En effet, une image est toujours subjective, elle peut tromper autant qu’être porteuse de vérité. Consulter des images en plein match est donc un défi insurmontable: trop long, nombreuses situations indécidables, risques d’erreurs… L’arbitre vidéo, ce décideur virtuel loin du terrain, isolé dans son cocon, voit son rôle considérablement augmenté. Il doit trancher, difficilement, au vu d’images qui souvent ne disent rien, ou si peu, voire se contredisent. Et ce jugement venu d’ailleurs éloigne toujours davantage le rugby de son esprit et de l’humanité qu’il revendique.


Faire plaisir à la télévision ?

Matches hachés, qui durent dix minutes de plus, déresponsabilisation des arbitres centraux demandant la vidéo pour un oui pour un non, impatience du public des stades en attendant la fin d’interminables visionnages: la vidéo new look nuit gravement au rugby. La nouvelle règle montre clairement que l’IRB ne sait pas ce qu’est une image et encore moins une réalisation télévisuelle. Seule son éventuelle volonté de faire plaisir à tout prix à la télévision peut expliquer une initiative aussi calamiteuse. Et même cette volonté-là serait une mauvaise idée, car contrairement à ce qui est trop souvent cru (à commencer par les gens de télé, généralement de fervents pro-vidéo), la télévision et les réalisateurs n’ont pas grand-chose à gagner à une assistance vidéo étendue. D’abord parce que si le rugby veut rester regardable et faire de l’audience, ses matches doivent garder un minimum de continuité et de dynamisme. Ensuite parce que les réalisateurs télé devenant des acteurs majeurs de l’arbitrage de ce sport, le choix des images qu’ils mettront à l’antenne – ou non – sera couramment contesté.


En outre, la télévision ne peut pas tout voir. Les décisions de l’arbitre vidéo ressembleront donc à une loterie. Imaginons l’expulsion d’un joueur pour brutalité au vu des images diffusées. Il faudra décider très vite, à partir d’images hors contexte, alors que le soir même d’autres plans viendront peut-être contredire cette décision hâtive (bien que prenant deux ou trois minutes, ce qui, en plein match, est très long). Que de polémiques, alors, le lendemain...


Boîte de Pandore

Le rugby est donc entré dans l’engrenage contre lequel Michel Platini met le football en garde. Pourquoi choisir d’examiner tel type d’action de jeu et pas tel autre? Où s’arrêter? L’arbitre “traditionnel” décide immédiatement, assume son autorité et sa prise de décision, les contestations restent limitées à l’après-match et le doute n’a pas le temps de s’installer pendant une rencontre. Les images, elles, tendent à nourrir les polémiques en créant de l’indécision, et en ouvrant la boîte de Pandore des interprétations différentes et des plans multiples sur une même action. De plus, l'intensité du match pâtit de trop de vidéo, même dans un sport aussi “découpé” que le rugby.


Un bilan désastreux pour cette nouvelle règle, donc, bien que la décision de l’IRB ne soit pas définitive: elle sera (ou non) confirmée en 2014. Les partisans de la vidéo diront sans doute “laissons le temps aux arbitres de s’adapter”. Certes, mais on ne voit pas comment ceux-ci pourront éviter le piège qui leur est tendu. Soit ils ne recourent presque pas à la vidéo (mais alors pourquoi en étendre à ce point l’utilisation?), soit ils l’emploient excessivement (et les matches n’y résistent pas). L’assistance vidéo dans les sports collectifs souffre toujours de cette tare fondamentale: ou trop ou pas assez. La question est insoluble. Les arbitres vidéo doivent-ils être mieux formés? s’interroge-t-on. Mais pourquoi devrait-on les former afin qu’ils s’adaptent à un système absurde?
 


Toujours des contestations

Certains affirmeront que pour valider les essais, c’est formidable. Pourtant, même dans ce cas-là, la vidéo pose problème. Elle place la télévision au coeur de l’arbitrage (ce qui n’est pas rien!) et elle déresponsabilise les arbitres au moment où leur capacité à assumer un choix difficile est le plus nécessaire. Les décisions des arbitres vidéo sont parfois ahurissantes, le jeu est souvent arrêté longuement, pour un résultat pas toujours incontestable.


Une logique millimétrique et de vérification plus proche du saut en longueur que du rugby se substitue à l’esprit du jeu, de magnifiques essais qui en d’autres temps seraient accordés sont maintenant refusés. Et cela après six, voire neuf ralentis et deux minutes cinquante d’attente, comme dans ce remarquable cas d’école qu’est la finale de la Coupe du monde 2007 et l’essai refusé à l’Angleterre (voir la vidéo). Et puis, jusqu’à présent, les joueurs de rugby – à l’inverse des footballeurs – acceptaient les décisions de l’arbitre et ne protestaient pas. Ce temps est révolu: ils s’y mettent. Si la vidéo n’en est pas la seule responsable, elle ne résout rien. Cela fait déjà beaucoup d’éléments à charge, auxquels s’ajoute le trouble créé par les écrans géants [2].


La technologie au service du sport, pas l’inverse

Pour éviter l’effet d’enchaînement et l’engrenage auquel on assiste en ce moment dans le rugby, il faut se passer complètement de la vidéo pendant les matches et se concentrer sur son utilisation rétroactive. Il s’agit en effet de bien distinguer le recours à la vidéo pendant et après les rencontres: avec du temps et à tête reposée, les commissions de discipline peuvent sanctionner et disculper dans des conditions acceptables, tout en exerçant un rôle dissuasif sur les auteurs de tricheries et de brutalités. On doit défendre ce recours raisonné à la vidéo, mais en cours de matches, on a la certitude que les dégâts sont considérables.


Ce rugby jadis si fier de son indépendance, de sa culture et de ses valeurs se soumet aujourd’hui à la télé encore plus que le football, alors même que l’image montre ses limites face à des situations que les hommes, eux, règlent dans l’instant. Ce sont les technologies qui doivent s’adapter au sport et le servir, pas l’inverse. Ne pas analyser et comprendre les relations entre les outils technologiques et le jeu ou le sport concerné revient pour les instances dirigeantes de celui-ci à pénaliser voire détruire ce qu’elles sont censées représenter et défendre. De ce point de vue, la décision du Board est tout simplement irresponsable.
 


[1] Rappelons les mesures qui, après une Coupe du monde 1990 désastreuse, ont justement amélioré cette continuité: interdiction de la passe en retrait au gardien, obligation pour celui-ci de ne pas conserver le ballon plus de six secondes, décompte réglementé du temps additionnel, sanctions accrues des actes d’antijeu, obligation de sortir du terrain pour les joueurs ayant nécessité l’intervention des soigneurs.
[2] Si les spectateurs des stades s’ennuient autant pendant les visionnages par l’arbitre vidéo, c’est en partie parce qu’ils ne peuvent pas voir les images. Les stades n'étant pas tous équipés d'écrans géants, les responsables de l’arbitrage français ont décidé de ne pas montrer les images sur les écrans existants. Et si les ralentis sont diffusés, la pression sur l’arbitrage s’en trouve évidemment accrue, ainsi que les risques de protestations violentes dans le public.


 

Réactions

  • Van Der Wiel Age People le 31/08/2013 à 15h39
    José-Mickael, ton exemple du hors jeu illustre très bien la théorie de l'absolu qui prévaut actuellement dans cette décision arbitrale : le directeur de jeu et ses assistants ignorent totalement quelle est la distance impliquant que l'attaquant est hors jeu ou pas. Donc, ils sifflent selon leur interprétation.

    Le fait que le joueur soit présumé ou pas hors jeu pour moins de 50 cm est un faux problème puisqu'il faut de toute façon trancher, et ce encore plus au ralenti...

    Sur un but marqué en situation interprétable, j'ai toujours autant de mal à voir ce qu'une utilisation cadrée de la vidéo induirait comme problème supplémentaire ou comme information en moins par rapport à la situation actuelle. Il suffit juste que la DNA dise dans tel cas l'arbitre vidéo doit se prononcer en faveur de l'attaque ou dans tel cas en faveur de la défense.

    Alors admettons que Dame Rédac et toi ayez raison, je me fais l'avocat de la défense contre l'utilisation de la vidéo : le cas de l'en avant lors d'un essai dans le rugby aujourd'hui. J'admets que l'interprétation actuelle de l'arbitre vidéo est une plaie. Si cela ne change pas, il est évident que le progrès présumé n'en sera pas un et qu'il sera impératif de revenir en arrière.

    Mais je souhaiterai que nous en reparlions à la fin de la saison de top 14 car si vous êtes convaincus que la situation n'évoluera pas dans le bon, je suis convaincu du contraire.

  • Coach Potato le 31/08/2013 à 17h18

    LES ÉLÉMENTS

    je suis désolé les gars mais si vous êtes politiquement majoritaires, vous avez géométriquement tort. Et c'est mon pote Euclide qui le dit.

    Rappel: La loi 11 ne prévoit pas de donner avantage à l'attaque ou à la défense mais de signaler un positionnement illicite d'un joueur dans le camp adverse au départ d'une passe vers l'avant d'un partenaire.

    Géométrie: L'arbitre assistant est chargé de se déplacer le long de la ligne de touche et de s'aligner sur le dernier défenseur. Sa capacité à le faire suffisamment vite et à répéter l'effort est évaluer en stage et fait partie de la notation.
    Ainsi, il peut vérifier que le joueur attaquant est ou non aligné avec la droite qui passe par lui et le dernier défenseur et coupe la ligne de touche à angle droit.

    En conséquence, tout angle en azimut et en site (élévation)induit une apparente modification de la position du sujet observé. Tout instrument de mesure autre que les yeux de l'arbitre (qui se trouve aussi à la hauteur idoine) mesurera une position fausse de hors-jeu ou non.

    Les tenants de la vidéo empruntée à la couverture télévisuelle pour tout ce qui relève d'une position émettent un avis dont la méconnaissance de la géométrie euclidienne disqualifie la source du droit.

    En conclusion, c'est rapport à l'angle fait par rapport au cercle dont l'observateur mal placé forme le rayon dont le dernier défenseur constitue le centre et dont la tangente sera ?


    sera? la ligne de touche!

    Samedi prochain, vous me ferez 2 heures pour la peine!

  • Tonton Danijel le 02/09/2013 à 14h57
    la rédaction
    30/08/2013 à 19h08

    Là où on a perdu d'avance, c'est que quasiment personne n'est en mesure (ou plutôt n'a le temps ni l'envie) de considérer la problématique dans toutes ses (nombreuses) dimensions, et d'assimiler tout l'argumentaire nécessaire à démonter une "solution" vers laquelle tout le monde va spontanément bondir en n'en considérant qu'une portion.
    - - - - - - - - - - - - - -

    Ceci dit, pour l'instant, pas l'once d'une mise en application de l'arbitrage vidéo, donc c'est aussi loin d'être gagné pour les partisans de la vidéo...

  • C. Moa le 04/09/2013 à 15h37
    José-Mickaël
    30/08/2013 à 22h14
    Puisqu'on a encore abordé le cas du hors-jeu (un peu plus haut), je vais de nouveau démontrer que le hors-jeu introduit un facteur d'incertitude qui, comme l'incertitude quantique, est inévitable. Oui, j'en ai déjà parlé il y a quelques années mais ça a eu le temps d'être oublié...
    (...)
    ____

    Tu as bien fait.


    Il y a un point que vous n'avez pas abordé dans l'article ni dans les commentaires : pourquoi n'y aurait-il que la vidéo pour "aider à la décision" (restons dans le politiquement correct) ?

    Le problème des images, c'est qu'il faut les interpréter.
    L'avantage, au hasard, d'un ordinateur, c'est qu'il sait décider si on lui donne les règles et les bonnes informations. Et qu'on peut calculer la marge d'erreur.

    Des puces RFID dans les chaussures des joueurs (ou dans leur cerveau si vous préférez) et dans le ballon pour commencer. Un dispositif sur le bord du terrain qui sera toujours au niveau du dernier défenseur (se déplaçant comme les caméras qui filment le 100 mètres par exemple). On peut imaginer beaucoup de choses, qui coûteront beaucoup d'argent.
    Je vais de ce pas envoyer un CV à la dream football league, tiens.

    Deux remarques pour finir :
    - j'aime le principe de "Ai-je une raison d'annuler l'essai" ou "Ai-je une raison d'accorder l'essai" évoqué auparavant. La vidéo doit avancer une raison de déjuger l'arbitre, et non décider à sa place.
    - marquer l'emplacement du coup-franc et du mur à la bombe comme on peut le voir en Amérique du Sud, je trouve ça génial.

La revue des Cahiers du football