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Al-Jazira, ça ira, ça ira

Les droits télé de la Ligue 1 2012-2016 baissent mais ne s'effondrent pas: Canal+ fait des économies... et voit débarquer Al-Jazira.
Auteur : Jérôme Latta le 28 Juin 2011
Dernière réaction : le 30/06/2011 à 21h21

 

En obtenant 510 millions d'euros annuels sur les principaux lots de l'appel d'offres sur les droits télé de la Ligue 1, la Ligue du football professionnel a échappé au spectre d'une baisse brutale. Les quatre lots restants (trois concernent les droits "mobiles") vont être négociés de gré à gré et en dernière extrémité, la nouvelle chaîne C-Foot, lancée par la Ligue elle-même (lire "C-Foot, écran de fumée?"), récupérera le paiement à la séance – abandonné par Canal+ –, en espérant rallier le plus d'abonnés possible à son offre. L'enveloppe globale restera toutefois éloignée des 668 millions par an de la période précédente, mais dans un contexte économique très dégradé, le résultat est rassurant pour les clubs.


Canal+ a encore besoin de la Ligue 1
Il est dû pour une large part à l'arrivée inopinée du groupe Al-Jazira, invité surprise de l'AO qui s'est offert deux matches et deux magazines pour 95 millions d'euros (le lot 5, pour lequel il était seul en lice), un montant à comparer avec les près de 200 millions déboursés auparavant par Orange pour un seul match. Le groupe de médias lancera une chaîne en janvier prochain, et suit actuellement la piste d'un rachat d'Orange Sport.
Canal+, après une partie de poker menteur avec la Ligue qui aura duré deux ans (lire "La guerre pour préparer la paix"), densifie son offre avec deux matches de premier choix au lieu d'un et cinq magazines, pour 420 millions (465 pour le contrat en cours). La filiale de Vivendi ne veut pas, ou ne peut pas, se passer de la L1: voilà une bonne nouvelle pour cette dernière, qui avait fini par en douter. Le football français est tout de même devenu meilleur marché, du moins pour les opérateurs. Le téléspectateur, lui, verra l'offre de base s'élargir à quatre matches au lieu de deux, répartis sur deux chaînes au long d'un week-end très éclaté qui l'abreuvera aussi en "magazines".

programme_2012_2015.jpg


Vive la télé-dépendance ?
Les droits de télévision baissent donc, mais conservent un volume considérable. En constatant qu'après TPS et Orange, Al-Jazira Sport vient maintenir Canal+ sous la pression d'une concurrence substantielle, on peut se demander si la "télé-dépendance" souvent décriée des clubs français (les droits constituent 58% de leurs ressources) n'est pas un pari certes périlleux, mais gagnant puisque durant la décennie 2005-2015, le montant global sera resté aux alentours de 600 millions d'euros annuels – de quoi ne pas être décroché à l'échelle européenne.
Le dernier appel d'offres permettra en tout cas de maintenir un train de vie correct en dépit des mesures de rigueur qu'imposent la chute des revenus liés aux transferts et l'aggravation des déficits (lire "Le football français ne veut pas voir son trou"). Il permet aussi de voir venir en attendant les bénéfices escomptés des stades qui seront construits ou rénovés pour l'Euro 2016. Difficile, ensuite, de prévoir si dans quatre ans le paysage des opérateurs de télévision sera plus ou moins favorable qu'aujourd'hui, ni si le marché des droits mobiles se sera consolidé.


Redistribution des cartes
La chaîne cryptée peut voir arriver cette concurrence inédite avec un peu de crainte, même si elle a consolidé son offre de Ligue 1 pour un montant moindre qu'auparavant. Son président Bertrand Méheut a déjà ironisé en affirmant que diriger une chaîne payante ne s'improvisait pas. Les échecs et renoncements successifs de TPS puis Orange abondent dans son sens, mais Al-Jazira vient avec une autre logique que celle de la rentabilité (lire "La Ligue 1 dans la ligne d'émirs"). On ne sait pas si une opposition frontale avec Canal+ entre à terme dans la stratégie du groupe, mais il va proposer dès août 2012 autant de matches (même s'ils seront les troisième et quatrième choix) que le "partenaire historique" du foot français, provoquant de fait une recomposition du marché. On saura au bout du contrat comment le rapport de force aura évolué...

L'essentiel étant acquis, les clubs français vont pouvoir revenir à leurs objets de discorde, comme... le système de répartition des droits télé, jamais suffisamment "élitiste" pour ceux qui veulent augmenter leur part d'un gâteau en décroissance.

Réactions

  • Hachich le 28/06/2011 à 22h43
    Il n'y a pas assez de places pour tous les grands joueurs de France dans une Ligue 1 à dix équipes ; aussi, au niveau du cépanotpognon, je n'ai pas donné de chiffres donc si ça se trouve, l'écart L1-L2 serait minime. Aussi, selon le marketing, la L2 pourrait avoir une très bonne image, sachant qu'en plus tout le monde à ses chances de monter en L1 (trois places de potentiels promus, il suffit d'assurer les barrages). Alors si en plus on a une chaîne comme Al Jazeera qui s'amène sur le marché avec leur volonté de vitrine, alors là on est sûrs d'améliorer le foot français (non pas la Ligue 1 ou la Ligue 2 individuellement, mais bien le foot pro en France en général) avec une augmentation certaine du coeff' UEFA, un championnat de L2 où ça joue et qui ne sera même pas jaloux des ennuyants championnats latins, ...

    Les gros clubs veulent jouer souvent contre des gros, et bien ils seront servis !
    Les Français veulent des équipes qui font plus que de la figuration en Ligue des Champions ? Et bien ils les auront !
    Les petits clubs veulent de l'exposition ? Et bien ils l'auront vu que tout le monde n'aimera pas la Ligue 1, mais se rabattra sur la Ligue 2 !

    C'est certes compliqué sur le papier, mais ça n'a un peu rien à voir avec le championnat belge.
  • Tonton Danijel le 28/06/2011 à 23h00
    Oui mais non, hachich, tu as beau y mettre tout l'idéalisme que tu veux, le championnat de ligue 2 ne sera jamais plus attractif que la ligue 1. Ou alors il y a un problème quelque part.

    Et si un joueur ne trouve pas sa place en ligue 1, il ira chercher du r€sp€ct ailleurs, quitte à jouer en Russie ou en Roumanie. Je crains vraiment au contraire un exode encore plus important des talents avec une élite trop reserrée.
  • Hachich le 29/06/2011 à 00h46
    Là, on n'est plus vraiment dans une optique L1-L2, parce que sinon, en théorie comme en pratique, Ligue 1 > Ligue 2. Ce sont deux championnats bien différents là.

    Là, c'est plutôt un championnat d'élite avec quelques équipes et un autre championnat plus "proche" des gens. Pour suivre le premier il faudra être supporter d'une des équipes ou alors être très intéressé par le foot TV. Pour suivre le deuxième, il faudra supporter une des 22 équipes. Et des supporters de Nantes, Metz, Monaco, Lens, Montpellier, Nice, Toulouse, Caen, ... il y en a quasiment partout en France En tous cas, il y a plus de supporters (et quand je dis supporters je parle de ceux qui regardent au moins 10 matchs par saison chez eux ou qui sont abonnés) des 22 équipes que seulement des 10. Le championnat à 10 clubs sera pour le plaisir des yeux, le championnat à 22 clubs sera pour le plaisir du coeur.

    Plus exactement, le championnat à 10 clubs sera suivi par les supp' des 10 équipes en France et ailleurs, mais aussi par les curieux du foot en général dans le monde, ceux qui regardent aussi de temps en temps la Bundesliga, la Premier League ou la Major League Soccer. Ce sera la vitrine du foot français, et une vitrine qui aura de la gueule.
    Celui à 22 sera suivi par ceux qui actuellement n'osent pas tout à fait dire qu'ils aiment tel ou tel petit club et qui vont plutôt supporter par exemple Marseille pour le Niçois, Rennes pour le Nantais, Lille pour le Lensois, Lyon pour le Grenoblois, ...

    Par exemple, je suis sûr qu'au Portugal la Ligue Europa a fait de meilleurs résultats d'audience que la Ligue des Champions. Pourtant le truc élitiste en Europe, c'est la LDC non ? Et ben là pareil, on préfèrera suivre la compétition de son équipe plutôt que la coupe des gros.
  • Sens de la dérision le 29/06/2011 à 06h37
    C'est aussi parce qu'en ce moment Lens ou Nantes, deux des places fortes du football français, sont un peu à la ramasse.

    Si dans tes 10, tu as Lyon, Marseille, Paris, Bordeaux, SaintEtienne, Lille, Lens, Nantes, ça m'étonnerait fort que ton championnat "L1-L2" soit très très suivi. D'ailleurs même sans Lens et Nantes à mon avis.
    D'autant plus qu'au fil des saisons, les gens suivront de plus en plus les très gros, c'est ce qui se passe avec la multiplication des matchs de championnats étrangers : je suis presque certain que tu as plus de supporters du Barca ou de MU qu'il y a 10 ans.
  • Jeanroucas le 29/06/2011 à 10h28
    Bon je crois que Hachich porte bien son pseudo ^ ^
    Blague à part, le grenoblois moyen n'est pas supporter de Lyon, mais de l'usine à Sardines....
  • Tonton Danijel le 29/06/2011 à 10h48
    Je crains que la faille dans le raisonnement de Hachich soit que le supporter de club soit une espèce en voie de disparition. Il y a des 'traditions' à Nantes, Lens, ou Marseille.

    Mais dans la plupart des clubs, les supporters viennent voir un spectacle, soutenir un peu leur ville, mais s'en désintéressent dès que leur club sombre. Exemple à Grenoble: je fais partie des 2,000 supps qui se tapaient des matchs de CFA à la Ligue 2, sur les tribunes ventées de Lesdiguières (pour cause d'exil, je n'ai vu qu'un seul match au SdA en Ligue 1... et sans doute le pire du club, le 0-4 contre Rennes avec les débordements des ultras). L'affluence est monté à 17,000 à l'époque des débuts du SdA (dont 15,000 marseillais lors des venues de l'OM). Mais les deux places de lanterne rouge consécutive ont vidé les tribunes... Même le RC Strasbourg, malgré une histoire plus chargée, a vu les tribunes de la Meinau se vider au gré des descentes. Donc l'idée de voir des tribunes pleines dans une Ligue 2, même une "super-Ligue 2" me paraît très utopiste. Même en cassant les prix.
  • Jeanroucas le 29/06/2011 à 11h03
    Ah ah le 4-0.... Celui là même de l'anniversaire des Red kaos, avec un tram en tissu qui a empêché bon nombre de gens de rentrer à temps pour voir les deux premiers buts ^^
  • Hachich le 29/06/2011 à 13h06
    En même temps Tonton, là, ce n'est même plus de la Ligue 2, c'est du National, et avec une équipe qui n'était qu'une saison dans les dix premiers de Ligue 1. Après, un autre truc qui pourrait marcher, c'est si pour cette élite les prix des billets sont augmentés au double (et vu les stades qui nous attendent ça ne m'étonnerait même pas) ou au triple. Et là, l'amateur de foot et de bonne ambiance pourra quand même avoir à disposition 11 stades par semaine à prix bien plus accessible. Et vu la plutôt bonne répartition géographique des clubs professionnels (à part dans le centre du pays), on aura un espère de supportérisme local bien plus intense qu'aujourd'hui.

    Ou alors, autre stratégie de la LFP : promouvoir le championnat à 10 clubs français dans tous les marchés potentiels (un match niveau Ligue des Champions et quatre autres gros matchs par semaine, je vois mal dans quel pays de foot ça pourrait faire un bide) à l'étranger et promouvoir le championnat à 22 clubs en France, avec notamment une diffusion plus large. Car oui, le succès d'une telle division ne peut se faire qu'avec une vraie empreinte audiovisuelle. Et vu comment les Américains ont réussi à me persuader pendant quelques jours que la Major League Soccer était un aussi beau championnat que la Ligue 1, je pense bien qu'on peut faire des prouesses avec la Ligue 2 à 22 clubs.
  • Hachich le 29/06/2011 à 13h21
    Sens de la dérision
    mercredi 29 juin 2011 - 06h37
    C'est aussi parce qu'en ce moment Lens ou Nantes, deux des places fortes du football français, sont un peu à la ramasse.

    Si dans tes 10, tu as Lyon, Marseille, Paris, Bordeaux, SaintEtienne, Lille, Lens, Nantes, ça m'étonnerait fort que ton championnat "L1-L2" soit très très suivi. D'ailleurs même sans Lens et Nantes à mon avis.
    D'autant plus qu'au fil des saisons, les gens suivront de plus en plus les très gros, c'est ce qui se passe avec la multiplication des matchs de championnats étrangers : je suis presque certain que tu as plus de supporters du Barca ou de MU qu'il y a 10 ans.

    ********************************

    Sauf qu'il y a vraiment peu de probabilité qu'il y ait les 10 clubs les plus titrés de France en même temps dans une telle division. Tout d'abord parce que chaque année, trois clubs délogent. Et qu'ensuite, Nantes et Strasbourg sont vraiment dans le rouge, alors que Lens et Monaco ne retrouveront pas les coupes d'Europe avant au bas mot cinq ans.

    Et une autre chose, que j'évoquais déjà partiellement avec Tonton : toi-même tu dis qu'il y a plus de supporters du Barça ou de Manchester United qu'il y a 10 ans. Mais en 10 ans, le foot pro a définitivement changé : on est (et on y est pour encore très longtemps) dans une période où le téléspectateur en veut toujours plus, donc c'est normal qu'il y ait de plus en plus de "supporters" du FCB ou de MU.
    Par contre, en Angleterre (même si c'est justement en Angleterre, le pays à 75% de remplissage en troisième division), il y a plus de supporters de Man City que de Man Utd, et ce depuis bien des années déjà, le Cheikhier n'y est pour rien. En France, plus il y aura de diffusion, plus on montrera une bonne image de nos équipes, plus on dira du bien du foot pro en France, et plus les gens se rapprocheront du foot pro. Le marketing coco !
  • Sens de la dérision le 29/06/2011 à 14h01
    Plus de supporters de City que de ManU ?

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