DU SANG, DE LA SUEUR ET DES LARMES
Invité : les Cahiers du catch – Les Cahiers du foot sont heureux de saluer la naissance d'un petit frère. Il porte des slips bizarres et bave un peu, mais on va l'aimer.
Auteur : Axl Rothen
le 11 Juin 2009

Ce "George Guest" est un invité pas comme les autres. Si jusqu’ici cette rubrique a permis aux Cahiers du football d’accueillir et de présenter des sites dont le rapport au football est proche du leur, c’est cette fois un site qui a fait sienne la "méthode Cahiers" qui est à l’honneur. Et si son objet est bien éloigné du rectangle vert et du ballon rond, son style en fait un cousin proche, quoique pas vraiment sortable.

A leur apparition, à une époque lointaine où ni l’équipe de France ni Randy Orton n’étaient champions du monde, les Cahiers du foot ont représenté une bouffée d’air frais dans le paysage médiatico-sportif français. Les Cahiers souhaitaient traiter le football avec humour et dérision, sans négliger pour autant les sujets qui fâchent.
Cette méthode est aisément transposable à d’autres sports et, depuis le temps que les Cahiers existent, on aurait été ravis, mais pas surpris, de voir naître les Cahiers du rugby, du tennis, du basket, du hand, etc. Mais il faut croire que les fans de Kelleher, Federer, Bryant ou Karabatic sont de sacrés fainéants, à la différence de ceux de Chris Jericho. Car le premier site prenant directement pour référence les CdF ne se consacre pas à un sport en tant que tel, mais à cet enfant bâtard de la lutte et de la commedia dell’arte qu’est le catch.
Une passion honteuse qui s’assouvit en cachette
Le catch, nous le savons bien, a mauvaise presse. À en croire ses nombreux détracteurs, il s’agit d’un spectacle grotesque et vulgaire, faisant appel aux plus bas ressorts de l’âme humaine. Si s’y intéresser peut être toléré de la part d’enfants de moins de dix ans, il semble inimaginable qu’un adulte sain d’esprit puisse consacrer du temps de cerveau disponible à ces pitoyables simagrées. Certes, ces arguments sont en bonne partie justifiés. Mais à y regarder de plus près, les mêmes raisonnements n’étaient-ils pas opposés, il n’y a pas si longtemps, aux supporters de football? Jusqu’au triomphe orgiaque de 1998, le supporter de foot n’était-il pas considéré comme un débile, qui plus est potentiellement dangereux dès lors qu’il se retrouvait en meute?
Ne vous en faites pas, nous n’allons pas tresser une fastidieuse comparaison de ces deux passe-temps. Qu’on nous autorise toutefois à affirmer qu’un objet comme le catch, à condition d’être considéré sous le bon angle, peut tout comme le football amuser, enthousiasmer et même fasciner.

- Regardez! Les gentils, ils font comme les méchants!
- Ça veut dire que nous aussi, on doit faire ça!
- Oui! Semons la mort et la destruction sur la planète!
- Obscurcissons le ciel de la fumée des villes détruites!
- Gloire à Satan!
Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes
Evacuons immédiatement un faux débat récurrent: non, évidemment, le catch n’est pas un sport, et oui, évidemment, nous savons que les matchs sont arrangés à l’avance. Il n’empêche que les catcheurs sont (au moins pour la plupart d’entre eux) des athlètes accomplis capables d’accomplir des prouesses physiques sidérantes, et que l’issue des combats, si elle est pré-écrite, n’est pas forcément prévisible pour autant, comme en témoignent les concours de pronostics qui fleurissent sur le net, et notamment sur les Cahiers du catch: on a autant de chances de prédire avec exactitude les résultats de dix combats d’une réunion de catch que de faire une grille parfaite au Loto Foot.
De plus, le catch actuel, du moins tel que pratiqué dans la plus grande fédération mondiale, la WWE (World Wrestling Entertainment, qui est la seule fédération que nous suivons attentivement du fait de sa plus grande exposition et aussi par manque de temps pour les autres), donne la part belle aux talents d’acteurs des protagonistes. Semaine après semaine, show après show, le plus grand cirque du monde raconte des histoires dont les matchs ne sont que des éléments parmi d’autres. Le catch est un ensemble unique, constitué à la fois de combats souvent spectaculaires et de saynètes faisant avancer le récit. C’est ce qui en fait le charme et l’unicité. C’est aussi ce qui nous a d’abord intrigués puis aimantés. Et finalement donné envie d’écrire.
Un paysage médiatique uniforme
Aux Etats-Unis, ce spectacle total est entré dans les mœurs depuis plusieurs générations, si bien que bon nombre de papas de Seattle ou de Louisville racontent à leurs enfants les exploits des catcheurs d’antan avec la même émotion que nos propres pères nous narrent encore les performances des footeux des années 1970. Une presse diversifiée et d’innombrables sites Internet sérieux y sont consacrés. En France, on n’en est pas là (qui a dit "heureusement"?). Le catch, en pleine expansion depuis un an ou deux après de longues années d’éclipse (une émission hebdomadaire y avait été consacrée sur Canal+ au milieu des années 1990), est principalement l’affaire des enfants et des adolescents. L’offre médiatique est à l’avenant: une diffusion télé encore balbutiante, une presse axée sur le jeune public et une blogosphère vivante, constellée de quelques sites excellents, mais très inégale et globalement submergée de skyblogs dédiés au culte de tel ou tel catcheur en langage SMS.
C’est dans ce contexte que, forts de nos années de lecture assidue des Cahiers (auxquels nous avons même eu l’honneur de contribuer épisodiquement), nous avons immodestement lancé, au début de l’année 2009, les Cahiers du Catch. Un peu comme en 1997 les pères fondateurs des CdF postaient leurs premiers articles comme des bouteilles à la mer, espérant qu’il se trouverait quelque part des lecteurs partageant leur vision, nous avons voulu faire le site que nous aurions aimé lire. Fondamentalement, il s’agit de pester contre des histoires abracadabrantes ou des matchs foireux, ou au contraire de s’incliner devant la maestria des scripteurs et des acteurs, mais toujours en ricanant, sans hésiter de temps à autre à sombrer dans un mauvais goût régressif auquel le spectacle invite souvent, on ne le nie pas.

Are you rrrrready to rumble?
Si vous vous aventurez jusqu’à nos pages, vous trouverez donc des analyses hebdomadaires des deux principaux shows de la WWE (Raw et Smackdown); des comptes-rendus des pay-per-view mensuels; des rubriques consacrées aux grands catcheurs du passé ou à des thèmes globaux (traitement du catch féminin, vision géopolitique propre à la WWE, attitude face au dopage, et ainsi de suite); et bien sûr plusieurs formats humoristiques qui pompent éhontément des concepts Cdfiques comme les faux reportages ("24 heures dans la vie de…"), les vignettes ou encore des sondages tout à fait idiots (faut-il être idiot pour se demander à quel catcheur ressemble le plus Nicolas Sarkozy, alors que l’un d’entre eux est un nain particulièrement ignoble?). Sans oublier de confortables modules vidéo. Tout pour être heureux, en somme (jusqu’à ce que les Cahiers du foot nous collent un procès pour plagiat sur le dos).
La saison de foot est terminée, et il n’y a pas de Coupe du monde ou d’Euro à se mettre sous la dent cet été. Alors plongez-vous dans le monde merveilleux du catch!
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