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Leçon 10 : le racolage

La démagogie est une arme précieuse pour le journaliste sportif qui tient à répondre aux impératifs commerciaux de son employeur. En football, les occasions abondent. Pour cette leçon, nous nous sommes référés un quotidien régional et parisien à la fois qui est devenu maître en la matière.
Auteur : Le journalisme sportif en 12 leçons le 25 Juin 2002

 

Branche : toutes branches.
Niveau : très facile.

Introduction
Le travail de journaliste (même sportif) est généralement long et fastidieux. Pour écrire un article sérieux, il faut à la fois avoir de bonnes idées, de bonnes informations, et une bonne plume. Mais remplir toutes ces conditions ne garantit pas pour autant le succès auprès du lectorat. Pour s’assurer de bonnes ventes, une méthode efficace consiste à user du racolage et la démagogie. Celle-ci permet par ailleurs des économies à la fois en termes de temps, d’argent et de travail à fournir.
A titre d'exemple, nous étudierons dans cette leçon le cas exclusif de l'article du Parisien du lundi 24 juin 2002 "Arbitrage : le scandale", véritable modèle en la matière (les citations en italiques sont extraites de cet excellent article).


Etape 1. Brosser le lecteur dans le sens du poil
L'une des règles de base du journalisme racoleur consiste à proposer au lecteur ce qu'il a envie de lire en flattant ses plus bas instincts: haine, chauvinisme, rancœur, etc. Cette attitude présente l'avantage de ne pas réclamer beaucoup d'originalité dans la recherche des sujets: un simple argument de comptoir entendu à la Brasserie du Marché pourra suffire de base à l’écriture d’un article. Il permet également de limiter les risques de polémiques et assure de ce fait une large audience en termes de vente. Evidemment, la position défendue par le journaliste racoleur devra être présentée comme évidente, et ne pas devoir faire l’objet d’une quelconque nuance.

Quelques réflexes de base du journaliste racoleur
- Critiquer l’entraîneur
- Enfoncer un joueur
- Dénigrer l’arbitre

Exemple : dans notre exemple, c’est la troisième option qui a été choisie.
(En une du Parisien) "Ce favoritisme (NDLR : pro-Coréen) et la médiocrité générale de l'arbitrage font scandale dans le monde entier".


Etape 2. L'insinuation
La première des règles à maîtriser dans le journalisme racoleur est d’utiliser la rumeur comme principale source d’information. Inutile de s’encombrer de détails (coups de téléphones à des personnes tenant un point de vue contradictoire, analyse de rapports, etc.). Ces attitudes constituent une perte de temps nuisible à votre rendement. Il est vivement déconseillé de vérifier la véracité de la rumeur. Pour peu qu’elle soit totalement infondée, vous repartiriez de zéro et vous retrouveriez sans sujet d’article.

Exemple
"L'épopée des Coréens ne doit rien au hasard : fruit d'une préparation hyper pointue, dont la nature exacte reste à découvrir (…) elle est aussi le produit d'une volonté politique et économique".


Astuce
Pour éviter que votre intégrité journalistique ne soit remise en cause (ce qui serait quand même un comble), une astuce consiste à relayer une rumeur donnée par une tierce personne. Ce subterfuge permet en effet d'aboutir au résultat recherché (rappel: le sensationnel, donc la vente), sans impliquer ses méthodes de travail, puisque cette technique consiste à ne pas prendre les propos de cette personne à son compte.

Exemple 1 : reproduire le discours limite d'un joueur
"Avant la demi-finale de demain contre la Corée du Sud, Oliver Kahn a émis de sérieux doutes sur l'intégrité de l'arbitrage : " Il faut s'attendre à ce que l'arbitre siffle contre nous(…)".

Exemple 2 : encore plus fin, dans le but de ne vous mettre personne à dos, vous pouvez également éviter de citer les personnes en question.
"Les mauvais esprits remarquent aussi la désignation d'un arbitre sud-coréen pour le match Brésil-Turquie, entaché d'erreurs flagrantes".
Dans cet exemple, "les mauvais esprits" désignent en fait l'auteur, toute l'habileté de la manœuvre résidant dans cette délégation du dénigrement.


Etape 3. L'approximation
Donner des chiffres, révéler des faits avérés et vérifiables constitue un danger important pour le journaliste sportif racoleur. En effet, outre le fait qu'il est particulièrement difficile d'obtenir ce genre d'informations, ces renseignements trop précis pourraient être utilisés à votre encontre par un lecteur, un observateur, voire un autre journaliste malintentionné. Le bon journaliste racoleur usera donc de généralités et d’approximations diverses. Il pourra également s'agir d'affirmer tout bonnement n'importe quoi et d'en faire découler des conséquences pas forcément liées à l’assertion de base, mais forcément compromettantes pour le sujet incriminé.

Exemple
"Le choix d’arbitres venus de petits pays (…) pour diriger les rencontres des Coréens serait du fait [du président de la Fédération Coréenne]".
Notez l’emploi d’un conditionnel : si l'affirmation gratuite est le principe, des précautions de langage doivent être utilisées de temps à autres pour éviter la diffamation mais également donner l'impression que le ton est mesuré (et donc juste).


Etape 4. L'amplification
Devant le manque drastique d'information, en plus de l'invention pure et simple (cf. ci-dessus), le journalisme racoleur consiste également à exagérer outrageusement un phénomène. Cette technique permet à la fois de donner de l’importance à l’article en termes de fond, mais également de faire passer son auteur pour un brillant journaliste d’investigation.

Exemple : qualifier d'erreurs d'arbitrage flagrantes des hors-jeu ou des fautes limites.
"France-Uruguay : but refusé à Trezeguet pour un hors-jeu imaginaire signalé par l’arbitre assistant du Salvador".


Etape 5. La totale mauvaise foi
Dans le domaine du journalisme racoleur, tous les arguments sont bons, surtout les plus fallacieux. Il est donc conseillé de proférer des énormités, car se sont généralement celles qui font le meilleur effet. Avec un argument grossier, un lecteur inattentif pourra ainsi avoir l’impression d’être en face à une idée géniale, tellement géniale qu’il n’y avait pas pensé auparavant. Evidemment, la raison pour laquelle personne n’y a jamais pensé est souvent liée au fait que l’idée est particulièrement stupide. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas abuser de cette technique, et n’utiliser cet argument qu’à dose très modérée dans un article.

Exemple : Reprocher au pays organisateur de jouer à domicile
"C'est le président de la Fédération coréenne qui a obtenu que la Corée (…) joue tous ses matches à domicile".


Etape 6. La formule choc
Nous avons déjà vu dans une leçon précédente (lire leçon 6 : titres et légendes) que la recherche d'un titre et d'une légende sans intérêt était une composante essentielle du journalisme sportif. Le cas du journalisme sportif racoleur est une exception: ici, le titre et la légende ne doivent pas être sans intérêt, mais accusateur, mensonger, etc. Il s’agira donc d’éviter les titres descriptifs ou donnant de nombreuses informations, mais de mettre en cause directement une personne ou une institution par une formulation douteuse.

Exemple
Ne titrez pas : "L'arbitrage du Mondial suscite de vives polémiques".
Titrez : "Pourquoi la Corée est favorisée".


L'arbitrage, les choix tactiques des entraîneurs, les aléas des prestations des joueurs donnent une infinité d'occasions de racoler le badaud à moindres frais. Il s'agit simplement d'être vigilant et de ne pas manquer les faux procès qui obtiendront aisément le consensus, en sollicitant le minimum d'intelligence, à la fois de la part du rédacteur et de son lecteur. Une bonne maîtrise de ces techniques peut assurer une carrière intéressante dans cette partie de la presse française qui se rapproche constamment du modèle des tabloïds à l'anglo-saxonne.

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Le journalisme sportif en 12 leçons
Leçon 1 : les transferts
Leçon 2 : recopier la dépêche AFP
Leçon 3 : l'interview minée
Leçons 4&5 : l'autopromotion et l'éloge du patron.
Leçon 6 : titres et légendes.
Leçon 7 : pomper les articles des Cahiers
Leçon 8 : interviewer un footballeur
Leçon 9 : le consultant télé

Réactions

  • El mallorquin le 26/06/2002 à 11h47
    Des dégâts du corporatisme sur des êtres pourtant visiblement doués d'intelligence (quoique)... Tu vois CC, le problème, c'est que ta défense coûte que coûte de ta profession te fait réagir y compris pour protéger les pratiques les plus puantes. Pour tout dire, même plumitif trouve "mythique" le traitement du cas EdF par le Parisien, c'est dire... Tu devrais peut-être te poser quelques questions.

  • SNOOPY le 26/06/2002 à 17h34
    À noter la parution (très) prochaine d'un livre* des 2 journalistes* du journal* "Le Parisien" sur les dessous de la déroute de l'EdF en Corée, dont je recommande la lecture à la rédaction (pince-nez obligatoire).

    * ces termes sont employés pour la compréhension générale mais ne désignent qu'avec une très forte marge d'approximation les objets et les individus qu'ils décrivent.

  • Don Quijote le 26/06/2002 à 21h02
    Superbe belle leçon du journalisme, moulé au "profilé lecteur"...

    Je croyais que le journalisme c´était la vérité, l´analyse, la réflexion enrichissante, voire l´enquête. Mais non, vous avez raison, comme les politiques se sont auto-détruits, les journalistes sont en voie de disparition, à quelques exception près.

    Outre vos articles et le ton général des CdF, exempts de ce journalisme de basse qualité, voire écoeurant, vérifez aussi quelques articles dans mon magazine lien

    dans les chroniques

    - La violence du résultadisme.
    - Théatre, drame et cancer du football.
    - Gagner ou gagner, le grand mensonge du G14.
    -La faute des entraîneurs, par Pelé

    et dans les archives

    - Ils jouent moins.
    - Buuut ...sur coup franc.
    -Dribble interdit
    - Artiste et Athlètes
    -Jeu ou travail...
    -Brésil, chronique d´une mort annoncée.

    etc... etc... toutes chroniques d´extrème actualité

    et vous serez enchantés d´apprendre qu´il est encore vivant ce journalisme classique, juste, presque normal... mais qui passe aujourd´hui pour un journalisme anti-classique, anti-conformiste, et non corporatiste, ou encore insolidaire d´une profession en voie de disparition... le journalisme tout simplement.

    Et Contrapie a de nombreux "supporters", pas toujours d´accord, mais d´accord, oui, pour réfléchir et non consommer le breuvage fade et quotidien de la presse dans´l´sens du poil comme vous dites...

    Salutations offensives

    Jean Pierre Bonenfant
    lien
    jeanpierre@ lien

  • elnin le 26/06/2002 à 23h57
    Don quijote ecrit:
    "Je croyais que le journalisme c etait la verite, l analyse, la reflexion
    enrichissante, voire l enquete. Mais non, vous avez raison, comme les
    politiques se sont auto-detruits, les journalistes sont en voie de disparition, a quelques exception pres."

    Je ne suis pas tout a fait d accord. D abord il n y a pas de verite. Et deja c est le grand defaut du journalisme actuel, il se croit detenteur de LA verite. Je ne pense pas que les politiques se soient auto-detruits, et je pense plutot que ce sont les media qui ont detruit la chose publique en la vidant de sa substance au profit de l evenementiel (vendeur). (De possibles analogies avec le foot sont possibles, on vide un match de foot de son sens Allemagne-Bresil pour le transformer en un duel Kan-Ronaldo qui est un evenement (au diable les inities!!!!! Le duel de star permet "l identification" et ainsi de toucher femme homme jeune vieux !!).

    Les media sont le sang de la democratie, sans information libre les differents organes de la republique ne s oxygenent plus, et elle meurt. A force d asceptiser le monde dans lequel on vit (business), de rechercher des consensus forcement vendeur pour un plus grand nombre (business encore), les media on perdu leur habitude de lutter de defendre des causes (a cause du business); d ou, a la premiere infection serieuse la republique y passera.

    ps:j etais un fervent admirateur du Parisien quand je vivais a Paris. C est un journal mythique. C est le meilleur journal quand on se fait un cafe-clope au cafe le matin vant d aller bosser. une connerie par page en moyenne, il m a bien fait rigole. prenons le pour ce qu il est.

  • CC le 27/06/2002 à 03h24
    effectivement, el M, je defend ma profession face à des attaques systematiques que je comprend mal, venant d'un site comme celui ci.
    dans cet article, il suffirait que le mot "journaliste" soit tremplacé par K Nedjari ou G Verdez pour que ma réaction soit differente.
    evidemment; le brûlot du Parisien d'hier est mythique. Mais pour moi, il devrait vous servir à évaluer la distance entre le vrai travail de journaliste que l'on retrouve dans l'Equipe, que cela vous plaise ou non, et le "trash writing" du Parisien, non signé qui plus est.

  • El mallorquin le 27/06/2002 à 04h48
    Je crois qu'il faut que tu rebranches ta fonction "humour", CC... "Les leçons de journalisme sportif", c'est un exercice satirique, qui pousse à l'extrème la généralisation de comportements parfois marginaux: si tu n'as pas assez de recul pour comprendre qu'il ne s'agit pas là d'une charge générale contre tous les journalistes sportifs, je crois que ton cas est désespéré.
    Le fait, qui plus est, que les exemples de racolage ne soient tirés que du Parisien et la précaution de langage dans l'intro ("Le travail de journaliste (même sportif) est généralement long et fastidieux. Pour écrire un article sérieux, il faut à la fois avoir de bonnes idées, de bonnes informations, et une bonne plume") démontrent assez clairement vers quel média se porte la critique...

  • CC le 27/06/2002 à 04h57
    el M, d'abord je connais personnellement jean Amadou et Bernard Mabille, alors question humour je ne crains personne OK ?
    ensuite, pour la charge générale contre les journalistes, je ne m'appuie pas sur cet article en particulier mais sur la tendance générale des articles et des contribs, qui, bien souvent, manquent cruellement de discernement. Je remarque enfin que les contribs n'allant pas dans ton sens manquent généralement d'humour. soit dit en passant, je suis certain que tu t'entendrais très bien avec nos amis du Parisien cités prédédemment. à tel point qu'il m'arrive de me demander si tu n'est pas l'un d'entre eux.

  • Amazigh le 27/06/2002 à 06h09
    A propos de journalistes crapuleux, même s'ils ne sont pas sportifs il y a eu un fait qui est presque passé inaperçu par les médias, il s'agit de ces pseudos journalistes du figaro qui voulait absolument mettre l'attentat de l'usine AZF sur le dos de musulmans, je ne sais ou en est l'affaire mais j'espère qu'ils le paieront cher parce qu'ils ont foutu en l'air la vie d'une famille.

  • plumitif le 27/06/2002 à 06h13
    Snoopy, d'après ce que j'en sais, le livre dont tu parles n'est pas à aborder avec un pince nez (sauf si l'on se laisse aller à la facilité qui consiste à mettre tous les journalistes dans le même sac) mais constitue une enquête sérieuse sur les raisons du flop des Bleus à la CM.

  • plumitif le 27/06/2002 à 06h24
    El M., je rejoins CC dans la mesure où à chaque article sur la question tu nous expliques APRES qu'il ne faut surtout pas y voir une généralisation, ce qui constitue une forme de racolage (brosser le lecteur des cahiers dans le sens du poil) de plus non assumé (c'est pas tout à fait ce qu'on voulait dire).

La revue des Cahiers du football