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« Les sportifs ont soutenu leurs causes respectives »

Bonus web - Deuxième partie de l'interview de Jean-Arnault Derens, spécialiste des Balkans, parue dans le n°13 des Cahiers: le football yougoslave dans la tourmente de la guerre...

Auteur : Propos recueillis par Grégory Rayko le 16 Fev 2005

 

 

Jean-Arnault Derens, journaliste indépendant, est l’auteur de "Balkans : la crise" (1). Il est également rédacteur en chef du portail francophone Le Courrier des Balkans (2). "L’éclatement de la Yougoslavie a-t-il commencé dans les stades?" s'interrogeait-il en 2004 dans la revue Confluences, texte réédité dans "Sport et politique en Méditerranée", un recueil d'articles récemment paru chez l'Harmattan.

 

Après avoir abordé les liens entre le football de l'ex-Yougoslavie et les nationalismes (Cahiers du football n°13, actuellement en kiosque), il revient sur l'enrôlement des footballeurs et des supporters dans le conflit...

 

Quelles ont été les conséquences de l’exclusion de la Yougoslavie de toutes les compétitions internationales de la FIFA, au printemps 1992?

 

Cette exclusion s’inscrit dans un cadre plus vaste. Au printemps 1992, la République socialiste fédérative de Yougoslavie est officiellement remplacée par une nouvelle "Fédération yougoslave", qui ne réunit plus que la Serbie et le Monténégro. En même temps, des sanctions internationales sont prises contre cette fédération, qui est frappée par un embargo commercial, un embargo total sur les médicaments et, effectivement, une mise à l’écart de toutes les compétitions sportives internationales.

 

C’est alors que les sportifs serbo-monténégrins expatriés reprennent un rôle de premier plan...

 

Bien sûr ! Tout d’abord, la situation économique est catastrophique. Enormément de gens, dont un grand nombre de sportifs, quittent le pays. Évidemment, dans ces circonstances, certains des plus célèbres d’entre eux, comme Sinisa Mihajlovic, vont mettre leur notoriété au service du régime de Belgrade, sans même que celui-ci ait à le leur demander. La logique est la même pour les sportifs serbes, croates ou bosniaques. La tension est maximale. Au pays, c’est la guerre. L’ensemble de la population, pas seulement les sportifs, a du mal à se distancier par rapport à ces nationalismes qui s’affrontent les armes à la main. Et les sportifs soutiennent donc naturellement leurs causes respectives. Les régimes en sont conscients. La Croatie exempte ses meilleurs sportifs de service militaire: elle sait bien qu’une déclaration d’Ivanisevic à Wimbledon aura plus d’impact qu’un discours du président Tudjman! Quant à la Slovénie, elle naturalise à tour de bras des sportifs d’origine serbe, croate, bosniaque ou encore autrichienne. Pour en revenir aux Serbes, on aurait pu imaginer qu’un sportif serbe de haut niveau condamne son régime; mais à ma connaissance, cela ne s’est jamais produit.

 

On se souvient pourtant qu’à l’époque où ils portaient tous deux le maillot du Milan AC, le Serbe Savicevic et le Croate Boban n'hésitaient pas à afficher leur amitié...

 

On touche là à toute la complexité de la région. Même si leurs pays ont guerroyé les uns contre les autres, les ex-Yougoslaves continuent de partager la même langue et des cultures très proches. Il est normal qu’ils deviennent amis, surtout s’ils se trouvent à l’étranger. Lorsqu’en 1998, la Croatie accède à la demi-finale de la Coupe du monde de football, tous les ex-Yougoslaves, y compris les Serbes, soutiennent l’équipe de Suker! Malheureusement, la demi-finale donnera aussi lieu à la pire des manifestations de haine: à Mostar, en Bosnie — une ville divisée entre une partie musulmane bosniaque et une partie croate —, les supporters croates, après la défaite de leur équipe contre la France, se sont livrés à un véritable pogrom anti-musulman. Il y a eu au moins un mort et de nombreux blessés.

 

Au moment des bombardements de l’Otan sur la Serbie, en 1999, les joueurs serbes qui évoluent à l’étranger utilisent les matches comme des tribunes leur permettant d’affirmer leur indignation. Même les plus apolitiques d’entre eux portent notamment des T-shirts représentant des cibles (T-shirts qui font florès à Belgrade), et tiennent des propos très durs à l’égard de l’Otan. Mais on n’a pas le souvenir que des sportifs ex-yougoslaves mais non-serbes aient participé à ce genre de manifestations...

 

Les bombardements sont vécus par les Serbes comme une agression délibérée et injuste. Même des gens opposés à la politique de Milosevic arborent ces fameuses cibles. Savicevic, pourtant un modéré, déclare alors: "Le président Milosevic doit être blâmé pour ce qui se passe actuellement en Yougoslavie, mais il n’est pas le seul. Tout le monde aujourd’hui est derrière Milosevic, prêt à combattre jusqu’à la mort pour le Kosovo qui est une terre sacrée des Serbes". Il reste que pour les ex-Yougoslaves non-serbes, il n’était pas question de soutenir ce genre de protestations. À leurs yeux, c’était une affaire serbo-serbe.

 

Nous avons parlé du comportement des stars yougoslaves à l’étranger. Revenons, si vous le voulez bien, à l’intérieur du pays. Ce qui est très marquant, dans les années 1990, c’est l’odyssée d’Arkan, symbole par excellence du glissement de certaines franges de supporters dans le nationalisme le plus criminel...

 

C’est effectivement une personnalité assez représentative de cette période... Dans les années 1970, Arkan est un criminel de droit commun qui se livre à quelques mauvais coups (casses, hold-up) à l’étranger, notamment en Allemagne et en Belgique. Il sera d’ailleurs détenu dans ces deux pays. Il est alors recruté par les services secrets yougoslaves, qui l’aident vraisemblablement à s’évader d’une prison belge, au début des années 1980. Ensuite, son rôle, en tant qu’agent des services secrets, consiste à surveiller les milieux de délinquants et de petits criminels yougoslaves, notamment ceux d’entre eux considérés comme les ennemis absolus du régime: les mafieux albanais du Kosovo. C’est fort de cette connaissance des bas-fonds de la société qu’il prend la direction des supporters de l’Etoile Rouge de Belgrade: il est alors en service commandé. À l’époque, en 1990-1991, la rue serbe, et notamment les éléments de type hooligan, prêts à en découdre avec la police, n’est pas forcément acquise à Milosevic. Ces éléments-là sont liés au courant monarchiste, qui n’aime pas beaucoup le régime de Milosevic. À ce moment-là, le Mouvement du Renouveau Serbe (SPO) de Vuk Draskovic a beaucoup plus de relais dans ces milieux que Milosevic et ses hommes.

 

Comment Arkan parvient-il à "retourner" ces gens-là, à leur prouver que Milosevic est l’homme qu’il leur faut ?

 

Arkan avait un charisme personnel indéniable. Et le régime a mis des moyens financiers considérables à sa disposition. Surtout, n’oubliez pas que ces milieux ont une conscience politique assez floue: en jouant sur leur fibre nationaliste, Arkan les convainc rapidement qu’ils doivent se rallier à Milosevic.

 

Pendant la guerre en Croatie et en Bosnie, Arkan dirige une milice qui se signale par sa sauvagerie contre la population civile : les Tigres. Dont une bonne partie ont été recrutés parmi les supporters de l’Etoile Rouge...

 

Tout à fait. L’essentiel des premiers Tigres viennent de là. Avant même que les Tigres soient formés, Arkan propose déjà des formations paramilitaires aux supporters. Il y a donc un passage, par gradation, entre la violence symbolique, à base d’insultes et de symboles, propre aux tribunes des stades, et un entraînement paramilitaire qui va conduire certains de ces supporters à se livrer aux pires exactions, les armes à la main. Ils joueront un rôle essentiel pendant la guerre en Croatie.

 

Par la suite, Arkan s’éloigne de l’Etoile Rouge pour reprendre en main l’obscur club d’Obilic, qui végète dans les divisions inférieures...

 

Je crois que le régime serbe a décidé d’éloigner Arkan, tristement connu dans le monde entier pour ses "exploits" à la tête des Tigres, de l’Etoile Rouge, afin de réhabiliter l’image de celle-ci. Le but de cette manoeuvre est d’obtenir la réintégration de la Yougoslavie aux compétitions internationales, qui sera effective en 1996. Dès la fin 1992, Arkan devient très gênant et reçoit des consignes de discrétion. Ses hommes se trouvent toujours dans l’est de la Croatie, où ils se livrent essentiellement à divers trafics. Quant à lui... il ouvre une pâtisserie à Belgrade! Le régime n’a plus vraiment besoin de lui et se garde bien de le mettre en avant. Il lui reste de l’argent : il reprend alors Obilic, qu’il fait remonter rapidement au plus haut, en profitant de la faiblesse insigne d’un championnat déserté par ses meilleurs joueurs et disputé en vase clos, et sans lésiner sur les intimidations à l’encontre de ses adversaires et des arbitres...

 

Arkan est assassiné en janvier 2000. Sa mort signe-t-elle la fin de cette politisation outrancière des supporters de football ?

 

Le Parti radical de Seselj, à la rhétorique très proche de celle d’Arkan, essaiera bien de reprendre le flambeau parmi les phalanges de supporters, mais sans grand succès. En revanche, le parti d’extrême droite créé par Arkan, le Parti de l’unité serbe, a survécu à son créateur. C’est aujourd’hui un groupuscule, dirigé par le vice-président de la fédération mondiale de kick-boxing, qui a su maintenir ses réseaux auprès d’une frange de supporters.

 

(1) Gallimard, collection Folio actuel, Paris, 2000.
(2) Le courrier des Balkans.

Réactions

  • che_zinn le 17/02/2005 à 17h14
    "peterelephanto - mercredi 16 février 2005 - 19h26
    L'occasion de rappeler sur ces pages que le FN, le PC, LCR et Lo s'étaient alors retrouvés majoritairement dans une hostilité aux interventions militaires qui finirent par avoir raison du régime de Milosevic."

    >Fort heureusement, il n'est pas nécessaire d'être militant ou sympathisant d'une de ces formations politiques pour condamner les bombardements "humanitaires" orchestrés par l'OTAN sur la Serbie et le Kosovo (considéré alors encore comme une province serbe par l'OTAN). Il faut savoir que cette mission de justice des "Etats éclairés" au service du "nouvel humanisme" a principalement conduit à bombarder des civils, entraînant un afflux de réfugiés dans et hors les frontières du Kosovo, ainsi qu'une accélération du nettoyage ethnique, entre autres crimes. Ceci est rapporté par le HCR et les récits de correspondants sur place non aveuglés par la propagande de la version OTAN-USA destinée à légitimer des bombardements aveugles en diabolisant les Serbes en général, pas seulement Milosevic. Les conséquences humanitaires désastreuses des bombardements avaient même été anticipées par le général en chef de l'OTAN, Wesley Clark.
    En perspective, il est bon de noter que des opérations de nettoyage ethnique et des massacres d'une ampleur similaire se sont déroulés en Turquie au milieu des années 90. Mais la Turquie, contrairement à la Serbie, avait le bon goût de se trouver du bon côté, celui de l'OTAN, et de recevoir des armes des USA pour commettre ses exactions contre les Kurdes. La Turquie n'a donc pas bénéficié des bombardements humanistes de l'OTAN !


  • Natchez le 17/02/2005 à 17h47
    Le Kosovo est encore moins multi ethnique qu'il ne l'était avant l'intervention. Les quelques zones, comme Pristina où subsistait un semblant de cohabitation entre serbes et albanais ont été parfaitement "homogénéisées", d'autres minorités, comme les roms ont été elles aussi éliminées du paysage kosovar, qui a vu par ailleurs sa population diminuer de 15 %, et pas seulement du fait de l'exil serbe.
    Belgrade, Nys (tout au nord de la Serbie quand même!) ont été bombardés et les infrastructures civiles (à moins de considérer un pont comme à usage purement militaire) ont souffert.
    A contrario, l'armée serbe en est sortie sans gros dommage, y compris au Kosovo.
    La justification et le résultat de cette campagne là (si c'est de celle là que parle Peter, je l'attends.)

    Trés bon article par ailleurs, j'aurais aimé un peu plus de développement quant à la situation sportive de la Bosnie, y-a-til des serbes en équipe nationale, ou des croates?
    Sinon, les évènements de Mostar ont été évoqués par Vahid, qui résidait et tenait un commerce dans la partie musulmane.
    Autre question: la capacité des ex-yougoslaves à posséder des équipes nationales de premier plan dans les sports collectifs tenaient-elles d'une volonté politique, ou d'une forme d'atavisme (ben oui, les monténégrins sont les plus grands habitants d'Europe tout ça..) ?
    Et je confondais visiblement le Partizan et l'Etoile Rouge en ce qui concerne le supporteuriat, merci des précisions donc.

  • peterelephanto le 17/02/2005 à 19h44
    Comme les Balkans ne sont pas devenus du jour au lendemain un paradis sur terre, c'est la preuve irréfutable que les interventions militaires étaient rétrospectivement à proscrire. CQFD. En plus, les impérialistes, ils ont tout cassé les ponts.

    Le Kosovo, c'était mieux avant -du temps de Milosevic, à qui il suffisait d'indiquer qu'il n'était pas très gentil.

    A la LCR, à LO, au PC et au FN, l'humanité reconnaissante.

  • paulo les gaz le 17/02/2005 à 19h48
    +1 peter

    La Bosnie se joint au concert de louanges d'ailleurs. Elle est la preuve que la non-intervention a permis la paix et l'amour entre les peuples.

  • Natchez le 17/02/2005 à 20h19
    Expliquez moi en quoi le Kosovo (je n'ai pas parlé de la Bosnie) se porte mieux maintenant, je parle du Kosovo et non uniquement des albanais du Kosovo, bien que même eux n'aient qu'une envie: partir.

    Mais j'avais oublié que les serbes étaient des sous hommes assoiffés du sang de leurs pauvres victimes.
    A l'Otan, les paysans serbes reconnaissants...

  • paulo les gaz le 17/02/2005 à 20h36
    Natchez, je ne veux pas me retrouver dans un débat guerre/pacifisme, il est évident que le choix de la paix est toujours le meilleur!

    Seulement, Quand en face il y a Slobodan Milosevic, qui porte déjà sur lui la responsabilité des massacres de Bosnie et de Croatie et qu'il semble décidé à faire la même chose au Kosovo. Quand on a l'incompétence à gérer cette catastrophe de l'Europe qui a laissé mourir Gorazde, Sebrenica et Zepa. Quand l'urgence demande l'action, et bien l'intervention américaine se justifiait et se justifie toujours, par le simple fait qu'on a évité les massacres et la purification ethnique.

    La guerre n'est jamais la meilleure des solutions, mais parfois, c'est la moins pire.

  • El mallorquin le 17/02/2005 à 23h25
    En fait on peut remplacer "Otan" par "Etats-Unis" et "Kosovo" par "Irak" dans le premier post de Peter, et on se retrouve avec un joli parallèle... Oups, non, en fait, il faut aussi rajouter l'UMP et le PS dans la liste de ceux à qui l'humanité doit être reconnaissante.

    Bon cela dit joli troll Peter*. :-))

    *Je crois qu'on disait "provoc" dans le temps.

  • mollows le 18/02/2005 à 09h33
    Si on ajoute Chomsky à la liste à la Prevert-Peter des zextremes de gauche et de droite des denonciateurs des bombardements, on se dit aussi que les choses sont peut-être pas si simple (j'ai pas creuser ceci-dit)

  • Natchez le 18/02/2005 à 11h58
    Paulo> je n'ai aucune sympathie pour Milosevic, loin s'en faut mais s'il faut intervenir militairement partout où les hommes au pouvoir sont des "méchants", et ce sans accord de l'ONU, alors on ne va pas s'élever contre l'intervention US en Irak, ou à Grenade, ou demain à Damas ou au Camps des Loges..
    Et qui définit qui sont ces méchants ?
    C'est la porte ouverte à n'importe quoi; et je ne parle pas de l'intervention en Bosnie, mais bien du Kosovo, illégale.
    Sinon, il n'y avait pas d'égalité des droits au Kosovo, et les albanais y étaient maltraités mais il n'y avait pas non plus de nettoyage ethnique ou que sais-je.
    Et ce sans même entrer dans le détail de l'importance historique du Kosovo pour les serbes, importance partagée et soulignée par y compris les plus pro-occidentaux d'entre eux.
    ça détourne mais c'est la faute de Peter d'abord.

  • LokomotivDallas le 18/02/2005 à 12h05
    plgaz,
    je maintiens qu'à la mort de Tito les yougoslaves l'ont pleuré, mais aussi paske sans lui il savaient qu'à terme ils allaient se foutre sur la gueule les uns les autres, entre voisins de palier d'un m^me territoire.
    il avait fallu qu'un croate de naissance renie cet etat de fait au profit d'une vision un peu plus large des choses, fut elle adossée à un concept discutable : le communisme (quand bien même dans sa version autogestionnaire).
    les choses ont tenu tant que les serbes ont privilégié leur indépendance plutôt que leurs liens pan-orthodoxes avec en particulier les russes (jusqu'à la dissolution du bloc soviétique, quoi).
    un peu d'huile sur le feu avec les nationalistes croates, et hop c'est parti...
    je le sais car certains me l'ont dit.

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