Le foot aux JO : Cinq matches de légende
Même si l'histoire du foot fait peu de cas des tournois olympiques, certaines rencontres ont fait leur place dans la légende du ballon rond.
France-Uruguay, Colombes, 1er juin 1924
C'est la grande foule qui s'est réunie en ce printemps 1924 au stade de Colombes, où l'équipe de France dispute les quarts de finale du tournoi olympique de football des Jeux de Paris. Ce n'est pas tant leur sélection que les 45.000 spectateurs viennent voir que l'adversaire du jour, cette épatante formation d'Uruguay qui a fait forte impression lors des deux premiers matches face à la Yougoslavie (7-0) et aux États Unis (3-0). L'équipe au maillot ciel, tenante de la Copa América (qu'elle a déjà remporté quatre fois), est la première sélection venue d'Amérique du Sud à participer aux JO.
Le public européen découvre un football technique, inventif, souvent spectaculaire et surtout très efficace. Rapidement d'ailleurs, l'équipe de France comprend qu'elle n'est qu'un sparring-partner de luxe. Elle prend un but dès la deuxième minute, et malgré une égalisation rapide de Paul Nicolas, elle prend l'eau de toutes parts et s'incline 5-1. La Celeste poursuivra sa route jusqu'en finale, où elle s'imposera 3-0 face à la Suisse.
Yougoslavie-URSS, Tempere, 20 juillet 1952
L'événement des Jeux d'Helsinski en 1952 est la première participation des athlètes soviétiques aux épreuves olympiques. Le 20 juillet 1952 à Tempere, l'équipe d'URSS est confrontée à la Yougoslavie, un choc lourd de sens sur le plan politique, les deux pays refusant tout bonnement de s'adresser la parole. Sur le terrain, les joueurs yougoslaves se dirigent vers une large victoire: ils mènent 3-0 à la mi-temps et Stjepan Bobek inscrit un quatrième but en début de seconde période. Le Soviétique Vsevolod Bobrov réduit l'écart, mais Branko Zebec marque un cinquième but à l'heure de jeu.
À un quart d'heure de la fin, la Yougoslavie mène toujours 5-1, mais elle se fait surprendre par un but de Trofimov. Deux minutes plus tard, Bobrov inscrit sa deuxième réalisation et ramène le score à 5-3. À trois minutes de la fin, Bobrov, encore lui, parvient à tromper Beara. Puis à l'ultime minute, Aleksandr Petrov signe le but de l'égalisation la plus extraordinaire de l'histoire du foot: 5-5! Le match sera rejoué deux jours plus tard et verra la victoire 3-1 des Yougoslaves. Ceux-ci parviendront en finale, où ils s'inclineront face la fabuleuse équipe de Hongrie de Puskás et Czibor.
France-Yougoslavie, Pasadena (États-Unis), 8 août 1984
Deux faits notables marquent les Jeux de Los Angeles en 1984: le boycott des pays de l'Est et l'entrée dans la maison olympique des premiers sportifs ouvertement professionnels, notamment des footballeurs. L'équipe de France, dirigée par Henri Michel et composée de joueurs de première division, réussit le meilleur tournoi de son histoire. En demi-finale, elle est opposée à la Yougoslavie. Le match démarre bien: Dominique Bijotat et Philippe Jeannol marquent dans le premier quart d'heure.
Puis vient la seconde mi-temps et le match se dérègle: Didier Sénac est évacué sur civière, Jovica Nikolic est exclu, et les Yougoslaves, bien que réduits à dix, parviennent à marquer deux buts. Mais ils doivent disputer la prolongation à neuf puisque Cvetkovic, l'auteur du premier but, est exclu à son tour. Les Bleus, un peu désarçonnés, reprennent leurs esprits et Guy Lacombe donne l'avantage sur un but de raccroc (96e). En toute fin de match, l'inévitable Daniel Xuereb concrétise la domination française en récupérant au milieu de terrain un ballon perdu… par le gardien Ivkovic, qui avait donc déserté sa cage (4-2). Trois jours plus tard, les Bleus remporteront la médaille d'or aux dépens du Brésil.
Zambie-Italie, Gwangju (Corée du Sud), 19 septembre 1988
Pour les Jeux Olympiques de Séoul, l'équipe d'Italie se présente parmi les favoris, ayant emmené un effectif impressionnant puisque composé de joueurs rompus au meilleur championnat de l'époque, la Serie A. Après avoir trimballé le Guatemala (5-2), les hommes de Francesco Rocca se voient bien infliger la même punition à la modeste Zambie.
Mais à Gwangju, les Italiens souffrent et voient Kalusha Bwalya tromper Tacconi juste avant la pause. En seconde période, rien ne s'arrange: l'attaquant du Cercle Bruges double la mise sur un subtil coup franc. Après l'heure de jeu, c'est la déroute. Johnson Bwalya inscrit le troisième but zambien d'un magnifique tir lointain. Et en toute fin de match, Kalusha Bwalya signe son triplé et donne à la défaite italienne des allures de Bérézina: 4-0! Une humiliation sans conséquence pour les Italiens qui iront jusqu'en demi-finale, alors que les Zambiens se feront sortir par la RFA en quarts (4-0, triplé de Jürgen Klinsmann). Mais la victoire zambienne sur l'Italie restera une date importante dans l'histoire du foot africain.
Nigéria-Brésil, Athens (États-Unis), 31 juillet 1996
Avec son attaque Ronaldo-Bebeto, l'équipe du Brésil a fière allure pour les Jeux d'Atlanta. Les quadruples champions du monde n'ont jamais remporté le moindre tournoi olympique et les joueurs de Mario Zagallo sont là pour mettre fin à cette infamante statistique. En demi-finale au Sanford Stadium d'Athens, la Seleçao retrouve le Nigéria, qu'elle a battu au premier tour. Le jeune Flavio Conceição ouvre rapidement le score et, à la pause, le Brésil mène 3-1.
La finale est en vue, d'autant que le score reste ainsi jusqu'au dernier quart d'heure. Mais à la 78e minute, le remplaçant Rivaldo perd un ballon au milieu de terrain, immédiatement exploité par des Green Eagles qui réduisent l'écart par Victor Ikpeba. Et puis, à la toute dernière minute, c'est Nwanko Kanu qui arrache une miraculeuse égalisation. La prolongation ne dure que quatre minutes, le temps que Kanu trompe à nouveau Dida, signant le deuxième but en or de l'histoire olympique. Le Brésil est éliminé. Quatre jours plus tard, le Nigéria s'impose face à l'Argentine et remporte le premier grand titre de l'histoire du foot africain.