Libertadores / foot sud-américain
De l'exotisme, du soleil, des tacles rageurs, des techniciens surdoués, des supporters fous: tout le foot sud-américain!
Gone Going
28/11/2020 à 23h46
Maintenant que les choses sont redevenues plus tranquilles, voici le moment du message annuel sur la situation au Pérou. Reprenons après le message 11546 du fil politique, pour voir comment nous en sommes arrivés à la situation d’il y a 10 jours, avec les plus grosses manifs des 20 dernières années.
lors du dernier épisode, Vizcarra avait donc triomphé du fujimorismo et de ses alliés, et le parti était bien amoché (Keiko Fujimori en prison préventive, son père toujours condamnés) avec un soutien juste du noyau dur (7-8%, vs 37% au premier tour des élections 3 ans avant)
Les élections législatives ont donc eu bien lieu en janvier comme prévu, et ont donné des résultats très différents du parlement précédent, avec aucun parti majoritaire parmi les 130 parlementaires, avec une grosse erreur de Vizcarra, qui n’a pas présenté de liste (pour qu’on ne puisse pas penser qu’il ait dissous le parlement pour ca). Pour vous guider, un petit récapitulatif :
Accion Popular, un des rares partis historiques (plusieurs présidents, l’actuel maire de Lima, plusieurs actuels gouverneurs). Plusieurs courants, certains corrects, d’autres plutôt louches : 25 parlementaires
APP : 22 parlementaires, parti fondé et dirigé par César Acuña, qui dirige un business d’universités privés de mauvaise qualité (même si certifiés). Fortune un peu louche tout de même
Fuerza Popular : le parti de Keiko Fujimori, 15 parlementaires, voir épisodes précédents
FREPAP : la grosse surprise que les sondages n’avaient pas vu venir. Fondé par une sorte de secte israelite, très morale, mélange entre christianisme, incaisme, et pleins de trucs comme ca. Populaires dans le monde rural.
UPP : 13 parlementaires. La liste basée sur le degout de la poltique de la corruption, mais remplis de corrompus. Ils se sont aliés avec Antauro Humala, (frère de l’ancien président Humala), qui a fondé l’etnocacerismo, mouvement nacionaliste, incaiste et plutôt conservateur. Les propositions phares sont donc fusiller les corrompus. C’est un mix bizarre entre extrème gauche et extrème droite. Antauro est en prison pour multiples meurtres depuis 2005 et son soulèvement militaire. Son frère ne l’a pas relâché quand il était président.
Podemos, 11 parlementaires : parti fondé par les Luna, qui dirigent les universités de très mauvaise qualité, qui ont perdu leurs licences et devront fermer sous 3 ans. Ils ont eu pleins de vote grâce à Urresti, tete de liste à Lima, un ancien ministre l’intérieur populaire (et accessoirement accusé du meurtre d’un journaliste quand il était militaire à l’époque du Sentier Lumineux)
Somos Peru, 11 parlementaires, un peu connus de partout, donc ca fait des pourcentages corrects, mais ils ne sont maintenant plus grand-chose (le genre de parti qui te fait payer pour etre sur ses listes)
Frente Amplio, parti de gauche à l’ancienne, pas moderne, avec 9 parlementaires. Tout de même 2 Lenin, ca donne le ton.
Partido Morado : un peu le En Marche local, 9 parlementaires, c’est ce qui ressemble le plus à un parti du gouvernement. Pas trop trop ma tasse de thé sur les idées en général, mais je reconnais sans souci que tous sont à peu près honnetes plutôt bien formés, démocratiques…
On se dit que bon, c’est pas top mais ce devrait faire le boulot plus ou moins jusqu’aux élections présidentielles et parlementaires du Bicentenaire en 2021, qui sont rapidement convoqués pour avril 2021.
Mais on se trompe completement. Ils ont bien l’espoir de prendre le pouvoir durant les 18 mois qu’il reste, tous pour leurs différents interets, en général en rapport avec se faire plein de thunes (developper des universités, gérer le ministere des finances pour faire plein de projets avec le petit % qui va avec).
peu de temps apres les elections, on a la crise du Covid. Mal géré en general, meme s’il y a eu de bonnes intentions. On n’a pas la pire mortalité par habitant du monde par hasard. Entre quelques mauvaises decisions, couplé à un système de santé plus que defaillants. Les parlementaires en profitent pour prendre quelques decisions bien populistes, convoquent sans cesse le ministre de l’Education qui gere la reforme universitaire pour d’autres raisons.
En septembre, un petit scandale avec un chanteur de salsa local, Richard Swing, apparait. Il serait ami avec Vizcarra, et a eu des contrats avec le Ministere de la Culture. Le Parlement lance un processus de destitution mais ne va finalement pas jusqu’au bout.
Rebelote debut novembre, mais pour un scandale plus important : des accusations de pot de vin lors de la construction de l’hopital de Moquegua, dont Vizcarra fut le gouverneur avant d’etre élu vice président.Plusieurs témoins clés le confirment à la justice, et ca filtre dans la presse.
Comme indiqué, dans le cas de la destitution de Vizcarra, celui qui prendrait le pouvoir est le président du Parlement, dans notre cas Manuel Merino. C’est une sorte de pion d’une alliance entre AP, APP, Podemos, UPP principalement. Ces 4 partis sont motivés pour aller au bout.. Le FREPAP et FA decident de s’ajouter pour des considerations morales (religieuses pour le FREPAP, ideologiques pour FA) Au total, 105 parlementaires voteront pour la destitution, avec un motif vaseux d’incapacité morale, qui ne veut pas dire grand-chose (ca voulait plutôt dire psychique genre folie)
Vizcarra est probablement corrompu, mais le virer 6 mois avant les elections prévus, dans un contexte de crise économique et sanitaire, alors qu’il est plutôt populaire, c’est une très mauvaise idée. Le soir meme, Vizcarra dit qu’il accepte la decision et rentre chez lui. Mais la rue n’accepte pas cette décision, surtout en voyant Merino prendre le pouvoir, et les premieres annonces montrent qu’il ne compte pas faire une sorte de gouvernement de transition, multi parti pour arriver aux élections, mais plutôt sur un groupe très conservateur, pleins de vieux racistes, la coordinacion republicana, aussi appelés los viejos lesbianos ( les Vieux Lesbiens)
pour essayer de le faire chronologique : le lundi soir Vizcarra est destitué. Le mardi à midi Merino est nommé president intérimaire. Le jeudi il nomme Antero Florez Araoz premier ministre, un ancien ministre, raciste, qui a fait 0.5% de la derniere election presidentielle. Ses ministres sont nommés le vendredi, la plupart sont inconnus, personne ne veut etre ministre de ce gouvernement qui est délégitimé dans la rue. Ils tentent dés le debut de virer le responsable de la reforme universitaire, ils prennnent le contrôle de la tele publique, ils virent plusieurs haut fonctionnaires du Ministere de l’Economie Les manifs et cacerolazos (taper sur des casseroles sur son balcon) se font chaque jours plus forts, malgré le covid. Les manifs sont assez descentralisés, meme dans les differents quartiers de Lima, meme si les plus intenses sont dans le centre historique, autour de la Plaza San Martin, l’avenue Abancay qui meme au congrès, et les petites rues autour. Ces manifs sont organisé un peu comme les chiliennes, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de mouvements, de partis derrière. Tout se fait sur des plateformes de jeunes, à traves de Tiktok par exemple. La génération du Bicentenaire est prend les choses en main, avec leurs codes, 20 ans après leurs ainés qui ont fait tomber Fujimori et sa clique en 2000. La repression est très forte, les lacrimos sont un classique mais dans une intensité rarement vue. Dès le deuxieme jour, il y a des tirs de chevrotines. Le samedi est le jour de manifestation le plus intense. L’avenue Abancay est le lieu d’une bataille rangé, avec des tirs par balles de la part des policiers en plus des lacrimos et des chevrotines. Un groupe Terna, spécialisé en infiltrations dans le grand banditisme, se mélange et arretent des gens au milieu de la foule.
https://tinyurl.com/yxa23tyb
https://tinyurl.com/y4qzv6hz (le désormais équivalent péruvien à la liberté guidant le peuple)
Le samedi termine avec 2 morts, une dizaine de disparus (qui reapparaitront dans les comissariats durant les 3 jours suivants, et plusieurs dizaines de blessés.
Selon des sondages, plus de 13% des Péruviens sont descendu dans la rue, et plus de 50% ont participé au moins avec des publications, des cacerolazos.
Le lendemain, le dimanche, Merino et son gouvernement démissionne dans une situation devenu intenable. Le Bureau du parlement demissionne aussi, pour que ne soit pas president le vice president du Bureau. L’election du nouveau bureau est compliqué. 105 des 130 ont voté pour la destitution, fortement apparenté à un coup d’Etat. Le peuple veut donc des dirigeants de ce petit groupe.
Apres de multiples tractations, ca se termine avec Sagasti, un parlementaire du Parti Morado president du Bureau et donc president interimaire, et une des rares (Mirtha Vasquez) qui a voté contre du Frente Amplio, une avocate qui se bat contre les abus des mines, comme vice presidente du parlement et donc présidente du Congres pendant que Sagasti est president de l’executif.
Ca satisfait plutot la rue, meme si c'est compliqué de savoir comment vont reagir les perdants de ces dernieres semaines.
Gone Going
29/11/2020 à 01h20
En fait, la plupart des universités sont privés. Il n'y a pas ci longtemps, il n'y avait aucun suivi, donc tout le monde pouvait faire son université, faire payer et donner le diplome. En plus d'etre un business facile pour laver de l'argent. La qualité pouvait etre bonne, voire très bonne, comme super mauvaise.
En 2016, ils ont créé la Sunedu, qui donne des licences aux universités, et donc certaines ne l'ont pas obtenus. C'est pas hyper exigeant, mais ca fait déjà un premier filtre(il y a meme des publiques qui ne l'ont pas passé). Les universités Telesup des Luna (du parti Podemos) ne l'ont pas obtenu. Les universités Cesar Vallejo des Acuña (APP) l'ont obtenu, mais ils ont du investir pas mal, donc c'est devenu moins rentable. Si je ne me trompe pas, un des dirigeants d'Accion Popular (AP) est aussi dans le business de l'Education.
En plus, ces universités "donnaient" des diplomes, donc ca permettaient aux parlementaires d'avoir des masters en droit à peu de frais.
la Sunedu fait en plus partie de la plus large réforme éducative, qui inclue tous les themes de genre, qui sont bien à la mode dans les pays catholiques, par exemple avec les équivalents péruviens de la Manif pour tous (Con Mis Hijos No Te Metas), donc tu peux avoir des soutiens par exemple du FREPAP, ou de Fuerza Popular, pour faire tomber les ministres/gouvernements et en mettre un plus complaisants sur ce genre de sujet
Donc tout ca fait que ces partis des mafias de l'education veulent transformer la Sunedu en une coquille vide pour continuer leur petit business, avec des alliés de circonstances