Lexique tactique / 2 : principes et philosophies
La vogue de l'analyse tactique charrie beaucoup de termes de jargon pas toujours explicites, parfois inutilement savants. Définitions, exemples et pointe de dérision.
La tactique, ça ne fait pas toujours rêver. Aux considérations théoriques s’ajoute tout un vocabulaire, plus ou moins pontifiant, permettant de définir des systèmes ou des rôles précis. Petit guide en deux parties (à compléter) pour pouvoir s’y plus retrouver facilement, sans se prendre trop au sérieux…
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Catenaccio
Tactique défensive popularisée par l’Inter d’Helenio Herrera dans les années 60. Originellement, ce système employait un libéro très en retrait de quatre autres défenseurs, qui appliquaient un marquage individuel. Expression aujourd’hui largement galvaudée car employée pour désigner une équipe à l’approche très défensive.
Variante : "L'important c'est les serrures trois points" (Pablo Correa).
Décrochage
Un joueur décroche lorsque, sans ballon, il quitte la zone qu’il est censé occuper dans l’organisation de base de son équipe pour demander le ballon dans une autre zone du terrain. Objectifs: créer une supériorité numérique inattendue dans une zone, chercher les espaces entre les lignes adverses...
Variante : "C'est pourquoi je voudrais, enfin si vous le permettez, dézoner en paix" (Nicolas Anelka).
Football total
Totaalvoetbal en néerlandais. Principe de jeu développé par Rinus Michels à l’Ajax Amsterdam dans les années 70, basé sur un mouvement perpétuel, un pressing constant et la participation de tous les joueurs à toutes les phases du jeu (offensive, défensive), notamment via une permutation extrême des postes. Nécessitait une grande polyvalence des joueurs, et a suscité l'augmentation des exigences athlétiques.
Variante : "Au total, on n'a pas beaucoup joué au football" (un ancien joueur de Jean Fernandez).
Gegenpressing
Littéralement, “contre-pressing”. Tactique offensive utilisée par Jürgen Klopp au Borussia Dortmund. Elle s’appuie sur une récupération de balle très haute et nécessite des joueurs offensifs rapides, travailleurs et disciplinés. Elle repose sur un principe simple: au moment d’enclencher un mouvement offensif, les adversaires ne sont pas tous en position. Reprendre rapidement le ballon et jouer dans la verticalité permet de profiter de ce désordre temporaire pour obtenir un accès rapide au but.
Variante : "Les Portugais étaient visiblement gegenpressés de rentrer à la maison" (Joachim Löw).
Horizontalité
Désigne un jeu latéral, sur la largeur, avec peu de progression vers le but adverse et donc stérile. Fréquent lorsqu’une équipe de possession n’arrive pas à créer des décalages.
Variante : "J'ai souvent fait la différence à l'horizontale" (Sergio Busquets).
Kick ‘n’ Rush
Style de jeu qui consiste à rechercher, dès que possible, un jeu direct avec de longs ballons vers l’avant. Historiquement associé au football anglais. Des journalistes britanniques ont évoqué l’influence d’un climat difficile sur la naissance de cette façon de jouer, mais cette explication est un peu simpliste (les Britons sont juste des rustres, en fait).
Variante : "J'aime encore plus le headkick and run" (Brandao).
Marquage en zone
Stratégie défensive dans laquelle chaque défenseur a une zone à couvrir, plutôt qu’un adversaire spécifique à marquer. Le défenseur ne s’occupe que du joueur pénétrant dans sa zone. Cela permet de conserver une organisation défensive, un alignement stables et de préserver la mise en place tactique de base. L’entraîneur italien Arrigo Sacchi a popularisé le marquage de zone à l’AC Milan à partir de la fin des années 80. Applicable également sur coups de pied arrêtés, en particulier lorsqu’une équipe manque de joueurs bons dans les airs.
Variante : "Notre marquage sur corner, c'est la zone" (Mario Zagallo, juillet 1998).
Marquage individuel
Stratégie défensive qui consiste à attribuer à chaque défenseur un adversaire spécifique. Le défenseur doit alors le marquer quelle que soit sa position sur le terrain. Délaissé aujourd’hui, le marquage individuel a pourtant longtemps été la norme. Lors de la généralisation du W-M, à partir des années 30, les attributions de marquage se faisaient souvent automatiquement, via les numéros des joueurs, qui définissaient les postes de chacun (le 4 marque le 9, le 3 marque le 7…).
Variante : "J'aime bien marquer chacun de mes adversaires" (Nigel de Jong).
Pressing
Action de courir vers le porteur du ballon pour réduire son espace et son temps d'action, ainsi que celui de ses coéquipiers proches. Objectifs: récupérer la possession, soit directement par une interception, soit indirectement en forçant une mauvaise passe adverse, ou ralentir la construction.
Variante : "J'ai inventé le pressing au Stade de Rince" (Albert Batteux).
Sapin de Noël
Nom donné à l’organisation en 4-3-2-1, popularisée par Carlo Ancelotti à l’AC Milan. Ce schéma, large à sa base et étroit à son sommet, repose sur quatre défenseurs, trois milieux à vocation plus ou moins défensive, et sur deux joueurs offensifs en soutien d’un unique attaquant de pointe.
Variante : "J'avoue que Lugano, c'était pas un cadeau" (Leonardo).
Tiki-taka
Terme utilisé originellement pour décrire le style de jeu espagnol lors de la Coupe du monde 2006, basé sur une succession de passes courtes au sol. Depuis, l’expression a été principalement affectée à la philosophie développée au Barça par Pep Guardiola.
Variante : "En 2014, c'était plutôt Titanic-cata" (Vicente Del Bosque).
Transition
Moment du jeu lorsqu’un bloc-équipe passe de sa configuration offensive à son organisation défensive, ou inversement. Le Borussia Dortmund de Jürgen Klopp exploite ces quelques secondes pour dépasser l’adversaire et se retrouver très vite devant son but.
Variante : "La transition a été un peu difficile" (David Moyes).
Verticalité
Désigne un jeu qui progresse rapidement et beaucoup vers le but adverse, dans la longueur du terrain.
Variante : "Je prenais mieux la profondeur que Fred, d'après Madame" (Sylvain Wiltord).
W-M
Système tactique créé au milieu des années 1920 par Herbert Chapman, entraîneur d’Arsenal. Disposé en 3-2-2-3, d’où son nom (les cinq joueurs défensifs forment un M sur le papier, les cinq offensifs un W), le W-M était le dispositif tactique majeur jusqu’en 1953 et le “match du siècle” entre la Hongrie et l’Angleterre. La nette victoire hongroise (6-3) a révélé ses failles et marqué le premier pas vers le 4-2-4 utilisé par le Brésil en 1958.
Variante : "Pour les arbitres, je préconise le WC" (un supporter).
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