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Chelsea, la nouvelle oligarchie

Les Blues sont parvenus à leurs fins en remportant la Ligue des champions: un trophée à l\'image de ce club singulier, pur produit de l\'époque et de sa compétition phare.

Auteur : Christophe Zemmour (avec J.L.) le 24 Mai 2012

 

 

19 mai 2012: Chelsea remporte la C1 aux dépens du Bayern Munich, au terme d’un parcours jalonné de rebondissements. Depuis son arrivée au club en 2003, Roman Abramovitch caressait ce rêve prestigieux. Il lui aura donc fallu neuf saisons pour y parvenir. Au cours de cette période, le club de Londres a écrit avec cette compétition une histoire longue, décriée et mouvementée, mais qui a le mérite d’être la sienne, et seulement la sienne. La Ligue des champions a peut-être créé Chelsea à son image: celle d’une entité omniprésente, imprévisible, agaçante, déroutante et fastueuse.

 

Des hommes et du caractère

Outre son oligarque russe, auquel sa discrétion confère une personnalité énigmatique, l’éventail des grandes figures Blues est large. Après une saison 2003/04 qui a vu la véritable éclosion des futurs cadres Frank Lampard et John Terry, alors parmi les meilleurs joueurs en devenir à leur poste, vint l’avènement du Special One. José n’est vraiment devenu Mourinho que lors de son passage remarqué à Fulham Road, fait de déclarations tapageuses et de polémiques, et Chelsea n’a accompli sa mue qu’avec le technicien lusitanien. Ce dernier a façonné une équipe et des joueurs de caractère qui se sont retrouvés propulsés sur le devant de la scène anglaise et européenne.

 

 

Désiré par Mourinho dès son arrivée, Didier Drogba peut être perçu comme un pur produit de cette époque: il a été, et il est encore, tour à tour puissant, talentueux, controversé, efficace, simulateur, mauvais perdant (lire “Fucking disgrace”), arraché à prix d’or, annoncé sur le départ... Cette image de têtes à claques, les hommes de Chelsea la traînent encore et ce n’est pas cette campagne de C1 2012 qui va l’embellir, laquelle les aura vus trembler devant le Benfica Lisbonne en quarts et s’en sortir en demi-finale et en finale grâce à une stratégie ultra-défensive.

 

La vérité est peut-être ailleurs, parce qu’au-delà du Boring Chelsea et de son parfum de petrodollar, le club compte des personnalités fortes et emblématiques qui ont peu à peu transformé une équipe dite de mercenaires en une formation de tauliers solidaires – laquelle s’est construite, des saisons durant et autant par ses succès que par ses déboires, une identité propre. Chelsea, c’est ce grand gardien au casque noir, ce capitaine fidèle sur le terrain et infidèle en-dehors, ce tireur de penalty qui dédie ses réussites à sa mère décédée, cet avant-centre combatif, décisif et énervant. Dirigés par des coaches de renom comme Mourinho, Hiddink, Scolari ou Ancelotti, ces joueurs sont parvenus au fil des années à résister à toutes sortes d’adversité (Liverpool, Barcelone, les tirs au but) et ont paradoxalement obtenu leurs meilleurs résultats en C1 lorsque leur banc était occupé par un intérimaire (Avram Grant en 2008 et Roberto Di Matteo en 2012).

 

 

Paradoxes et vents contraires

L’histoire du Chelsea d’Abramovitch en général, et de Chelsea en C1 en particulier, est truffée de paradoxes et de (mauvais) coups du sort. De la main d’Hugo Ibarra non sanctionnée qui remet en selle Monaco lors de la demi-finale retour en 2004, à celle de 2009 marquée par l’égalisation d’Andres Iniesta à quelques secondes de la fin – en passant par ce but indéterminable de Luis Garcia pour Liverpool en 2005 et l’aquaplanning de John Terry lors de la finale de Moscou –, le destin a longtemps été contraire ou contrariant. De cette formation qu’on a souvent qualifiée d’ennuyeuse, il ne faudrait pas oublier qu’elle est née véritablement aux yeux de l’Europe grâce à un dispositif en 4-3-3 dont la puissance et l’explosivité faisaient le côté spectaculaire, avec des scores fleuves à domicile contre des cadors continentaux (4-2 face à Barcelone et Munich en 2005, dont une entame tonitruante face au club catalan au retour [1]), un duo offensif Drogba-Lampard complice et prolifique, et une écrasante domination sur la Premier League [2].

 

Dans les périodes où il était le plus régulier et le plus redouté, Chelsea n’est pas parvenu à séduire la C1, cette fille difficile qui aura donc attendu quinze ans avant de s’offrir à un nouvel amant [3]. Après avoir pris le temps de la connaitre, d’essuyer des revers douloureux, c’est l’année où il connait une crise singulière dans son vestiaire (lire “Luttes de pouvoir”) et son exercice national le moins réussi (sixième place), que le club résident de Stamford Bridge est parvenu à conjurer le sort. Comme face à Barcelone en demi-finale, avec un incroyable scénario ponctué de maladresses catalanes, d’abnégation et d’actions de talent des individualités décisives de la campagne – Petr Cech et Didier Drogba. Non sans ajouter dans le script une tactique à faire bondir de leur siège les puristes, un rôle de méchant qui fait tomber le gentil et l’amusante absence de John Terry en finale, l’inconsolable capitaine de 2008 redevenu le brutal et décrié défenseur l’espace d’un instant fatidique.

 

 

Dans le dernier carré

En définitive, Chelsea présente avec Manchester United le meilleur bilan anglais de la dernière décennie, aussi bien sur le plan domestique qu’international, et avec Barcelone la plus grande assiduité dans le dernier carré de la Ligue des champions. Se distinguant essentiellement par un niveau athlétique élevé et une discipline tactique remarquable, ce Chelsea régulier et habitué à la performance au très haut niveau n’a que très rarement été surclassé.

 

 

Autre clin d’œil, l’équipe qui s’est le mieux illustrée dans ce registre est peut-être l’Inter Milan de José Mourinho, marqué lui aussi du sceau de l’entraîneur portugais qui lui a imprimé une force collective et un caractère hors du commun. Ce huitième de finale 2010 entre les deux formations a mis fin à une invincibilité sur la scène européenne du club londonien à domicile longue de quatre ans [4]. Équipe indissociable de l’histoire récente de la compétition, Chelsea, par cette présence au plus haut niveau, a de plus contribué à créer des classiques. S’ils portent en eux le caractère répétitif et galvaudé des affiches de la C1 actuelle, les duels face à Liverpool et à Barcelone, notamment ceux de 2009 [5], resteront des moments marquants de la mythologie des coupes européennes, au travers de leurs nombreux rebondissements, de leur symbolique et des oppositions de styles proposées (club avec une culture contre parvenu, équipe joueuse contre tactique défensive).

 

C’est peut-être là que réside la principale réussite du CFC: être parvenu à devenir un grand club selon les normes contemporaines, marquant la Ligue des champions de sa présence avant de la remporter, obtenant le droit de figurer parmi les multinationales du football, imposant sa marque et ses stars sur le marché mondialisé du sport. En moins de dix ans, Stamford Bridge a connu plus de grandes heures que dans le reste de l’histoire du club... sans craindre de détruire les liens avec sa propre histoire et sa propre communauté. Il vaut en effet mieux regarder cette réussite de l’extérieur, tant son prix a été considérable pour les supporters – au propre comme au figuré (lire “Chelsea, le prix des titres”). Chelsea est le premier club “nouveau riche” à être sacré, et il a peut-être amorcé une lignée que Manchester City ou le Paris SG vont vouloir poursuivre. Les Blues continueront probablement de cultiver leur singularité, par exemple avec le projet de nouveau stade sur le site iconique de Battersea [6]. Avec la fin d’une génération tardivement couronnée, il faudra surtout assurer la continuité du projet et des ambitions sportives.

 

 

[1] 3-0 au bout de dix-neuf minutes de jeu.
[2] Chelsea a terminé les exercices 2005 et 2006 à plus de 90 points. En 2010, année de leur dernier titre de champion, les Blues ont inscrit 103 buts.
[3] Le Borussia Dortmund en 1997 (victoire 3-1 face à la Juventus Turin en finale) était le dernier club avant Chelsea à remporter son premier titre de champion d’Europe.
[4] La dernière défaite à Stamford Bridge remontait au 22 février 2006, face à Barcelone (1-2).
[5] Avec un match retour qui s’est soldé sur un résultat nul (4-4) en quart face aux Reds.
[6] Qui figure notamment sur la pochette de Animals de Pink Floyd.

Réactions

  • Espinas le 24/05/2012 à 15h03
    José-Mickaël
    aujourd'hui à 14h46
    Pour le dire de façon plus spectaculaire :
    - Lors des 9 saisons de domination liverpuldienne, l'aristocratie triple-demi-finaliste a joué 22 % des demi-finales (8 sur 36).
    - Lors des 9 dernières saisons, l'aristocratie triple-demi-finaliste a joué 61 % des demi-finales.
    ---
    Le format de la C1 "moderne" aide à avoir les mêmes équipes vu qu'on peut s'y qualifier sans être champion ou tenant de la C1.

  • Cantona pour un il y en a pour deux le 24/05/2012 à 15h11
    Metzallica
    aujourd'hui à 15h00
    ---
    Quand on voit la nba, je suis pas sûr que cela soit une solution : nombre de champions limités également et certaines équipes servent de faire-valoir, en ayant que peu d'espoir de faire venir ou garder un gros (cf Cleveland, New Orleans)

  • José-Mickaël le 24/05/2012 à 15h18
    Espinas
    aujourd'hui à 15h03
    > Le format de la C1 "moderne" aide à avoir les mêmes équipes vu qu'on peut s'y qualifier sans être champion ou tenant de la C1.

    Oui, c'est une des raisons de cette concentration, avec de plus le cercle vicieux (ou vertueux selon le point de vue) bonne saison en C1 ==> $$$$ ==> re-bonne saison en C1, qui a créé par exemple le Big Four.

    (Mais il y a aussi les politiques de distribution des recettes des championnats nationaux : en Espagne le Real et Barcelone ont souvent été dominateurs, mais jamais comme actuellement, ils profitent d'un système très inégalitaire.)

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