Ne perdez pas de temps à lire ce texte, connectez-vous vite pour commenter les articles des CDF. Attention à ne pas confondre vos minuscules et vos majuscules.
Vous avez oublié votre mot de passe ?
Inscription
Vous avez oublié votre mot de passe ? Il reste un espoir ! Saisissez votre adresse e-mail ; nous vous enverrons un nouveau mot de passe. Cette procédure est quasiment gratuite : elle ne vous coûtera qu'un clic humiliant.
Nous vous avons envoyé un email sur votre adresse, merci d'y jeter un oeil !

CONDITIONS D'INSCRIPTION :

1. Vous devez nous adresser, via le formulaire ci-dessous, un texte (format .txt inférieur à 100 ko) en rapport avec le football, dont la forme est libre : explication de votre passion, anecdote, aventure, souvenir, essai, commentaire composé, portrait, autobiographie, apologie, réquisitoire, etc. Vous serez ensuite informés de la validation de votre inscription par mail. Les meilleurs textes seront mis en ligne sur le Forum.

2. Nous ne disposons pas d'assez de temps pour justifier les retards d'inscription ou les non-inscriptions, et ne pouvons pas nous engager à suivre une éventuelle correspondance à ce sujet. Merci de votre compréhension.

Nous avons bien reçu votre candidature, on y jette un oeil dès que possible. Merci !

Partager :

Rob Beal, le roman d'un tricheur

Enquête – Arnaqueur en série, Robert Beal a vendu de la rumeur aux journalistes. Parcours d'un habitant de Sheffield qui se dit parisien. Et plein d'autres choses.

Auteur : Raphaël Cosmidis le 18 Mars 2013

 


Lorsque Robert Beal prétend être une source d'Oliver Kay à la suite de la publication de l'article du Times et son imbroglio, l'homme nous est totalement inconnu. Il défend la véracité de la Dream Football League par messages privés, avant de défendre Oliver Kay dans des tweets publics. Rapidement, il est retweeté par de nombreux journalistes, qu'ils soient du Times ou d'autres journaux anglophones. Sa popularité nous fait douter. Serait-il vraiment une source? Les doutes sont très vite dissipés. Robert Beal, s'il a déjà eu raison, a surtout eu très souvent tort. Logique, de la part d'un professionnel de l'invention.
 

Rob Beal, Bad Deal

Les premières traces d'un Robert Beal arnaqueur remontent à 2007. À la recherche “Rob Beal scam”, Google répond en quantité. On découvre qu'entre 2007 et 2008, Robert Beal dit travailler pour Global Risk Security Group, une compagnie basée à Paris offrant des services de sécurité. Une compagnie qui offre des emplois, surtout. Outre-Manche, l'appât fonctionne particulièrement bien. On retrouve sur des forums, ici ou , des discussions à son sujet. Les participants se plaignent d'une avance de cent livres demandée pour le contrat de travail. En retour, Robert Beal envoie un faux numéro de téléphone et une fausse adresse. En réalité, jamais une compagnie au nom de Global Risk Security Group n'a existé officiellement en France. Le nom est calqué sur celui d'une vraie société, Global Security Event, située près du métro Jaurès à Paris.
 

 



 

Sur son profil Linkedin qui ne semble pas avoir été mis à jour, Robert Beal travaille toujours à Global Risk Security Group, comme “Director Client Services”. En essayant d'accéder au site web de l'entreprise affiché sur son profil, on tombe sur une page introuvable. À l'aide du site archive.org qui permet de retrouver l'état d'une page internet dans le passé, on découvre un site sommaire, à la recherche de salariés tels que des gardes du corps. Des informations complètement inventées à propos de l'histoire de la société (selon lesquelles elle aurait été créée en 1999). Seul moyen de contacter la boîte, une adresse mail. Global Risk Security Group est un exemple parfait de ses méthodes. Une promesse contre de l'argent, une promesse jamais tenue.
 


Virage sportif

Robert Beal ne s'arrête pas là. Il multiplie les petits et les plus gros coups. En 2010, il joue le faux intermédiaire dans une tentative de rachat de Sheffield Wednesday. Leur propose un partenariat avec le PSG totalement bidon. Les prémices de son intérêt pour le sport, le football, et plus particulièrement le club parisien. Avant d'être @robbealparis sur Twitter, il était @rob10media, en poste à “SEO 10 Media Management”, parfois appelée 10mm Media, une autre compagnie domiciliée à Paris, dans le milieu de la musique et du sport. Une autre société fantôme dont le nom est de nouveau calqué sur une vraie compagnie – 10media, une agence de création canadienne.
 

Lors de l'été 2011, Robert Beal s'attaque au Guardian. À l'occasion de la reprise du football européen, il propose au site d'héberger un blog dont le sujet serait la Ligue 1. 10mm Media entre en scène. À travers 10mm Media, il se dit mandaté par la Fédération Française de Football, qui voudrait promouvoir le football hexagonal. Il offre 50.000 livres pour une saison d'articles publiés sur le Guardian, accompagnés du logo de la FFF, tout en laissant totale liberté éditoriale à l’auteur. Beal propose donc à des journalistes de les payer pour écrire sur ce blog Ligue 1 parrainé par la FFF. Le quotidien accepte et publie les trois premiers articles, avant de constater que personne n'est payé. Ni les auteurs, ni le site. Le blog est arrêté immédiatement. “C'était une arnaque bizarre pour plein de raisons, il n'y avait pas de bénéfice financier direct pour Beal. J'imagine qu'il utilisait nos réseaux et les articles publiés pour établir sa crédibilité ailleurs. Mais ce n'est qu'une supposition”, nous a confié un employé du Guardian.
 


Arnaques VIP

Nous avons établi qu'il donnait aussi dans l'arnaque aux billets de match, et recueilli le témoignage détaillé de deux de ses victimes françaises. Son mode opératoire aurait été identique dans une vingtaine d’autres approches, six ayant réussi. Il sympathise sur Twitter, noue des contacts par SMS ou téléphone, et un jour propose des places VIP gratuites ou bon marché. Pour un match à Marseille, il faut aller retirer les billets au guichet, pour d’autres au Stade de France, les recevoir d’un journaliste devant le stade, en prenant soin à chaque fois de se faire passer pour un de ses collaborateurs. Cette première opération se déroulant bien, ses bénéficiaires sont en confiance et se voient proposer un autre deal: des places, encore très haut de gamme, à des prix très attractifs. Cette fois, les “clients” restent aux portes du stade, et n’obtiendront jamais de remboursement, en dépit des promesses, rendez-vous annulés et autres atermoiements que Rob Beal leur réservera par la suite. Quand ce n'est pas... des propos menaçants.
 

On peut souligner qu’il continue de contacter avec insistance ceux qu’il a arnaqués, probablement moins pour défendre son honneur que pour limiter les bruits négatifs autour de sa réputation. On note au passage que son entregent n’est pas seulement imaginaire, puisqu’il est en mesure de fournir des places à ses “amis”, cela sans quitter Sheffield.
 


Wheeler-Bealer

Difficile de savoir comment Robert Beal s'est infiltré dans les coulisses du monde journalistique jusqu'à devenir une source considérée fiable par certains. Son activité sur les réseaux sociaux en donne néanmoins une idée: il flatte, copine avec les journalistes dans le but d'obtenir un moyen de les contacter de manière privée afin de leur vendre ses informations, celles-ci se révélant parfois vraies (Alex ou Van der Wiel au PSG, des détails de contrat). En remontant certains fils Twitter, on lit plusieurs journalistes lui signifier de parler en messages privés, ou par mail. Il est même parvenu à déjeuner avec Darren Tulett en 2011 lors d'une de ses rares venues à Paris. Le journaliste s'est vite rendu compte que son compatriote n'était pas digne de confiance. Définitivement quand Beal lui a dit qu’il pouvait le faire entrer chez beIN... alors que Tulett était à la veille de signer avec la chaîne.
 

Beal a beaucoup d'informations, et il n'hésite pas à les asséner avec une grande assurance, la majorité étant fausse (Drogba à la Juve, Sneijder à Tottenham, la reprise de l'OM par des investisseurs du Moyen-Orient etc). Beal explique la connaissance de ses informations par son nouveau métier, qu'il exerce depuis 2010. “Chef de Sports Media”, dit son profil Viadeo. Chef de la compagnie “Euro Sports Media” plus précisément, qui collaborerait avec “la BBC, Sky Sports, TF1, Radio et TV France (sic), Fox, ESPN” et autres. Une fausse société dont le nom est calqué sur une vraie? Évidemment. À l'inverse du raccourci Euro Sports Media, European Sports Media existe bel et bien. Le schéma se répète et Beal en sort toujours indemne, adressant des menaces régulières à ceux qui mettent en doute sa crédibilité. Dernièrement, c’est à Nick Harris, alias @sportingintel sur Twitter, qu’il a laissé, manifestement ivre, un message vocal de menaces, complété par un mail, au cas où. La police a mené des enquêtes sur lui par le passé, saisi ses téléphones et ordinateurs là où il vit vraiment, avec ses parents, à Sheffield. Apparemment sans succès.
 


Fini de jouer

Véritable moulin à rumeurs, Beal a aussi seriné que Margarita Louis-Dreyfus était en négociation avec Abou Dhabi pour une reprise de l'OM. On trouve sa trace dans un nombre considérable d'actualités, qui témoignent d'un certain sens du timing. Positionné comme une source proche du PSG et des Qataris, il a alimenté certaines rédactions, mais a souvent fini par se discréditer. Richard Whittall a appris, de la part d'un dirigeant de QSI, que l'entreprise avait adressé fin 2011 à Beal une injonction de cesser la diffusion de fausses informations et fausses citations concernant QSI et le PSG. À cette époque, Beal s'était montré très actif dans l'émission de confidences sur le transfert de Beckham. De quoi se demander si le panneau dans lequel L'Équipe et Le Parisien étaient tombés, en annonçant à l'époque que le transfert de l'Anglais était finalisé (lire "Leurre de Beckham"), résulte lui aussi des œuvres de Beal. Ces derniers jours, L'Équipe a en tout cas observé le plus complet silence sur l'ensemble de l'affaire.
 

Le 13 mars, Robert Beal connaît l'apogée de sa carrière d'arnaqueur. Ses bobards atterrissent dans le Times. Trahi par ce qui l'avait servi jusqu'ici, les réseaux sociaux l'amènent à être démasqué: un escroc amateur et maladroit. L'histoire d'une source pas vraiment d'eau fraîche.
 

Réactions

  • crotale psychopathe le 20/03/2013 à 22h52
    Ce type a réussi un grand truc tout de même.
    Imaginez vous un jour ouvrir Le Monde avec 3 pages de conneries que vous avez sorties de votre imagination malade ! Qui ne jalouse pas cette mystification me jette la pierre. Aie aie aie ok, mais quand même, ça c'est de la piraterie.
    Dommage que l'apothéose du Times s'achève par une sortie de route sans panache ni couronne.
    Se voyant démasqué, il pouvait :
    -prétendre avoir essayé de dissuader Oliver Kay de délivrer de fausses informations
    -faire chanter Oliver Kay pour tous les autres tuyaux bidons qu'il a alimenté
    -Retirer son masque et se présenter comme le pourfendeur du journalisme à 4 sous
    -...
    Décevant tout compte fait, ce Rob Beal, pas les épaules.

La revue des Cahiers du football