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Les footballeurs au crash-test

La grave blessure d'Hatem Ben Arfa est moins l'acte d'un tueur isolé que la conséquence du niveau d'engagement physique habituellement toléré sur les terrains.
Auteur : Jérôme Latta le 5 Oct 2010

 

On ne sait pas si, dans quelques années, une double fracture pourra encore prétendre être l'événement footballistique du week-end, tant cette blessure s'est banalisée ces dernières années (1). Celle d'Hatem Ben Arfa y a encore droit, et les images ont fait "le tour du monde" comme il se doit. Accompagnées de cet inévitable mélange d'indignation et de voyeurisme. Lors de Canal Football Club, les images filmées sous l'angle le plus cru suscitent un murmure horrifié dans le public, qui précède de peu la diatribe de Pierre Ménès sur l'air de "Y en a marre des bouchers".

crash_test_2.jpg


Le petit bois dont on se chauffe
Mais qu'est-ce qu'un boucher? En réalité, c'est souvent un défenseur qui a la malchance, à l'arrivée d'un tacle comme il y en a des centaines chaque week-end, d'être dans le mauvais dixième de seconde. C'est à dire dans le dixième où la rencontre avec un adversaire encore plus infortuné exercera une torsion qui sera fatale à une cheville, une jambe ou un genou. Un temps avant ou après, on aurait juste froncé les sourcils en réclamant un avertissement.

Ce sont les risques du métier, du moins tel qu'on le pratique aujourd'hui. Car avec l'augmentation de la puissance athlétique des joueurs, et en dépit d'une sévérité bien plus grande contre les brutalités que dans les années 70 et 80, ces blessures graves sont les conséquences directes de "l'engagement" dont on fait l'apologie dans un football qui exige de "gagner les duels", de "mettre de l'impact", de "gagner la bataille de l'entrejeu" et autres joyeusetés. On ne peut alors pas se féliciter des bénéfices pour le spectacle (2) pour ensuite s'étonner que la course aux armements physiques transforme le football professionnel en champ d'expérimentation pour la chirurgie orthopédique.


Tacler dans la marge de tolérance
Il est très légitime de défendre la thèse du football comme "sport de contact", et de jeter avec un sourire entendu que, "En Angleterre, c'est jamais sifflé", à l'occasion d'une collision "un peu virile". On peut faire l'apologie des "Bad Boys" du football et – on a pu le lire sur ces pages mêmes – rejeter une morale angélique de ce sport en souhaitant qu'il préserve sa part de vice et d'injustice. Mais dans ce cas, autant ne pas tomber sur le premier bourreau venu pour en faire une victime expiatoire: qu'il soit maladroit ou malveillant, le garçon n'est jamais que l'exécuteur de la volonté collective d'assister à un jeu rapide et – sinon brutal comme jadis – d'une intensité qui implique des traumatismes occasionnellement graves (3).

crash_test_1.jpg

Bien sûr, il y a des récidivistes et d'authentiques brutes (lire ci-dessous, "Henry, portrait d'un serial tacleur"), mais leur nombre même indique qu'ils sont tolérés. Et s'ils commettent des brutalités fatales, c'est d'abord parce qu'ils ont toujours bénéficié d'une marge d'indulgence qui expose leurs adversaires directs à un débordement plus malencontreux que les autres. Dans un football où les arbitres qui dégainent un peu vite les cartons jaunes et rouges se voient reprocher leur manque de psychologie et de contrôle, et où les sanctions rétroactives sont encore trop peu nombreuses, la marge est assez grande (le problème n'est pas nouveau: lire "Faut-il interdire les blessures?").


Inhiber les défenseurs
"Protéger" l'intégrité physique des joueurs, protéger les techniciens restera un vœu pieux aussi longtemps qu'on ne produira pas un effort pour abaisser le seuil de tolérance envers les brutalités délibérées ou non, c'est-à-dire pour abaisser le niveau ordinaire d'engagement physique dans les contacts – ce que les Britanniques appellent, de façon parlante, des challenges. Pour faire remonter le degré d'inhibition des joueurs en situation défensive, il faudrait faire accepter des sanctions plus lourdes sur le terrain, avec toutes les difficultés que l'on imagine pour vaincre l'inertie culturelle du milieu – en plus des contestations sans fin qui accablent l'arbitrage.

Il s'agirait pourtant de prendre le chemin d'un football favorisant moins les défis physiques que le jeu lui-même, dans lequel le dribble ne serait pas l'apanage de quelques phénomènes hors-normes, et qui ne sélectionnerait pas les joueurs en fonction de leurs résultats au crash-test. Dans le cas contraire, il faudra prendre le parti d'assumer ces accidents du travail comme des dommages collatéraux.


(1) Le souvenir est encore frais du geste de Martin Taylor à l'encontre d'Eduardo, en février 2008. Djibril Cissé et plus récemment Grégory Coupet, ont également alimenté ces archives macabres.
(2) Il paraît que le football du 20e siècle manque de "rythme", que les joueurs ont trop d'espaces.
(3) L'augmentation des traumatismes crâniens, constatée dès la Coupe du monde 2002, témoigne aussi du niveau de risques atteint ces dernières années.



Henry, portrait d'un serial tacleur
crash_test_henry.jpgNe revenons pas sur le cas de Nigel de Jong, dont Kevin Keegan a dit qu'il avait "juste voulu faire savoir à Ben Arfa qu'il était là"... Karl Henry, "auteur" d'une fracture aux dépens de Bobby Zamora lors de Fulham-Wolverhampton le 11 septembre dernier, a déclaré par la suite: "J'ai eu l'impression que c'était un bon tacle. Je n'ai rien fait de délibéré, et jamais je n'essaierais de blesser quelqu'un intentionnellement".
Les jours précédents, son engagement contre Newcastle et le traitement infligé à rien moins que Joey Barton l'avait déjà amené, en compagnie de son entraîneur, à défendre son style de tacle. "Tacler est un art. Ne me dites pas que les supporters de tous les clubs n'aiment pas quand un de leurs joueurs récupère un ballon avec un tacle dur mais régulier". Le garçon précisa aussi: "On ne va pas laisser les équipes jouer un joli football contre nous à Molineux. On va les en empêcher" (lire l'article de Sky Sports).
En déplacement le week-end dernier, c'est Henry qui a été empêché de jouer, écopant d'un rouge direct pour un nouveau fauchage, cette fois sur Jordi Gomez lors de Wigan-Wolverhampton. Dès la 11e minute.

Réactions

  • le Bleu le 05/10/2010 à 01h37
    N'est-ce pas un problème plus spécifique à l'Angleterre ?

    Les cas en France existent, bien sûr, et d'autant plus que les joueurs y maîtrisent moins leur technique (qu'elle soit offensive ou défensive). Pour autant, ils me semblent moins nombreux, et surtout... assez sévèrement réprimés.
    Si Djibril Cissé s'en est bien tiré avec un simple carton jaune (Yepes ayant mésestimé sa propre blessure), Pierre-Alain Frau a tout de même été suspendu quatre mois pour avoir malencontreusement fracassé Stéphane Noro, et Kader Mangane deux mois et demi pour avoir démoli Guillaume Lacourt. Notons que le malheur poursuit ces deux dernières victimes, le premier au chômage, le second ne parvenant pas à s'en remettre...

    Et surtout, contrairement à un de Jong ou un Henry, aucun des trois joueurs n'était particulièrement fier d'avoir commis ce genre de geste, et personne parmi les commentateurs n'a jugé que c'était "normal".
    Personne ne plaide ici-bas l'indulgence pour ce genre de geste et les Cahiers du Foot ne sont pas le seul média à avoir du mal à rapprocher les notions de "jeu" et de "blesser gravement l'adversaire"...

    (il n'y avait pas aussi un geste de boucher de Moussa Sow sur... un Lillois, et un très vilain geste de Kader Keita non sanctionné ?)


    Pour terminer, j'ai au contraire eu le sentiment que l'ère des bouchers était à peu près terminée. En France, nous avions Llacer, Jemmali, Jurietti, Kouassi, Henrique, Cyril Rool (sans parler de la génération précédente, incluant quelques poètes marseillais comme Di Meco). A la retraite, ou au pire, se sont largement calmés. On n'a plus leurs équivalents. Aujourd'hui on a plutôt des bourrins calibrés DTN, qui y vont gaiement mais pas gratuitement... Légère nuance.

    Bon c'est évident que c'est pas encore demain la veille que tous les défenseurs seront des Bisounours à la Max Bossis.

  • Pascal Amateur le 05/10/2010 à 07h22
    Les tacles, c'est l'éclate.
    Ça serait pas une contrepèterie que j'y verrais pas un lien. Mais là...

  • Sens de la dérision le 05/10/2010 à 07h27
    Si dans l'idée ce papier est intéressant, je ne suis pas d'accord avec tout. Un football avec une pléthore de joueurs qui dribblent m'ennuierait, je pense, au plus haut point. Car non il n'y a pas qu'un football, celui des esthètes, que viendrait contrecarrer celui des "brutes" (et ceci va avec l'idée que le but du football n'est pas que de marquer des buts mais aussi d'empêcher l'adversaire d'en marquer).
    Certes il faut éviter les blessures comme celles de Ben Arfa mais un accident est toujours possible (cf le cas de Frau/Noro dont on se perdrait je pense à trouver l'origine). Les récidivistes doivent être punis et les commissions a posteriori devraient faire leur boulot dans un monde idéal.

  • Marius T le 05/10/2010 à 08h50
    Un multi-récidiviste pendant la LDC#2 fait un article contre les tacles.

    Mais où va-t-on ma brave dame ?

  • Vachalait le 05/10/2010 à 08h50
    Il ne faut pas denoncer les boucs emissaires et en jeter un en pature a la fin de l'article... Le tacle de Henry sur Zamora etait comme il l'explique tout ce qu'il y a de plus normal, ni spectaculaire, ni violent, ni mechant. Mais voila, c'est bien de la mauvaise fraction de seconde qu'il s'agit.

    Et puis mettre ses declarations sur la necessite d'empecher les bonnes equipes de jouer dans le contexte de cet article, c'est plutot vicieux... on s'imagine tout de suite les grands mechants loups attendant les petits chaperons rouges d'Arsenal pour les decouper. C'est ni plus ni moins qu'une maniere de reconnaitre ses faiblesses et de dire qu'on va jouer avec ses moyens et ne pas partir perdants d'entree. Qui ne dirait pas ca ?

  • Troglodyt le 05/10/2010 à 09h23
    Le tacle, c'est avant tout le don de soi: lien

    Vous verrez, un jour l'Europe entière adoptera le règlement de la LdC.

  • leo le 05/10/2010 à 09h24
    Le tacle sur Zamora, on le voit sur cette video lien et ça serait un sacré coup de bol que Zamora s'en sorte avec moins qu'une grosse entorse vu comment sa cheville est prise en ciseau sur un tacle qu'il ne voit à aucun moment venir.
    C'est pas juste "pas de bol", et c'est la répétition de ce genre de gestes qui vaut à leurs auteurs la réputation de bouchers.

  • DarkZem13 le 05/10/2010 à 09h33
    Comme souligné dans l’article, le tacle est un geste extrêmement exigeant et délicat, se jouant au dixième de seconde près. Ben justement, rien que pour ça, il ne devrait être effectué que si le joueur est sûr d’avoir le ballon et ne pas mettre en danger l’adversaire. Et je ne suis pas du tout certain que De Jong, par exemple, était complètement sûr de récupérer la balle sur le tacle qui amène la blessure de Ben Arfa. J’ai peur que l’idée de ces tacleurs soit plus d’arrêter le joueur, de détruire son jeu que de le contrer.

    Jouant latéral, c’est un geste auquel je n’ai recours que si c’est la meilleure solution pour combler un retard dans la course qui m’oppose à l’attaquant et quand défendre debout devient impossible, tout en étant sûr d’être le premier sur le ballon. Sinon, tant pis, je cours et j’essaie de m’approcher du porteur du ballon. Les yeux sont toujours rivés sur le ballon et jugent à la fois la distance qui m’en sépare, et celle avec le pied de l’attaquant, pour juger quelle est la plus courte. Ne pas faire de faute est une préoccupation de tous les instants, mais je ne suis pas certain que ce soit le cas dans la tête de tous les footballeurs.

    Pour conclure, ça doit rester un geste technique plus que puissant ou physique. Contrer, récupérer le ballon ne doit pas être l’apanage d’une force mais d’une maîtrise. Et d’une exécution instinctive dans le sens du jeu, comme on fait une passe parce qu’on sent, on sait que c’est la bonne solution. Du coup, j’ai du mal à ne pas condamner les joueurs qui disent tacler « viril mais correct ».

    Avis sponsorisé par Bisounours, et cie.

  • gurney le 05/10/2010 à 09h46
    Vachalait, tu exagères un peu! On n'est quand même pas dans la thématique du "on joue avec nos armes" qu'on peut lire quand Fernandez parle du jeu de contre de son équipe. Tu peux pas comparer.
    On est plus dans la thématique guerrière.

    Y a d'ailleurs chez certains serial tacleurs un espèce de fantasme du tacle guerrier. Le tacle, c'est la métaphore des tranchées. Tu te jettes à terre, tu bouffe de l'herbe, des poils, tu sens les os de ton adversaire craquer...

    Et encore l'explosion de la médiatisation du football a fait du mal à cette profession si particulière. Si tu regarde les tacles du passé, tu vois qu'on s'autorisait des choses invraisemblables. Si vous avez un petit coté voyeuriste, faut vous mettre à la recherche des vidéos sur les tacles bastiais par exemple. Je sais pas si elle circule encore, mais je l'avais vu une année, c'est tout bonnement hallucinant. Mais à l'époque, pas de risque de se voir infliger une suspension de 6 mois.

    Quand je vois le geste de Henry ce week end, qui lui a valut l'exclusion directe au bout de 10 minutes. C'est à peine croyable. Pour le coup, lui, il aurait toute sa place au Furiani de l'époque. Il arrive avec une telle vitesse et une telle puissance, que son adversaire fait presque un salto complet avant de retomber sur le sol la tête la première comme dans un vulgaire manga du club dhorothée.
    Vient pas nous dire que le mec n'a pas dans l'idée de faire (très) mal.

    Moi les histoires de guerre, de "marquer son territoire", faire comprendre à l'autre qui il a en face... je déteste.

    Je comprends aussi que ça arrive les coups de malchance. Quand c'est Pierre Alain Frau, un mec qui n'a rien de méchant, on s'imagine plus l'éternelle maladresse de l'attaquant qui tacle plutôt que du vice. Quand c'est De Jong... tout malchanceux qu'il a pu être (je n'ai pas vu ce tacle là), tu te dis que de toute manière, faut qu'il paye pour l'ensemble de son oeuvre.

    Mais le tacle garde une saveur particulière pour certain qui ne viennent pas au foot que pour se détendre. Je fais partie d'une asso de foot loisir, ce week end pour un match amical je me suis fais déboîter une cheville (et pourtant dieu sait que je cours à 2 à l'heure). Mon adversaire du jour vient s'excuser tout en se justifiant "que ça fait partie du jeu, et qu'il a touché le ballon donc y a même pas faute".

    J'essaye là de faire interdire le tacle dans notre association. La majorité de ceux qui s'expriment semblent d'accord, mais alors y a une petite minorité qui ne comprend pas du tout et pour qui les chevilles déboîtés par des tacles gourmands "ça fait partie du jeu, c'est ça le football".

    Un bon défouloir.


  • liquido le 05/10/2010 à 09h48
    L'hypothèse de l'exception britannique du footix ne me parait pas insensée. J'entends bien l'argument de la course au physique et du serrage de vis défensif des années récentes. Mais s'il était vrai on observerait une tendance continentale uniforme à la destruction des tripoteurs. Or, pour ne parler que de la France, ces accidents sont devenus bien rares. Du coup, ouais, l'hypothèse de la tolérance institutionnelle me semble mériter l'attention. Il faudrait qu'un socio-épidémiologiste s'y colle.

La revue des Cahiers du football