Si vous saisissez votre mot de passe PUIS votre e-mail, vous aurez la confirmation que ça n'a aucun effet particulier. Attention à ne pas confondre vos minuscules et vos majuscules.
Vous avez oublié votre mot de passe ?
Inscription
Vous avez oublié votre mot de passe ? Il reste un espoir ! Saisissez votre adresse e-mail ; nous vous enverrons un nouveau mot de passe. Cette procédure est quasiment gratuite : elle ne vous coûtera qu'un clic humiliant.
Nous vous avons envoyé un email sur votre adresse, merci d'y jeter un oeil !

CONDITIONS D'INSCRIPTION :

1. Vous devez nous adresser, via le formulaire ci-dessous, un texte (format .txt inférieur à 100 ko) en rapport avec le football, dont la forme est libre : explication de votre passion, anecdote, aventure, souvenir, essai, commentaire composé, portrait, autobiographie, apologie, réquisitoire, etc. Vous serez ensuite informés de la validation de votre inscription par mail. Les meilleurs textes seront mis en ligne sur le Forum.

2. Nous ne disposons pas d'assez de temps pour justifier les retards d'inscription ou les non-inscriptions, et ne pouvons pas nous engager à suivre une éventuelle correspondance à ce sujet. Merci de votre compréhension.

Nous avons bien reçu votre candidature, on y jette un oeil dès que possible. Merci !

Partager :

Amalgame over

Les défenseurs de Laurent Blanc s'indignent, mais les obsessions identitaires de la DTN et du sélectionneur ne font aucun doute. Le cauchemar continue.
Auteur : Jérôme Latta le 6 Mai 2011

 

Au cours de la semaine écoulée, l'embarras général, la stupeur et les tensions ont attesté l'onde de choc et ses effets sur les principales institutions du football français – équipe de France comprise. Les enjeux sont tels que, quelle que soit la tournure des événements (en particulier concernant le maintien du sélectionneur), l'héritage sera amer.

quotas_2.jpg


Blanc victimisé
La plus grande entourloupe intellectuelle des derniers jours a obtenu une belle surface médiatique: elle a consisté à se scandaliser que Laurent Blanc soit traité de raciste. Les amis du sélectionneur ont rivalisé d'indignation: Bixente Lizarazu et Christophe Dugarry, qui est allé jusqu'à dire que Blanc était victime d'amalgames. Certes, mais avant tout des siens. L'un évoque la menace d'une démission, tous deux annoncent le "chaos" qui s'ensuivrait, tandis que Marcel Desailly affirme que les propos de Blanc ont été "déformés", ce qui est aussi peu pertinent que possible s'agissant d'un enregistrement. Dans un communiqué, Frédéric Thiriez y va de son habituelle prose bouffonne: "l'enjeu pour l'avenir du football français est-il de sacrifier des têtes, comme celle de Laurent Blanc qui serait soudain devenu raciste, au veau d'or du politiquement correct?"

Blanc, dont la première réponse à pourtant été un mensonge ("Je n'ai jamais entendu parler de projets qui prendraient en compte des quotas") est donc victime des "manipulations médiatiques", des "bien-pensants", des "professeurs de morale" et bien sûr du "politiquement correct" qui nous étouffe tous, ou encore d'une odieuse "chasse aux sorcières". Dont on cherche pourtant vainement les chasseurs: où diable sont ceux qui ont traité Blanc de raciste? À lire et relire les déclarations des uns et des autres, nulle part. Sa responsabilité est mise en cause au même titre que celle des membres de la DTN, sur la foi de cette conversation consternante qui a vu ses protagonistes manifester une obsession pour le cas des "binationaux" sans commune mesure avec la réalité de la question, proposer une solution (stupide) à ce faux problème sous la forme de quotas incontestablement discriminatoires et mobiliser pour les justifier des stéréotypes associant origine ethnique, style de jeu et mentalité (lire "Pas de Blacks, 'pas de problème'").


Diversions
Dire qu'à la fois le projet de discrimination et le discours qui l'a sous-tendu soulèvent de graves questions relève de l'évidence et même de la nécessité le plus impérieuse. Nul besoin d'accusations de racisme, surtout pas au nom de cette conception binaire qui vaudrait que l'on ne puisse être qu'absolument raciste ou absolument pas raciste. Car si la controverse est vive, c'est parce qu'elle porte sur des préjugés profondément ancrés, "de bon sens" et très largement partagés – dont il est donc difficile de prendre conscience et d'admettre qu'ils contiennent des précurseurs de racisme, aussi innocents soient-ils. On reviendra sur cet aspect-là, ainsi que sur l'inquiétant fossé des opinions creusé entre les "Noirs" (Thuram, Vieira, Lama...) d'un côté et les "Blancs" de l'autre (Dugarry, Lizarazu, Desailly...[1]).

En mettant en scène les antagonismes suscités notamment par les déclarations de Lilian Thuram ou Patrick Vieira, la polémique sur "l'explosion" de France 98 fait diversion au détriment du vrai débat, qui doit porter sur les propos tenus et sur la question de la mise en œuvre ou non de la politique de discrimination projetée (volet que l'enquête doit déterminer, et sur lequel Mediapart a peut-être encore des informations à distiller). Les mêmes manœuvres d'évitement ont présidé au dénigrement de celui qui a "trahi" le secret des discussions, qualifié de "taupe" par les journalistes plutôt que de lanceur d'alerte, sans considération pour ses états de service ni la légitimité éventuelle de sa démarche (lire l'article de panenka.fr).

quotas_4.jpg


Mélange des genres
Les événements récents doivent d'abord être mis en perspective avec le discours de la DTN et du sélectionneur au cours des derniers mois. Il est frappant de constater à quel point la question des binationaux a fait l'objet d'une lourde insistance de la part des uns et des autres, au point que la lutte contre la "fuite" des joueurs vers les sélections étrangères a été ressassée comme une priorité en dépit de ses conséquences limitées pour l'équipe de France A.

Dans une interview publié par le magazine de la FFF d'avril, Erick Mombaerts décrit la nouvelle politique menée en définissant notamment le "projet de jeu" des sélections de jeunes par "des exigences associant qualité de jeu, comportement et état d'esprit" ou encore "amour du maillot bleu". Toutes ces notions sont abordées pêle-mêle et présentées comme étroitement liées, et elles aboutissent encore sur la binationalité. "Quelle que soit sa valeur – et j'insiste – nous n'avons pas besoin d'un joueur qui ne soit pas attaché au maillot bleu. Ayons le courage d'aller au bout de nos idées dans ce domaine. Et n'oublions pas le problème abordé par Laurent Blanc: la déperdition de nos jeunes internationaux." Le même avait dit le 8 novembre: "Tout est lié, tout est lié!" Interrogé par Mediapart avant la révélation de l'affaire, le DTN François Blaquart a même évoqué la religion musulmane d'une partie des joueurs comme un critère ayant servi à établir à la bonne franquette de douteuses statistiques de binationaux au sein des sélections U16 à U21 (lire l'article de Mediapart - en accès payant).


Blanc et "l'origine sociale"
Aussi troublante encore est cette interview de Laurent Blanc, accordée à Eurosport... le soir de la fameuse réunion du 8 novembre (voir la vidéo). Évoquant la nécessaire réforme d'une formation à la française qui n'est plus "avant-gardiste", le sélectionneur part dans une explication qui empile "histoire", "culture", "classe sociale", "problèmes" et "puissance physique".
"Chaque pays a son histoire. Le football espagnol a sa propre histoire, sa propre culture. Ils n'ont pas les mêmes problèmes que peut avoir le football français. Je m'explique. Le football en France est très populaire, il attire une certaine couche sociale de nos jeunes. Pour être tous les samedis sur les terrains de foot amateur, je trouve que le football attire actuellement beaucoup de gens de la même classe sociale, avec tous les problèmes que cela peut amener. Je pense qu'il faut s'adapter à ça et surtout, dans cette préformation qui est si importante revenir à des critères de jeu et non pas de puissance physique de puissance athlétique pour faire de la Champions League et gagner sur le moment." Cette fois, sans allusion raciale, il établit un lien confus mais direct entre origine sociale et qualité de jeu, sur fond de "culture" et de "puissance physique" [2].

Alors Blanc n'est certainement pas raciste au sens où il serait par exemple capable de défavoriser les internationaux d'origine africaine (il a eu le temps de démontrer le contraire) ou de juger une personne particulière sur sa couleur de peau, mais il exprime des conceptions qui paraissent sérieusement perturbées par des stéréotypes et des amalgames grossiers. En quoi il est tout à fait en phase avec François Blaquart et Erick Mombaerts, qui touillent le même bouillon d'arguments.


Où mène le redressement national
Il est de plus en plus probable que leur projet de quotas désigne une cible un peu nébuleuse, mais qui ressemble au portrait-robot du "jeune de banlieue", obtenu en superposant divers stigmates à géométrie variable: binational, Noir ou Arabe, musulman, athlétique, peu attaché au maillot, "à problèmes", etc. En définitive, et sans surprise, le football français désigne le même bouc émissaire que la société française toute entière. Chose étonnante: les centres de préformation fédéraux, les centres de formation des clubs et les sélections de jeunes, qui prennent totalement en charge des jeunes entre leurs 12 et 20 ans, parviennent à les transformer en sportifs de haut niveau, mais pas en Français réglementaires.

Rappelons que la prise de fonction de Laurent Blanc et les missions qui lui ont été assignées (ce double impératif de restauration de l'état d'esprit et du beau jeu) se sont inscrites dans le contexte hystérique de l'après-Coupe du monde 2010, impliquant la diabolisation des "caïds" de Knysna, coupables d'avoir fait honte à la France aux yeux du monde entier, et charriant son lot d'amalgames et de moralisme réactionnaire (lire "Traitres à la nation?" de Stéphane Beaud, La Découverte). À quels écarts a pu pousser la rhétorique du redressement national et de la restauration de l'honneur de la France? Elle a sans nul doute créé des conditions favorables pour le discours décomplexé, mais bien conscient de la nécessité du secret, du nouveau DTN. Alors intérimaire, il a été pleinement investi en février dernier par une Fédération au sein de laquelle son discours était connu. Cette fois, la "honte nationale" n'est pas usurpée.


[1] On peut rire quand même un peu.
[2] Le 12 novembre, quatre jours après la réunion, L'Équipe publie une interview de Laurent Blanc axée sur la formation, dans laquelle il martèle ses convictions (jeu plus intelligent, état d'esprit, "problème d'identification à l'équipe de France (...) que les autres pays n'ont pas"). Un article intitulé "La déformation à la française?" accompagne l'entretien et donne la parole à Mombaerts, Blanquart et Smerecki. La DTN était bien en campagne médiatique à cette époque sur ces thèmes, et le sélectionneur indique lui-même son implication: "J'espère être associé [avec la DTN] à la mise en œuvre d'un projet validé par toutes les familles. Avec des critères de formation bien établis, une idée directrice et les personnes compétentes pour les faire appliquer."

Réactions

  • Mipoulet le 06/05/2011 à 10h56
    5 mois plus tard tu peux reconnaitre des paroles qui ont été effectivement prononcées, sans pour autant te souvenir si c'est au mot près et si l'enchainement des propos est correct. Tu sais que l'enregistrement existe, aussi tu ne peux pas te permettre de réfuter tes propos, même s'ils te semblent approximatifs. Et dans l'analyse semantique qui en découle je pense que chaque détail a son importance. Aujourd'hui il manque des éléments de la conversation puisqu'unun moment donné il est signalé un trou dans la conversation, pour des propos sans doute jugés moins importants, hors, ça peut mettre en lumière un raisonnement sous un jour nouveau.

  • Metzallica le 06/05/2011 à 10h57
    Mipoulet
    vendredi 6 mai 2011 - 10h34

    Moi ça commence en effet à me faire peur que ce soit ça. Et alors là on va être beaux. Car dans ce cas les gamins de classes modestes ne voudront plus jouer pour la France et ils auront raison. Et du coup si ils se barrent l'idée des quotas devient justifiée (dans le raisonnement de la fédé pas juridiquement). Et donc leur prophétie d’exode devient auto-réalisée.
    "Regardez ces faux français qui vont jouer pour les autres. Ahah on vous l'avait bien dit, que des basanés! Hein y a des blancs? Oui enfin des romanos ou des polaks quoi".
    J'ai envie de chialer.

  • Pascal Amateur le 06/05/2011 à 10h59
    Qu'en pense Christophe Lemaître ?
    Ah, ah, non, je déconne.

  • Rigoboum Song le 06/05/2011 à 11h15
    Tout est dit et bien dit. Je vais pouvoir poser les armes sur le fil FFF et me reposer un peu. Merci Jérôme.

  • visant le 06/05/2011 à 11h22
    "On peut rire quand même un peu."
    Oui, je crois que bon, c'est important le rire. D'ailleurs les blacks sont non seulement grands mais en plus ils rient tout le temps.

    Plus sérieusement, merci pour cette analyse. Tout ou presque y est dit et c'est assez flippant. Je n'ose même plus allumer la télé de peur de voir débouler Duga ou Petit et de vouloir éclater mon poste.

  • arnaldo01 le 06/05/2011 à 11h29
    Rigo, est-ce que tu as eu accès à toute l'interview d'eurosport du 8 novembre ? Pour l'instant, je n'ai eu accès qu'à l'extrait montré sur eurosport dernièrement.

  • Jean-Luc Skywalker le 06/05/2011 à 11h29
    Et encore, tu n'es probablement pas abonné au twitt de Pierre Salviac. Oui, j'aime me faire du mal.

  • François-Youssouf Hadji-Lazaro le 06/05/2011 à 11h34

    Metzallica
    vendredi 6 mai 2011 - 10h57

    Moi ça commence en effet à me faire peur que ce soit ça. Et alors là on va être beaux. Car dans ce cas les gamins de classes modestes ne voudront plus jouer pour la France et ils auront raison. [...]

    ---------------------------------------------------------


    Je pense que c'est déjà le cas dans une certaine mesure. Le choix d'une sélection pour un binational se fait probablement d'abord sur des critères sportifs certes, mais il sa fait aussi dans un deuxième plan sur un sentiment d'appartenance à un pays.
    La cas Ozil/Altintop est assez parlant sur le sujet.
    Et il ne me semble pas complètement impertinent de dire qu'une certaine partie des binationaux ne se sentent pas complètement français, sentiment en partie généré ou alimenté par la façon dont ils peuvent être considérés (eux ou leurs proches) dans certaines situations en France.

  • Rigoboum Song le 06/05/2011 à 11h35
    Arnaldo : pareil. Ce n'est pas l'itw complète qui a été mise en ligne. Mais seulement l'extrait rediffusé par Eurosport dans le cadre d'une émission. J'aimerais bien d'ailleurs savoir comment les invités en plateau ont réagi (Lama notamment).

  • visant le 06/05/2011 à 11h35
    Jean-Luc Skywalker
    vendredi 6 mai 2011 - 11h29

    Tu n'as vraiment aucune éthique déontologique.

La revue des Cahiers du football